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JE NE SUIS PAS LA POUR ETRE AIME

Avant-première à l’UGC Cité Ciné à Bordeaux de « Je ne suis pas là pour être aimé » en présence d’Anne Consigny et du réalisateur Stéphane Brizé. Première scène un quinquagénaire monte assez péniblement les escaliers d’un immeuble. Essoufflé, fatigué il sonne à la porte d’une jeune femme qui lui ouvre pensant que c’est un de ses amis qui lui demande de revenir avec elle. On apprend qu’il est un huissier, qu’il apporte une mise en demeure à la jeune femme, dépassée par l’énormité de la dette rappelée. Le personnage se prénomme Jean-Claude, qui dit que ce n’est pas de sa faute, mais on comprend bien qu’il vit parfaitement la situation, son problème étant juste son souffle. Le titre apparaît évident « Je ne suis pas là pour être aimé ». Dès le premier plan tout est dit, tout est définit, Jean-Claude est joué par Patrick Chesnais, et on est ravi de voir qu’enfin il va trouver ici un grand rôle à la hauteur de son grand talent.

Patrick Chesnais

Ce film est un grand coup de cœur, une écriture subtile et dépouillée, le scénario initial est débarrassé de toutes les scories, passant de 100 à 50 pages, et on a rarement vu un film aussi subtil dans le cinéma français depuis très longtemps. Jean-Claude Delsart s’arrange avec la raideur de son travail, vit sereinement son emploi, il a repris l’étude de son père, un homme bougon et coléreux, qu’il va rendre visite tout les dimanches à la maison de retraite – Georges Wilson, d’une raideur saisissante qui nous livre ici une composition exceptionnelle. Le vieil homme avec lequel il joue au monopoly est la terreur des lieux, peste un jour car il reçoit des chocolats qui ne sont pas à 80 ans. On devine très vite les relations pères-fils. Jean-Claude reproduit d’ailleurs le même schéma avec son films – remarquable nouveau venu Cyril Couton, un nom à retenir, l’obligeant à travailler avec lui, alors que lui ne vit que pour sa passion des plantes vertes. L’étude n’est pas très sympathique, la secrétaire – Anne Benoît parfaite venant du théâtre, veillant au grain et ne semble avoir d’amour que pour son chien. La santé de Jean-Claude le préoccupant, il prend des cours de tango, qui jouxtent juste son étude. Une jeune femme particulièrement radieuse Françoise, repoussant un dragueur insistant – Olivier Claverie parfait en danseur déplaisant à souhait – reconnaît Jean-Claude, sa mère l’ayant élevé. Elle se prépare pour son mariage, avec un écrivain renfrogné : Lionel Abelanski, formidable comme à son habitude, qui a fait une pose dans son métier d’enseignant pour écrire un roman.

Patrick Chesnais et Anne Consigny

La suite est très prenante, Stéphane Brizé après le très bon « Le bleu des villes », où les amours d’une pervenche – l’on se souvient de l’anthologique scène des noyaux de cerises laissés dans le gâteau de la belle-mère joué par Liliane Rovère – , décrivait également une personne remettant ses agissements et sa vie en question. Anne Consigny engagée selon le réalisateur suite à des essais de danse avec Patrick Chesnais – il avait trouvé que le couple fonctionnait parfaitement -, est très à l’aise dans les non-dits, lumineuse, elle compose un personnage particulièrement attachant. Patrick Chesnais trouve ici son meilleur rôle depuis longtemps. Beaucoup d’émotions canalisées et niées ressortent dans un amour incertain, les personnages déstabilisés se remettent en question dans leurs vies.

Tous les comédiens sont formidables, choisis avec le grand talent de directrice de casting de Brigitte Moidon, le metteur en scène connaît les acteurs et s’évertue à éviter les clichés présentant même un autre scénario pour les essais pour ne pas trop dévoiler ses personnages et garder une fraîcheur. Citons également Geneviève Mnich appréciée par Alain Resnais, en mère étouffante, Hélène Alexandris en grande sœur, Marie-Sohna Condé en jeune femme qui perd tout mais reste digne – voir la terrible scène des ricanements des policiers -. Optimiste, ce film nous donne une formidable empathie avec ses personnages, Stéphane Brizé a su illustré un formidable scénario – Anne Consigny a rappelé qu’il déclarait que c’était pour lui son meilleur ennemi. Le public emballé, charmé par la grâce d’Anne Consigny – parfaite dans le rôle de la récitante dans « L’équipier » de Philippe Lioret, parlait d’ailleurs de « Lost in translation » le beau film de Sofia Coppola, nous sommes ici dans le même cousinage et louons le réalisateur d’avoir donné à Patrick Chesnais enfin un rôle à la mesure de son grand talent, impressionnant d’autorité, son système de vie vacille, il s’humanise, s’ouvre aux autres, et comprend la difficulté que l’on peut avoir à dire des choses simples. Donnez sa chance à ce film le 12 octobre prochain, belle observation de nos frilosités, vous ne le regretterez pas !

L’HOMME AUX YEUX D’ARGENT

« L’homme aux yeux d’argent » est un polar minimaliste, ancré dans les années 80, l’exemple du film bien fait par Pierre Granier-Deferre, dont le grand talent est à réévaluer. Tout semble ici présent pour constituer l’atmosphère glacée d’un film noir, sauf que tout est ici morne et sans humanité. Ce pourrait être adapté de Georges Simenon, mais c’est ici une adaptation d’un roman de Robert Rossner. Dans les années 80, Alain Souchon après ses débuts dans « Je vous aime » (Claude Berri, 1981) pouvait prétendre à trouver une place originale comme acteur, se servir de sa sensibilité pour des personnages attachants, mais mis à part Jean-Paul Rappeneau, Jean Becker et Jacques Doillon, il n’aura pas eu beaucoup de rôles intéressants.

Thierry Berger, sort de  12 ans de prison pour avoir braqué une banque avec son amoureuse tuée lors du hold up. Il retourne sur les lieux de sa jeunesse où il avait caché son butin, mais sa ferme familiale a laissé la place à une ville nouvelle, froide dont il ne manque même pas les horribles arbres « Prunus » poussant comme la chienlit.  Il n’est rien de plus attristant que de voir un résultat aussi laborieux, avec tous les éléments de réussites prévues, Souchon, très crédible en personnage durci par la vie, il frappe avec violence le personnage de Lambert Wilson – ce qui sur « le papier » peut paraître grotesque -, Jean-Louis Trintignant en flic sadique, habillé comme un clergyman cabotine en diable, ce qui n’est pas désagréable, mais ne sauve en rien l’ensemble, Lambert Wilson dans le rôle de son jeune acolyte teint en blond se réjouit visiblement dans un rôle trouble et torve, les seconds rôles sont sacrifiés – André Julien en agriculteur – mais tous les rôles ne sont que des archétypes. Le seul personnage intéressant est celui d’une bibliothécaire esseulée et un peu manipulatrice – Tanya Lopert, plus habituée à des seconds rôles mais à la hauteur d’un premier -, mais sa rencontre avec le personnage de Thierry Berger est décevant. Il faut de plus déplorer une musique particulièrement peu inspirée de Philippe Sarde – Sa musique équivaut pour moi au grincement de la craie sur un tableau, jugement totalement subjectif mais ça n’enlève rien à son talent. On termine le film dans une déception globale et une nostalgie de la disparition grand polar dans le cinéma français actuel.

LA MORT EN LIGNE

C’est l’histoire d’un fantôme, fille perdue, cheveux gras, nouvelle variation de Ring, la mode du portable a traversé l’outre-tombe…  Rien de nouveau finalement, le téléphone étant largement utilisé dans le cinéma fantastique de Mario Bava « Les trois visages de la peur » à Wes Craven -« Scream »-. Le prolifique Takashi Miike, surprend souvent, voir sa trilogie des « Dead or alive », il a tendance à faire un film contre le précédent, « chakushin ari » a la première heure, beaucoup de mal à décoller, la peur n’est pas manifeste, le cinéaste nous ressortant assez vainement quelques ficelles faciles, avec une bande son surlignée et pas très subtile, c’est assez basique, nous sommes en terrain connu, reste que le cinéaste a un regard acerbe sur ses personnages, raillant volontiers un flic fatigué, des jeunes assez fades, ou une équipe de télévision survoltée et sans scrupules. Cette histoire en vaut bien une autre, mais on n’en finit pas se désintéresser du sort des personnages, même s’il y a un effort de fait sur les angoisses enfantines et l’utilisation du syndrome de Müchchausen – grosso-modo, les parents blessant volontairement leurs enfants pour les soigner et se faire plaindre -.

Puis petit à petit avec le jeu des apparitions disparition, et une scène assez efficace dans un hôpital désaffecté, on finit par frémir un tantinet, se perdre dans les explications, et se laisser gagner par un climat assez angoissant. Cet exercice de style déçoit, malgré des effets spéciaux soignès et une utilisation assez efficace de la pénombre et des des objets, mais la critique et les spectateurs semblent cependant apprécier…

AUX ABOIS

Le troisième film du critique Philippe Collin, dont la voix reste familière aux auditeurs de France Inter, est une belle surprise, je partage l’avis de Pierrot dans son blog (mention du personnage de Meursault, le lapsus de « Vous oubliez votre marteau », voir …,  je vais donc essayer de ne pas être redondant sur son avis. On peut parler de performance dans l’interprétation d’Elie Semoun, pour reprendre une expression du réalisateur « c’est un contre-emploi… tout contre ». Ce bon comédien n’a guère était gâté au cinéma jusqu’à présent à part les rôles à la « Joe Pesci » dans les films de Bernie Bonvoisin. Il ne se contente pas de se laisser porter par la situation, il y instille de l’humour, de la gravité, une étude des comportements dans ce rôle d’homme fatigué et seul, subissant le monde (La pension alimentaire de sa femme – brève apparition de Fabienne Babe -) et à l’écoute du monde qui l’angoisse à l’image de la « peau » d’un bol de lait. Il nous livre une interprétation subtile, incarne parfaitement son personnage – On se dit pas « tiens c’est Elie Semoun dans… » , crédible y compris dans la séduction de Ludmila Mikaël -, il a trouvé son « Tchao Pantin » ou son « Monsieur Hire ».  Philippe Collin dresse ce portrait d’ « homme qui dort » avec une distante ironie, Paul Duméry comme absent de sa vie finit par être dépassé par son acte presque gratuit et dont seule l’apparition d’un problème dermatologique à son cou semble en manifester la gravité. L’épure de la reconstitution des années 50 est une belle réussite, aidée par une bande son particulièrement soignée, une écoute particulière des bruits d’une ambiance étouffante.

On suit sans décrocher l’itinéraire de ce personnage à la dérive ni dans la fuite, ni dans une quête, se perdre dans un palace à Deauville, et le voir se perdre comme dissocié de lui-même et cherchant à analyser son attitude de manière clinique en s’envoyant lui-même une sorte de rapport via une adresse dans une poste restante. Il semble y avoir comme une fraternité de personnages perdus qu’il rencontre comme Simone, superbe femme mondaine aventurière. Dans ce rôle Ludmila Mikaël rayonne alternant légèreté et gravité, son parcours théâtral nous a privé, de même que le manque de curiosité des cinéastes, de cette lumineuse interprète qui traduit très justement la complexité de son personnage de femme blessée par la vie. Autour d’Elie Semoun, Philippe Collin a réuni une équipe de comédiens particulièrement remarquable d’Henri Garcin qui fait une saisissante composition d’usurier élégant, Laurent Stocker en avocat sensible ayant encore ses illusions, Philippe Uchan en Daubelle sorte de double gouailleur mais triste, le formidable Jean-Quentin Châtelain en policier dans l’expectative sorte d’ami fantasmé, Rosette une peu perdu de vue depuis ses rôles chez Éric Rohmer en concierge suspicieuse, Roger Van Hool en cynique revenu de tout ou Arnaud-Didier Fuchs en réceptionniste d’hôtel aimable. Saluons la curiosité du cinéaste pour utiliser avec intelligence ses comédiens issus de différents horizons théâtraux et réussir une osmose remarquable. Ce film inventif et singulier est une excellente surprise.

Jean-Quentin Châtelain & Elie Semoun

POURQUOI (PAS) LE BRÉSIL

En consultant les programmes de télévisions, on peut voir que « Pourquoi (pas) le Brésil », sorti en salles en septembre 2004, passe actuellement  sur Canal+ à des heures indues de la nuit, courage/encourageant de cette chaîne à péage à la dérive…Ostracisme curieux sur un film ambitieux décrivant les aléas de la création à l’instar du « Huit et demi » de Fellini… Il serait dommage de rater cette seconde chance de revoir ce film – je n’ai pas Canal – la frilosité de cette chaîne est donc à déplorer. Ca commence un peu comme « Les clefs de bagnole », Alain Sarde dans son propre rôle – en sur-jeu hélas -, rejette un scénario qu’il juge abscons de la cinéaste Laëtitia Masson. La réalisatrice se met en scène et nous explique l’urgence pour elle de faire un film – elle a un découvert bancaire de 10 000 € – après l’échec financier de « La repentie » avec Isabelle Adjani et Sami Frey. Un grand producteur « à l’ancienne » Maurice Rey – Bernard Le Coq baroque -, lui propose d’adapter le livre de Christine Angot « Pourquoi le Brésil », projet qui l’intéresse car elle connaît la romancière, et de plus l’éditeur du livre, Jean-Marc Roberts n’est autre que son propre mari. Mais le livre difficilement est adaptable et Laetitia Masson traverse une crise de la création et une perte de confiance traduite avec beaucoup d’honnêteté. Christine Angot apparaît dans son propre rôle comme bienveillante et bonne conseillère, c’est son livre, en fait, qui déclenche les questionnements de la cinéaste sur sa famille, Marc Barbé interprétant avec force son mari – + le personnage masculin d’une adaptation rêvée-. Par ses doutes, on finit par ce biais par rejoindre la problématique du couple posée dans le livre.

Elsa Zylberstein 

Laetitia Masson à la manière d’un Michel Drach dans « Les violons du bal » (1973), joue son propre rôle tout en passant le relais à Elsa Zylberstein, impressionnante de justesse, pour l’interpréter ainsi que Christine Angot dans une version fantasmée d’une hypothétique adaptation du film. Le film aligne habilement les mises en abîmes entre les difficultés, les incertitudes sur sa propre vie, fantasmant sur le pédiatre de ses enfants, Haïm Cohen  – joué avec sobriété par Pierre Arditi, puis par le vrai pédiatre lui-même – qui l’amène à réfléchir sur la question de l’identité juive traitée dans le livre de Christine Angot, point déterminant dans son couple avec le journaliste Pierre-Louis Rozinès. Elle dresse un portrait acerbe de la cinématographie actuelle, un constat d’impuissance, piégeant  Daniel Auteuil – grand moment de gêne du comédien qui refuse le rôle masculin principal après la lecture du scénario, et qui a l’intelligence de laisser figurer ce moment réel dans le film -. Elle ne se fait aucun cadeau, à l’exemple du refus de Francis Huster partant en voiture à la maternité où l’attend sa femme. Dans son propre rôle il lui explique l’inanité pour lui de ce projet, expose sa vison de la vie et la critiquant de manière rude – scène d’anthologie pour ce comédien si souvent décrié -. La belle idée de ce film est de réunir trois femmes réelles, une actrice au meilleur de son talent, une romancière qui se livre frontalement et une réalisatrice qui se dérobe dans sa propre représentation– elle est la récitante du film, les scènes tournées chez elle est ses scènes sont filmées en DV. Elle définit aussi la force d’un témoignage, celui de sa grand-mère et la difficulté de faire incarner ce personnages à des comédiennes – elle cite les refus d’Anouk Aimée et d’Anna Karina, ne voulant se positionner en aïeules -. Elle trouve donc un troisième biais, parti-pris du film à l’image du personnage amusé de Ludmila Mikaël rencontré dans une gare, mondaine landa très belle refusant également le personnage. Même si ce film peut déconcerter il me semble être l’un des meilleurs films de Laetitia Masson, en souhaitant que cette remise en question ne la pénalise pas pour son œuvre à venir. La performance lumineuse d’Elsa Zylberstein aide pour beaucoup à entrer dans l’atmosphère très originale de ce film.

FRAGMENTS D’UN DICTIONNAIRE AMOUREUX : ALEX MÉTAYER

Cet ancien Trotskiste, né le 19 mars 1930, fils d’officier d’aviation, passe son enfance en Algérie. Passionné de musique, Alex commence sa carrière comme saxophoniste dans un orchestre de jazz, aidé par un premier prix de Clarinette au conservatoire. Il passe par la dure école des cabarets, notamment dans les années 60, avant d’assurer la première partie du spectacle de Georges Brassens à Bobino en 1964. Il trouve son épanouissement dans le « one-man-show », habillé toujours en costume blanc, citons notamment « Mémoires d’un amnésique » (1975), « Nous on s’aime » (1976), « La vie en V.O. », « Merci Disco » (1979), « Les femmes et les enfants d’abord » (1983), « Liberté Chérie » (1985), « Y a un malaise » (1981), « Moral d’acier » (1990), « Opéra comique » (1993), qui lui vaut le grand prix de l’humour de la Sacem. En 1996, il écrit la pièce « Aimez-moi les uns les autres » qui lui donne l’occasion de jouer avec son fils aîné Éric (excellent dans « À l’heure où les grands fauves vont boire », film de Pierre Jolivet (1992), et grand pilier de la ligue d’improvisation). Suivent « Famille, je vous aime » (1997), « Alex Métayer perd la tête » (2000), son dernier spectacle. Sur scène, il impressionne, par un humour lucide et corrosif, mais jamais cruel, renvoyant au spectateur un juste miroir de nos travers (à l’image du couple « Maurice/Nicole » par exemple). Il dépense une belle énergie, digne d’un personnage de Tex Avery. Ses célèbres incisives (il aurait choqué un orthodontiste en refusant de les « corriger », ne trouveront que peu d’échos au cinéma, un seul film en fait de Jean Pourtalé, « 5% de risques » en 1979, avec Bruno Ganz. Il est évident que son extraordinaire univers sur la scène, permettant au spectateur de visualiser toutes les situations, n’inspirait pas les metteurs en scènes. Il est rare qu’un humoriste de cette classe trouve des propositions, à l’image du film de François Reichenbach « La raison du plus fou » ne rendant pas justice à l’univers d’un Raymond Devos, qui partageait comme lui la passion pour la musique. Il tourne cependant deux films comme réalisateur-interprète suivant une inspiration de la comédie italienne: portraits subtils de deux personnages égoïstes dont les convictions volent en éclats. « Le bonheur se porte large » tisse l’histoire d’un couple de vacanciers et leur fille qui vont vivre un cauchemar durant leur trajet en voiture, vivant toutes sortes d’épreuves par un « destin » pourtant bien familier… « Mohamed Bertrand Duval », brosse le portait un dynamique PDG, renvoyé par la maison mère de son entreprise, et qui, las de la monstruosité ordinaire de sa femme et de sa fille, fuit en camping-car. Ruiné, il se réfugie dans un camp de gitans et d’arabes, avec lesquels il se lie d’amitié. On peut trouver en ce film une préfiguration d’ « Une époque formidable » de Gérard Jugnot (1991). Il y traite des sujets graves comme le racisme et la maladie. Sans cynisme, mais avec justesse, il sait s’entourer d’interprètes venant d’horizons divers comme: Laure Duthilleul, Marie Rivière, Didier Pain, Eva Darlan dans le « Bonheur se porte large », et Moussa Maaskri (qui excellera plus tard chez Karim Dridi), Marie-Christine Adam (étonnante en assistante sociale amoureuse du personnage d’Alex Métayer) et à nouveau Didier Pain dans « Mohamed Bertrand Duval ». Le relatif échec public de ses films, a malheureusement dissuadé Alex Métayer à persister dans cette voie. Il avait pourtant un formidable talent d’observateur et de portraitiste. Il meurt le samedi 21 février 2004 à Paris à l’âge de 73 ans.

Filmographie : Comme comédien : 1979 – 5 % de risque de Jean Pourtalé – Comme réalisateur, auteur, interprète : 1985 – Le bonheur se porte large, avec Laure Duthilleul, Marie Rivière, Guillemette Grobon, Muriel Kenn, Eva Darlan, Kathy Kriegel, Didier Pain, Christian Bouillette, etc… – 1990 – Mohamed Bertrand Duval avec Moussa Maaskri, Marie-Christine Adam, Didier Pain, Netty, Mohamed Mouzidi, Baptistine etc…

UN PEU DE FINESSE DANS LA TRASH TV OU JAMAIS MIDDLE

Alexia Laroche-Joubert, le retour…

Imaginez un retour d’une journée splendide à se balader dans les Pyrénées un 24 septembre, fins de vacances tristouilles, spleen obligatoire. Pour prolonger la détente j’avais enregistré « + Clair » sur Canal + présenté par Florence Dauchez, qui excelle à la présentation de cette émission, malgré la dure tache de nous faire oublier Daphné Rouiller. Surprise on retrouve la pitoyable Alexia Laroche-Joubert de sinistre mémoire chaperonnée par Armande Altaï. Je n’ai pas prévu de sac « à vomi », mais je visionne tout de même, sur K7 on peut toujours passer en vitesse rapide. La bougresse ne me déçoit pas, nous livrant un festival effarant de minauderies ponctué par des « Je vais être sincère », « franchement » and co…

Elle fait parti des fondamentaux de la télévision réalité dit, elle ! Elle joue à celle qui s’amuse, malgré le poids de ses responsabilités, dansant avec la raideur de la créature de Frankenstein, histoire de montrer qu’elle est bien « fun ». Mme Moâh se glorifie d’être la reine des dealeuses de la nullité télévisuelle, jamais « middle » selon un témoin. Elle annone et récite son laïus, n’écoute visiblement rien des remarques pertinentes de l’animatrice, elle suit son idée ce qui doit être considérable pour ce qui lui sert de tête. Son débit mitraillette est là pour bien signifier son auto-valorisation de grande prêtresse de la « Starac’ », qui sévit toujours sur TF1. Selon elle, cette émission a donné plus de talents à la chanson française que tout le marché réuni ! Elle prétend avoir introduit plusieurs générations, remarquant après « La ferme » et « La 1ère compagnie », le goût pour les personnes à maturité différente ! Il y a donc un « vieux » de 37 ans, au milieu de jeunes gens , histoire de provoquer, elle dit elle-même un conflit générationnel, histoire de trouver une nouvelle manière pimenter le spectacle – Ca marche au vue des multiples conflits passant sur le « Zapping » de Canal + -. Sympathique donc ! ayant en prime l’âge du « vieux », me voilà signifié ma « maturité différente », bon pour la casse, usé, rincé, laminé, ras-le-bol, vieux conisé et bon pour acquérir un déambulateur, la société de la télé réalité vient de me catégorisé dans les schnocks, et le moral en berne est de rigueur. Ma vie est finit et je ne le savais même pas ! 

L’andouille de compétition se plaint aussi des jeunes qui ont le maîtrise de toutes les astuces de la télé, depuis le temps, il faut donc les « déformater » pour les « reformater », ils ne sont même plus corvéables à merci. Elle nous joue donc un remake propre sur lui de « l’arroseuse arrosée, ce qui est un comble !. Sur une remarque d’une intervenante, elle parle de rancœur, n’accepte aucune critique, la Altaï vient même à sa rescousse sur une question de close qui interdit tout candidat à décrier l’émission, les dealers n’ont pas de services après vente, non mais… La belle Florence évoque le feuilleton rigolard Pernaut-Ducruet-Marquais, sur une basse histoire de cocufiage qui a alimenté la presse trash ces derniers mois, la Alexia ne ce sent responsable de rien, regrettant en passant que ça n’a pas fait grimper les audiences… Et termine par un « je vais être franche avec vous, je n’ai pas la main mise sur les médias ! »…. Et l’on pense à la phrase d’Audiard, « Les cons ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît ».

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Germain Huby

Suit la troisième diffusion du programme court « Germain fait sa télé » par le prodigieux Germain Huby, transfuge d’Arte. Il joue en play-back dans son appartement, dans la vie de tout les jours, la bande son des émissions de Confessions intimes, et celle du tandem de cornichon Bataille et Fontaine – Pour cette dernière un mari préfère ses chiens à sa femme -. Jouant tout les rôles avec virtuosité il révèle l’inanité de ces programmes et nous livre avec humour un portrait féroce de la télévision, pointant du doigt la bêtise ambiante qui finit par nous passer inaperçue, il dénonce aussi les questions de « Marc-Olivier Fogiel », n’attendant aucune réponse d’un Vincent Lindon agacé et souligne en passant le malaise de l’excellent Guy Carlier. Un programme de qualité qui nous venge un peu de l’écoute de la plus belle pintade des médias français : Alexia Laroche-Joubert.

L’ANNIVERSAIRE

Diane Kurys, continue dans la vacuité, avec ce film paresseux, on est loin de la veine de son très abouti « Coup de foudre ». Ce film est un collage de plusieurs références, Jacques Fansten traité beaucoup plus subtilement les désillusions d’après mai 1981, avec son film « États d’âmes », film de 1986, soit presque vingt ans ! On songe avec nostalgie à l’âge d’or du cinéma italien, tout est ici stéréotypé, opportuniste, l’émotion est facile – la molle critique de la télé-réalité très dans l’air du temps -. Tous les poncifs des amitiés trahies sont ici au rendez-vous. La réalisatrice joue sur une nostalgie supposée de tubes des années 80. Un grand ponte de la télé-réalité, pris de remords réunis ses anciens amis dans sa somptueuse – et tape à l’œil – de Marrakech. La distribution brillante, dans le ton du film choral – ne manque même pas à l’appel son acteur fétiche Jean-Claude de Goros en éditeur aguerri -, tente vainement d’essayer de faire exister les situations, Antoine Duléry et Florence Thomassin anime avec énergie l’ensemble, Jean-Hugues Anglade est très émouvant et acerbe, et amène une humanité. La représentation de la maladie est presque ici irresponsable, tant l’édulcoration est ici à l’ordre du jour. On est bien ici dans un film de Diane Kurys, mais elle est ici en train ces derniers temps de dilapider son crédit de metteur en scène avec ce type de produit manufacturé.

MORT DE JEAN-CLAUDE GUIGUET

Annonce de la mort du cinéaste Jean-Claude Guiguet, exigeant et rare, on lui doit « Les belles manières » (1978), où un jeune provincial est engagé à tenir compagnie d’une Parisienne quinquagénaire – Hélène Surgère -, « Faubourg Saint-Martin » (1986), portrait de trois femmes dans un grand hôtel, « Le mirage » (1991), une excellente adaptation de l’œuvre de Thomas Mann, où une femme malade joué par Louise Marleau découvre l’amour sur le tard, un film choral « Les passagers » (1998), variation autour d’un tramway parcourant une ligne imaginaire entre Paris et Strasbourg, et dont le film rouge est l’excellente comédienne Véronique Silver. Il savait formidablement communiquer sa passion du cinéma, notamment dans la revue « Trafic » et à la radio sur « France Culture » émission de Claire Vassé diffusé tous les samedis, où il se montrait particulièrement brillant. Ses films sont disponibles en DVD. En conclusion, Louis Guichard, dans Télérama  N°2577, du 2 juin 1999 déclarait. « Jean-Claude Guiguet se met facilement en colère contre l’ordre actuel de la société et se définit comme « en état de guerre permanent », le sourire au fond de l’œil. Ce pessimiste joyeux aime à citer Baudelaire : « La fin du monde a eu lieu, et on ne s’en est pas rendu compte». « C’est en présentant son film, précédent, « Le mirage », à des lycéens agités et inattentifs (« Ils sortaient très vite les bonbons, les cacahuètes ») que s’est imposée à lui la nécessité d’explorer une autre forme que le récit linéaire , fondé sur la durée. Et l’envie de parler du monde d’aujourd’hui « d’une façon frontale et directe, avec le plus d’audace possible ». Abonné à l’avance sur recettes. Guiguet l’est aussi aux salles clairsemées et au refus des chaînes, dont l’apport est déterminant pour financer un long-métrage. « Je prends ça pour un compliment : la télé ne veut que des films qui ne dérangent personne conformes au goût majoritaire. Or la majorité a généralement tort » ».

Mise à jour du 06/08/2009

MORT DE ROBERT WISE

A lire l’hommage du site DVD Classik.

ARTICLES LE MONDE

La mort de Robert Wise, réalisateur éclectrique de « West Side Story » par Thomas Sotinel (16/09/2005)

C’est à Saint-Sébastien, à la veille de l’ouverture du Festival de cinéma, que l’on a appris, mercredi 14 septembre, la mort du cinéaste Robert Wise, le jour même. Le grand rendez-vous espagnol s’apprêtait à rendre hommage au réalisateur de West Side Story ­ – le film aux dix Oscars ­ – en son absence.

Agé de 91 ans, Robert Wise avait délégué son épouse pour le représenter. Il a succombé à un arrêt cardiaque à Los Angeles. Samedi 10 septembre, il avait célébré son anniversaire. Le nom de Robert Wise reste attaché à deux des plus grands succès commerciaux de l’histoire du cinéma, deux comédies musicales, West Side Story (1960) et La Mélodie du bonheur (1965). Ce n’était pourtant pas un spécialiste du musical. Au long de ses cinquante-cinq ans de carrière, Wise a sacrifié à tous les genres : le policier, l’horreur, la science-fiction, le western. Et le succès n’est pas toujours allé à ses productions les plus intéressantes.

Robert Wise est né le 10 septembre 1914 à Winchester, dans l’Indiana. Il part pour Hollywood et est embauché comme assistant au département montage de la RKO en 1933. A la fin de la décennie, il est devenu monteur en titre, à temps pour qu’Orson Welles lui demande de travailler sur Citizen Kane.

Wise obtient un Oscar pour son travail sur le chef-d’oeuvre de Welles qui le retient pour son film suivant La Splendeur des Amberson. Le monteur passe alors de la gloire à l’infamie puisque c’est à lui que revient la tâche de couper le film de Welles contre la volonté du réalisateur éloigné d’Hollywood.

Son efficacité lui vaut de passer à la réalisation, toujours pour la RKO. Le producteur Val Lewton, spécialiste des films d’horreur, lui propose de terminer La Malédiction des hommes-chats, un film fantastique inspiré par le succès de La Féline, de Jacques Tourneur. Les premiers films de Wise pour la RKO forment un catalogue disparate et passionnant : il adapte Maupassant dans Mademoiselle Fifi (1944) et Robert Louis Stevenson dans Le Récupérateur de cadavres (1945), avec Boris Karloff.

Robert Wise continue sa collaboration avec la RKO jusqu’en 1949. Parmi les films remarquables de cette période, on retient Né pour tuer (1946), film noir mettant en scène un tueur en série séducteur, Le Ciel rouge (1948), un western avec Robert Mitchum, et Nous avons gagné ce soir (1949). Cette évocation d’un combat de boxe truqué à la mise en scène très sèche offre à Robert Ryan l’un de ses plus beaux rôles.

AFFRONTEMENT RACIAL Comme beaucoup de ses collègues au même moment, Robert Wise devient réalisateur indépendant à partir de 1950. Son éclectisme prend alors toute sa mesure. Il passe de la science-fiction( Le jour où la Terre s’arrêta, en 1951) au film de gangsters. Dans ce dernier domaine, Le Coup de l’escalier (1959) se détache de la production courante en mettant en scène l’affrontement racial entre deux braqueurs incarnés par Robert Ryan et Harry Belafonte.

Pour son film suivant, on lui demande d’adapter West Side Story. La comédie musicale de Leonard Bernstein doit en grande partie son immense succès sur Broadway à la chorégraphie de Jerome Robbins. Wise décide de partager la tâche de metteur en scène avec le chorégraphe. Ce sera la seule fois dans l’histoire des Oscars que la récompense sera attribuée à deux réalisateurs pour le même film. Le succès, critique et populaire, de cette adaptation de la tragédie de Roméo et Juliette au New York de l’époque est immense.

Trois ans plus tard, Robert Wise tourne alors ce que beaucoup considèrent comme son meilleur film, La Maison du diable (1963), un film de fantômes économe de ses moyens et pourtant terrifiant. Il revient ensuite à la comédie musicale avec La Mélodie du bonheur. Les recettes que rapportent les tribulations de la famille von Trapp, 163 millions de dollars pour l’Amérique du Nord, dépassent celles d’Autant en emporte le vent et le film détient pendant plusieurs années le record absolu du box-office.

C’est le dernier triomphe de Robert Wise. Certes le succès commercial ne l’abandonne pas tout à fait (La Canonnière du Yang-Tse, avec Steve McQueen en 1966 ou Le Mystère Andromède, un film de science-fiction en 1971) mais ses retrouvailles avec Julie Andrews, pour la comédie musicale Star, en 1968 se soldent par un échec. Il commet ensuite un film catastrophe Hindenburg (1975), une imitation de L’Exorciste (Audrey Rose en 1977) et porte avec un succès très relatif la série télévisée Star Trek à l’écran en 1979. Il réalise son dernier film, Rooftops dix ans plus tard.

Une sélection de films en DVD
Aux Editions Montparnasse. Né pour tuer, avec Claire Trevor et Lawrence Tierney ; Mademoiselle Fifi, avec Simone Simon ; Nous avons gagné ce soir, avec Robert Ryan.
Chez Warner Home Video. La Maison du diable, avec Richard Johnson, Julie Harris.
Chez MGM. Le Coup de l’escalier, avec Harry Belafonte et Robert Ryan ; Je veux vivre, avec Susan Hayward et Simon Oakland ; West Side Story, avec Natalie Wood, Rita Moreno et George Chakiris.
Chez 20th Century Fox. La Canonnière du Yang-Tsé, avec Steve McQueen et Candice Bergen ; La Mélodie du bonheur, avec Julie Andrews.

LIBÉRATION

La mort de Robert Wise, cinéaste de rigueur – Le réalisateur de «West Side Story» et de «Nous avons gagné ce soir» est décédé à Los Angeles. Par Édouard Waintrop, le jeudi 15 septembre 2005

Il n’était pas un habitué des honneurs, plutôt abonné aux notules un rien méprisantes des dictionnaires du cinéma et surtout au travail ordinaire des galériens d’Hollywood, même s’il eut deux succès impressionnants (»West Side Story», film aux dix Oscars, puis «La Mélodie du bonheur», record de recettes en 1965). Alors une intégrale de ses quarante films à Saint Sébastien, un des festivals majeurs du circuit international! Robert Wise a eu cette sorte d’élégance incroyable de quitter la scène juste avant l’ouverture du rideau: il est mort mercredi à Los Angeles à 91 ans, dernier pied de nez dans une carrière d’une quarantaine d’années qui n’en fut pas avare. Robert Wise vit les années 30 dans les salles de montage de la RKO, la plus petite des majors. D’abord comme grouillot puis comme responsable du montage son sur quelques comédies musicales (avec Fred Astaire). Enfin il monte tout court «La fille de la Cinquième Avenue» de Gregory LaCava, «Citizen Kane» et «La Splendeur des Amberson». Sur ce dernier, il accomplit sa tâche en l’absence d’Orson Welles que le studio a viré. Son style: rigueur et excellente direction d’acteurs Ce n’est que deux ans plus tard, qu’il fait ses premiers pas dans la mise en scène. En 1944, Val Lewton, responsable de productions fauchées de la RKO, lui confie la fin du tournage de «La Malédiction des hommes chats», suite de «La Féline» de Tourneur. Il enchaîne avec «Mademoiselle Fifi», tiré de Maupassant. Deux premiers films avec Simone Simon. Wise trouve un style, conjugaison de rigueur et d’une excellente direction d’acteurs. Dans le «Récupérateur de cadavres» (1945), très réussi, Boris Karloff est à la fois effrayant et pitoyable. Malgré son histoire dingue, «Né pour tuer» (1947) manque en revanche de jus. Ce nerf, Wise le retrouve avec «Le Ciel rouge» (1948), un western étonnant qui vire au film noir grâce à l’injection massive de scènes de nuit et surtout à un Robert Mitchum ambigu. «Nous avons gagné ce soir» (1949), histoire de boxe confinée entre un vestiaire et un ring, à la mise en scène vive et inventive sera son premier film célèbre et sa dernière production RKO. Avec Robert Ryan, acteur sombre et magnifique dans le rôle d’un boxeur essoré mais fier. Ensuite, Wise alternera le bon et le nettement moins bon («Destination Gobi», «Mon Grand», «La loi de la prairie», etc.), ces derniers titres faisant beaucoup pour sa réputation mitigée. Dans la première catégorie (les bons films), il faut citer le très mankiewiczien «Secrets de femme», qui ressemble dans son principe même à «Chaînes conjugales» (flash-back sur la vie de trois femmes provoqué par un événement inattendu). Et «The Captive City» (1952), polar prosaïque, sec et paranoïaque, où un journaliste découvre que sa petite ville, qu’il croyait idyllique, est devenue la proie de la mafia avec la complicité ou la passivité de la plupart de ses concitoyens. Melville enthousiasmé  : En 1954, Wise dirige «La Tour des Ambitieux», histoire a priori peu engageante de la succession d’un grand capitaliste, qu’il rend captivante avec l’aide d’un dialogue ciselé, d’acteurs formidables (de William Holden à Barbara Stanwyck) et d’un sens personnel du rythme. En 1956, il dirige un Paul Newman monté sur des ressorts dans «Marqué par la haine», plus nerveux que passionnant. En 1958, dans «Je veux vivre», il met en scène une prostituée (Susan Hayward), accusée à tort d’un crime et condamnée à mort. La première partie, sur la vie de bâton de chaise de l’anti-héroïne, est brillante. La seconde touchante. Réalisé l’année suivante, «Le Coup de l’escalier» suit un casse avec un classicisme revigorant qui enthousiasma Jean-Pierre Melville. Un flic à la retraite y monte un coup avec l’aide d’un musicien noir frimeur (Harry Belafonte) et d’un blanc amer et raciste (toujours formidable Robert Ryan). Le suivant, «West Side Story» (1961), tragédie musicale, Roméo et Juliette dans les bas quartiers de Manhattan, sera un immense succès. Mais c’est sans doute plus à Jérôme Robbins, coréalisateur et responsable des séquences dansées, à Leonard Bernstein, compositeur de la musique, et à Stephen Sondheim, auteur des paroles, que l’on doit les qualités du film. En 1963, retour plutôt réussi au cinéma d’horreur avec le gothique «La Maison du diable». En 1965, triomphe avec «La Mélodie du bonheur», qu’une grande partie des historiens qualifie de mièvre. Et pourtant ce remake de «La Famille Trapp», chronique d’une chorale familiale autrichienne au moment de l’Anschluss, comédie musicale (avec des dialogues de Lehman et une musique de Richard Rodgers) enlevée, se révèle brillante. Julie Andrews y est formidable. La fin de la carrière de Wise est plus floue. «Le mystère Andromède» (1971), une SF réaliste et effrayante, ébouriffante histoire de contamination adaptée d’un des premiers romans de Michael Crichton, mérite d’être sortie du lot. Le style de Robert Wise s’y retrouve tel qu’il fut, rigoureux au risque de la sécheresse.