Skip to main content

Encyclopédie des longs métrages français de fiction 1929-1979 VOLUME 2

La distribution de « L’an 01 »

Avant-dernier texte de ce blog, la devise de Canalblog devant être le titre d’un film de Philippe Clair « Si t’as besoin de rien, fais moi signe », je me vois contraint de m’arrêter… Mais je ne pouvais pas le faire sans saluer une exceptionnelle aventure cinéphilique avec le volume 2 de « Encyclopédie des longs métrages français de fictions 1929 – 1979 ». 345 pages très riches de « L’an 01 » de Jacques Doillon à « Azaïs » de René Hervil, avec Max Dearly. Le volume 1 étant relaté ici.

Donc si vous êtes comme moi amateurs de génériques et que vous vous découragez en voyant celui de « L’an 01 » – disponible en DVD chez MK2 – justement, histoire de rajouter des noms sur IMDB. D’ailleurs il y a une voix off précise que c’est illisible, mais que les comédiens de toute manière se reconnaitront… Il suffit désormais de lire le livre d’Armel de Lorme pour s’amuser à quantifier les toutes premières apparitions de Gérard Depardieu ou de l’équipe du Splendid, tout en vous lançant dans la résolution de l’énigme quant à la participation à ce film de Daniel Prévost en hypothétique « cycliste apostrophant une vieille dame », rare erreur du livre en fait, le rôle étant joué par Martin Lamotte.

Outre la première équipe autour d’Armel De Lorme, Christophe Bier, Stéphane Boudin, Raymond Chirat, Gilles Grandmaire et Italo Manzi, on retrouve trois nouveaux, Jean-Pierre Pecqueriaux , un amateur de petits rôles et de silhouettes, Edgard Balzer et Jean-Pierre Bouyxou – que les auditeurs de « Mauvais genre » sur France Culture connaissent bien.

On ne peut qu’être impressionné par cette masse d’informations, d’anecdotes, de précisions, par les synopsis très détaillés, il y a des découvertes à chaque page, des relectures de films que l’on a visionné (« Les amants » de Louis Malle ou « L’air de Paris »).  Cet ouvrage sera très précieux, si vous êtes comme moi amateurs de silhouettes et de seconds rôles– je tire mon chapeau en passant aux dictionnaires de Raymond Chirat, chez Pygmalion, je ne compte plus les comédiens que j’ai identifié grâce à ce livre -. C’est un vrai travail de bénédictins – au sens non péjoratif du terme -, on pourra ainsi vérifier grâce aux recoupements divers que certains comédiens ne figurent donc plus dans les copies existantes – se rapporter à la notule sur le volume 1 – et vous pourrez désormais reconnaître les éternels non crédités aux génériques, et réussir à mettre un nom sur la quasi-totalité des truands dans la cour des miracles de la série des « Increvable Angélique ». La genèse des films est aussi précisée comme celle du film « Anémone » de Philippe Garrel, premier film d’Anne-Aymone Bourguignon,  future Anémone, confronté à des problèmes avec l’O.R.T.F. Ce livre tord le cou à pas mal de légendes, « Pension Jonas, 1941, de Pierre Caron, ne fut pas interdit sous l’occupation pour imbécilité – dans l’article sur « L’accroche-cœur ». 

Il y a aussi les films méconnus, oubliés des cinémathèques et de la programmation du câble, que l’on aimerait visionner, bien que certains soient perdus tel « L’an 40 » de Fernand Rivers, citons ainsi au hasard « Les anges » de Jean Desville – dont j’ai la V.H.S. trouvée dans un marché mais que je n’ai jamais visionné, « Au revoir, Monsieur Grock », film qu’adorait Michel Serrault, avec le clown Grock, « L’ange gardien » seul film avec en vedette Francis Lemaire – le père de Christophe Lemaire -, « Autopsie d’un complot », film franco-algérien de Mohamed Slimane Riad, etc… . On retrouve certains films cités, tels ceux produits par Eurociné, pour ceux qui n’on pas lu le livre culte de Christophe Bier sur le sujet, « Avortement clandestin ! » ou « Les aventures galantes de Zorro », qui semble un ahurissant « remontage approximatif » autour d’une trentaine de minutes d’un film déjà existant « Les trois épées de Zorro », avec divers inserts, et même une version hard, avec une comédienne fétiche de Jean-Christophe Averty, Louise Petit, dans l’un de ses rares films pour « une ex-préposée des Postes ! ». Il a aussi des pistes, sur des interrogations, les différentes versions étrangères simultanées ou plus tardives, les pseudonymes de chacun, les stock-shots. Pour reprendre le titre d’un livre de Francis Lacassin, il a sous l’égide d’Armel de Lorme, une « contre-culture » du cinéma. Il y déclare « s’affranchir une bonne fois pour toutes des héritages – encombrants ô combien ! – d’un Charles Ford, d’un René Jeanne ou d’un Georges Sadoul, paix à leurs cendres ». Il est donc avec son équipe à contre-courant. Pour lui Romy Schneider est par exemple mieux utilisée par Clive Donner et Woody Allen que Claude Sautet… Si on ne le suit pas forcément, on pourra se réjouir de cette attitude, pour mieux nous faire découvrir des œuvres sous-estimées. Je suis encore loin d’avoir profité de toutes les richesses de ce livre, par expérience avec le volume 1, c’est le type de livre que vous avez à portée de main, dans votre bibliothèque, et que vous ressortez à l’occasion d’un visionnage, sur le câble ou en DVD, ou pour les chanceux qui ont une à proximité, à la cinémathèque. Le bon de commande est ici et les films évoqués sonc ici. L’aide-mémoire, le site, poursuit sa route, avec des notes sur l’actualité, des hommages, des fiches sur des films.

On termine avec de bonnes nouvelles, « Le dictionnaire des longs métrages français érotiques et pornographiques » de Christophe Bier se précise pour 2011 – une souscription sera lancée, et Armel de Lorme annonce avec Raymond Chirat, le volume 2 de « L’encyclopédie des comédiens français & francophones », de Pauline Carton à Louis Gauthier, consacré au cinéma de Sacha Guitry en 160 comédiens. De quoi nous réjouir, certainement ailleurs, ou alors sur des forums, je ne sais pas encore.

Les seconds rôles du cinéma français grandeur et décadence

Photo et infos source Klincksieck

Auteur en 2006 d’un remarquable « Éloge des seconds rôles » aux éditions Séguier, Carré ciné, Serge Regourd sort un nouveau livre « Les seconds rôles du cinéma français – Grandeur et décadence », paru aux éditions « Klincsieck », avec le génial Saturnin Fabre en couverture. Si l’on prend actuellement en exemple certains génériques de fin de séries françaises sur le service public, France 2 et France 4, ceux-ci sont souvent carrément invisibles soit pour laisser place à la présentation des épisodes suivants, soit pour un commentaire d’un intérêt relatif – l’ineffable Thomas Hugues pour la présentation du « Clan Pasquier » par exemple, mais bon il faut bien l’occuper… Ayant l’habitude de compléter des génériques sur IMDB pour que l’on puisse trouver des CV complets de comédiens, je n’ai pu ainsi rajouter les noms de Patrick Rocca, Sophie Barjac ou Yves Afonso dans « Sur le fil » – saison 3 – ou Geneviève Mnich et Fred Ulysse dans « Marion Mazzano ». L’intérêt un peu limité de cette anecdote est de démonter un mépris évident des comédiens non stars, de plus en plus malmenés. Ils n’ont très souvent qu’une « coquille vide » à défendre au cinéma et à la télévision. De plus en plus, si vous êtes également maniaques sur ce type de seconds rôles, on lit des noms inconnus aux génériques, alors qu’il y a peu on retrouvait pléthores de seconds rôles dans des comédies, à l’exemple du film de Michel Blanc « Grosse fatigue », ce qui est beaucoup moins courant pour les films actuels. Serge Regourd déplore ainsi le gaspillage de bien des talents. Son livre est une analyse remarquablement amoureuse et sociologique de cette évolution. Il déplore les dérives et les limites du système de « bankeybeulhisation ». En 272 pages, très référencées, il part donc des mythiques « excentriques du cinéma français » ouvrage culte, de référence, hélas épuisé d’Oliver Barrot et Raymond Chirat, avec Saturnin Fabre en couverture, et suit l’évolution de ce type de comédiens. L’auteur possède une grande connaissance du cinéma français, et nous dresse une liste exhaustive de personnalités fracassantes, avec de grands regrets sur le parcours de certains comédiens atypiques, il cite par exemple Jacques Canselier, Philippe Brizard, Arlette Gilbert, Jean Mermet, Jean-Paul Muel, Olivia Brunaux, etc…, qui n’ont jamais eu la carrière qu’ils auraient mérités. Les seconds rôles ont accompagné le cinéma français, même durant « La nouvelle vague », tel Serge Davri, Yves Afonso, Sacha Briquet ou Laszlo Szabo. Beaucoup d’interprètes peuvent heureusement compter sur le théâtre et la télévision. Le livre au-delà de son analyse sociologique est un panorama complet de nos meilleurs comédiens, il bénéficie d’une très riche iconographie, avec un grand nombre de photos très rares ou inédites provenant de la cinémathèque de Toulouse. On pourra ainsi retrouver des comédiens prolifiques comme Albert Michel, ou oubliés des dictionnaires comme Micha Bayard, Jean Luisi, Henri Cogan, etc… Jubilatoire et ludique, c’est un voyage dans l’histoire du cinéma français de Jean Abeillé à Zouzou, C’est aussi un constat lucide des évolutions économiques, et des travers actuels de ce cinéma, visant à une rentabilité immédiate. On retrouve ainsi des descriptions des oubliés des génériques. Un livre qui devrait légitimement rester à portée de main dans votre bibliothèque.

 

Marcel Dalio, Paul Meurisse et Robert Dalban dans « Le monocle rit jaune », source toutlecine.com

Profitant d’avoir trouvé son adresse sur un commentaire, j’ai donc contacté Serge Regourd pour le féliciter, il a répondu quelques questions, l’occasion de revenir sur un travail unique, amoureux et salutaire.

– D’où vous vient cet amour des seconds rôles, et cette idée de dresser une situation très juste sur le cinéma français, à travers ce prisme ?

Depuis l’enfance, ma passion du cinéma est indissociable de la part que les seconds rôles y occupent. Problème de génération : enfant, et adolescent, je lisais « Cinémonde »qui ne les ignorait pas. Il n’y avait pas, dans ces années là, d’apartheid entre les stars et les seconds rôles dont nombre d’entre-eux étaient très populaires. Mon propos fut, précisément, de prendre ces acteurs comme fil-conducteur pour mesurer les évolutions et les mutations du cinéma français.

– Il y a peu d’ouvrages sur ce thème, du mythique « les excentriques du cinéma français », de Chirat et Barrot, «Les grands seconds rôles », « Stars deuxième » désormais épuisés, alors qu’il y a beaucoup de livres anglo-saxons sur ce sujet. Yvan Foucart et Armel de Lorme, ne sont pas passés par un réseau de distribution traditionnel pour évoquer ce type d’acteurs et être publiés. D’où vient ce désintérêt ?

L’air du temps est, dans tous les domaines , celui des « vainqueurs », des « people ». Les médias, généralistes, mais aussi, hélas, spécialisés, n’accordent aucune place aux acteurs dits de seconds rôles. Seuls existent les stars, les jeunes susceptibles de le devenir, et quelques « bons clients » des plateaux télé qui sont dans les réseaux indépendamment de leur carriére artistique. Les journalistes, notamment les jeunes générations, n’ont aucune culture cinéphilique en ce domaine. De surcroît, l’escamotage contemporain des génériques à la télé ne facilite pas l’identification de ces acteurs.

–  Comment avez-vous eu accès à l’iconographie remarquable de votre livre, en partenariat avec la cinémathèque de Toulouse et quelle fut votre méthode de travail ?

Le travail d’iconographie fut énorme : des jours et des jours consacrés à chercher des photos correspondant au texte déjà écrit. J’ai procédé par titre de films, en cherchant dans la ressource photo de ces films les acteurs concernés. J’ai bénéficié de l’aide précieuse du responsable photo de la Cinémathèque de Toulouse. Sans cette formidable collection, je n’aurais pas pu parvenir à ce que je souhaitais. Chaque fois que je trouvais l’acteur que j’avais en tête, c’était comme une victoire. Mais certains, hélas, sont restés introuvables, en particulier pour les périodes récentes . A l’inverse, j’ai dû sacrifier une cinquantaine de photos par manque de place même si l’éditeur a été généreux, en acceptant d’aller sensiblement au-delà du nombre initialement prévu.

– Vous citez des réalisateurs amoureux des seconds rôles de Jean Marboeuf à Cédric Klapisch, comment expliquer l’actuelle frilosité des nouveaux cinéastes pour employer certains comédiens pourtant remarquables ?

Comme je l’explique dans le bouquin, beaucoup de jeunes réalisateurs ne connaissent pas du tout les acteurs et n’ont pas de curiosité dans ce domaine. Ils sont, par ailleurs, dépendants des diffuseurs (Télé) qui financent et n’ont d’intérêt que pour les acteurs « bankables ». Des réalisateurs comme Marboeuf, mais aussi, par exemple, Boisset ou Costa Gavras, ne tournent plus, ou quasiment plus pour le cinéma

– Les enjeux financier, et l’idée d’une rentabilité immédiate, sont elle les causes d’une sous-utilisation de ces comédiens et pensez-vous que cette situation est irrémédiable ?

Rien, sauf la mort, n’est irrémédiable mais le métier d’acteur a été bouleversé par la « financiarisation » et l’industrialisation de l’audiovisuel. De nouvelles moeurs se sont imposées :être « bankable » ou rien en quelque sorte. On doit alors regretter que l’argent public soit aussi dévoyé quand il s’agit des co-productions des télévisions publiques, ou de l’avance sur recettes du C.N.C. Dans ces cas, la primeur des critères culturels devrait permettre de choisir les acteurs sur d’autres bases que le calcul financier et le marketing.

–  Comme vous le signifiez dans votre formule Adieu les prolos, vives les bobos, vous décriez un cinéma français, coupé des réalités, depuis quand dure cette situation ?

Deux moments essentiels : la Nouvelle Vague qui début années 60 rompt avec le cinéma populaire fondé sur la multiplicité des personnages issus « des gens sans importance » au profit de leur imaginaire à l’inverse issu de la bonne bourgeoisie, et la rupture postérieure aux années 90 d’un jeune cinéma francais-type Desplechin- qui met en scène de jeunes « bobos » citadins, de préférence parisiens, dans des intrigues intimistes, des épopées minuscules évacuant les classes populaires et la logique du nombre.

–  Votre livre est un procès-verbal sur l’ingratitude du cinéma français pour bien des comédiens français, faut-il une prise de conscience des metteurs en scène, ou déplorer une absence de curiosité ?

Il s’agit bien d’une absence de curiosité dans un environnement dominé par les logiques marchandes et la superficialité d’une approche « people ». 

ENCYCLOPÉDIE DES LONGS MÉTRAGES FRANÇAIS DE FICTION 1929-1979

Ceux qui chérissent « L’histoire du cinéma français 1929-1970 » en 7 volumes de Maurice Bessy, Raymond Chirat et André Bernard, vont pouvoir se réjouir avec la sortie du premier volume d’une incroyable filmographie du cinéma français parlant, 1929 – 1979, établie par Armel de Lorme et toute une série de collaborateurs. Le livre est préfacé par Raymond Chirat. Le résultat est impressionnant, avec la sortie du volume 1, allant des films « À belles dents » à « L’Ampélopède ». C’est une mine d’informations érudites et exhaustives, on trouve des informations inédites sur des grands classiques comme « À bout de souffle », mais aussi de films méconnus, comme « À l’ombre d’un été », film inédit en salles de Jean-Louis Van Belle, avec Maurice Ronet. Je recommande vivement aux amateurs d’acquérir et d’encourager ce travail important, basé sur une documentation impressionnante et le visionnage attentif et minutieux des films disponibles. Sur le site de « L’aide-mémoire », vous trouverez plus d’informations ici. C’était l’occasion de pour s’entretenir avec un cinéphile hors norme, iconoclaste, passionné et passionnant, Armel de Lorme :

– Qu’as-tu fait au cours des quatre ans ayant séparé la sortie du premier volume de « L’@ide-Mémoire – Encyclopédie des Comédiens » évoqué ici, de celui de L’Encyclopédie des Longs Métrages ?

J’ai vécu… poil aux oreilles.

– L’amour c’est gai, l’amour c’est triste ?

Exactement. En fait, avec le recul ces quatre années se sont écoulées de manière extrêmement rapide. J’ai dû voir quelque chose sept cents ou huit cent films que je ne connaissais pas encore, en ai revu à peu près autant, et ai surtout réalisé un projet qui me tenait terriblement à cœur depuis longtemps et consistait à développer un @ide-Mémoire « audiovisuel » sous forme de documentaires ou de films expérimentaux. C’est fait.

– Tu penses au portrait filmé de Nathalie Nattier visible sur « Dailymotion » ?

Oui, mais pas seulement. En fait, cette série de films a été inaugurée par un premier docu sur la comédienne Solange Sicard, qui a été l’un des premiers professeurs d’art dramatique en France à enseigner aux apprentis comédiens à « jouer cinéma », ce que ne faisaient à l’époque ni René Simon ni Pierre Renoir, ni les autres… Sous l’Occupation, elle a littéralement « découvert » Suzanne Flon, qui était alors vaguement démonstratrice (mais déjà secrétaire de Piaf), Simone Signoret qui avait trouvé une planque à la rédaction du journal de Jean Luchaire, et Juliette Gréco qui avait seize ans, sortait à peine de prison et ne savait pas trop quoi faire pour gagner sa vie… Flon, Gréco, Signoret : on peut imaginer pire comme triplette. Donc, avec Gauthier Fages, mon coréalisateur, et avec le soutien de la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé, que je ne remercierai jamais assez, nous avons commencé à rencontrer et à filmer les anciens élèves de Sicard : Nicolas Bataille, Paul Bisciglia, Jean-Pierre Mocky, Jean Pommier… Nathalie Nattier a accepté de nous recevoir à Narbonne, où elle s’était retiré avec son mari, Robert Willar, qui nous a quittés depuis, et à peine reparti(s) de chez elle, j’ai dit à mon coréalisateur et à l’assistante qu’il fallait mettre le Sicard entre parenthèses… et la gomme sur Nathalie, que j’avais trouvé formidable de classe, d’humour et de présence à l’écran tout au long de l’interview. Ce soir-là, en visionnant les rushes, j’ai eu la confirmation immédiate de cette première intuition, et nous avons effectué le premier montage sitôt rentrés à Paris, Gauthier ayant eu entre temps l’idée de travailler le grain de l’image pour lui donner un aspect « vintage » qui me plaît beaucoup à l’arrivée. Ensuite, grâce à Nicolas Bataille, lui aussi parti depuis, et à Jacques Legré, nous avons eu la possibilité de filmer 75 ou 80 comédiens ayant interprété le « Spectacle Ionesco » sur la scène de la Huchette entre 1957 et 2007 à l’occasion des commémoration du cinquantenaire de La Cantatrice Chauve et de La Leçon. Je crois qu’à part Brigitte Fontaine, que nous n’avons pas réussi à joindre, Dominique Labourier avec laquelle nous ne sommes pas parvenus à poser de dates par téléphone, Bernard Larmande qui devait être occupé à tourner une pub « 3ème âge » genre Phytalgic, parce qu’il n’a jamais rappelé, et Laurent Terzieff (regrets éternels) qui a successivement dit oui, non, pas sûr, peut-être, et finalement non, nous avons eu tout le monde ou presque.

– Des noms ?

Très volontiers. Je ne peux pas tous les citer, tu t’en doutes, mais parmi ceux qui m’ont le plus marqué… Marcel Cuvelier, bien sûr, Andrée Damant, Jacques Nolot, Guy Pierauld, Hélène Rodier, Isabelle Spade… Lucienne Hamon, l’ex-compagne et scénariste de Robert Enrico, qui s’est tapé un aller-retour Saint-Michel-Nanterre pour venir poser trois minutes et demi devant notre objectif… l’espiègle Françoise Bertin, dont j’ai pu apprécier dans un contexte pas forcément évident l’intelligence, l’à-propos et les grandes qualités de cœur… Danièle Lebrun, pour laquelle le mot « photogénie » semble avoir été inventé et qui possède assurément le plus beau regard de tout le cinéma français… Josiane Lévêque et son humour ravageur… Uta Taeger, à laquelle nous avons rappelé entre deux prises l’existence de son premier et unique 45 tours – du punk dix ans avant l’heure – dont nous étions (et sommes encore) tous les deux fans, mon coréalisateur et moi, plein d’autres… Deux filles incroyables, que j’oubliais, Pinok et Matho, qui nous ont gratifié d’un numéro de mime hyper millimétré à décoiffer une armée de chauves… Monique Tarbès, qui ne s’est pas aimée à la projection, c’était son droit, et a demandé – mais avec humour et courtoisie – à ne pas figurer dans le montage définitif (là encore, regrets éternels)… une actrice dont je tairai le nom, mais qui nous a fait un Alzheimer, un vrai, en direct, le genre de truc facile à gérer quand tu n’es pas préparé à…, d’autres qui n’avaient pas fait de cinéma ou de télévision depuis les années 60 et que nous avons en quelque sorte fait redébuter à l’écran, comme l’immense Nell Reymond que j’adore, et qui tient à la fois d’Hortense Schneider, d’Yvonne Printemps et de Mistinguett… À l’arrivée, après un premier montage effectué dans l’urgence et jugé peu probant, Gauthier, toujours lui, a eu l’idée de retravailler entièrement l’image sur un mode plus expérimental, et de commander une mini-BO, expérimentale elle aussi, à l’une de ses amies musiciennes. Du coup, il existe désormais deux versions : celle d’origine, qui fait une heure, et la version « sépia », ramenée à quinze ou seize minutes et davantage conforme à ce que nous voulions. C’est à ce moment là que Christophe Bier m’a appelé en renfort sur le projet CinÉrotica, qui m’a, mine de rien, occupé durant plus de six mois, et dans le même laps de temps, j’ai entamé sur le tard une carrière (quel grand mot !) d’auteur dramatique, en écrivant et publiant à la suite plusieurs pièces, dont certaines ont été ou sont en train d’être mises en lecture. Il paraît d’ailleurs qu’on dit plutôt « séances d’écoute », maintenant. Plus un roman qu’il faut que je reprenne de A à Z : dans l’état actuel des choses, il n’y a guère que le titre – St. Drome de Stockholm – et un chapitre qui me plaisent vraiment, le reste est à entièrement à retravailler, bref… Tout ceci m’a conduit lentement mais sûrement fin 2008, à peu près au moment où est sorti le premier numéro de CinÉrotica.

– On y revient…

Et pour cause… C’est à ce moment-là que j’ai pris la décision de publier sur le mode alphabétique mes 500 premiers comptes rendus de visionnages de films, entièrement remis en forme pour l’occasion… Ensuite, en voyant le projet prendre forme, et sur les conseils de mon imprimeur qui ne trouvait spécialement très judicieuse l’idée d’un pavé de 800 pages, j’ai opté pour deux (premiers) volumes séparés…

– Quelle est la méthodologie de ton travail, recherche d’archives, visionnages, temps passé, etc. ?

Ma méthode rejoint autant que faire se peut le propos et l’intention de départ, et consiste en priorité à tout voir et/ou revoir, ce, tu t’en doutes, dans les limites du « visible ». De ce point de vue-là, c’est vraiment le circuit habituel du cinéphile (ou phage, au choix) : diffusions sur le câble (avec une offre, malheureusement de plus en plus restreinte et de moins en moins intéressante), vhs, dvd, parfois vod… J’imagine que c’est plus simple pour moi que pour Raymond (Chirat) ou Vecchiali, qui ont commencé à tenir leurs fichiers cinéma respectifs à une époque qui ne connaissait rien de tout cela, et surtout pas la fonction « arrêt sur image ». Avec à l’arrivée, tu t’en doutes, l’immense frustration de n’avoir pas avoir accès à tout, pour des questions de droits ou simplement de coûts. Pour ce qui est des archives, je me repose à la fois sur un fichier double (6000 films/8000 comédiens des deux sexes) tenu depuis 1993, finalement assez comparable à ceux tenus depuis 70 ans par Raymond, à cette différence près que les miens sont intégralement informatisés, d’un fonds films de 5000 titres en vhs ou dvd constitué au fil du temps, et d’un fonds iconographique de 4000 photos dont la majeure partie m’a été offerte par l’ex-régisseur général Jean Pieuchot en 2004. En ce qui concerne les visionnages, je tourne à un ou deux films par jour, en sachant que, mine de rien, j’ai commencé – pas au berceau ou presque – il y a 17 ou 18 ans. De fait, ne serait-ce la nécessité de tout revoir, notamment pour rétablir les génériques les plus complets possible et rédiger les résumés, l’intégralité de ce projet pourrait être publié en deux ans. Dans l’état actuel des choses, et compte tenu du fait que je déteste bâcler, je me fixe plutôt l’horizon 2014 ou 2015 pour boucler ce premier inventaire. Après, je m’attaquerai probablement aux années 80… À moins que je ne recommence à tourner des documentaires ou que je ne me décide à me consacrer pleinement à mes activités de jeune auteur dramatique. Une seule chose est certaine, au moment précis ou je te parle, c’est que sauf imprévu ou accident, je bouclerai quoi qu’il arrive l’inventaire 1929-1979… la suite, ce sera en option.

 

– Comment as-tu identifié les seconds rôles et autres seconds rôles – Raymond Chirat cité dans la préface Marguerite de Morlaye par exemple –, y compris dans les années 30, ce qui n’est pas une mince performance…

Comme je l’explique dans l’avant-propos du Volume 1, Raymond, que je connais depuis le milieu des années 90, m’a branché dès notre première rencontre rue du Colisée, sur ces seconds et troisièmes couteaux qu’il affectionne entre tous, les Brizard, Francomme, Marceau, Vissières, Yvernès, les trois Albert (Broquin, Brouett, Malbert), Geo Forster, Anna Lefeuvrier, Marie-Jacqueline Chantal, Marguerite de Morlaye… Pour la plupart d’entre eux, il m’a indiqué le ou les film(s) dans le(s)quel(s) il était impossible de les rater (Malbert dans Les Dégourdis de la 11ème et Le Corbeau, Mme de Morlaye dans Remontons les Champs-Élysées et Le Roi, Marie-Jacqueline Chantal dans L’Habit vert…), ensuite, la fréquence des apparitions à l’écran de la plupart d’entre eux a fait le reste. Par la suite, Christophe Bier (encore lui) m’a permis de familiariser avec bon nombre d’incontournables Eurociné, comme Étienne Jaumillot, Robert Leray (déjà doublure de Gabin dans les années 30) ou Pierre Taylou, et c’est en grande partie grâce à Gilles Grandmaire que je suis peu ou prou incollable, depuis douze ou treize ans, sur Madeleine Bouchez, Yvonne Dany, Édith Ker ou Raymonde Vattier. Depuis, j’ai découvert d’autres comédiens, dont je ne soupçonnais pas l’existence, venus pour certains d’entre eux de la figuration mondaine, ou du roman-photos, pour ne rien dire des doublures lumière d’artistes de premier plan, que l’on retrouve parfois, voire souvent, devant la caméra, à l’image de Georges Fabre et de Jacques Pisias, doublures respectives, dans la durée, de Louis de Funès et d’Alain Delon ou de Dany Jacquet qui, entre deux petits rôles, doublait à la fois Brigitte Bardot, Romy Schneider et, je crois, Mireille Darc. Ajoute à cela le fait d’avoir réuni, notamment grâce à Jean Pieuchot dont il a été question plus haut, un fond iconographique conséquent sur lequel je continue de m’appuyer, et une mémoire cinéphilique visuelle plutôt solide. Ce qui est plutôt drôle, lorsqu’on me connaît et que l’on sait que dans la vraie vie, je suis absolument incapable de reconnaître ou de resituer la plupart des gens que je croise, même si je les ai rencontrés la veille. À part les comédiens… bizarrement… Cela étant, ça peut être bien, éventuellement, de rappeler que ce projet encyclopédique n’est pas seulement un inventaire de dix-huitièmes couteaux connus de moi seul. Je parle de films et de réalisateurs, quand même… J’insiste.

 

– Justement, tu mentionnes avec beaucoup de précision, les « copies actuellement visibles », tel l’exemple de Maurice Baquet qui disparaît dans la diffusion du ciné-club de « France 2 » de « Gueule d’Amour ». Les films diffusés actuellement le ne sont pas forcément dans les versions d’origine. Peux-tu nous en parler et notamment la notion des copies d’exploitations ?

C’est un peu compliqué, il n’y a pas de véritable règle. Il m’arrive simplement très souvent de revoir un film que j’ai déjà vu ou revu et de me dire « Tiens, il manque une scène ». Dans le cas précis de Gueule d’Amour, j’étais au téléphone au moment du début de la diffusion sur France 2, dont pas tout à fait disponible. Je n’ai véritablement revu que les deux derniers tiers, et, le film terminé, j’ai réalisé que Maurice Baquet, dont je me rappelais très bien la scène, vue plusieurs fois, et le rôle (un soldat se faisant poser des ventouses dans le dos par René Lefebvre), était passée à la trappe. Je me suis repassé en accéléré le dvd que je venais de graver – toujours pas de Maurice Baquet ni de ventouses – et ai fini par ressortir ma vhs du commerce, où la séquence en question figurait bel et bien, ainsi qu’une autre scène (Gabin se faisant draguer par une midinette dans la rue) y faisant immédiatement suite dans le montage initial. Maintenant, te dire précisément pourquoi il existe des différences d’une version à l’autre dans le cas de ce titre précis… J’imagine que l’actuel ayant-droit a récupéré une copie d’exploitation incomplète sans savoir qu’une version longue existait, cela arrive tout le temps… C’est vrai pour Gueule d’Amour, ça l’est aussi pour Les Jumeaux de Brighton, dont la version intégrale, assez longue, du prologue, ne semble figurer que dans la copie présentée par la Cinémathèque en 1993 (j’ignore même si elle figure dans le dvd, le métrage donné laissant plutôt penser que c’est la version écourtée qui vient d’être commercialisée), ou La Reine Margot de Dréville, dont la version longue est quasiment invisible depuis 1955. Pour d’autres films, en revanche, on connaît un peu mieux les raisons faisant qu’il existe des versions alternatives ou de durée variable. Les Vacances de Monsieur Hulot, par exemple, vient de ressortir dans sa version d’origine, invisible depuis 1953. Dans ce cas précis, on sait que Jacques Tati a entièrement remonté son film en 1978, tournant à cette occasion une séquence clin d’œil aux Dents de la mer (le bateau se transformant en requin) tellement raccord que tout le monde la croyait contemporaine du reste du film, mais supprimant dans le même temps quatre scènes jugées superflues a posteriori. Sinon, je pourrais te parler pendant des heures des films de l’ex-Catalogue Télédis, dont un bon tiers n’est visible aujourd’hui – je ne saurais te dire s’il faut attribuer les coupes en question à feu Maurice Bessy – que dans des copies mutilées, parfois en dépit du bon sens : Les Perles de la Couronne, dont vingt minutes sont passées à la trappe mais pour lequel un négatif d’origine – 120 mn contre 100 actuellement – subsiste(rait) à Bois-d’Arcy ; La Maison du Maltais, dont l’intrigue devient presque incompréhensible lorsqu’on ignore qu’initialement, à mi-film, le personnage joué par Dalio expédiait dans l’autre monde, afin de prendre sa place à la tête du gang, le chef de bande qui l’avait recruté dès son arrivée de Sfax ; De Mayerling à Sarajevo, où Raymond Chirat conserve un souvenir très précis d’une apparition-éclair de Louis Florencie, disparue depuis… Dans un tout autre ordre d’idée, il est également arrivé que des films multidiffusés par l’ex-bouquet TPS Cinéma l’aient été dans des versions sensiblement différentes que celles programmées quelques années auparavant sur Cinéclassic. Je pense au Défroqué de Léo Joannon, où une scène de conseil de famille, figure bien dans la version Classic mais pas dans la version Cinétoile, ou, ce qui est encore plus curieux, aux deux montages différents de Souvenirs perdus, permutant d’une version à l’autre, l’ordre et la place des sketches interprétés par Yves Montand et par François Périer, l’actrice Gaby Basset, interprète furtive du premier sketch, n’apparaissant quant à elle que dans la seule version « Cinétoile ». La liste est longue, comme tu peux le constater…

 

– Jacques Prévert avait inventé la formule « menteur comme un générique », reprise souvent par Bertrand Tavernier, l’as-tu souvent vérifié ?

Pas tout le temps, mais presque… Je plaisante… En fait, oui, ça arrive parfois, cela va du nom mal orthographié ou du prénom erroné – Germaine Clasis au générique de La Bête humaine, au lieu de Charlotte Clasis, Madeleine Ducouret (elle se prénommait Marguerite) dans Les Inconnus dans la maison – à l’omission pure et simple. Au générique des fresques historiques de Guitry, par exemple, seul Pierre Montazel est crédité au poste de directeur de la photographie, alors que l’on sait de façon formelle que c’est Roger Dormoy qui a dirigé les éclairages de la deuxième époque de Si Versailles m’était conté… et ceux de la première époque de Napoléon. Dont les génériques artistiques sur copie sont eux-mêmes partiellement erronés : Georges Chamarat joue bien La Fontaine, et non Boileau, dans Versailles, contrairement à ce qu’annonce le générique « copie ». Dans Napoléon, Louis Arbessier figure le maréchal Berthier et Jean Marchat le grand-maréchal Bertrand, alors que le générique et les distributions mentionnent généralement le premier en tant que maréchal Bertrand et le second comme général Bertrand. Donc, ne pas systématiquement tenir pour acquises les infos « première main » et se fier plutôt à sa mémoire visuelle… Je pense à deux autres films aussi, revus récemment, dont les distributions quasi complètes données par les génériques de fin sont erronées en ce qui concerne la majeure partie des petits rôles : Copie conforme et Le Dernier Tournant. Il y a tellement d’erreurs à l’arrivée qu’on pourrait croire que les crédits acteurs ont été placés dans un chapeau avant d’être tirés au sort… Il arrive parfois aussi que des comédiens intégralement coupés au montage, voire remplacés à la dernière minute, figurent quand même au générique parce que les contrats signés avec la production le leur garantissaient noir sur blanc. Or, quel que soit le cas de figure, le problème avec les erreurs, c’est bien qu’elles restent… Enfin, pour ne pas faire mentir Prévert, il existe une autre forme de mensonge, elle nettement plus grave, qui a conduit la France de Vichy, à « nettoyer » certains génériques de films, non rétablis depuis pour la plupart d’entre eux, d’artistes jugés indésirables au nom de lois de triste mémoire. Soixante ans plus tard, tu peux toujours chercher le nom de Jean Témerson au générique de Volpone (Maurice Tourneur, 1940) ou celui de Claude Dauphin sur celui des Petits Riens (Raymond Leboursier & Yves Mirande, 1940), le nom de Jules Berry, affiché sur le même carton que celui de Dauphin, ayant disparu par la même occasion. Le seul éditeur à avoir fait, dernièrement, un effort méritoire en ce sens, est René Château, qui a fait figurer sur le dvd de Grisou, sorti il y a quelques mois, les deux génériques, celui d’origine et celui expurgé des acteurs et techniciens d’origine juive. Ce qui nous conduit à une autre forme de mensonge, elle beaucoup plus légitime dans un contexte qui ne l’était pas, puisqu’elle a permis à des artistes mis à l’index de continuer à exercer leur profession : je pense en particulier aux fameux prête-noms de Trauner et Kosma au générique des Carné-Prévert tournés sous l’Occupation, ou au fait que Jean-Paul Dreyfus-Le Chanois ait pu exercer, à la même époque, ses activités à la Continental sous un pseudonyme dûment aryanisé… qui a fini par lui rester.

– Internet est une mine d’informations, par exemple j’avais rajouté une ébauche de fiche sur IMDB de « Aimez-vous les uns, les autres », resté inédit, trouvé dans un Ciné-Revue de 1972, qui te permet de le faire figurer dans ton livre. Mais tu évoques aussi les erreurs telles qu’Armande Navarre qui est dans IMDB citée comme pseudo de l’actrice Amarande, alors que c’est une actrice bien distincte. Quel crédit alors donner dans cette jungle d’informations et de hoax.

En ce qui concerne Aimez-vous…, dont j’ai retrouvé le titre, et donc appris l’existence, une semaine exactement avant le bouclage du Volume 1, autant dire que c’était moins une, j’ai immédiatement vérifié l’info sur les CV professionnels de plusieurs interprètes toujours en activité, où ce titre méconnu apparaissait bel et bien. J’ai également cherché, sans succès, à retrouver le réalisateur, Daniel Moosmann, afin d’obtenir par lui un complément d’informations, et au final, ne sachant pas d’où pouvait provenir la fiche IMDB, j’en ai parlé à Gilles Grandmaire qui m’a confirmé, le fameux numéro de Ciné-Revue à l’appui, que ce film inédit avait bel et bien été tourné en 1972. Pour ce qui est de la confusion Armande Navarre/ Amarande, j’ai mis du temps à comprendre le pourquoi du comment. Armande Navarre a tenu vers 1968 un rôle récurrent, pour la Télévision, dans un feuilleton intitulé La Prunelle, aux côtés de Claude Jade. Pour des raisons que j’ignore, le catalogue des fictions télé volume 1 édité pat Dixit a attribué le rôle en question à Amarande, ce qui a vraisemblablement conduit un petit malin à supposer qu’il s’agissait, sous deux pseudonymes différents, d’une seule et même actrice. Ensuite, l’info ayant été mise en ligne sur IMDB, elle a, comme c’est toujours le cas, été reprise absolument partout. Sur ce coup-là, je dois être l’un des rares, avec Gilles Grandmaire, à ne pas avoir donné dans le panneau. Au final, j’ai quand même pris la peine de téléphoner à Amarande, qui m’a avec beaucoup d’humour laissé entendre qu’elle avait eu vent de cette confusion, qui commençait du reste à l’agacer prodigieusement, et a demandé au cours des semaines suivantes à l’un de ses proches de faire le nécessaire auprès de Wikipedia. Qui a depuis novembre 2009 rendu à Armande Navarre ce qui appartenait à Armande Navarre et à Amarande ce qui revenait à Amarande. En revanche, l’erreur perdure à ma connaissance sur de nombreux autres sites spécialisés… Donc, pour revenir à ta question, toujours prendre les informations avec des pincettes, essayer d’apprendre à discerner ce qui est crédible ou pas, et ne pas hésiter à faire appel aux souvenirs des principaux intéressés aussi souvent que faire se peut. Pour l’anecdote, la semaine dernière, j’ai passé une demi-heure au téléphone avec Jacqueline Caurat, afin de faire le point avec elle sur la filmographie de son époux disparu, Jacques Mancier, qu’Encyclociné créditait depuis peu d’une demi-douzaine de courts métrages dans lesquels il n’a, à ma connaissance, jamais figuré. J’ai eu la chance de tomber une personne délicieuse, disponible, parfaitement au fait de la carrière de son mari en ses moindres détails et qui a démenti la totalité des informations « douteuses » que je lui soumettais. D’après ce que j’en sais, la photo d’un comédien indûment présenté comme Jacques Mancier aurait quelque temps circulé sur Internet, et serait à l’origine de cette erreur vite passée aux pertes et profits. Cela posé, Internet m’a, dans le même temps, permis de lier virtuellement connaissance, avec les responsables de plusieurs sites spécialisés, presque aussi maniaques que moi (c’est dire…) dans leur recherche de l’exactitude, et avec lesquels les échanges de courriels s’avèrent particulièrement fructueux. Là, c’est un véritable plaisir…
 

– Quel est l’apport de Raymond Chirat dans ton livre, qui fait suite aux formidables informations de ses dictionnaires, parus dans les années 80 ?

Et même le milieu des années 70 en ce qui concerne la période 1929-1950 ! Ce sont effectivement ses travaux, dans leur apport (indéniable) comme dans les lacunes (inévitables) qui m’ont permis de poser les premiers jalons de ma ligne éditoriale : élargir aux coproductions avec l’étranger (l’ouverture s’imposait, je crois, en ces temps de questionnement pas du tout opportuniste, mais alors pas du tout, sur l’identité nationale), aux versions multiples tournées aux débuts du Parlant, aux films partiellement français tournés à l’étranger, aux années 70, surtout, pour lesquelles tout restait encore à faire en terme d’inventaire, au cinéma érotique aussi… Pour en revenir aux seuls génériques artistiques des films mis en chantier entre 1929 et 1970, je me suis évidemment appuyé sur les travaux publiés de Raymond (quitte, parfois, à le contredire), mais également sur la correspondance suivie que nous avons échangée, lui et moi, tout au long des années 90, sachant que je suis devenu moi-même, avec le temps, un « familier » des comédiens qu’il m’a permis de découvrir il y a dix ou quinze ans. Pour le reste, je continue de faire appel à lui, de façon ponctuelle, sur les points pour lesquels je ne suis pas tout à fait sûr de moi, et de son côté, il m’a promis de m’envoyer une série d’ajouts et corrections inédits afin de compléter au mieux les génériques du premier volume que nous n’avions pas eu le temps de pointer avant publication. Mais, au-delà des seules informations d’ordre factuel, le plus beau cadeau que Raymond m’ait fait, sur ce projet, reste quand même d’avoir immédiatement accepté d’en signer la préface. Comme il a été l’initiateur de ce type de travaux, en France, et qu’il est aussi celui, avec Philippe Arnaud, à m’avoir le plus soutenu et encouragé lors mes premiers pas dans la profession, et dans la durée, je tenais vraiment à ce que ce soit lui, et personne d’autre… Prière exaucée !

 

– Comment as-tu travaillé avec ton équipe composée de Christophe Bier, Italo Manzi, Gilles Grandmaire, etc… ?

Plutôt bien, comme pour L’@ide-Mémoire, dont j’ai pu reconstituer à quatre ans d’intervalle – et une exception près – le noyau dur, augmenté pour l’occasion de Gilles Grandmaire que je connais et apprécie depuis 1996. Tous, au-delà de cinéphilies comportant chacune sa part de spécificité, sont des êtres généreux (j’insiste sur ce vocable), disponibles, éclectiques et précis, avec pour point commun supplémentaire le fait de  ne pas du tout se prendre au sérieux et même de détester, d’une manière générale, les historiens, spécialistes et chercheurs pétant notoirement plus haut que leur cul. De ce point de vue-là, nous nous sommes tous plutôt bien trouvés. Christophe a eu un rôle ultra-déterminant dans ce projet, puisque c’est, je ne le dirai jamais assez, la parution du premier volet de son Dictionnaire des Longs Métrages érotiques et pornographiques en supplément dans CinÉrotica, qui m’a servi de déclic : je rêvais de mon Encyclopédie depuis quinze ans, mais c’est après avoir eu ce premier fascicule entre les mains que j’ai commencé à « visualiser » mon propre projet dans sa totalité… et dans la durée. Pour le reste, comme il savait que je tenais à ce que la production érotique et pornographique française mise en chantier jusqu’au 31 décembre 1979 figure en bonne et due place dans cette encyclopédie, Christophe m’a généreusement permis d’utiliser la matière première des notules établies par lui et par d’autres, sur son propre projet, sachant que je ne toucherai en aucune manière à l’aspect « critique » de ce travail, qui resterait ainsi une sorte d’exclusivité. Dans un deuxième temps, son apport a été d’ordre ponctuel : il m’a sigalé quelques films peu connus manquants dans la première liste que je lui avais soumise, comme À bride abattue, coproduction franco-vénézuélienne peut-être diffusée dans le Bordelais, ou une production franco-ivoirienne de Désiré Écaré, qui vient de disparaître, intitulée À nous deux, France. D’autre part, la dernière fois que nous nous sommes parlé lui et moi, Christophe m’a dit vouloir rapatrier de province des « films racontés » retrouvés dans des cartons, qui permettront de fournir des résumés plus précis d’œuvres totalement invisibles et, éventuellement, d’identifier des comédiens supplémentaires sur photos. Je suis assez impatient de découvrir tout ça. En ce qui concerne Italo, son apport s’est borné, si l’on peut dire, à compléter à partir de ses archives les génériques techniques et artistiques de quelques productions franco-italiennes, comme Accroche-toi, y’a du vent !, dernier film, entièrement tourné à Rome, de Bernard-Roland. Il m’a par ailleurs été d’un apport infiniment précieux en ce qui concerne les productions tournées en double, triple ou quadruple versions au cours des premières années du Parlant, comme Les Amours de minuit ou Les Amours de Pergolèse. Quant à Gilles Grandmaire, il m’a très généreusement fourni ses comptes-rendus de visionnage sur une douzaine de films auxquels je ne suis pas encore parvenu, à ce jour, à avoir accès, comme Aimez-vous les femmes ?, L’Amant de cinq jours ou L’Amour à la chaîne. D’autre part, tous les trois, à l’instar de Raymond, continuent, depuis la parution du Volume 1, à me signaler des incomplétudes détectées ça et là… Il est une dernière personne dont je tiens absolument à parler, c’est Stéphane Boudin, déjà présent, plus discrètement, sur L’@ide-Mémoire et qui cumule sur ce premier opus consacré aux films les fonctions (bénévoles) de maquettiste et d’intendant. C’est lui aussi qui, en marge d’une activité professionnelle plutôt prenante, s’occupe de la conception, de l’habillage et du lancement de mon site Internet, au fur et à mesure de l’arrivée des textes que je lui livre. Comme nous venons à peine de démarrer et que je tiens à initier en même temps les cinq ou six principales rubriques, notamment un hommage aux disparus récents et un Dictionnaire critique des Films destiné à compléter la publication papier, il n’a quasiment plus le temps de dormir, ni même de s’alimenter, c’est une horreur… Je plaisante… Pour être plus sérieux, au moins trente secondes, je crois que sans lui, tous ces projets ou presque seraient demeurés des vœux pieux, et rien de plus. Ils ne le savent pas forcément, mais les cinéphiles lui doivent beaucoup…

– Tu as choisi de ne pas mettre d’illustrations et de ne pas passer par la diffusion en librairie, pour quelle raison ?

Dans les deux cas, pour de simples questions de coût de fabrication. En ce qui concerne ce premier tirage du Volume 1, la moitié du budget de départ a servi à régler l’imprimeur, l’autre à acquérir le maximum de films, que ce soit en dvd, en vhs d’occasion ou en vod, puisque l’idée initiale était de voir ou de revoir tout ce qui est ou avait été visible à moment donné. Acheter des droits photos, ou avoir recours à un relecteur professionnel, aurait nécessairement impliqué le fait ou bien de traiter certains titres « en diagonale », ce que je ne souhaitais pas, ou alors d’augmenter le prix de vente du livre d’une quinzaine d’euros, ce que je ne souhaitais pas non plus. Pour le reste, ce seront les ventes des premiers volumes qui me conduiront (ou pas) à réviser les choix adoptés au démarrage. Au-delà d’un nombre stable de 500 lecteurs « réguliers » – encore faut-il pouvoir les toucher –, je devrais pouvoir envisager à la fois la possibilité de faire appel à un correcteur et une présentation moins austère. Encore que cette idée de mur de titres, initialement motivée par le manque de moyens, me plaît bien à l’arrivée. En fait, plus j’y repense, plus je me dis que l’absence d’iconographie donnera davantage au lecteur le désir de voir ou de revoir les films… J’ai envie de faire le parallèle avec les pièces de théâtre que l’on met en lecture : moins on en montre, plus les décideurs ayant pris la peine de venir ont envie de reprendre le projet à leur compte, et ce n’est finalement pas plus mal. Pour ce qui est de la diffusion confidentielle, c’est un peu pareil : je respecte profondément les libraires, tous les libraires – sauf peut-être le directeur de la librairie Contacts qui ne s’est pas spécialement bien comporté au moment de la sortie de L’@ide-Mémoire en 2006 – mais il m’est, dans l’état actuel des choses, impossible de faire face à la fois aux marges exigées par la plupart d’entre eux, mêmes si elles m’apparaissent légitimes en soi, et au coût de fabrication des premiers tirages. L’équation est très simple au fond : le coût de chaque livre fabriqué est inversement proportionnel au nombre d’exemplaires tirés. Sur des tirages en petites quantités, une fois l’imprimeur réglé et la marge libraire habituelle défalquée du prix de vente, il te reste en théorie à peine de quoi acheter un kébab – même pas un paquet de cigarettes par trente – et encore moins de quoi rémunérer, fût-ce symboliquement, les contributeurs réguliers. Donc, à ce stade initial du projet, je préfère vendre en plus faible quantité, mais engranger dans le même temps suffisamment d’argent pour financer la suite dans des conditions décentes : l’impression du Volume 2, dont la rédaction est quasiment achevée, l’accès à la soixantaine de films restant à visionner pour les Volumes 3 et 4… En même temps, à l’heure où je te parle, les choses sont en train de changer et il semble qu’un partenariat privilégié avec une grande librairie spécialisée, sur Paris, soit sur le point de se mettre en place au cours des mois à venir. Tout est question de patience, au fond… hélas…

 

– Quelles sont les premières réactions depuis la sortie de ton livre ?

Écoute, plutôt bonnes dans l’ensemble… C’est le gros avantage des ouvrages fabriqués de façon… on va dire artisanale : les lecteurs ont eu affaire à toi, donc ils se manifestent plus volontiers que lorsqu’ils ont se sont procuré leur exemplaire via la FNAC ou Amazon. Sur L’@ide-Mémoire, j’avais eu, si mes souvenirs sont bons, quelque chose comme deux tiers de retours – généralement élogieux – sous forme de courriers, de mails, d’appels téléphoniques et même de textos. Pour ce qui est de L’Encyclopédie des Longs Métrages, il est encore trop tôt pour tirer un premier bilan, mais je sais que Carole Aurouet, Gérard Lenne, Lucien Logette (Jeune Cinéma), Jean-Claude Romer et quelques autres ont aimé et me font d’ores et déjà une très bonne presse auprès de leur entourage professionnel et/ou amical. Il faudra absolument que d’autres sommités prennent le relai, si je veux pouvoir mener la totalité ce projet à terme, mais ça a l’air bien parti pour… Inch Allah… De toute façon, on se retrouve d’ici deux mois pour le Volume 2, non ?

… En bonus « Le communiqué de presse » :

Après une mise en sommeil de près de quatre ans et le tournage de trois documentaires, le site Internet de L’@ide-Mémoire (www.aide-memoire.org), consacré au cinéma français patrimonial, renaît dans une mise en scène flambant neuve, au moment même où paraissent les deux premiers volumes d’une Encyclopédie des Longs Métrages de fiction produits et/ou tournés en France entre 1929 et 1979.

La démarche se veut exhaustive, qui nous a conduits à – et par la même occasion permis de – voir ou revoir quasiment tous les films diffusés sur les supports les plus divers (diffusion hertzienne, câble, VHS, DVD, VOD…) entre 1996 et aujourd’hui.

Cet inventaire se voulant exhaustif reprend le principe même des célèbres Catalogues de Raymond Chirat (qui en a signé la préface), dûment revisités, étendus aux années 70 et augmentés de la présentation des productions érotiques et pornographiques sur la période retenue, des œuvres à diffusion restreinte ou inédites, ainsi que des coproductions étrangères « délocalisées » en France (Hollywood, Grande-Bretagne, Allemagne, Italie, Espagne…).

Au final, près de 6.000 titres couvrant l’intégralité des cinquante premières années du parlant en France seront traités in extenso sur une quinzaine de volumes, dont un peu plus des deux tiers à partir de visionnages effectués sur copie, les informations fournies étant autant que faire se peut complétées par le dépouillement méthodique des sources écrites à notre disposition, elles-mêmes agrémentées de sources orales et des réminiscences cinématographiques des divers contributeurs.

Le premier tome (346 pages / 24 x 16 cm) , recensant les 262 premiers films (d’À belles dents à L’Ampélopède) ainsi qu’une sélection de courts métrages, est paru le jeudi 17 décembre (nous mettons à votre disposition un bon de commande via le site www.aide-memoire.org), et sera suivi d’un deuxième volume courant mars 2010, la sortie du troisième étant prévue pour septembre 2010. En outre, un second tome de L’@ide-Mémoire – Encyclopédie des Comédiens, consacré aux interprètes de Sacha Guitry, est prévu pour juin prochain, dont le site se fera peu à peu la vitrine au cours des mois à venir.

Afin de fournir aux cinéphiles et aux professionnels un aperçu de ce premier volume, les notules des dix premiers films présentés ont été mise en ligne au format PDF (www.aide-memoire.org/notules%2010%20films.pdf) sur notre site, ainsi que l’index alphabétique des longs et courts métrages présentés (www.aide-memoire.org/index%20films.pdf).

Pour tout renseignement complémentaire, n’hésitez pas à nous contacter via l’adresse qui suit : aide-memoire@club.internet.fr

Cordialement,

Armel de Lorme, Christophe Bier, Stéphane Boudin, Raymond Chirat, Gilles Grandmaire, Italo Manzi.

Trois extraits du premier en date des films coproduits par l’@ide-Mémoire et Homeworks
(Nathalie Nattier, la plus belle fille du monde) sont accessibles en ligne via les liens suivants :
http://www.marcel-carne.com/equipecarne/nattier/nattier-biographie.html

www.dailymotion.com/video/x8zqk7_nathalie-nattier-les-portes-de-la-n_shortfilms

ARRÊT DE CINÉROTICA

Cinérotica s’arrête avec son quatrième numéro paru en kiosque. Les abonnés ont reçu cette nouvelle accompagnée d’un texte de à lire sur Zine. C’est l’occasion d’interroger son instigateur Christophe Bier, sur la fin – provisoire – d’une formidable aventure. Un grand merci à Christophe pour ses propos passionnants et à Laëtitia Mélierres pour ses photographies.

Christian Chauvaud & Christophe Bier, tournage pour YouTube – © Laëtitia Mélierres

 

 

 

 

 

  

Genèse de Cinérotica : 

  

– Peux-tu évoquer l’élaboration de « Censure –moi, histoire du classement X en France« , aux éditions de l’Esprit frappeur, un livre de référence paru en 2000 ?

 

A l’époque, Baise-moi venait de sortir en salles, interdit aux moins de 16 ans, avec ensuite toutes les difficultés dont les médias se sont fait l’écho. Une association conservatrice, Promouvoir, traquant les bédés érotiques dans les Fnac, homophobe et pour la « préservation des valeurs de l’Occident chrétien », tout cela mérite un [sic !], voit rouge et  conteste l’exploitation du film en vertu de l’article Jolibois, le 227-24 du code Pénal, stipulant que « le fait soit de fabriquer, de transporter, de diffuser par quelque moyen que ce soit un message à caractère violent ou pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine, soit de faire commerce d’un tel message, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 75000 euros d’amende lorsque ce message est susceptible d’être vu ou perçu par un mineur. » Bref, pour ces tenants de l’ordre moral, Baise-moi tombe bien sous le coup de cet article puisqu’il comporte des scènes sexuelles explicites mais est autorisé à des mineurs de 16 et 17 ans. Il faut savoir que depuis que Jack Lang avait fait ramener à 12 et 16 ans les interdictions aux mineurs de 13 et 18, la seule manière d’interdire aux 18 ans le film de Despentes et Coralie était de le classer X ou de l’interdire totalement. Le classement X qui est ipso facto une interdiction aux moins de 18 ans existait et existe toujours bien qu’au cinéma il n’y ait plus un seul porno. J’ai donc voulu raconter ce problème et surtout rectifier un certain nombre d’âneries publiées à l’époque et qui montraient au mieux l’ignorance au pire le mépris, ou les deux, dont bénéficiait le cinéma porno. Il a été dit que Baise-moi était le premier film censuré depuis « La Religieuse » de Rivette sans que personne ne s’offusque de ce mensonge ! Et La Comtesse est une pute ? Et Langue de velours ? Et Prostitution clandestine ? Et Les Petites Filles et un millier d’autres films pornos qui furent classés X de 1976 à 1992, entraînant la ghettoïsation d’un genre, son appauvrissement et sa disparition lente, qu’est-ce que c’est sinon une censure économique et politique ? C’est donc pour rappeler au souvenir de tout ce patrimoine du cinéma français, honorable selon moi, victime d’une censure implacable, que j’ai écrit ce livre qui a toutes les apparences d’un Que sais-je ? Informatif, historique mais qui est aussi très polémique. C’est quasiment un pamphlet qui reprend des idées reçues sur la censure, dénonce des positions hypocrites. On entend souvent : je suis contre la censure, mais… Ce qui sous-entend qu’il y aurait une littérature ou un cinéma noble et un autre qui serait… ignoble et pouvant être censuré. Oui au Fleurs du mal, non à C’est bon la bite ! Oui à La Religieuse non à Inonde mon ventre qui serait censé ne pas être du cinéma donc indigne d’être défendu. Le silence assourdissant des intellectuels et des critiques de cinéma pendant les presque vingt ans d’action de la loi X les ont rendus complices – et beaucoup s’en félicitent peut-être – de la mort d’un genre cinématographique. L’Esprit Frappeur, qui appartient au groupe de la NSP, l’éditeur de Cinérotica, était l’éditeur engagé idéal pour éditer ce petit livre. Et c’est comme cela que j’ai rencontré Michel Sitbon, l’éditeur, lequel s’est plus tard courageusement lancé dans l’aventure de Cinérotica.

  

© Laëtitia Mélierres

 

 

  

– Comment s’est faite la promotion de la revue, tu as fait preuve d’inventivité notamment avec des clips sur You tube ?

 

Nous avons engagé une attachée de presse que je connaissais bien, Karine Durance. Elle avait longtemps travaillé pour la chaîne câblée Ciné Cinéma, elle avait aussi fait la promotion du long métrage et du coffret DVD de HPG. Elle avait toute sa place pour faire connaître au mieux Cinérotica. Et sur ce plan-là, on ne peut qu’être satisfaits car nous avons rencontré un très bel accueil critique. Libération, Nouvel Obs, Paris Match, Brazil, Siné Hebdo, Technikart, Les Inrocks dont nous avons fait, modestement, la couverture avec Obama ! Des sites comme Bakchich, le blog d’Aurélien Ferenczi dans Télérama, d’autres. Nous avons bénéficié de quelques soutiens spontanés sur les forums spécialisés comme La Cochonne, DevilDead, la liste est longue… Les clips sur You Tube, c’était un clin d’œil que nous nous sommes offert. Je m’en suis occupé personnellement avec des amis qui m’ont tous aidés bénévolement. Disons que c’est un cadeau que j’ai offert à mon éditeur, ça n’entre pas dans son budget promotionnel. Il a juste réglé la facture du costume de cardinal que je porte. C’est Jean-Claude Guillosson qui tenait la caméra, faisait le cadre et a fait le montage. Il a été extraordinaire de gentillesse et de compétence. Un autre copain, Dominique Forma, tenait la perche alors qu’il avait dirigé Jeff Bridges à Hollywood dans un excellent polar, Scenes of the Crime ! J’ai écrit les spots, choisi les acteurs et on a tourné tout cela en une journée dans les bureaux d’Yves Riquet, un personnage étonnant qui a sauvé un des derniers métiers à tisser français fabriquant de véritables bas couture. C’est un fétichiste du bas couture, vous comprenez… Et un amoureux du strip-tease ! Je ne peux que m’entendre avec des gens comme lui ! Et j’ai demandé à des amis acteurs de venir comme Christian Chauvaud qui est un habitué de chez Mocky, Raphaël Scheer, un auteur strasbourgeois dont j’ai joué déjà deux pièces et qui est un excellent acteur – l’homme ivre, c’est lui -, Manon Desgryeux, Murielle Rivemale. Xavier et Marie ne sont pas comédiens mais l’une, en chienne de garde, l’autre en candidat du quizz, ont aussi été parfaits. J’ai même eu le luxe d’avoir une photographe de plateau, Laëtitia Mélierres qui m’avait déjà beaucoup aidé sur un précédent documentaire. Franchement, j’ignore quel fut l’impact de ces spots, mais on s’est bien tous amusés à les tourner. Et j’ai offert à chacun une magnifique paire de bas couture de la production Riquet. C’est le minimum que je pouvais faire pour les remercier tous.

 

– Combien de temps as-tu mis avec tes collaborateurs pour arriver à définir ton dictionnaire des longs-métrages érotiques et pornographiques ?

 

Nous y travaillons depuis presque dix ans. Francis Moury est mon plus ancien collaborateur. Les autres sont arrivés au fil des ans. J’ai défini le contenu du dictionnaire et sa forme. Le travail n’est pas fini ; il doit rester deux cents films à chroniquer. Avec Cinérotica, nous faisions quelques réunions pour discuter principalement sur les titres tangents. Faut-il Hiroshima mon amour ? Faut-il Irréversible ? Et à ces réunions, je venais toujours avec les copies vidéos des films érotiques ou pornos qui restaient à faire et on se les répartissait ensemble. 

 

 

Tournage pour YouTube – © Laëtitia Mélierres

  

– Comment as-tu choisi tes collaborateurs, tous des érudits ?

 

Certains sont déjà bien connus des cinéphiles. Par exemple Jacques Zimmer qui fut rédacteur en chef de La Revue du Cinéma qui publiait la Saison tous les ans et grâce à laquelle les films pornos avaient droit au même traitement critique que les autres films. D’ailleurs, l’un des meilleurs défenseurs du porno dans la Saison, Alain Minard, a rejoint le dictionnaire il y a un an environ. Patrick Meunier en est un autre de la Saison mais il signait sous un autre nom ; il y a Jean-François Rauger, programmateur de la Cinémathèque française ; Gilles Esposito, qui vient notamment de Mad Movies ; François Cognard, un ancien de Starfix devenu depuis producteur de cinéma ; Frédéric Thibaut travaille à la Cinémathèque de Toulouse où il anime Extrême Cinéma et écrit pour Brazil (le professeur Thibaut, c’est lui) ; Italo Manzi est un critique argentin vivant à Paris et féru de cinéma français des années 20-30 ; Richaud d’Ombasle, c’est Monsieur troisième couteau du cinéma français, un maniaque des filmographies exhaustives, auteur de L’@ide-Mémoire ; Emmanuel Levaufre vient de La Lettre du cinéma ; Herbert P. Mathese, c’est l’auteur d’un incroyable bouquin sur Benazeraf ; et il y a des jeunes auteurs très prometteurs comme Edgard Baltzer, 25 ans seulement et l’érudition d’un vieux cinéphile qui a tout vu ! J’ai aussi eu la chance de rencontrer cet été Hervé-Joseph Lebrun, un réalisateur qui s’intéresse aussi beaucoup au cinéma porno gay sur lequel peu de choses passionnantes et détaillées ont été écrites jusqu’à présent. Dominique Forma et Francis Moury, déjà cités, Pierre-Arnaud Jonard, Maxime Delux dont l’écriture précise et iconoclaste me ravit, Didier Dhuique, Frédérick Durand qui est un écrivain canadien… Tous ont été choisis pour la rédaction du dictionnaire parce qu’ils savaient écrire sur l’érotisme et la pornographie sans se moquer du sujet, sans condescendance, sans cette prétention si répandue à vouloir démontrer combien le rédacteur est supérieur au film qu’il commente, qu’il n’est pas dupe. Le second degré qui tient office généralement d’avis est proscrit. Et pour le magazine Cinérotica, je suis heureux d’avoir rencontré Frédéric Tachou, encore un dont le travail remet en cause les idées reçues sur le porno clandestin longtemps paresseusement colportées sans un véritable travail de recherche qu’il est le seul à accomplir en ce moment, et comme Lebrun, c’est aussi un réalisateur qui porte donc un regard de cinéaste sur son sujet, ce qui est toujours très enrichissant pour nous lecteurs. Et dans le n°4, je suis fier d’avoir enfin la plume féminine que je désespérais de trouver : Britt Nini, une pionnière dans le domaine puisqu’elle faisait partie de l’équipe fondatrice du mythique Sex Stars System. 

  

– Quelle était la méthode de travail, on est stupéfait devant la masse d’informations des pseudonymes aux stock-shots ?

 

Chacun a apporté son regard personnel et ses connaissances. Quand on le pouvait, on est entré en contact avec les protagonistes. Un exemple parmi d‘autres, Edgard Baltzer a correspondu avec Catherine Ribeiro qui s’est exprimé librement sur sa participation au film le plus méconnu de sa carrière, Ils sont nus de Claude Pierson. Pour ma part, j’ai fait tout le travail de dépouillement des archives du CNC, la consultation des dossiers de censure, parfois riches d’information, même s’il faut être très prudent avec ses infos administratives. Mais le plus intéressant sont les commentaires mêmes de la commission de censure que j’ai reproduits chaque fois qu’ils étaient circonstanciés. Nous sommes à l’affût de la moindre info, des archives de production consultables. Encore récemment, j’ai hérité de quatre classeurs d’archives des productions Hustaix qui avaient échappés au déménagement de ses bureaux vers 1988, treize ans après la mort du bonhomme. J’y ai découvert les contrats de techniciens et d’acteurs qui m’ont permi d’établir des fiches techniques et artistiques encore plus complètes que les génériques. L’essentiel reste la vision des films : une fois le stock des titres édités en VHS françaises épuisés, nous avons fait jouer le réseau des collectionneurs européens, pour profiter de copies allemandes, italiennes ou anglaises. L’un de mes contacts achète aussi des copies 35 de films rares dont le dictionnaire profite ensuite : c’est ainsi que j’ai pu visionner et commenter sur pièce la version hardifiée sous le titre de Clodo et les vicieuses du dernier film de Bourvil, Clodo dont on ne connaissait en vidéo que la version originelle ! Mais il reste toujours des films mystérieux, qui résistent aux recherches, c’est une quête sans fin !

  

– Quels critères sur le choix des films disponibles en VOD sur le site internet ? 

 

On s’efforce de choisir des strip-teases et des pornos clandestins représentatifs de leur époque ou au contraire très particuliers, proposant une certaine originalité. 

 

 

Christophe Bier – à droite – en Monsieur Cinéma – tournage pour UTube – © Laëtitia Mélierres

  

  

L’arrêt de la revue : 

  

– Peux-tu nous évoquer la raison de l’arrêt de ta revue, 40 000 exemplaires étaient pourtant distribués ?

 

D’abord, il ne faut pas caricaturer et tout rejeter sur une raison : la revue s’arrête parce qu’il n’y a pas assez de lecteurs. Nous n’avons pas encore les vrais chiffres du 3, du 4 non plus évidemment. Mais il y avait environ 3400 lecteurs qui achetaient la revue en kiosque et presque 300 abonnés. Le contraire aurait été préférable et viable. J’ai rencontré des lecteurs désolés de cet arrêt et qui m’expliquaient qu’ils allaient s’abonner. C’est trop tard ! Aujourd’hui, la presse est un secteur en danger. Personne ne l’ignore, la crise de la presse est largement commentée dans les médias. Quand une nouvelle revue sort en kiosque, qui plus est lorsqu’elle est pointue et originale comme Cinerotica, il faut – si l’on est vraiment intéressé – immédiatement s’abonner. C’est l’évidence ! C’est un risque à prendre même. Après, il ne faut surtout pas se plaindre que la revue s’arrête.  

  

– Y avait-t-il des problèmes de distribution, des freins des services de presse, et des difficultés pour trouver un éditeur ?

 

Problème de distribution ? On peut surtout parler d’un problème de diffusion. Cinerotica était distribué par les MLP. J’ai l’impression qu’ils n’ont rien fait pour mettre en valeur et promouvoir la revue. Ça ne les intéresse guère. Après il y a les dépôts partout en France ; parfois c’est une mafia. A Grasse par exemple, un kiosquier a plusieurs fois réclamé au diffuseur des Cinérotica et ne les a jamais eus… Pourquoi ? Le distributeur se fout de faire correctement son boulot, à moins de servir la soupe aux grands éditeurs. Faut-il donner des pots de vin pour avoir son magazine bien mis en évidence ? Je me pose la question ? Enfin, il y a les kiosquiers… Vaste problème ! Je ne veux pas en fait le bouc émissaire idéal, ce serait facile ! Ils ont leur problème, sont submergés par le papier, visiblement aussi par les problèmes financiers… Il n’empêche que beaucoup d’entre eux ne font pas correctement leur boulot. Je l’affirme car j’ai eu des témoignages sur certains comportements inqualifiables. D’abord, il y a ceux qui cherchent à décourager le client, lui affirmant qu’ils ne connaissent pas la revue, ne voient pas ce que c’est ; si le client insiste très lourdement, le kiosquier finit par lui sortir Cinérotica ! Ça s’est vu ! Encore plus fort, une autre fois dans une maison de la presse, le type est parti en réserve chercher le numéro : il ne l’avait absolument pas exposé ! Comment voulez-vous que des petits éditeurs s’en sortent avec des habitudes pareilles ! On n’a pas les moyens d’envahir les points de vente d’huissiers pour faire des constats de refus d’exposition ou de vente, c’est impossible ! Je crois aussi que Cinerotica a décontenancé des kiosquiers : la revue était trop particulière. Une revue de cul intello, ça dépassait leur entendement. Nous voulions être dans le rayon cinéma, à côté de Mad Movies par exemple, mais le kiosquier gère son kiosque comme il l’entend. Beaucoup l’ont mis dans le charme. Remarquez, pourquoi pas, c’est préférable que de rester en carton. J’ai aussi constaté que certains commencent à faire le ménage deux semaines avant la fin de l’exploitation, pour « faire de la place ». Considérant la revue « invendable », ils la mettent en carton en invendu avant même la fin du mois ! Je vous fais part de mes indignations, mais hélas il semble que tout cela soit très banal dans le monde de la presse. Voilà de quoi décourager les éditeurs…

  

– As-tu eu des difficultés avec la censure, ou une certaine morale bien pensante, à l’instar de la suppression de la page Facebook de Cinérotica ?

 

Pour continuer sur le kiosquier, ajoutons effectivement des menaces. Récemment, rue Léon dans le XVIIIème à Paris, l’un d’eux est arrivé le matin et a découvert sur son kiosque, par-dessus les publicités pour Union et un autre magazine érotique des affichettes sous forme de faire part (avec des bordures noires) rappelant les termes de l’article 227-24 du Code Pénal et signé « Papa et Maman en colère ». C’est de l’intimidation qui peut influencer le comportement des kiosquiers les plus trouillards. On ne peut pas leur en vouloir si ce genre de choses se propageait. On salope leur kiosque et en plus on les menace de prison et d’une amende salée s’ils font commerce d’un message porno pouvant être vu par un mineur ! C’est le fait d’associations conservatrices, comme celle qui avait poursuivi Baise-moi en 2000. Plutôt que de lutter contre la pornographie dont les effets néfastes restent toujours à démontrer, il faudrait s’inquiéter de la montée de ces intégristes qui, la nuit, recouvrent les murs de la ville de leur menace.

 

 

tournage pour YouTube – © Laëtitia Mélierres

Côté Service de presse, nous n’avons pas trop eu à nous plaindre. Le succès critique a été très grand. Toutefois, c’est vrai, quelques journalistes qui avaient adoré Cinérotica n’ont pas pu défendre notre revue au sein de leur rédaction. Un rédacteur en chef adjoint d’une très populaire revue de cinéma s’est vu opposer un refus catégorique de sa rédactrice en chef au motif de la pornographie ! Mais oui, Cinerotica parle de pornographie, quel est donc le problème, c’est interdit ? C’est indigne ? Il faut le croire… Cela ne gêne pas certaines revues d’exploiter l’érotisme, de surfer même sur l’idée de porno, en l’occurrence de porno chic, mais en aucun cas il faut saluer une entreprise plus frontale – en un mot plus honnête – comme Cinérotica ! Un autre hebdomadaire important a aussi refusé d’en parler, alors que l’article du critique était rédigé. C’est encore une rédactrice qui a bloqué. Des femmes qui ont des postes importants ne comprennent rien à la pornographie, la considèrent comme dégradante et font un authentique acte de censure morale. Des hommes tombent aussi dans ce travers par sympathie « féministe ». La suppression de la page Facebook en revanche n’est peut-être pas un cas de censure, mais répond aux limites de leur charte. Toujours est-il qu’il m’a fallu plusieurs mails pour obtenir une réponse complète de Facebook. Le site considérait notre profil comme « professionnel » et nécessitait donc un autre traitement. 

  

– Que deviennent les soirées Carré blanc, présentées sur CinéCinémaClub, en partenariat avec ta revue, et qui a participé aux choix de ces films (« Les onze mille verges », « Calmos », « Collection privées ») ?

 

Les choix étaient du ressort du programmateur Bruno Deloye, de CinéCinémaClub. La chaîne continuera dans l’érotisme mais notre partenariat cesse évidemment. 

  

– J’imagine ta déception. L’arrêt de ton dictionnaire va beaucoup frustrer les cinéphiles, peut-il ressortir sous une autre forme ou un autre support ?

 

Non, il ne faut pas être déçu. C’est une expérience qui a au moins permis de faire découvrir notre travail et l’ampleur de notre ambition. J’ai donc décidé d’achever le dictionnaire cette année. Le but est d’en faire un livre, un pavé de 800 pages illustrées, cousu et relié. Un ouvrage de luxe. Je me suis donné jusqu’en mars pour discuter avec des éditeurs. Passée cette date, si aucune proposition sérieuse n’est avancée, j’éditerai seul avec l’aide d’un ami partenaire cet ouvrage. Nous mettrons neuf mois à le finir, le temps d’une grossesse au cours de laquelle une souscription sera proposée à un prix très attractif. J’attends des devis d’imprimeurs, donc je ne peux pas encore donner de prix. Il faut patienter. Donc, tous ceux qui brûlaient d’envie de savoir ce qu’était Zob, zob, zob, le dernier titre du dictionnaire se rassurent : édité ou autoédité, le Dictionnaire sortira. Je les invite à se tenir au courant, surtout dans le cas d’une auto-édition avec souscription. Déjà, ils peuvent nous envoyer leurs adresses postales et mails à : cinerotica@free.fr. Je leur dis à très bientôt, courant mars pour des nouvelles. 

 

  tournage pour YouTube – © Laëtitia Mélierres

 

  

– Y a-t-il une action pour sauvegarder les copies de ces films, ou risquent-ils de disparaître un jour ?

 

Ce genre méprisé mériterait en effet un plan de sauvegarde. Déjà, plusieurs cinémathèques ont pris conscience de ce patrimoine et sauvegardent les films pornos, mais beaucoup de titres ont certainement disparu. Le genre a trop été dans les mains de marchands de soupe qui n’avaient cure du patrimoine et du respect de l’œuvre. Les premiers à mépriser la pornographie furent souvent, hélas, ceux qui la finançaient, parfois même qui la réalisaient. Les copies 35 exploitées jusqu’à la corde furent revendues, détruites pour économiser des frais de stockage, remontées pour faire de nouveaux films-gigogne. Lorsque la vidéo fit son apparition, c’est le master vidéo qui est devenu la référence, sans plus se soucier des copies. Quant aux négatifs, certains dorment dans les labos dans une indifférence générale. Je voudrai faire un rêve : un plan de financement gouvernemental pour un état des lieux du patrimoine pornographique français, suivi de mesures financières pour des restaurations massives. Mais vous imaginez cela possible ? Au moins, après le Dictionnaire de 800 pages, plus personne ne pourra dire que le cinéma porno français est négligeable. Il apportera la preuve de sa richesse, de ses différences et coupera court à tous les discours généralistes des pornophobes. 

  

– Les films pornos restent-ils « Mauvais genres » malgré leurs diffusions TV et vidéo ?

 

Oui. Car la loi X est maintenue. Cela signifie que si un jour John B. Root a envie de tourner en HD un film porno pour le cinéma, il ne bénéficiera jamais de la nouvelle interdiction aux moins de 18 ans (celle de la ressortie de baise-moi) mais sera automatiquement classé X. Donc, le cinéma porno continue d’être censuré, interdit dans les salles puisqu’il n’y a plus de salles (à part le Beverley à Paris). Concernant les diffusions TV, ce qui est approuvé, du moins sur des chaînes du groupe Canal +, c’est un certain type de pornographie, une pornographie BCBG en quelque sorte, corsetée par des interdits stupides qui infantilisent le genre. B. Root, toujours lui, a contourné la difficulté en réalisant des doubles versions. Très habilement, il a commercialisé en vidéo sa « director’s cut » d’Inkorrekt(e)s et a fourni à Canal + une version expurgée qu’il a ironiquement intitulée Korrekt(e)s. Un autre problème crucial qui révèle le mépris et le refus de considérer la pornographie comme un genre qui a une histoire : sous le prétexte idiot de lutter contre le sida, tous les films tournés sans préservatifs dans les années 70-80 tendent à disparaître des programmations. On considère à la fois le cinéma porno comme un produit de consommation jetable dont il faut promouvoir uniquement les « produits » les plus récents et aussi comme ayant des devoirs pédagogiques. Tout cela vide le genre de sa force transgressive. Le cinéma porno n’a jamais eu de vocation pédagogique. Si aujourd’hui tous les films doivent utiliser des préservatifs, c’est uniquement pour protéger les comédiens et non pas pour donner un message éducatif. De même les pornophobes reprochent parfois une pornographie violente, mais elle n’a pas forcément la vocation d’être douce, mièvre, de symboliser l’image d’un bonheur béat. On dit encore que cela détourne les jeunes de l’amour parce que l’amour y est ridiculisé au profit du sexe. Mais là encore la pornographie n’a pas à être au service d’une idéologie unique qui serait celle de l’amour, de la fidélité. Et en quoi l’amour serait à privilégié dans l’éducation des jeunes par rapport à la découverte d’une sexualité sans sentiment ? Je m’arrête là car je peux être intarissable sur ce sujet. Je vous conseille simplement un livre remarquable du philosophe Ruwen Ogien : Penser la pornographie au PUF. Il fait le point et démonte de manière remarquable, à la lumière de l’éthique minimale, tous les arguments des pornophobes.  

  

– Après « Eurociné », « Les nains au cinéma », et « Cinérotica » et la réalisation de documentaires, quels sont tes projets ?

 

Eh bien, ce Dictionnaire donc qui me prendra beaucoup de temps. Mais aussi un documentaire sur Daniel Emilfork qui est en bonne voie et dont j’espère commencer bientôt le montage. J’ai déjà fait les interviews de la fille d’Emilfork, Stéphanie Loik, de Pierre Philippe, de Jacques Baratier, Jean-Claude Dreyfus, Jean-Louis Roy qui réalisa un extraordinaire Inconnu de Shandigor avec l’un des plus beaux rôles d’Emilfork, Daniel Mesguich et Claudie Ossard, la productrice de La Cité des enfants perdus.

ENCYCLOPÉDIE CINÉROTICA

Michel Ciment se plaignait dans l’éditorial de Positif d’octobre dernier, de l’hommage de la Cinémathèque fait à Jésus Franco, démontrant qu’il fallait installer une échelle de valeurs. Il ironise sur Max Pécas ne pouvant prétendre à être reconnu sérieusement dans l’avenir, selon lui on n’y devrait ne saluer que des grands maîtres. Une réponse involontaire est faite par Christophe Bier, avec la sortie au début de ce mois du second numéro de la revue pour lequel il est rédacteur en chef « Cinérotica ». On connaît l’amour pour les cinémas de la marge de ce chroniqueur sur France Culture dans l’émission « Mauvais genre » – des « nains au cinéma » aux films de la firme d’Eurociné -.  Comme disait Jean-Luc Godard, c’est « La marge qui tient le cahier ». Ce mensuel fait donc suite à son livre paru en 2000 « Censure-moi – Histoire du classement X en France – « Collection « L’esprit frappeur », 2000 -. Il nous rappelait les agissements du comité de censure – et ses commentaires ! -, et qu’entre « La religieuse » (Jacques Rivette, 1966) à « Baise-moi »  (2000), « depuis 25 ans, la loi X ne se contente pas de « protéger » les mineurs : elle pénalise très lourdement ceux qui fabriquent, produisent et émettent des images interdites. Du coup, tout un genre cinématographique a disparu ». Un évènement, car avec une équipe de rédacteurs érudits – Jacques Zimmer, Richaud d’Ombasle, Edgard Baltzer, François Cognard, etc… -, il nous livre une somme consacrée, sous la forme de 24 fascicules – 1 par mois –  à un panorama de l’érotisme à la pornographie dans le cinéma français. Chaque numéro comporte un dossier, par exemple le premier sur le cinéma des années 30 – on découvre au final qu’il est assez déluré, sans l’équivalant du Code Hays américain – et « Les pornos primitifs 1900-1950 », et le deuxième sur le cinéma des années 50 – Dany Carrel, Françoise Arnoul dont le parcours est encadré par deux nudités de « L’épave » (1950) à « Post-coïtum, animal triste » (1996), Martine Carol et bien sûr Brigitte Bardot. On s’amusera à l’évoquation de l’ineffable Nadine Tallier fouettée par Juliette Gréco dans « L’homme et l’enfant » (Raoul André, 1958) . L’iconographie est remarquable, et aguicheuse. Il convient de saluer son grand oeuvre « Le dictionnaire du cinéma érotique et pornographique français des longs métrages en 16 et 35 mm » – dix ans de travail ! – proposé en 24 fois dans un cahier central. Soit plus de 1000 pages recensant plus de 1700 titres – les films référencés sont ceux uniquement présentés en salle, on ne retrouvera donc pas ceux diffusés en vidéo et à la télévision -, d' »A bout de sexe » à…  « Zob, zob, zob » ! – il conviendra d’attendre presque deux ans pour lire cette dernière note. Des « auteurs » y sont salués de José Benazeraf, Jean-Pierre Bouyxou, Alain Payet, Jean-Daniel Cadinot pour le porno gay, etc… On se régale déjà aux deux premiers morceaux de cette encyclopédie. C’est une mine d’informations avec des génériques les plus complets possibles – ce qui est remarquable pour le cinéma pornographique dans la jungle des pseudos -, des résumés, des avis critiques, des notes informatives, des dates de sorties avec les salles d’exclusivité, des titres alternatifs – étrangers, vidéos,et même ceux refusés par la censure -… Le tout est très riche en anecdotes, citons Georges Séguy, en meeting pour la « vie ouvrière » qui se retrouve involontairement dans « Adolescente pervertie » (José Benazeraf, 1978)…. On retrouve aussi bien quelques réjouissances du genre aux titres incroyables – comme « L’aubergine est bien farcie » (sic) -; mais aussi des grands classiques – L’âge d’or » de Luis Buñuel, « Les amants » de Louis Malle -. Mais on retrouve aussi quelques films mineurs comportant quelques polissonneries – « Ah ! les belles bacchantes » (Jean Loubignac, 1954), qui vient d’être rediffusé sur France 3 – « Adam est… Ève » (René Gaveau, 1953) avec Jean Carmet, et également des films bien oubliés des dictionnaires comme le franco-luxembourgeois « L’amour, oui ! mais… » (Philippe Schneider, 1969), avec Roland Lesaffre et Sabine Sun. On retrouve aussi des commentaires complets, qui vont faire le regal de ceux qui s’amusaient à lire les comptes rendus des films pornographiques dans « La saison cinématographique » de films pornos aux traditionnels, sans hiérarchie, n’en déplaise à Michel Ciment. Le projet est déjà salué avec ferveur par Charles Tatum, et son excellent blog Le vieux monde qui bouge, Christophe Lemaire dans le numéro 11 de Brazil nouvelle formule, par Bernard Joubert dans « Sinéhebdo » qui s’amuse de ces « censeurs qui se sont tapés 1700 films de cul ! ». Souhaitons bon vent à cette entreprise salutaire, passionnée et émoustillante ! On peut signaler aussi des petits spots de pub désopilants sur Youtube 1, Youtube 2 – avec Christian Chauvaud, acteur fétiche de l’univers de Jean-Pierre Mocky – et Youtube3 notamment. Christophe nous signale que sa revue est disponible dans certaines librairies comme celle de la « Cinémathèque de Paris », « Le Regard Moderne », rue Gît le Coeur et la librairie de cinéma rue Monsieur le Prince (Paris).Vous pouvez également visiter le site officiel Cinérotica.fr. qui propose de larges extraits de la revue en format PDF et même des VOD – des codes sont disponibles pour les lecteurs pour les retrouver -. Indispensable ! Dans cet ordre d’idée signalons aussi l’excellent livre d’Herbert P. Mathese – aussi collaborateur de la revue – consacré à José Benazeraf « La caméra irréductible » (Éditions Clairac, 2007).

DICTIONNAIRE DES COMÉDIENS FRANCAIS DISPARUS D’YVAN FOUCART (NOUVELLE ÉDITION)

J’’avais évoqué ici, les meilleurs dictionnaires de cinéma, que je connaissais. En 2000, grâce à « La lettre des comédiens » de Jean-Jacques Jouve, je découvrais le dictionnaire des comédiens français disparus d’Yvan Foucart, mine incroyable d’informations de 894 pages. J’évoquais souvent avec mes amis cinéphiles ce modèle de rigueur, plaignant les malchanceux de ne pas pouvoir l’acquérir car il était épuisé. On attendait vivement une réédition, en découvrant quelques nouveaux portraits dans le site d’André Siscot, « Les gens du cinéma ». Presque 8 ans après, nous découvrons avec bonheur une nouvelle édition de ce magnifique ouvrage. Les 543 portraits et 1170 noms – états civils complets -, de la précédente édition, deviennent donc 694 portraits et 2147 noms. On est bluffé de recevoir les 1186 pages de ce livre. Car mis à part une petite rubrique feu dans Ciné-Revue, le « Carnet noir » – qui n’existe plus en France après 60 ans de parutions ! – que quelques vieux schnocks atteignant leur 4ème décennie connaissaient bien, nombre de disparitions passaient superbement inaperçues. Grâce au livre d’Yvan Foucart, et les recherches de l’équipe d’André Siscot, on pouvait découvrir que l’attachant Roger Riffard était mort presque jour pour jour, en même temps que Georges Brassens. Et c’est toujours le cas, pour cette nouvelle édition, le pauvre Jean-Pierre Rambal, – professeur Plumecousin dans « Broc et Chnock » est mort en 2001, Max Vialle en 2000, etc… Évidemment avec le web, ces infos inédites se diffusent très rapidement – IMDB, Wikipédia, certains sites, etc… -, mais si on connaît ces informations, il faut bien dire que tout le mérite revient surtout à M. Foucart. C’est d’abord l’occasion de rendre à César… ce qui n’appartient pas à Alain Delon. Belge, il fait donc perdurer une tradition cinéphilique sérieuse, comme les travaux de ses compatriotes, André Siscot, Jean-Marie Lardinois, pour la revue « Stars », Bertrand Van Wonterghem « Eurobis », etc… -. Dans cette édition, nous retrouvons nos chers disparus récents – Michel Serrault, Jean-Claude Brialy, Giselle Pascal, Raymond Pellegrin, Philippe Noiret, Jean-Pierre Cassel – et hélas son grand ami Jean-Pierre Aumont, qui avait préfacé la précédente édition -, mais aussi d’autres plus méconnus – Neige Dolsky… . Citons  le sympathique Jean Droze, que l’on retrouve souvent dans les films de Louis de Funès, et dont Wikipédia disait il y a peu qu’il était « toujours vivant et à 82 ans, il prend une retraite bien méritée » ( !), alors qu’il est mort en 1995. Une mémoire du cinéma français, vous est ainsi donnée. Le livre est riche en anecdotes, si vous ne le connaissez pas, il va vite devenir votre compagnon, à la diffusion d’un film TV, ou à la lecture d’un DVD d’un film ancien ou récent. Toujours à l’affût d’un second rôle, c’est mon pêché mignon, je suis toujours à repérer une silhouette, ou une gueule, j’ai grâce à ce livre fortement progressé dans ma connaissance des acteurs, repérant un Louis Bugette, alors que croyais qu’il y avait toute une dynastie de « Bugette(s) », à l’instar des Barrymore, les dictionnaires de cinéma, le stipulant avec le prénom d’André ou Henri, alors que c’est bien le même acteur. Chaque portrait est accompagné d’une photo, formidable pour aider à identifier certains comédiens connus mais pas reconnus… La lecture des états-civils est riche en surprises, sur les noms véritables ou les années de naissance. Surprise, il n’y a pas que les comédiennes qui trichent sur leurs âges – Martine Carol, Capucine, Olga Georges-Picot -, mais aussi quelques acteurs comme Jean Lefebvre ou le coquet Howard Vernon, ce dernier se rajeunissant de 6 ans !. On retrouve les stars incontestées – Jean Gabin, Lino Ventura -, aussi bien que les excentriques du cinéma français chers à Raymond Chirat et Olivier Barrot – Julien Carette, Jean Tissier, Pauline Carton… -, leurs dignes successeurs – Michel Peyrelon, Jean-Pierre Bisson, Roland Blanche, Jacques Monod , Pierre Frag…-, des personnalités plus discrètes et souvent oubliées des dictionnaires – Jacques Hilling, Gérard Hérold, Denis Manuel, Mathilde Casadesus, Nicolas Vogel, Gabriel Gobin, Gabriel Cattand… -, de grandes voix du doublage – Sylviane Margollé, Jean Davy, Raymond Loyer.. -, des étoiles filantes – Pierre Blaise, Lyne Chardonnet, Anne Caudry, Pascale Ogier… -, des destins tragiques – Patrick Dewaere, Dominique Laffin, Françoise Dorléac… -. S’il y a un formidable travail de recherches des états civils exacts et des lieux d’inhumation – y compris en province -, il y a aussi un grand effort sur les filmographies, exhaustives même pour les très prolifiques Albert Michel ou Raymond Aimos. Dans le livre « Jeux d’auteurs, mots  d’acteurs » – « scénaristes et dialoguistes du cinéma français » 1930-1945 aux Éditions Actes Sud (1994), Philippe d’Hugues citait  une formule de Jacques Prévert, « Menteur comme un générique de film », reprise dans la préface de ce dictionnaire. Il y précisait  « La filmographie est devenue, depuis quelques années, une science précise. On peut regretter les comportements cinéphiles, passionnés et sentimentaux qui passent outre ce genre de question mais -tant pis pour la nostalgie d’antan – il est utile que nous abordions aussi l’étude des films munis de méthodes sérieuses, sinon scientifiques. La filmographie ne consiste pas à recopier les génériques de films, dont la véracité laisse perplexe ». C’est le cas ici, et il faut louer M. Foucart, de ne pas recopier sans se poser de questions la base IMDB ou les dictionnaires du cinéma français de Raymond Chirat – qui ne pouvait pas avoir vu certains films qui passent désormais sur le câble et en DVD -. Tout comme Armel de Lorme, il fait preuve d’un grand sérieux. Enfin un dictionnaire qui par sa rigueur, tord le coup à une multitude d’erreurs, et dont le plaisir de la lecture est sans cesse renouvelé. Ce livre risque d’être très vite épuisé, n’attendez pas trop, pour les modalités de commande du livre, le tirage étant limité, voir le lien suivant sur le site des « Gens du cinéma ». Indispensable en ces périodes « oublieuses » ! Tous mes remerciements à André Siscot pour la photo du livre.

LE COIN DES DICTIONNAIRES

La vision dans la librairie du dictionnaire des acteurs de Christian Dureau, dernière version, avec toujours les mêmes erreurs, et celle de Jean Tulard dans l’émission chez « F.O.G. » dans son numéro habituel de fanatique bonapartiste… face à Nicolas S., me donne l’envie de vous resservir le premier texte de mon ancien blog. Il est toujours d’actualité concernant la reprise parfois abusive de certains textes. Il est vrai les infos vont et viennent, vous avez parfois la surprise de les retrouver ailleurs, je cite il est vrai nombre d’articles de journaux, mais dans un but d’information, au moins en citant mes sources et dans un blog, donc non lucratif par excellence. Il m’arrive parfois de retrouver mes infos ailleurs, une fois sur « Wikipédia « concernant François Berléand, mais son équipe est soucieuse du droit et a supprimé cet emprunt. Reste que « Wikipédia », à l’instar d’IMDB, est source de trouvailles – il y a des infos inédites sur des seconds rôles français, grâce à un internaute je connais enfin René Hell, spécialisé dans les vieillards chenus -. Voilà que je me retrouve depuis mi-décembre à compléter aussi certaines notules, je vais finir « bredin » à continuer ainsi en plus du blog et d’IMDB – quoi que le blog en ce moment je sèche un peu vous pouvez le constater, ma source aux platitudes se tarissant un tantinet…-. Mais prenons exemple d’une société qui met en ligne un site sur « Le cinéma français », que je ne vous citerai pas et qui ne trouve rien de mieux que de piquer des infos à droite à gauche, dans le style comment créer un site sans se fatiguer. Des infos, par exemple, de mes amis Yvan Foucart, pour son « dictionnaire des disparus du cinéma français » et des photos inédites de Philippe Schroeder, participant activement au site d’André Siscot « Les gens du cinéma »  – voir les explications dans sa rubrique « News » -, se retrouvent sans vergogne intégralement reprises par quelques fumistes, qui citent juste « Ces textes sont issus de la collection des fiches de « Les gens du cinéma », sans même un triste lien ! Une pratique déloyale, indigne et désobligeante pour le travail d’autrui, alors que le propriétaire du site trouvé dans le « Whois », base des noms de domaine de l’AFNIC, est une société qui a son petit chiffre d’affaires assez croquignolet. Un site entièrement constitué « d’emprunts divers », rentabilisation optimale des touches « Control » + « C » et « Control » + « V ». Les bénévoles et autres passionnés ont donc du souci à se faire, les vautours sont là !

Trois dictionnaires du cinéma : (texte déjà paru le 25 mars 2005, dans la précédente version de ce blog)

– Dictionnaire international des acteurs du cinéma de Christian Dureau (Editions La Mascare France, 2004) »seul dictionnaire du cinéma entièrement consacré aux acteurs et actrices du monde entier », …ou plutôt auto-proclamé comme tel par Christian Dureau. Certes il y a des corrections depuis la précédente édition qui fourmillait d’erreurs, avec une préférence pour « La semaine savate » au lieu de « La semaine sainte » (Wojtek Pszoniak) erreur corrigée depuis, suite à un mail à la maison d’édition. Mais cette édition est tout aussi décevante, en premier lieu le pillage sans vergogne des fiches de « Monsieur Cinéma » (James Whitmore, Robert Loggia, Jacques Marin, Olivier Hussenot, etc… » ) ou de la rubrique de « Ciné-Revue » :  « Les immortels du Cinéma » (Bella Darvi, Michel Etcheverry, Jean Rougerie, etc…) bien sûr sans les citer, procédé particulièrement odieux, mais avec des circonstances largement atténuantes pour « Ciné Revue », pour les deux derniers noms Daniel de Belie ayant recopié littéralement les articles de « La lettre des comédiens », revue de Jean-Jacques Jouve, hélas disparue depuis. La boucle est bouclée, ironie du sort que de voler un voleur. Second lieu la notion « filmographie complète » et « principaux films » disparaissent au profit d’une « filmographie » belle manière de palier aux manques pour lecteurs hâtifs. Les filmos sont visiblement l’oeuvre d’un fumiste. Prenons un seul exemple la filmo de François Berléand on retrouve inévitablement les films de son presque homonyme François Berland – de « La galette des rois » à « Je préfère qu’on reste amis », des films jamais tournés par Berléand – « Je t’aime je t’adore », « Arsène Lupin » -, et un film cité deux fois – « Je suis votre homme » – etc… Mais le pire est encore à venir André Siscot et Yvan Foucart (deux modèles de rigueur, tordant le cou à des erreurs récurrentes , comme l’exemple de Laurent Terzieff auquel on attribuait souvent le véritable nom de Ludmilla Tcherina, par la faute d’un recopieur maladroit, erreur à la vie dure et enfin rectifiée ) ont communiqué leurs recherches d’états civils (un travail colossal) bénévolement au désinvolte sieur Dureau, qui en a pris certaines en considération et d’autres pas (Bourvil, par exemple) jetant ainsi un discrédit sur les travaux d’André Siscot, en laissant des erreurs perdurer, ce qui montre bien le côté dilettante du personnage.

Le dictionnaire des acteurs par Jean Tulard

Jean Tulard, … de l’institut

« Les Charlots sont à l’original ce qu’un joueur de tennis non classé de Romorantin est à Connors ou Mac Enroe » Tel est le style du sieur Tulard (… de l’Institut) dans son « dictionnaire du cinéma – les acteurs », . Premier temps (1984-1996) : Un style à l’emporte-pièce, une misogynie certaine (« boudins » ou autres « Teutonnes », sur de nombreuses fiches), des omissions à la pelle (qui n’a pas annoté les premières versions sur les marges?), de vagues filmos bien qu’annoncées complètes, erreurs sur les prénoms (Maurice! Dalio), confusions entre les personnes (Jill Clayburgh avec Jill Ireland, résultat Jill Clayburgh joua l’agonie de Jill Ireland dans un téléfilm, en plus il donne des idées aux producteurs !), Hélène Surgère se retrouve avec des films de Marthe Villalonga ! (« Inspecteur La Bavure »/ »Nous irons tous au paradis »/ »Trois hommes et un couffin ») les deux fiches se faisant suite dans un numéro de feu « La Revue du cinéma ».
Pour les seconds rôles aucun ajout sur les titres recopiés dans l’excellent « Dictionnaire du cinéma et de la télévision » de Maurice Bessy et Jean-Louis Chardans (dernière édition en 1966), exemple pour Robert Dalban aucun film après 1963 (même pas les célèbres « Tontons flingueurs », toujours absent de la version 2004 !) sous le fallacieux prétexte « que la plupart des films deviennent de plus en plus médiocres »! Et le Tulard (…de l’Institut !) faisait le beau chez Pivot, comme la référence des dictionnaires. Bref Bérézina, nougat et chocolat comme chantait Sophie Marceau, certains cinéphiles nommait ce dictionnaire le « Nulard », son dictionnaire des réalisateurs étant cependant plus honorable. Second temps l’arrivée d’un certain Gregory Alexandre (1999-20??), Malgré la persistance de l’ancienne formule, (« Le vicomte règle ses comptes » réalisé par Godard ! pour la filmo de Jean Yanne), l’apport de Gregory Alexandre rédacteur sur « Ciné-Live » est considérable (500 000 signes au bas mot pour l’édition 2001). La part belle est laissée aux seconds couteaux. Cinéphile passionné, je retrouve aussi son nom dans la liste de fin d’année des « fourmis » complétant le site IMDB (ouf , je ne suis pas le seul grand malade !) Grégory Alexandre nous offrant enfin un ouvrage plus digne. Il méritait des encouragements. Hélas, la septième version 2004, semble sonner le glas de sa collaboration avec Jean Tulard (…de l’Institut). Toujours pas de relecture en aval (pour les anciennes fiches, « Eugènie Grandet » réalisé par Balzac ! (filmo d’Alida Valli), « White Fang (Croc Blanc) » deviennent « White » réalisé par Fang ! (John Carradine), et des vagues mises à jour ici ou là, et pas systématiquement. Il y a peu de compléments, telle une fiche sur François Chaumette, ignorant superbement les années 60 à 90. Bref, une réédition « light », Jean Tulard (…de l’Institut) semblant avoir repris les rennes seul, hélas… Si vous avez la version 2001 de ce dictionnaire évitez de vous faire avoir, en achetant la réédition 2004.
– Que certains livres trouvent un éditeur laisse perplexe tel « Le dictionnaire des grands acteurs de séries télévisées » de Jacques Foucart, qui se contente pour le plus gros de recopier les apparitions TV du site IMDB (c’est flagrant pour les Français). Certes l’effort était louable mais ce listing est paresseux, il n’y a pas de photos, malgré la présence de seconds couteaux, aucun texte, aucun effort, aucun réalisateur. L’originalité du site d’IMDB est que de nombreuses précisions proviennent directement des internautes. Pour prendre l’exemple de ma pomme, il m’arrive de rentrer de nombreuses TV (séries et téléfilms français notamment), venant d’anciens Téléramas, « Ciné Revue » ou de génériques TV (« Antoine Rives », « Le tribunal de l’impossible », « Les cinq dernières minutes »…), histoire de sauvegarder une mémoire collective. Ces infos sont alors disponibles pour tous, tant mieux si un petit malin réussit à publier ces informations. Mais le comique de l’histoire est que l’auteur de ce livre se targue avoir passé… 10 000 heures à rechercher ses informations !. 10 000 heures à recopier IMDB, à ce compte l’achat d’une imprimante s’impose…

OMBRES ET LUMIÈRES

    

« … On aime les seconds rôles parce qu’ils nous ressemblent. Plus que les héros eux-mêmes, auxquels on aimerait ressembler, et qui dont donc plutôt des projections idéales. Par essence, le second rôle figure l’homme de la rue, le stylise, le personnalise, lui donne relief et singularité, mais ne le sublime pas. L’identification du spectateur opère donc de manière plus directe et plus immédiate – à la rigueur si le trait est trop rude ou trop peu flatteur, décidera-t-on d’y reconnaître son voisin de palier… » (Jacques Valot et Gilles Grandmaire « Stars deuxième », Édilig, 1989). Si on retrouve dans l’édition anglo-saxonne, plusieurs livres consacrés aux « heavies », « seconds couteaux », ou comédiens de seconds plan, on ne pouvait jusqu’à présent retrouver concernant les français quatre livres exemplaires, mais malheureusement épuisés – « Les excentriques du cinéma français » d’Olivier Barrot et Raymond Chirat, portraits de 250 comédiens, et livre de chevet pour moi, déclencheur d’un grand amour pour ce type de  comédiens, heureusement réédité dans « Noir & Blanc » (Flammarion, 2000), « Les grands seconds rôles du cinéma français » par Jacques Mazeau et Didier Thouart (Pac, 1984), « Stars deuxième » cité en exergue, « Le dictionnaire des comédiens français disparus » d’Yvan Foucart (Éditions Grand Angle, 2000), mine d’informations, largement reprises partout et dont on peut lire quelques portraits inédites dans www.lesgensducinema.com, en attendant une prochaine réédition. Par un hasard salutaire, deux livres sur ce sujet viennent de sortir en ce début d’année, comblant un manque évident, et proprement enthousiasmants.  

Christophe Bier avait fait une brillante chronique, il y a quinze jours, dans « Mauvais genre » sur France Culture, concernant L’aide-mémoire, encyclopédie des comédiens français et francophones de cinéma, théâtre et télévision, sous la direction d’Armel de Lorme, avec des textes de Christophe Bier, Raymond Chirat, Armel de Lorme, Tgabory Fernatos, Italo Manzi, Alain Petit et Jean Pieuchot. Ce brillant volume 1, nous permet enfin de retrouver et de découvrir, outre les vedettes d’hier et d’aujourd’hui – Jean Marais, Danielle Darrieux, Sacha Guitry, Marcel Herrand, Anouk Aimée, Jean-Paul Rouve, etc… -nombre de comédiens à la carrière régulière ou chaotiques, cantonnés dans des rôles d’officiers allemands, emplois ancillaires, gouailleurs, silhouettes, etc…. Ce livre est une mine d’informations, d’érudition, de sérieux, réalisés par des chercheurs passionnés et non par des compilateurs myopes qui se dépêchent à recopier des erreurs, suite à une lecture hâtive du site IMDB. L’auteur Armel de Lorme – il a signé un remarquable bonus hélas tronqué dans le DVD de « Mon oncle » -en signalant d’ailleurs quelques petits malins, vendant au prix fort des filmos parus dans des bonus DVD, simples copiés-collés ne faisant même pas la distinction avec la télé – je vois d’où ça vient, je retrouvé d’ailleurs quelques téléfilms des années 70 que j’avais mis sur IMDB, ce qui m’amusait beaucoup d’ailleurs -. J’ai découvert ainsi avoir colporté des erreurs récurrentes, en confondant Jacqueline Chambord avec Judith Magre, – elle se nommait Simone Chambord, à ses débuts -. Les auteurs tordent le cou aux erreurs habituelles, sachant bien que comme disait Bertrand Tavernier, rien n’est plus « menteur qu’un générique » ! Les rôles coupés au montage final sont signalés ici. On apprend que certains comédiens identifiés par Raymond Chirat à la sortie des films, ont proprement disparus dans les copies que nous pouvons voir, à l’exemple de Rudy Lenoir absent des « Portes de la nuit » dont « il manque une vingtaine de minutes par rapport à la durée d’origine » !

On se régale à retrouver les acteurs fétiches de Jean-Pierre Mocky – Jean-Claude Rémoleux, Jean Abeillé, Gaby Agoston, Rudy Lenoir, Antoine Mayor le « Rondo Hatton » français  -, les personnages hantant les films de Jacques Tati, et choisis avec minutie- Nicole Régnault, faisant un come-back tardif dans « Brice de Nice » ! -, Rémoleux à nouveau, Louis Jojot, Jean-Pierre Zola, Nicolas Bataille, Betty Schneider, Yvonne Claudie, Lucien Frégis, Edouard Francomme -, de destins tragiques – Pascale Ogier, Jean-Marc Tennberg -, des cascadeurs-comédiens – André Cagnard, Guy Delorme, Michel Berreur -, stars de cinéma bis – Véronique Vendell, Sabine Sun -, de comédiens truculents jouant les utilités dans les comédies françaises, souvent avec Louis de Funès – France Rumilly, Micheline Bourday, Max Montavon -, retrouver les excentriques du cinéma français chers à Chirat – Marcel Pérès, Jean Ozenne, Gabrielle Fontan, Jean Témerson, Aimos, Marguerite Pierry, Édouard Delmont, Alfred Adam -, et le retour des excentriques du cinéma français, pour la génération suivante – Georges Adet, Jacques Rispal, Jean Ozenne, Charlotte Barbier-Krauss, la sympathique Madeleine Barbulée, Florence Blot, nombre de comédiens attachants –Gabriel Jabbour, Darling Légitimus, la grand-mère de Pascal, Marc Mazza, Michel Peyrelon dont je déplorais, ici même,  le silence à sa mort, etc…- , les actrices fétiches de Paul Vecchiali – l’incroyable Paulette Bouvet, mère de Jean-Christophe, Germaine de France, Denise Farchy -, des sympathiques « Madeleine » : Bouchez, Cheminat, Clervanne, Damien, Marie, femmes menues, que l’on confond parfois -, de femmes confinées dans des emplois acariâtres ou autoritaires – Helena Manson, Marianne Borgo, Jeanne Herviale -, des comédiens souvent sous-utilisés – Jacques Herlin, Edith Scob, Catherine Lachens -, de destins « avant-garde et grands voyageurs » – Kiki de Montparnasse, Gina Manès, Florence Marly, Conchita Montenegro, Reggie Nalder, Enrique de Rivero, et Howard Vernon, avec cerise sur le gâteau une interview « long-drink » très mordante de ce dernier -, et de beaux hommage aux disparus récents, certains évoqués ici-même – Suzanne Flon, Maurice Baquet, Henri Génès, Paul Le Person, Pierre Trabaud, etc… -.

Ces visages vous les connaissez tous, sans pouvoir toujours les identifier. Cet une magnifique hommage pour ces comédiens, éternels non crédités, où figurant au générique de fin, que l’on ne peut désormais même plus lire dans un passage télé tant il est minuscule, tronqué ou passant à la vitesse « grand V ». Même si le cinéma d’hier et d’aujourd’hui ne vous intéresse que modérément, c’est aussi l’occasion de retrouver des destins tragiques, romanesques, singuliers, une masse d’informations inédites, vous saurez par exemple à quel occasion Jean Abeillé a été le dernier partenaire de Brigitte Bardot. Difficile de citer tous le monde, tellement ce livre est foisonnant, vous pouvez retrouver la table des matières via le forum de Dvdclassik. Personnellement je rêvais pouvoir avoir un livre tel que celui-ci dans ma bibliothèque, sans trop y croire d’ailleurs, c’est fait désormais. Il sera un compagnon idéal, à portée de main c’est obligatoire, lors de vos visionnages de films câblés, du patrimoine sur France 3 ou des DVD, quel meilleur hommage à « Mon oncle » peut-on trouver à ce livre. Les filmos sont en plus d’une exhaustivité inédite, difficile de les prendre en défauts, j’ai cherché une erreur pour ne trouver qu’une coquille confondant Bernard Lavalette avec Bernard Lajarrige, et encore pour une scène coupée au montage dans « Violette Nozière » de Chabrol, c’est dire si je suis vicelard, mais il n’y a rien à faire, c’est du sérieux. Entre cohérence éditoriale, une passion pour sauvegarder la mémoire du cinéma français, ce livre est sans forfanterie aucune, un absolu régal. Il n’y a peu d’échos hélas des médias, car c’est un livre auto-édité, mais vous pouvez avoir des renseignements pour l’obtenir via l’adresse aide-memoire@club-internet.net. Pour un livre qui fait du bien, surtout quand on voit la liste des disparus de l’année défiler de manière subliminale dans la cérémonie des Césars, et encore avec des coquilles, François pour Françoise Vatel, c’est pathétique. Heureusement il reste quelques amoureux enflammés.

  

Sorti du même moule, mais sans filmographies, c’est un peu dommage, pour rappel, il convient également d’acquérir « Caractères, moindres lumières à Hollywood » (Éditions Grasset, 2006), de Philippe Garnier, que les lecteurs de « Libération » connaissent bien. Ce sont des hommages flamboyants aux « characters actors », de la confrérie de la redingote – Eric Blore , Francklin Pangborn -, Edward Everett Horton, figurant en couverture, des visages singuliers du formidable « En quatrième vitesse », film culte de Robert Aldrich, « de Nick Dennis « Va Va Voum » à « Albert Dekker », d’individualités fracassantes de Simone Simon – évoquée aussi dans « l’@ide-mémoire -, mais aussi Frank Morgan, Arthur Kennedy, Thema Ritter, une sorte de Pauline Carton américaine, Eugene Pallette, une joyeuse rondeur, Edmond O’Brien, Jack Elam, présenté comme « L’homme qui a dit merde à Hollywood », Walter Brennan, etc…,  à l’ultime caractère Timothy Carey déjà évoqué dans le site « Retour à Yuma », formidable gueule passant de l’œuvre de Stanley Kubrick à John Cassavetes. A noter pour les éditeurs que l’ami Jean-Louis Sauger, a déjà un dictionnaire sur le même mode, qui ne demande qu’à être publié. Philippe Garnier, dresse ici un superbe hommage aux acteurs de « composition » de l’âge d’or du cinéma hollywoodien, souvent cantonnés dans des rôles stéréotypes, contraints à suivre l’exigence des studios, mais donnant aussi un suppléments d’âme à des figures imposées.   Deux hommages magnifiques aux sans-grade ! Il y a d’ailleurs deux cahiers photos centraux, permettant d’identifier, J’en ai découvert beaucoup ainsi. 

 

  

Je profite de cette chronique, pour présenter le premier roman d’un autre grand amoureux des seconds rôles, leur vouant un culte, c’est Jean-Marcel Erre pour son livre « Prenez soin du chien ». Avec un sens aigu de l’observation, on retrouve tout un voisinage assez déjanté autour d’un écrivain pour la radio Max Corneloup. C’est à la fois un solide polar, un livre inventif et haletant, habité par des personnages hauts en couleurs, et par un humour ravageur. On peut d’ailleurs s’amuser à distribuer les rôles avec nos amis seconds rôles. Hautement recommandable, aux éditions Buchet-Chastel.

EURO BIS

A recommander chaudement les 9 premiers numéros du fanzine « Euro Bis » mine d’informations, sur le cinéma bis Européen, avec des dossiers épatants sur le « Western spaghetti », avec également des hommages (Léon Klimovsky, Emilio Salgari, Fernando di Léon), dossiers sérieux (OSS 117, Le guide des acteurs du western spaghetti), et des filmos des disparus récents (Wolfgang Preiss, Charles Rénier).

Les 9 premiers numéros sont toujours disponibles, voir lien EUROBIS. Précipitez-vous, c’est de la belle ouvrage.

Ce blog « portnawack » n’est finalement pas complétement vain, puisque j’ai rencontré un cinéphile formidable Jean-Louis, dit Gashade, qui a dans ses tablettes un bel ouvrage concernant les seconds couteaux américains, d’où de passionnantes conversations il y a peu sur Warren Oates, ou le formidable Timothy Carey, voir site officiel TimothyCarey.com, acteur fétiche de John Cassavetes et Stanley Kubrick, notamment.

Grâce à lui, j’ai pu découvrir un livre épatant, « Les yeux de la momie » (Rivages/Écrits noirs, 1997), recueil d’articles de Jean-Patrick Manchette, publiés dans « Charlie Hebdo » de 1979 à 1982. Manchette a une grande ouverture d’esprit, passant des grands classiques au cinéma bis (Lucio Fulci, notamment, désormais reconnu). Le ton est drôle, le style excellent, on se régale dès la préface d’Alain Carbonnier (l’anecdote sur Robert Bresson). C’est un livre indispensable, ludique, en avance sur son époque et oeuvre de précurseur.