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LE COIN DU NANAR : L’ANTIDOTE

 

Vu « L’antidote » (…pas à la morosité en tout cas) de Vincent de Brus, comédie assez laborieuse, qui mériterait que l’on jette un voile pudique sans une galerie d’excellents interprètes : L’angoisse terrible c’est d’avoir comme moi ce jour, une voisine de salle qui avec son rire communicatif,  – à contre temps et dans des scènes assez lourdes, style « la bourse et la gaule » -, vous range dans la case des coincés du bulbe du genre « c’est moi ou c’est vraiment drôle… ». . On guette malgré soi « la mort au travail » comme disait Jean Cocteau, chez Villeret, dans un numéro où il excelle, Clavier tient son rôle honorablement sauf quand il bafouille à la « Pierre Repp ». Agnès Soral pète le feu en bourgeoise un peu fofolle.

Panorama des seconds rôles :

– François Levantal dans « L’antidote » il joue le bras droit probe et rigolard (n’omettant pas de jeter un coup d’oeil sur le décoletté d’Alexandra Lamy. Il fait preuve d’un bel abatage

– Alexandra Lamy, mieux servie que dans « Brice de Nice » – prononcez « Braïce de Naïce » –

– L’excellent Éric Prat en traître de service, sans cesse rabroué par Clavier car il n’est pas assez obséquieux

– Annie Grégorio, la voisine « popu » de Villeret, cuisinant gras et ne comprenant rien (chapeau pas à cette comédienne pour tirer des rires avec un rôle pareil).

– Dominic Gould, en souvenir de « Monsieur » le film Jean-Philippe Toussaint

– Gérard Chaillou, en professeur (il tient ce rôle également dans « Mon petit doigt m’a dit », un futur emploi

– Pierre Vernier en doyen du conseil d’administration, c’est le sage mais que Clavier manipule facilement.

– Bernard Dhéran, en père d’Agnès Soral (il le jouait également dans une sitcome « Blague à part » sur canal +, original et assez jubilatoire.

– Warren Zavatta en vigile qui s’efforce d’embrouiller André (Villeret)

– François Morel est formidable en associé sournois, de même Judith Magre dans le rôle de la mère de Clavier, mais Daniel Russo est sous exploité comme d’habitude…

Christian Clavier et Jacques Villeret

. C’est aussi le dernier rôle pour Jacques Dynam , il joue le propriétaire de l’usine de jouets, et patron de Villeret, on ne le voit que dans 2 scènes (et dans la seconde il est dans le flou !). C’est dommage pour ce si symphatique comédien dont le générique du film salue la mémoire…

C’était un comédien attachant, truculent, il fallait le voir filliforme dans « Millionnaires d’un jour » (1949) où il jouait un médecin timide. De l’adjoint malmené de Louis de Funès dans la série des « Fantômas », – version Hunebelle -,  à la voix française de Jerry Lewis !, c’était une figure populaire, souvent partenaire de Michel Serrault, on pouvait le retrouver en ouvrier typographe dans « Les enfants du marais », homme d’affaire roublard dans « L’associé » ou noble dans le remake de « Fanfan la tulipe », ou flic fatigué à la télé dans la série « Crimes en série » avec Pascal Légitimus… Un indispensable…

  Jacques Dynam

Il a fait beaucoup de doublage ( la voix de Jerry Lewis, ce n’était pourtant pas le même gabarit ! ) confère La gazette du doublage. On peut retrouver un excellent portrait signé par Yvan Foucart (auteur du formidable livre « dictionnaire des acteurs disparus », avec lequel je corresponds souvent dans le site wwww.lesgensducinéma.com à l’adresse :  Les gens du cinéma.

ÉROS THERAPIE

Moins abouti que « Borderline » (un des meilleurs films des années 90), « Le journal d’un séducteur » ou « L’examen de minuit » on se régale à retrouver l’univers de Danièle Dubroux, dans ce film à la sortie tardive (tourné en 2002), dont l’ancien titre était « Je suis votre homme » (au marché du film de Berlin). C’est une comédie psychanalytique, la réalisatrice se délecte à analyser les frustrations et les petits arrangements que l’on peut avoir avec ses fantasmes. C’est l’occasion d’analyser la perte d’identité des hommes devant l’émancipation des femmes et le marasme occasionné sur un ton sarcastique. La critique est acide sur le milieu de la critique ou sur la comédie des faux semblants, le ton est alerte.

Le film doit beaucoup à la pléiade d’excellents comédiens : François Berléand joue tout en finesse un personnage déboussolé, Catherine Frot subtile, en recherche d’identité sexuelle, Isabelle Carré en critique pure et dure, le « Ruizien » Melvil Poupaud, Claire Nebout en maîtresse femme, Hubert Saint-Macary en curé déjanté dans un rôle hélas trop bref, il était formidable déjà en psy dans « Le journal d’un séducteur », Marc Andréoni en écrivain marginal, Eva Ionesco décalée, Julie Depardieu en psy inhabituelle, et Emmanuelle Riva … à la gâchette facile.

Catherine Frot & François Berléand

C’est aussi la dernière apparition de Jacques François au cinéma, il est éblouissant dans le rôle du père de Catherine Frot, dépassé par l’homosexualité tardive de sa fille, et de voir que son beau-fils vit dans le garage ! Il faut le voir déclarer « Quelle époque ! », le film lui est dédié. Même s’il manque au film un rythme haletant, c’est un film dont l’originalité surprend.

PAUL VECCHIALI : POURQUOI EST-T’IL SI MÉCHANT ?

Photo de Paul Vecchiali par Oliver Roller

Bon ce n’est pas Maurice Lamy dans la publicité d’Orangina rouge, mais il ne faut pas l’énerver : L’analyse du cinéaste Paul Vecchiali, une liberté de ton (polémique) assez rare pour être signalée :

LIBÉRATION

Week-end : La profession du cinéma a politisé le vote, mais multiplié les injustices.
Césars, tu me fends le coeur par Paul Vecchiali samedi 05 mars 2005

Paul Vecchiali cinéaste.

Convivial ne veut pas dire consensuel ! Si le vote, cette année, a été politique, faut-il s’en réjouir ? Ou bien doit-on constater que le dernier maillon ( le faible ? ) est tombé ? Celui du coeur ou de l’enthousiasme spontané. De tout temps, il y avait cette règle : le nombre d’entrées (parisiennes, cela va de soi) a régi les votes. Au moins, c’était clair. Cependant, une politique mal comprise n’est-elle pas pire qu’une politique injuste ?

Renvoyer les Choristes au solfège peut sembler une attitude noble de la part de la «Profession» : film racoleur ­ qui a dit «sombre merde» ? ­ plus sombre que merdeux, appel (discret) à la délation et au masochisme ( ce qui aurait pu être intéressant, sans le vernis de la démagogie ), avec un Jugnot dévitalisé ( pour faire sobre ? ) aux côtés d’un Berléand délirant, toujours aussi peu charismatique ( qui nous délivrera ? ). Ignorer ou presque ce (trop) Long dimanche de fiançailles, débordé par les effets spéciaux (prière de revoir les Croix de bois de Raymond Bernard, 1932 !), reste salutaire : voir les attendus précédents sur ce film «français».

Au profit de quoi cette charge «émotionnelle» a priori salubre ? Quand la mer monte ? Oui, bon, c’est mignon et sympathique… Quant à l’autre, accablé d’honneurs, cette Esquive chanceuse, je ne vois qu’une démagogie maladive pour distinguer ce film formaté ( à l’envers, mais formaté quand même ) et récompenser cette jeune actrice qui cabotine en éventail, fausse beurette, jolie mais disgracieuse, investie mais incontrôlée, ce n’est pas rendre service à une débutante dont le talent pourrait se révéler ailleurs, et plus justement.

Et puis, les «oubliés»… Je ne comprends pas, mais pas du tout alors, puisqu’il s’agissait cette année de revenir aux «petits films», soit donc aux films d’auteur, l’absence aux nommés de bijoux tels que l’Equipier, Malabar Princess, Wild Side, entre autres, ni encore moins que Grégory Dérangère, indiscutable (mais le dialogue reste ouvert) prince de nos comédiens, notre Cary Grant, ait été éliminé au profit du baba cool Torreton qui joue tout de la même façon ( dialectique, connais pas ! ) Pas davantage, je ne comprends qu’on ait zappé le très fin et très rusé Edouard Baer, si personnel, évitant les excès avec une maestria redoutable, peut-être alors trop élégant ?

Question de goût ? Justement ! De goût sans préméditation, sans volonté politique, cette politique qui a poussé le festival de Cannes à récompenser l’ignoble film de Michaël Moore…

Et cette cérémonie ringardissime censée nous restituer la grande Adjani, revenue sur terre pour l’occasion, soeur jumelle de Monica Bellucci drivée par «Gag» Elmaleh, plus patate qu’épatant cette année ( ce n’est pas de sa faute car il reste classieux, même dans le pire ), cérémonie essoufflée, pataugeante ! Où l’on pousse au crime de la vulgarité pour tenter d’éviter l’ennui. Toutefois, l’ennui demeure et la vulgarité fait couche…

Petite remarque en forme d’info : c’est la troisième année, et non la première, que se pratiquent les livraisons de DVD aux votants.

Pour terminer par ce qui me semble le plus grave : plus d’hommages aux disparus. On le sait, la mémoire s’efface. Pourtant, dans un système où la hiérarchie ( amour, gloire et beauté ) est la base industrielle de cette Profession, le seul moment d’égalité est bien celui-là. La mort nivelle tout et permet la re-connaissance… Faut-il perdre même ça ?

De la part d’un votant qui se flatte de n’être pas juge et parti !

Il y a un excellent portrait de lui dans Télérama N°2880, du 26 mars 2005. A l’image du film « Corps à coeur », il aurait pût très bien être un cinéaste populaire.

François Berléand que je connais un peu, y voit de l’aigreur (je l’avais informé de cet article rageur). C’est vrai qu’il peine d’ailleurs son film « A vot’ bon coeur » diffusé pourtant à la « quinzaine » à Cannes en mai 2005. On attend d’ailleurs son dictionnaire des cinéastes français des années 30. 

Mais on ne peut lui donner tort sur tout : 

Pour les « Césars » : Il a toujours un problème avec les disparus de l’année dans cérémonie inventée par Georges Cravenne. On a vu cette année des noms apparaîtrent de manière presque subliminale avec une photo de plus pour Jacques Villeret, c’est peu ( un Robert Dhéry méritait un hommage particulier par exemple ) et surtout illisible. C’est donc avec beaucoup d’émotions que l’on a retrouvé l’hommage au producteur Humbert Balsan par Gilles Porte & Yolande Moreau.

Cette manière de faire me semble indigne de cette institution, c’est peut-être une manière d’éviter de renouveler les gaffes de ces dernières années comme confondre le cinéaste Jacques Richard avec le comédien homonyme, ( la mère du cinéaste avait eu un choc de voir l’annonce de son fils mort ! )… ou de parler de la disparition de Marty Feldman 15 ans après !, (je ne sais plus quelle année). Très souvent du parfait n’importe quoi , sans parler des rituelles omissions chaque année .

Il y a un site de cinéma qui rend hommage aux comédiens décédés Les gens du cinéma grâce aux portraits d’Yvan Foucart ( citons dernièrement Henri Poirier, Henri Marteau, Roger Ibanez, Simone Simon, Pierre Trabaud, etc… ) La cérémonie des Molière est elle beaucoup plus chaleureuse et rigoureuse à ce sujet.

Il a raison d’évoquer le comédien Grégori Dérangère : Par les hasards de la vie , j’avais assisté à quelques jours du tournage ( sur Bordeaux ) du film de Jean-Paul Rappeneau en 2002 « Bon voyage ». J’étais dans un coin lors de la scène au jardin public où Frédéric Auger ( Derangère ), cinglant lance à Viviane Danvers (Isabelle Adjani) qu’elle terminera seule à se regarder dans la glace ( réplique assez terrible finalement ). Le comédien m’avait impressionné par son intensité. Je le lui avais dit lors d’une avant-première de « L’équipage » où il était avec Philippe Lioret et la délicieuse Anne Consigny. Il m’avait donné son état civil pour que je fasse une fiche ( avec une photo de Philippe Schroeder ) sur le site des « gens… » :Les gens du cinéma .  Modeste, ce comédien (excellent dans « 30 ans » de Laurent Perrin) est bien comme le disait Jean-Paul Rappeneau, l’équivalent français de James Stewart.

LES MOTS BLEUS

Ce film ténu est très touchant, même si l’on peut déplorer quelques longueurs et quelques maladresses, sur un thème voisin de « La petite chartreuse ». On peut comprendre le personnage de Clara (superbement joué par Sylvie Testud), sa rudesse devant la protéger devant la dureté de la vie (elle est illettrée suite à un traumatisme d’un geste brutal (certes d’amour) de son enfance. Anna (lumineuse et très expressive) et sa mère forment une sorte de couple fusionnel et en définitif partageur.. Il faut sauver la mère pour que la fille trouve son salut. Bizarrement le personnage de Sylvie Testud, véritable petit soldat, est touchant – son personnage n’est pas immédiatement « aimable » -, devant son inaptitude à la vie. C’est loin d’être un monstre froid, je crois, et le subtil jeu de Testud nous laissant entrevoir le drame de cette jeune femme.

Sylvie Testud

Sergi Lopez est idéal dans son rôle d’éducateur rassurant, de même pour Mar Sodupe qui joue sa soeur, et dans un petit rôle Isabelle Petit-Jacques (actrice fétiche de Patrice Leconte), en directrice d’école peu compréhensive. Salutations à l’ingénieur du son Pierre Gamet, que j’avais rencontré un jour, et son beau travail sur le mode intime (l’oisellerie, la mer). Deuxième réussite pour le tandem Corneau-Testud après « Stupeur et tremblements », film conte, sans pathos et avec une belle utilisation de la caméra DV.

Esther Gorintin

Évoquons aussi Esther Gorintin, dont la présence rayonne durant tout le film, même après sa disparition. Je me souviens d’elle avec émotion pour l’avoir rencontrée durant l’avant-première du film « Depuis qu’Otar est parti ». Elle retrouvait Bordeaux, la ville de sa jeunesse après des années, elle avait fuit durant l’occupation. C’était un choc, la transformation du quartier Meriadeck, par exemple. C’était une formidable rencontre avec la cinéaste Julie Bertuccelli. Un grand souvenir pour moi et je regrette de n’avoir pas pris de notes sur cette formidable rencontre avec deux belles âmes. Depuis « Voyages », son rôle de voisine souffrante d' »Imago » ou « Rosie » dans « Carnages », ses personnages nous touchent énormément…

YOUNG ARSÈNE LUPIN

On pouvait attendre de ce film, qu’il rende compte de la noirceur originelle du personnage de Maurice Leblanc. A la télévision, on peut d’ailleurs préférer l’incarnation de Jean-Claude Brialy dans « Arsène Lupin joue et perd » (Alexandre Astruc, 1980), à celle surestimée de la série avec Georges Descrières.

Ce film se sert de la renommée du personnage,  pour n’en faire qu’un  » Young Indiana Jones » à la française. C’est une amère déception pour ce film comme pour les récentes adaptations de « Vidocq » où « Belphégor » en attendant « Les chevaliers du ciel » ou un éventuel « Fantômas ». Pourquoi s’éloigner de la richesse de l’œuvre originale, avec ce scénario rocambolesque ? (Même reproche que pour « D’Artagnan et les trois mousquetaires » version TV de Pierre Aknine, sur TF1).

Romain Duris & Kristin Scott Thomas

Romain Duris est pourtant très crédible dans le personnage – cet emploi est une formidable idée, il a depuis prouvé sa maturité dans le film de Jacques Audiard « De battre son coeur s’est arrêté » –.

Kristin Scott-Thomas, Pascal Greggory, Philippe Magnan ou Robin Renucci font ce qu’ils peuvent avec des personnages caricaturaux. On peut louer la richesse de la reconstitution,  s’amuser à trouver décalée la présence d’un Xavier Beauvois en docteur, saluer Philippe Laudenbach ou le grand retour de Mathieu Carrière, trouver charmantes Marie Bunel et Eva Green (digne fille de sa mère), mais l’impression à l’arrivée de divertissement laisse un sentiment assez vain.

Philippe Lemaire

Ce film est l’occasion de retrouver pour la dernière fois Philippe Lemaire en cardinal brûlé vif. C’était une véritable star des années 50-60, injustement oubliée depuis. Il semblait retrouver depuis peu le chemin des studios (Le chef maffieux dans « Gomez & Tavarès », le père grand bourgeois et intolérant de Patrick Chesnais dans « Mariage mixte », mais il s’est suicidé sous une rame de métro en mars 2004. On le comparait beaucoup à Michel Auclair auquel il ressemblait un peu. Il était d’une lucidité remarquable, voir son entretien dans feu « La revue du cinéma » dans les années 80. Triste parcours idole un jour, second couteau ensuite. Le film lui est dédié. Retrouvez l’indispensable hommage d’Yvan Foucart : via le lien Les gens du cinéma

Le lien du jour : http://encinematheque.net/accueil.htm

Encinémathèque  est l’oeuvre de Christian Grenier, un des meilleurs sites français sur le cinéma, sur des premiers temps du cinéma à nous jours, c’est une riche base de documents, sur les acteurs et techniciens, films, affiches, revues, archives, et un regard original sur notre nostalgie d’un cinéma passé.