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Fragments d’un dictionnaire amoureux : Robert Rollis

 

Si on devait distribuer le prix du comédien le plus sympathique du cinéma français, Robert Rollis pourrait aisément y prétendre. Il était un des enfants des « disparus de Saint-Agil », l’un des plus aisément repérable. Il avait une gouaille dans sa voix. Il la prête régulièrement pour des dessins animés, comme celle de « Pouce-moussu » dans l’émission enfantine « Les quat’zamis », animé par Fabrice, sur Antenne 2 à la fin des années 70. Dans « Les Tortillards » (Jean Bastia, 1960), il est un des membres la famille d’artistes dirigée par « L’illustre Beauminet » campé par un truculent Jean Richard. Il se présente à Roger Pierre, comme acteur de seconds rôles « spécialisé dans les têtes de turc ». Il est vrai qu’il est souvent le bon copain, à l’image de son personnage de Léon dans les deux opus de « Papa, maman… » de Jean-Paul Le Chanois, surnommé par Fernand Ledoux « Alibi », il couvre les frasques de Robert Lamoureux, sorte de « Tanguy » avant l’heure, vivant encore chez ses parents. Robert Rollis et souvent goguenard, comme dans « Nous autres à Champignol » et « Le gendarme à Champignol », il est irrésistible en farceur, toujours le sourire aux lèvres, et prompt à préparer une mauvaise blague contre Jean Richard. Il est également l’un des piliers des Branquignols, aux côtés de Robert Dhéry et Colette Brosset. Il est coiffeur dans « La belle américaine », un supporter goguenard d' »Allez France ! », un marin fidèle au poste de l' »Increvable », navire qui se dégrade à chaque inauguration au champagne par Louis de Funès dans « Le petit baigneur », un breton cul-de-jatte dans « Vos gueules les mouettes ! »…. Il devient très populaire grâce à son personnage de Jehan dans « Thierry La Fronde » dont l’intégrale est disponible en DVD. Il sauve bien des comédies franchouillardes par sa présence, souvent en vélo d’ailleurs, C’est un voleur de scènes. Le voir par exemple en pensionnaire d’une maison de retraite dans « Monique », nous fait regretter sa sous-utilisation ces derniers temps. Il reste presque inchangé également dans « Les amateurs » sorti en janvier 2004, en père de l’atypique Jean-Jacques Vannier, vieux paysan devenu « bredin » suite à une farce de gamins escamoteurs d’échelle, et qui ne s’exprime que par cris. Martin Valente avait hésité de confier ce rôle à ce formidable acteur, ne le trouvant pas à la hauteur de son talent. Dans le même sillon,  il est « 72 moissons » dans « Camping à la ferme », de Jean-Pierre Sinapi. Il est l’ancêtre râleur du village, cultivant son champ, sans rien planter histoire de recevoir des subventions, revendique une sécheresse de cœur et meurt en laissant un gros magot dans une boîte à sucre. Le site des Gens du cinéma, pour lequel j’avais fait sa filmographie, nous donne la triste nouvelle de sa mort le 12 novembre 2007, à Paris, des suites d’un cancer foudroyant, à l’âge de 83 ans.

Robert Rollis & Aghmane Ibersiene dans « Camping à la ferme »

Filmographie : établie avec Armel de Lorme : 1937  La marseillaise (Jean Renoir)1938  Les disparus de Saint-Agil (Christian-Jaque) – Le roman de Werther (Max Ophuls) –  Carrefour (Kurt Bernhardt) – La fin du jour (Julien Duvivier) – 1939  L’enfer des anges (Christian-Jaque) – Notre-Dame de la Mouise (Robert Péguy) – 1941  Premier rendez-vous (Henri Decoin) – Péchés de jeunesse (Maurice Tourneur) – Caprices (Léo Joannon) – Annette et la dame blonde (Jean Dréville) – 1942  Les cadets de l’océan (Jean Dréville) – 1943  Le carrefour des enfants perdus (Léo Joannon) – Lucrèce (Léo Joannon) – 1945  Les démons de l’aube (Yves Allégret) – 1946  Amours, délices et orgues (André Berthomieu) – 1947  Blanc comme neige (André Berthomieu) – 1948  Les amants de Vérone (André Cayatte) – Le bal des pompiers (André Berthomieu) – Tous les deux (Louis Cuny) – 1949  On ne triche pas avec la vie (René Delacroix & Paul Vandenberghe) – La femme nue (André Berthomieu) – La petite chocolatière (André Berthomieu) – 1950  Justice est faite (André Cayatte) – Le roi des camelots (André Berthomieu) – Une fille à croquer / Le petit chaperon rouge (Raoul André ) – 1951  La maison dans la dune (Georges Lampin) – Jamais deux sans trois (André Berthomieu) – Chacun son tour (André Berthomieu) – La maison Bonnadieu (Carlo Rim) – Drôle de noce (Léo Joannon) – 1952    Belle mentalité (André Berthomieu) – Allô… je t’aime (André Berthomieu) – Adorables créatures (Christian-Jaque) – Les dents longues (Daniel Gélin) – 1953  Le portrait de son père (André Berthomieu) – Virgile (Carlo Rim) – L’oeil en coulisses (André Berthomieu) – L’incentevole nemica (Pattes de velours) (Claudio Gora) – Une vie de garçon (Jean Boyer) – Faites-moi confiance (Gilles Grangier) – Le village magique (Jean-Paul Le Chanois) – 1954  Les évadés (Jean-Paul Le Chanois) – Les deux font la paire (André Berthomieu)  – Papa, maman, la bonne et moi (Jean-Paul Le Chanois) – 1955  Le dossier noir (André Cayatte) –  La madelon (Jean Boyer) – Papa, maman, ma femme et moi (Jean-Paul Le Chanois) – Cette sacrée gamine (Michel Boisrond) – 1956    La vie est belle (Roger Pierre & Jean-Marc Thibault) – Nous autres à Champignol (Jean Bastia) – 1957  Trois jours à vivre (Gilles Grangier) – La garçonne (Jacqueline Audry) – L’étrange Monsieur Stève (Raymond Bailly) – L’amour est en jeu (Marc Allégret) – Le grand bluff (Patrice Dally) – 1958  En légitime défense (André Berthomieu) – Le miroir à deux faces (André Cayatte) – Suivez-moi jeune homme (Guy Lefranc) – Le grand chef (Henri Verneuil) – Le gendarme de Champignol (Jean Bastia) – L’increvable (Jean Boyer) – 1959  Die Gans von Sedan (Sans tambour ni trompette) (Helmut Kaütner) – 1960  Ravissante (Robert Lamoureux) – Les moutons de Panurge (Jean Girault) – La brune que voilà (Robert Lamoureux) – Les amours de Paris (Jacques Poitrenaud) – L’homme à femmes (Jacques-Gérard Cornu) – Ma femme est une panthère (Raymond Bailly) – La française et l’amour [épisode : La femme seule] (Jean-Paul Le Chanois) – Les tortillards (Jean Bastia) – La famille Fenouillard (Yves Robert) – Quai Notre-Dame (Jacques Berthier) – 1961  La belle Américaine (Robert Dhéry & Pierre Tchernia) – Tout l’or du monde (René Clair) – Le petit garçon de l’ascenseur (Pierre Granier-Deferre) – La guerre des boutons (Yves Robert) – 1962    Les veinards [épisode : Le gros lot] (Jack Pinoteau) – Les culottes rouges (Alex Joffé) – C’est pas moi, c’est l’autre (Jean Boyer) – Mélodie en sous-sol (Henri Verneuil) – Paris champagne (Pierre Armand) – Le glaive et la balance (André Cayatte) – Strip-tease (Jacques Poitrenaud) – 1963  L’honorable Stanislas, agent secret (Jean-Charles Dudrumet) – Laissez-tirer les tireurs (Guy Lefranc) 1964  Allez France ! (Robert Dhéry) – Week-end à Zuydcoote (Henri Verneuil) – What’s new Pussycat ? (Quoi de neuf, Pussycat ?) (Clive Donner) – 1965  La tête du client (Jacques Poitrenaud) – Le caïd de Champignol (Jean Bastia) – Les baratineurs (Francis Rigaud) – 1966  Le jardinier d’Argenteuil (Jean-Paul Le Chanois) – Trois enfants dans le désordre (Léo Joannon) – Monsieur le président directeur général (Jean Girault) – 1967  Le petit baigneur (Robert Dhéry) – 1968  Un drôle de colonel (Jean Girault) – Faites donc plaisir aux amis (Francis Rigaud) – La femme écarlate (Jean Valère) – 1969  La maison de campagne (Jean Girault) – Trois hommes sur un cheval (Marcel Moussy) – 1972  La raison du plus fou (François Reichenbach) – 1973  Les gaspards (Pierre Tchernia) – L’événement le plus important depuis que l’homme a marché sur la Lune (Jacques Demy) – Le concierge (Jean Girault) – 1974  Vos gueules les mouettes ! (Robert Dhéry) – Impossible… pas français ! (Robert Lamoureux) – 1975  On a retrouvé la 7ème compagnie (Robert Lamoureux) – Opération Lady Marlène (Robert Lamoureux) – 1976  Le jour de gloire (Jacques Besnard) – Dis bonjour à la dame (Michel Gérard) – 1977  Moi, fleur bleue ! (Eric Le Hung) – 1978  Général… nous voilà ! (Jacques Besnard) – Les fabuleuses aventures du baron de Münchhausen (Jean Image, dessin-animé, voix) – 1979  La gueule de l’autre (Pierre Tchernia) – 1980  Touch’ pas à mon biniou (Bernard Launois) – 1981  Le jour se lève… et les conneries commencent (Claude Mulot) – Te marre pas… c’est pour rire ! (Jacques Besnard) – 1982  Le braconnier de Dieu (Jean-Pierre Darras) – Le secret des Sélénistes (Jean Image, dessin animé, voix) – 1986  Nuit docile (Guy Gilles) – 1987  A notre regrettable époux (Serge Korber) – Bonjour l’angoisse (Pierre Tchernia) – 1999  Tout tout près (Fabrice Maruca, CM) – 2001  Monique (Valérie Guignabodet) – 2002  Les amateurs (Martin Valente) – 2004  Camping à la ferme (Jean-Pierre Sinapi).  Nota : Il ne semble pas participer aux films suivants, bien que parfois crédité : « Les Duraton » (André Bethomieu, 1955), « Signé Arsène Lupin » (Yves Robert, 1959).

 

 

 

 

 

Dans « Papa, maman, ma femme et moi »

Télévision : notamment : 1962  L’inspecteur Leclerc enquête : Face à face (Marcel Bluwal) – L’oiseau de bonheur (Georges Folgoas) –  1963/1966  Thierry La Fronde (Pierre Goutas & Robert Guez) – 1964  Médard et Barnabée (Raymond Bailly) – 1965  Le troisième témoin (Georges Folgoas, captation en direct) – Bob Morane (1 épisode) – La bonne planque (Louis Verlant) – Les saintes chéries : Ève de la maison de Compiègne (Jean Becker & Maurice Delbez) – 1967  Saturnin Belloir (Jacques-Gérard Cornu) – 1970  Au théâtre ce soir : Frédéric (Pierre Sabbagh) – Au théâtre ce soir : La brune que voilà (Pierre Sabbagh) -1971  Madame êtes-vous libre ? (Jean-Paul Le Chanois) – 1973  Au théâtre ce soir : La poulette aux oeufs d’or (Georges Folgoas) – Arsène Lupin : Le secret de l’aiguille (Jean-Pierre Desagnat) – Le vagabond (Claude-Jean Bonnardot) – Un curé de choc : Hold-up campagnard (Philippe Arnal) – 1975  Pilotes de courses (Robert Guez) – La vie de plaisance (Pierre Gautherin) – Les Zingari (Robert Guez) – 1976  Le milliardaire (Robert Guez) – 1977  Les folies d’Offenbach (Michel Boisrond) – Commissaire Moulin : Cent mille soleils (Claude-Jean Bonnardot) – Le passe-muraille (Pierre Tchernia) – 1980  Tout le monde m’appelle Pat (Robert Guez) – La vie des autres : L’intruse (Robert Guez) – Arsène Lupin joue et perd (Alexandre Astruc) – 1982  Des yeux pour pleurer (André Cayatte) – Toutes griffes dehors (Michel Boisrond) – 1983  Père Noël et fils (André Flédérick) – 1984  Péchés originaux : J’ai comme une musique dans la tête (Philippe Monnier) – 1986  Le tiroir secret (Édouard Molinaro, Nadine Trintignant, Michel Boisrond & Roger Guillioz) – 1991  Intrigues : Scoop (Emmanuel Fonlladosa) – Intrigues : Trou de mémoire (Dominique Giuliani) – 1992  Un beau petit miliard (Pierre Tchernia) – 1998  Dossiers disparus : Serge et Patrick – 2000  Avocats et associés : La preuve par le vide (Denis Amar) – 2005  Faites comme chez vous (Plusieurs réalisateurs).

Mise à jour du 16/11/2007

AU SUIVANT

Avant-première hier soir à l’UGC Cité Ciné Bordeaux, du premier long métrage « Au suivant ! » en présence de sa réalisatrice Jeanne Biras, Alexandra Lamy et Clovis Cornillac. C’est le développement du court éponyme et épatant, réalisé en 2002, avec Isabelle Nanty et Patrick Ligardes. Il est rare de voir « un timing » efficace dans une première comédie, cette réussite est à saluer, la réalisatrice se réclame des films de Pierre Richard – elle trouve un pendant féminin d’ailleurs avec Alexandra Lamy -, Louis de Funès et l’âge d’or de la comédie américaine « screwball comedy » à l’image du « Avanti » de Billy Wilder. Elle a tiré ce film de sa propre expérience, où il faut une disponibilité constante. Son sens aigu de l’observation se révèle dans le film d’ailleurs, en privilégiant des acteurs méconnus en dehors de Marie-Christine Adam en mère énergique. Il y a beaucoup de révélations comme Juliette Roudet, une nature de comédie, son personnage secondant l’agence de casting.

Alexandra Lamy & Juliette Roudet dans « Au suivant ! »

Le film narre les mésaventures d’une directrice de casting de pub à la recherche de l’âme soeur. Elle est aux prises avec les difficultés de son entreprise. Elle est prête à accueillir toute la misère du monde, et peut-être la victime toute désignée de quelques roublards. Le rythme haletant perdure durant tout le film sans relâchement, c’est assez rare pour le signaler, Alexandra Lamy promène une nervosité et une belle énergie, elle peut désormais prétendre à tenir le haut de l’affiche d’un film de cinéma.  Et il y a Clovis Cornillac, qui continue à aller où ne l’on attend pas, et qui peut prétendre au titre du meilleur comédien de sa génération. Son personnage virevolte, surprend, s’accroche. Il était intéressant d’interroger Clovis Cornillac, sur son travail.

Il voit le regain d’intérêt récent à son sujet avec lucidité. Il déplore que la promotion – règle du jeu qu’il admet – lui prend un temps de travail pour d’autres aventures, comme les courts-métrages par exemple. Il est attaché à sa famille – sa « Douce » et ses enfants, il ne peut plus répondre à toutes les sollicitations. Jeanne Biras a déclaré qu’il apportait beaucoup de choses au texte  » l’animal en plastique au sauna, « Mon nom est « Manche ». Il est un grand travailleur, préparant longtemps ses rôles, pouvant y penser en vous parlant. Son champ est très large de la comédie populaire : « Brice de Nice », « Mensonges et trahisons… » -, du film de genre : « Maléfique »,  où il était saisissant, « A la petite semaine » – à voir absolument mardi prochain sur France 2″ -, ou le film « d’auteur » : « Vert paradis », « Je t’aime, je t’adore », « La femme de Gilles ». Un acteur exceptionnel !. La comédie est un genre difficile et c’est le moyen idéal de décrire nos préoccupations et nos aspirations. Elle acquiert ici une énergie communicative. Nous tenons donc ici la comédie de l’été !

DOUCHES FROIDES

« Douches froides » est un film dans la filiation de l’œuvre d’André  Téchiné (érotisation des corps adolescents et tourments à l’approche de l’âge adulte). Son réalisateur, Antony Cordier, venait de le présenter à la quinzaine des réalisateurs à Cannes, et  fait suite à un documentaire « Beau comme un camion » consacré à sa famille. Il vient d’un milieu social modeste, ce qui reste assez exceptionnel dans notre cinématographie. Le film révèle parfaitement les pressions qui pèsent sur un adolescent – scolarité, compétitions sportives, pour accéder à un meilleur statut social -. C’est Mikaël – Johan Libéreau, très juste -. dont les parents vivent dans la précarité. Le réalisateur a une certaine sensibilité pour traduire les premiers émois d’un adolescent, la description d’un milieu difficile obligé de rogner sur le moindre coût. 

Salomé Stévenin

Le milieu bourgeois, est vu par le regard de l’adolescent, où tout semble facile ou cynique – le personnage de Camille Japy -. Claire Nebout fait exister de suite son personnage oisif, et Aurélien Recoing en mécène protecteur cloué sur un fauteuil roulant reste assez énigmatique.  Ils sont les parents du jeune, Clément dégageant une certaine ambiguïté et qui va fasciner Mikaël. L’un des plus attachants personnages est celui de Vanessa – Salomé Stévenin, promis à un grand avenir -, qui ne se livre pas immédiatement et dont Mikaël tombe amoureux. Les tourments sentimentaux et la confrontation avec les compromissions des adultes, sont très bien rendus. Florence Thomassin est excellente en jeune mère de Mikaël, luttant avec dignité avec les difficultés du quotidien, et le problème d’alcools de son mari, campé par un Jean-Philippe Ecoffey généreux et fragile. Magalie Woch, en deux scènes, prouve après sa brillante prestation dans « Rois et Reine », son grand talent quand elle évoque avec tendresse, l’étonnement de ses parents découvrant l’eau chaude courante – Les douches à l’eau froide permettant une économie certaine -. A noter également la prestation de la cinéaste Dominique Cabrera, amusante employée du planning familial.

Johan Libéreau & Jean-Philippe Ecoffey

Le film est réaliste, comme dans les petits détails de la couche de vêtements pour perdre du poids, la description des séances de judo, la lutte pour sortir d’un certain déterminisme, avec la peur du moment où tout peut basculer – la carte de la Chine confondue avec celles des États Unis, dans un examen – : « Mais on ne s’arrache pas à son milieu, on compose avec lui dans un rapport de dette retorse et infinie… » (Didier Péron, Libération 16/06/2005). L’amour semble une épreuve initiatique à l’image des courbatures de Vanessa après son expérience à trois. Même si l’on sent la difficulté qu’a le metteur en scène pour se séparer de ses personnages – quelques critiques dénoncent le montage du film, alors que c’est l’œuvre d’un ancien monteur –, son propos est louable. Il change par son parcours, de l’habituelle vision privilégiée de la société. Ce regard chaleureux et singulier est à suivre dans un cinéma français assez rétif pour décrire les milieux populaires autrement que dans une mouvance Pialat.

DEAR WENDY

Ce mercredi vient de sortir le nouveau film de Thomas Vinterberg, qu’on appréhendait après le réfrigérant « It’s about love », faux film d’anticipation, qui semblait montrer les limites du cinéaste. « Festen » était pourtant un petit bijou, allant bien au-delà du cadre du Dogme, dont on se demande si c’était une invention de petits malins ou une véritable révolution cinématographique… Vinterberg apporte ici une empathie au scénario cadré de Lars Von Trier. L’utilisation de Jamie Bell, héros du film et qui fut Billy Eliott, est une bonne idée. Il amène beaucoup de sensibilité à son personnage d’orphelin, on pense au Lucas Belvaux des années 80. Son personnage ne trouve d’échappatoire pour échapper au déterminisme d’une petite ville minière qu’en formant un club de « Dandy » fasciné par les armes, avec les jeunes désœuvrés assez archétypaux du lieu.

La réussite de ce film, est de montrer la fascination que les armes peuvent apporter à des personnes en manquent de repères. Les armes sont personnalisées, semblent avoir une existence propre, pouvant trahir ou apporter un réconfort. Cette vision assez inédite , amène une réflexion assez salutaire, pour une œuvre qui ne se veut pas pamphlétaire. La musique des « Zombies » est parfaitement utilisée. Le village a peur d’une hypothétique attaque de gangs, et le danger arrive finalement de manière inattendue, venant d’une dérive du « tout sécuritaire ». Le film est un huis clos assez suffoquant, mais hésite un peu trop entre la dénonciation, le spectacle, en jouant avec certains clichés du western, n’évite pas la lourdeur et la symbolique du village pouvant évoquer les États Unis avec le personnage assez caricatural du shérif, joué de manière paternaliste et rusée par Bill Pullman.  Œuvre dispersée mais intéressante « Dear Wendy », pêche peut-être par un excès d’ambition et un certain maniérisme, à l’image des visualisations des impacts de balles.

L’EXORCISTE III

 Evidemment depuis le succès planétaire du film de William Friedkin « L’exorciste », nous avons droits à une multitude de produits dérivés, un récent lifting qui n’apporte rien, deux suites dont l’excellente de John Boorman – film à réévaluer, se démarquant de l’oeuvre originelle -, et la « prequel », « L’exorciste au commencement », commencé par Paul Schrader, version abandonnée au profit d’un retournage plus spectaculaire par Renny Harlin – on nous promet les deux versions dans un même DVD -. Le troisième opus de 1990 est réalisé par William Peter Blatty, lui-même auteur du livre originel, qui abandonne les pistes de John Boorman – trop décrié par les fans et par Blatty lui-même, mais encore une fois, son film est remarquable -, et la révélation du démon Pazuzu. Le film adapté de son roman « Legion », fait suite à la première version, quinze après, en reprenant comme fil conducteur le personnage du Lieutenant William Kinderman, joué par Lee J Cobb, mais disparu en février 1976. C’est le vétéran George C. Scott, qui lui ressemble d’ailleurs qui prend la relève, et c’est on peut le dire le meilleur et le plus spectaculaire effet spécial du film. Il est un peu trop âgé pour le rôle, la nuance n’est pas trop son fort, mais il est remarquable cependant.

George C. Scott dans « L’exorciste IIII »

Le démon intrumentalise l’âme d’un sérial killer, pour revenir sur les lieux de Georgetown, Kinderman enquête sur des crimes rituels très élaborés, tout semble converger vers un hôpital à la section des « agîtés » ou vivent des catatoniques et des perpétuels « agités ». Les scènes fantastiques confinent assez souvent avec le grotesque – un Christ ouvrant les yeux -, et le climax final – non présent dans le livre précise un internaute sur IMDB – ne tient pas ses promesses. Mais Blatty arrive à installer une inquiétude, les scènes les plus réussies sont souvent des scènes de dialogues – très bons d’ailleurs -, tel les monologues du patient X – absolument remarquable Brad Dourif, bien utilisé pour une fois – ou les échanges de Kinderman avec son ami le Père Dyer – joué par le méconnu Ed Flanders, qui se suicidera en 1995 -. Il lui confit son désarroi d’avoir la carpe que doit préparer sa belle-mère dans sa baignoire ! Le film bénéficie d’une distribution honorable avec un retour inattendu du père Karras, Scott Wilson en médecin nerveux, l’inquiétante Viveca Lindfors en infirmière peu commode ou l’acteur fétiche de John Ford, Harry Carey Jr. en prêtre quelque peu malmené et même le débutant Samuel L Jackson en aveugle le temps d’un cauchemar. Déplorons par contre de ne retrouver le brillant comédien anglais Nicol Williamson, que dans un rôle de prêtre exorciste assez anecdotique. A ranger donc dans la catégorie honorable sans plus.

LE DEMON DE MIDI

 Il y a des jours où l’on ressort d’un film amusé, satisfait, sans vouloir ergoter sur une absence d’inventivité dans la mise en scène. Nous voyons donc ici le dernier avatar après le BD de Florence Cestac et le spectacle de Michèle Bernier. Première surprise on attendait à retrouver l’abattage de cette dernière, mais son personnage Anne, est désabusée, blessée, tout en retenue et même simplement belle. Elle continue son personnage de femme quadra, en mal d’amour mais combatif comme dans le très juste téléfilm « Haute coiffure » de Marc Rivière présenté sur Arte l’an dernier. Autre personnage fort, celui de Julien joué par le brillant Simon Abkarian, passant de la lâcheté aux affres du quotidien, voir la scène où il passe en une fraction de secondes, dans un café, d’excuses touchantes à la jubilation d’un but marqué, en voyant un match de foot sur un écran TV. Ce comédien confirme à chacun de ses films combien il est devenu important.

Simon Abkarian et Michèle Bernier dans « Le démon de midi »

Les équivalences du passage de la scène au film sont assez prévisibles – voix off, scène d’ivresse dans un café -, mais on suit le film par la justesse du portrait d’une femme abandonnée, de sa reconquête d’une autre vie, du regard des autres. Le film dénonce justement la vision de notre société sur une femme de plus de 40 ans. IL fourmille aussi de petites idées comme le fils d’Anne Julien jouant avec un pistolet à eau avec le bocal d’un poisson rouge. .. Il a beaucoup d’excellents comédiens autour du couple, parfois sous utilisés, hélas, comme la sublimissime Hiam Abbass, jouant la confidente, Zinedine Soualem, jouant son mari aimant, Riton Liebman en maître nageur en panne sexuelle à cause du « chlore », Julie-Anne Roth en bonne copine, Roland Marchisio, en médecin accoucheur blagueur, Jean-Louis Foulquier en père indigne, l’ex Deschien, Jean-Marc Bihour et Stéphane Hillel en potes de Julien, Jérôme Pouly en cousin consolateur. La fiche IMDB comporte pas mal d’erreurs : Marc Berman en boucher, hors le rôle est joué par Michel Pilorgé, se trompe sur l’attribution de certains personnages, oublie quelques acteurs Nathalie Krebs en pharmacienne, Patrick Fierry dans le rôle d’Antoine. J’ai rajouté des compléments en cours de validation trouvé sur le  Site officiel du film.

 Autre beau moment et non le moindre, les deux scènes avec Claudia Cardinale – il y a deux extraits de deux de ses films « Sandra » et « Cartouche » -. Elle console Anne en parlant des surprises de la vie, et de ne plus trop se reconnaître en voyant ses premiers films. Un joli moment. Un film où l’on passe un bon moment et plus profond qu’il n’y paraît.

LA MOUSTACHE

 Avant-première hier à l’UGC Ciné-Cité Bordeaux, du second film d’Emmanuel Carrère – après le documentaire « Retour à Kotelnitc » en 2003 -, « La moustache » en présence du réalisateur et de Vincent Lindon. La visite se fait avant le film, le comédien déplorant ne pas pouvoir rester « pour un milliard de raisons ». C’est finalement une bonne chose, de ne pas avoir la tentation de demander ensuite une explication de texte au metteur en scène. Vincent Lindon assez calme, présente ce « premier » film – de fiction  -, comme sa plus belle expérience au cinéma, son autre premier film – « Prunelle blues » ? » étant pour lui son plus mauvais. Il raconte que lors de son 45ème anniversaire l’an dernier sa mère lui avait déclaré ne toujours pas regretter sa venue au monde, Emmanuel Carrère, au 30 ème jour de tournage, lui avait confiait la même chose pour son travail avec lui. Cette espère de corrélation rassurante, nous montre un Vincent Lindon, inquiet, satisfait de compter pour son entourage. L’idéal est de savoir le moins possible sur ce film, mais – n’ayant pas vu la première œuvre cinématographique -, la certitude est de tenir un authentique cinéaste en la personne d’Emmanuel Carrère, alors qu’il a déjà été gâté par ses adaptations par Claude Miller « La classe de neige » et Nicole Garcia « L’adversaire ». 

  

Emmanuelle Devos & Vincent Lindon dans « La moustache »

Le film commence sur un détail qui pourrait être anodin, Marc Thieriez rase sa moustache, sa femme Agnès ne l’ayant connu qu’avec elle. Et personne ne semble rien remarquer ensuite. Est-ce le début d’une perte de la réalité, ou le délire d’Agnès qui entraînerait ses proches avec elle ?. Emmanuel Carrère manie ce vertige à la perfection, partant de ce couple solide, et fait basculer son film, dans une incertitude – le film a pour point de vue le personnage de Marc -. Il définit bien la perte de repères – une rue sous la pluie dans un taxi, une chambre où l’on ouvre les yeux sans trop savoir où l’on est, la perception des sons alentours ou le choix d’une veste… Le film ne donne pas de réponse – la fin est différente de celle du roman -, le mécanisme d’une lente chute est formidablement décrite, destabilisant le spectateur, avec la notion des choses du quotidien qui peuvent se dérober. Vincent Lindon prouve encore une fois l’exigence de ses choix – après les personnages pas très aimables du « Frère du guerrier », « Chaos », « La confiance règne » -. Sa solidité apparente et rassurante et le côté « borderline » de son personnage est d’une grande justesse. Ce comédien confirme son grand talent et sa capacité à nous amener dans des univers variés. A ses côtés, il y a la grande performance d’Emmanuelle Devos, son côté décalé – elle adore le foot -, sa panique devant l’attitude de Marc, sa volonté d’affronter les problèmes, de la belle ouvrage. C’est incontestablement l’une de nos plus grandes comédiennes. Les autres acteurs ont des rôles plus courts dans la perplexité, voir fiche IMDB – Hippolyte Girardot, Brigitte Bémol, en femme policier, Cylia Malki et Mathieu Amalric, en « ex » d’Agnès, narquois et agité. Le film d’Emmanuel Carrère aux frontières du fantastique, de l’onirique et de la simple constatation clinique du point de vue de « l’homme qui tombe » est une preuve de maîtrise, avec un sens filmique très élaboré. Un cinéaste à suivre…

AVANT LE DÉLUGE

Affiche belge provenant des Les gens du cinéma

On peut avoir du mal à imaginer la panique d’une guerre mondiale, en Europe à l’annonce du conflit coréen, c’est l’intérêt sociologique de ce film d’André Cayatte « Avant le déluge » tourné en 1953. L’œuvre de Cayatte est souvent accompagnée de sarcasmes, immanquablement de l’adjectif démonstratif, mais c’est un cinéaste à réhabiliter, ses dénonciations contre la peine de mort : « Nous sommes sous des assassins », la dictature des apparences : « Le miroir à deux faces », l’euthanasie, etc… sont marquantes pour l’époque. Cet ancien avocat a une vision pessimiste de la société sclérosée, il donne ici à penser sur la responsabilité des parents, même si la charge est assez forte ici, mais les jeunes délinquants dans une utopie imbécile de fuite en Polynésie pour fuir un hypothétique cataclysme. Ils viennent tous de familles honorables, mais ne sont pas excusés pour autant, deux innocents seront des victimes gratuites, tel le vieux vigile joué par Julien Verdier. Il y a beaucoup des communs avec « L’appât » de Bertrand Tavernier (1994), ce dernier évitant l’écueil de la charge contre les parents – Nicolas Silberg jouant le père d’Olivier Sitruk a été coupé au montage -. Ici Liliane – dont la séduction innocente est parfaitement campée par la débutante Marina Vlady -, est dédouanée de sa responsabilité, contrairement au personnage de Marie Gillain, dans le film de Tavernier. Le film rend formidablement l’état de la France après guerre, l’inquiétude d’une guerre mondiale, les résurgences de l’antisémitisme, le cynisme des notables. Cayatte dénonce aussi bien l’éducation permissive d’un professeur dépassé – formidable Bernard Blier -, ou celle étouffante d’une mère abusive, ou d’un raciste délirant.

On peut décrocher parfois aux 2h15 de ce film, mais il y a comme souvent chez Cayatte, une distribution exceptionnelle – notifiée par ordre alphabétique, voir fiche IMDB, en attente de compléments -. Jacques Castelot est particulièrement excellent en marchand d’art douteux et d’un cynisme inouï, jouant avec les conventions de la grande bourgeoisie, séduisant Isa Miranda – co-production italienne oblige -, femme abandonnée à la mesquinerie de son mari – Paul Frankeur, très réjouissant dans la bêtise -. Line Noro est juste en mère possessive après une vie de frustrations. Bernard Blier, dans la sobriété est touchant en père dépassé par l’éducation de ses deux enfants – voir les affrontements avec son communiste de fils, le trop méconnu Paul Bisciglia, figure omniprésente du cinéma français, souvent dans des rôles gouailleurs -, facilement manipulable. En dehors de Marina Vlady – beaucoup de charme – et de Roger Coggio – quoi qu’un peu théâtral -, les jeunes sont assez méconnus mais justes – Clément Thierry, Jacques Pierre, Jacques Chabassol, Jacques Fayet -, Antoine Balpêtré est à l’aise dans l’ignominie antisémite – dont Cayatte montre le grotesque dans la scène de l’huissier breton joué par Jérôme Goulven -, il semble vouloir ici vouloir se dédouaner de son attitude lors de l’occupation, car il avait récité un poème sur la tombe de Philippe Henriot. Carlo Ninchi en président du tribunal est bien doublé – la litanie des sentences -, et l’on retrouve d’excellents seconds rôles, crédités, Albert Rémy en garçon de café sympathique, Léonce Corne en commissaire désabusé, ou non, Jacques Marin en cycliste rigolard. On retrouve aussi Delia Scala, superbe italienne, rayonnant d’érotisme – dévoilant un sein magnifique – et deux débutants prometteurs, Gérard Blain en élève bagarreur et Jacques Duby en manifestant pour la paix malmené. Le regard d’André Cayatte est précieux, il ne fait pas un plaidoyer, mais pose un constat sur la société de son temps.

CAMPING A LA FERME

Ce film peut poser problème, soit on le voit pour ce qu’il est une sympathique comédie, soit on le voit dans la continuité des précédents films de Jean-Pierre Sinapi, et l’on peut être déçu. Hier c’était donc l’avant-première de « Camping à la ferme » à l’UGC Cité Ciné, présenté par le réalisateur lui-même, Nadine Marcovici qui joue « La maire » – c’est une fidèle depuis « National 7 », Aghmane Ibersiene qui joue Assane, et la productrice Nathalie Gastaldo. On comprend très vite le pourquoi du film, c’est une commande de la productrice, et de l’écrivain Azouz Begag, dont la voix chaude de conteur sur France Culture me revenait en mémoire. A la recherche d’un cinéaste, il pense à Jean-Pierre Sinapi, dont l’acuité, l’humour (très présent dans « National 7 », film où rayonne l’admirable Olivier Gourmet), la sensibilité semblait idéale. Le réalisateur voit en cette comédie, un moyen de poursuivre son oeuvre, après le très « noir » « Vivre me tue », et un moyen d’y apporter une touche personnelle, une poésie – ce qui est parfois une erreur -, avec l’aide de son scénariste Daniel Tonachella.

 Jean-Pierre Sinapi

Curiosité, Azouz Begag, entre au gouvernement,  – idée pour sortir des abîmes de l’impopularité ? –, comme ministre délégué à la Promotion de l’égalité des chances – vaste programme ! -, ce qui change un tantinet la grille de lecture du film. Mais la productrice habile,  présente le fait comme une surprise, coupant court aux questions. Le fait est confirmé ensuite par le metteur en scène au sortir du débat, la promotion ne se fera pas sur ce fait, notre si charmant gouvernement n’y tenant pas non plus. Il précise que Clotilde Coureau est devenu princesse après le tournage des « Beaux jours » pour Arte. Amis artistes participez à un tournage du sieur Sinapi, c’est bon pour votre carrière ! J’ai pour parti-pris de saluer le travail des comédiens, qui devrait être au service du film, et non l’inverse, histoire de trouver toujours quelque chose à sauver d’un film, ou saluer ceux que nous connaissons sans toujours pouvoir mettre un nom. Ils peuvent être à la rescousse du film parfois. Le film doit beaucoup à l’abattage des jeunes acteurs, excepté pour Jean-Noël Cridlig-Veneziano, c’était la première expérience au cinéma pour Rafik Ben Mebarek, Hassan Ouled-Bouarif, Yves Michel, l’attachant Marc Mamadou et Aghmane Ibesiene, chaleureux malgré le tract dans la salle hier. Ils ont eu deux mois pour se préparer, ils sont tous très drôles, ou touchants.

Nadine Marcovici aime bien préparer ses personnages, elle s’est aidé de la vision du rôle de Nicole Kidman, dans « Prêt à tout / To die for » de Gus Van Sant. Elle est ici une femme politique arriviste – qui ne veut pas qu’on l’appelle la mairesse qui est la femme du maire ! « . Il y a un cousinage avec Isabelle Nanty, elle a un bel abattage. La seule indication du metteur en scène était de s’adresser aux personnes, comme si elles étaient les plus importantes au monde. Les villageois recevant les jeunes en difficulté dans le cadre des TIG – prononcez tige -, sont des « bas du front ».

La caricature semble un tantinet un peu lourde tout de même, tel le Rodolphe – joué avec humour par Dominique Pinon, qui jouait alors au théâtre avec Isabelle Carré dans « Les pieds sous la table -, l’agriculteur ne travaille que pour les subventions européennes – le très bon Robert Rollis, dont je vais faire un petit portrait d’ici peu -, ou Gaston – Jean-François Stévenin, convaincu de figurer dans ce film, grâce à sa fille Salomé qui aimait à raison les films de Sinapi -, qui voit des « fellagas » partout. C’est un peu le point faible du film, mais on a plaisir à retrouver de vieux routiers, Michel Fortin en ouvrier dans une église, Jean-Claude Frissung – troisième rôle pour Sinapi – en curé conciliant, Jean-Paul Bonnaire en abruti suiveur – comme d’hab’ – ou Jacques Giraud en cafetier – comme d’hab aussi -, Bruno Lochet « deschienise » et  sa scène du « pétard » a provoqué lancé un curieux débat dans la salle, nous sommes ici à Bordeaux, ne l’oublions pas.

Roschdy Zem est excellent dans la comédie – comme dans « Filles uniques », en éducateur probe, patient mais motivé, ne serait-ce que par le charme d’une femme juge – apparition amicale pour Julie Gayet -. Il porte le film par sa belle énergie. L’empreinte de Jean-Pierre Sinapi, est bien présente dans ce film. Dans le hall de l’UGC, il disait ne pas être d’accord avec le titre du film, imposé par la productrice, mais cette dernière semblait surprise que les gens avait un apriorisme sur ce film, pour finalement l’aimer beaucoup. L’étiquette « film de banlieue » semble si on prête oreille, ici ou là, semble faire fuir le public, ce qui est arrivé à l’attachant « Ze film » de Guy Jacques. Ici on se rapproche un peu de la comédie italienne, et la salle riait beaucoup. Mais on pouvait attendre légitimement un peu mieux du cinéaste de plus très sympathique.

A DIRTY SHAME

 C’est un pied de nez salutaire et potache à l’Amérique bien pensante, qui se scandalise à la vue d’un sein – celle qui se scandalise à la vue du sein de Janet Jackson, lors du superbowl, ou la récente censure des dessins animés de Tex Avery par Warner, voir le site de Martin Winckler -. Ses interprètes s’en donne à cœur joie, telle Tracey Ullman (« Escrocs mais pas trop », ou Chris Isaak continue à dégommer son image de crooner, le jackassien Johnny Knoxville est hilarant en messie du sexe, et on retrouve Patty Hearst, habituée des films de John Waters et connue pour son enlèvement. Le film commence comme dans « Frissons » de David Cronenberg, un souffle pervers semble atteindre Baltimore – ville de naissance du cinéaste -, y compris chez les végétaux et les écureuils, suit un salutaire et revigorant jeu de massacre, cartoon jubilatoire, avec la satisfaction de voir que le cinéaste n’a rien perdu de sa virulence, depuis ses premières provocations avec le célèbre Divine. Le film fourmille de trouvailles – la maison de retraite, la guest-star de la scène de l’avion -, transcendant le mauvais goût, même s’il n’évite pas les répétitions.

Tracey Ullman & Chris Isaak, où comment consolider son couple…

La sévérité de la critique me semble excessive pour ce film qui peut être une ôde à la liberté. Le ton est proche de celui d’un cartoon, est on est loin des habituelles comédies adolescentes scatophiles. C’est un film à rapprocher avec le récent « Team America », réjouissant jeu de massacre, en plus d’une réussite formelle en hommage des « Thunterbirds ». Personne n’est épargné, et le film brille par son inventivité constante, tout en osant le mauvais goût et le dénigrement de nos icônes hollywoodienne (Alec Baldwin en parrain du Film Actor Guild ((F.A.G. !), ou Susan Sarandon, en actrice dont le talent décline, ce qui n’est évidemment pas le cas). En plus un film qui nous venge de Michael Bay et de son « Pearl Harbour » ne peut qu’avoir notre estime. L’Amérique puritaine sous l’ère Bush, permet ce type de film, soupape autorisée, mais la France reste plus frileuse avec nos conformismes.