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POUCE ! (OU COMMENT MANIFESTER SA MAUVAISE HUMEUR)

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Peut-on continuer à causer cinoche, alors que le vrai cirque médiatique se trouve désormais plus à l’Élysée qu’au festival de Cannes. Au programme, cumul des mandats, castings originaux en vue de déstabiliser une opposition exsangue, famille d’opérette se pâmant au possible et parité oblige des « fillonettes » qui succèdent aux « jupettes »… Ces dernières ne devraient donc pas piquer dans la « caisse » (arf-arf). Et là une question se pose, le petit Louis S. pourra-t-il percevoir ses indemnités spectacles pour ses précédentes prestations longtemps « floutées ». On est en campagne électorale mais tout de même… La majorité des Français en redemande tendance mélange des genres « poudre aux yeux »…. Histoire d’une « main basse » médiatique sur la démocratie – confère le cas Solly qui part sur TF1 -, gare à la gueule de bois… Avant de sombrer totalement dans l’aigreur, revenons donc un peu s’oxygéner au cinéma. Les temps sont toujours difficile, comme chantait Léo Ferré… Pour peu que « l’amor » et le « trepalium » ne vous donnent pas vraiment de satisfaction, transformant votre vie en désert de « Sergio » Gob(b)i, vous filez donc au cinéma pour vous consoler de votre morne existence. C’est bien connu, quand on n’aime pas la vie, on va au cinéma ! Et là, on vous soumet à une épreuve – d’accord il faut bien être puni pour avoir la carte UGC, mais tout de même -, le « doigt » de « La Société Générale » ! Dans « Signé Furax : La lumière qui éteint », célèbre feuilleton radio de Pierre Dac et Francis Blanche, il y a le supplice de « Bambino »… Les « babus » pratiquent la torture en passant en boucle la chanson rendue célèbre par Dalida… La victime n’a plus qu’une seule alternative devenir fou. L’adage publicitaire « plus c’est con, plus ça reste dans les mémoires », est ici à son apogée… On a l’habitude pourtant de ce type de malversation, comme les publicités radios – le lait « Candia » sur France Inter -. Elles sont d’une connerie abyssale, heureusement que l’humour de Guy Carlier vous venge un peu. Mes ces horreurs, en comparaison, deviennent des œuvres d’arts devant un sommet de la crétinerie « séguelesque ». Depuis avril 2006, cette « socgénitale » pub sévit dans les Multiplex – et à la télé mais on peut couper le son -, précédée d’un pseudo-documentaire, making off, ou les premiers pas interminables de jeunes qui débutent dans la vie active, complètement anémié, pour torcher un hippopotame, devenir garde du corps pour V.I.P. ou sauter à l’élastique. C’est hallucinent de fausseté, la mise en scène prise sur le vif, pseudo-zoom pour animer l’ensemble, confine au grotesque. La banque qui se prétend être là pour vous aider, décide de continuer à nous emmerder, en enchaînant par la pub. D’abord, il y a l’horrible musiquette, de « Rollin Dana » chantant « Winchester’s Cathedral », avec un son proche de l’agonie d’un chat écorché tendance nasillarde. Au bout de la 820 372ème écoute, vos neurones se font la malle, votre sang se glace, vous fermez les yeux, respirez un bon coup devant autant de cruauté. L’image n’est pas triste, un doigt levé géant qui marche – ce serait un pouce, mais après une minutieuse exploration du mien, je ne vois pas grand chose en commun -. Ca pourrait être aussi bien un majeur, le voir ainsi levé nous fait évidemment penser à un geste obscène. Et si c’était un doigt d’honneur géant, une variante des contraintes à la bancarisation chère à Pascal Thomas ? On imagine une provocation inconsciente, avec une cohorte d’huissiers en cas de surendettement. Une créature minaudante pend sa crémaillère. Elle a donc invité ce fameux doigt, lui permettant de s’installer et d’avoir son premier appartement… Le monstre manucuré lui s’agite, tape « l’incruste », il aide à porter les paquets, fait le D.J., remue d’une manière éhontée… Il n’a même pas l’excuse de l’ivresse, n’ayant pas de bouche on ne voit pas comment il peut se mettre à boire ! Plan final, la pièce est illuminée par un néon géant notifié « Parking » ! La jeune fille a intérêt à installer des doubles rideaux, mais gageons qu’elle risque de garder une solide rancune après quelques nuits blanches passées à dormir au dessus ou à côté d’un parking… La banque est certes prêteuse mais pas au point de pouvoir s’installer dans un endroit calme. Notre symbole phallique géant est par contre bien mieux disposé envers les riches, quand il accompagne de riches seniors golfeurs dans un avion. Si Nietzsche – ou Nike on ne sait plus à force – nous disait « Tout ce qui nous tue pas, nous rend plus fort », il y a des limites au supportable, depuis avril que l’on se farcie cette horreur ambulante. Le seul pouce que je souhaiterais voir c’est le film de Pierre Badel, avec Guy Bedos, de 1971, disparu de la circulation… Je propose de jeter le sieur Julien Trousselier – ineffable réalisateur de ces sinistres oeuvrette – au rang d’indignité nationale. Car la pub a cet avantage, on est pas obligé d’apposer son nom à ce bassinage généralisé. Heureusement qu’il a eu une parodie de « Groland » chez Canal+, pour nous sauver de cette indigestion… On a envie de crier « Pouce » !

Fragments d’un dictionnaire amoureux : Georges Aminel

 

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Georges Aminel & Benoît Régent – Photo © Claude Angelini

Annonce de la mort de Georges Aminel, le 29 avril dernier, confirmée par François Justamand aux « Gens du cinéma ». Ce comédien, originaire de la Martinique, de son vrai nom Jacques Maline, fut le premier acteur noir à entrer à « La Comédie Française » en 1967,  avant de démissionner en 1972. On l’associe immédiatement à une des voix de notre jeunesse, il la prêta notamment au personnage de dessin-animé du chat Sylvestre dit « Gros minet » composant avec Arlette Thomas en « Titi » un duo mémorable. Il inventa à l’occasion pour cette version française le chuintement et le fameux « Nom d’un chat » qui devait rester dans nos mémoires. Il avait la stature et la tessiture de voix idéale pour doubler des comédiens magistraux comme Vittorio Gassman « Parfum de femme » (Dino Risi, 1974), Yul Brynner, Orson Welles dans « Paris brûle-t-il ? » (René Clément, 1965), « Casino Royale » (version 1967, dans le rôle du « Chiffre ») et  dans « La décade prodigieuse » (Claude Chabrol, 1971) – mais il ne fut pas très satisfait de la latitude laissée par Chabrol pour ce dernier film selon un de ses dernières interview. Il faisait mouche, notamment en doublant plusieurs rôles dans « Le magnifique » (Philippe de Broca, 1973) où il nous régalait de son humour en doublant Vittorio Caprioli, méchant d’opérette mais aussi Hans Meyer jouant un espion très sérieux. Dans « Tendre voyou » (Jean Becker, 1966), il alterne deux voix différentes dans une même scène de bateau, passant d’un marin noir au commandant du navire allemand, montrant ainsi ses grandes capacités. On lui reprochait parfois de détourner certains doublages à l’instar de celui de Ron Ely dans « Doc Savage arrive » (Michael Anderson, 1975). En apportant une voix « zézéyante », inexistante en V.O. ? il a donné une réputation de « Nanar » à ce film qui n’en méritait pas temps (Source Wikipédia et Nanarland). Il succéda même à François Chaumette pour trois des volets de la saga de « La guerre des étoiles », pour nous donner des frissons en « Dark Vador » VF, on ne peut que lui tirer notre chapeau, car la voix originale de James Earl Jones dans ce rôle était exceptionnelle. Pour la petite histoire c’est grâce à la ferveur de ses fans, qu’il avait pu reprendre en 2005, en une heure de temps, cette voix française « Star Wars 3 – La Revanche des Sith ». Vous pouvez retrouver quelques uns de ses plus célèbres doublages dans un des sujets du forum de « La gazette du doublage ».Le cinéma ne lui a hélas pas laissé beaucoup de place comme comédien. On le reconnaît dans un banquet d’étudiants fauchés dans « L’ange de la nuit » (1942), aux côtés d’une autre débutante Simone Signoret. On peut retenir aussi l’avocat mal à l’aise de « Chiens perdus sans collier » (Jean Delannoy, 1956), et l’apprenti dictateur noir dans le curieux « Popsy Pop » (Jean Herman, 1970), où il avait la chance de jouer avec une Claudia Cardinale au sommet de sa beauté. Il a un très joli rôle dans « Les amants de demain » (Marcel Blistène, 1957) qui vient de sortir en DVD chez René Château. Il est très touchant en client habituel du café tenu par Raymond Souplex. Toujours bien habillé, il est à la recherche d’un emploi, sans succès. Il évite de prendre la parole avec son accent créole, on comprend très vite que s’il est toléré, on le laisse en fait à l’écart. On sent dans son personnage une infinie tristesse et une grande détresse, quand il se voit refuser le sourire d’un enfant alors qu’il lui ramasse un jouet, ou quand il essaie discrètement de ramasser un mégot de cigarette, n’ayant plus d’argent. Il aura une grande gratitude auprès du personnage joué par Michel Auclair, qui venu de l’extérieur lui donne un peu d’attention. L’ironie toujours distinguée qu’il donnait à sa voix grave, restera durablement dans l’inconscient collectif de plusieurs générations. Un formidable serviteur du monde doublage, dont les fans déploreront sa disparition. A lire un entretien de lui par François Justamand pour « Objectif cinéma ».

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Filmographie établie avec Armel de Lorme : 1942  L’ange de la nuit (André Berthomieu) – 1943  Le ciel est à vous (Jean Grémillon) – 1944  La cage aux rossignols (Jean Dréville) – 1946  Le cabaret du grand large (René Jayet) – 1954  Le tournant dangereux (René Jayet) – 1955  Chiens perdus sans collier (Jean Delannoy) – 1956  À la Jamaïque (André Berthomieu) – La loi des rues (Ralph Habib) – 1957  Cargaison blanche (Georges Lacombe) – Les amants de demain (Marcel Blistène) – 1960  Le Sahara brûle (Michel Gast) – 1962  Ame qui vive (Jean Dasque, CM) – 1970  Popsy Pop (Jean Herman) – Docteur Caraïbes / L’homme à l’albatros (Jean-Pierre Decourt, sortie en salles des 3 premiers épisodes de la série TV homonyme) – 1971  Les portes de feu (Claude Bernard-Aubert) – 1972  Les tueurs fous (Boris Szulzinger) – 1975  La grande récré (Claude Pierson) – 1977  La vie parisienne (Christian-Jaque) – 1989  Jean Galmot, aventurier (Alain Maline, version longue TV seulement). Nota : Il n’apparaît pas dans les copies existantes des films suivants : 1956  « Porte des Lilas » (René Clair, 1956) et « Le soleil des voyous » (Jean Delannoy, 1966) – dans ce film le rôle du commissaire Leduc est en fait joué par Bernard Charlan – , titres crédités dans les catalogues de Raymond Chirat. Télévision (notamment) : 1956  Les énigmes de l’Histoire : L’énigme du Temple (Guy Lessertisseur) – 1956  Les énigmes de l’Histoire : L’énigme de la Mary Celeste (Stellio Lorenzi) – 1960  Rive droite (Jean-Paul Carrère, divertissement) – 1964  La puissance et la gloire (Claude Barma) – Bayard : Ludovic le More (Claude Pierson) – 1966  Comment ne pas épouser un milliardaire (Roger [Lazare] Iglèsis, série) – 1967  La vie parisienne (Yves-André Hubert) – 1969  Comédie Française : L’émigré de Brisbane (Jean Pignol) – Judith (Robert Maurice) – 1970  Reportages sur un squelette ou Masques et bergamasques (Michel Mitrani) – 1973  Docteur Caraïbes (Jean-Pierre Decourt, série) – Au théâtre ce soir : La tête des autres (Pierre Sabbagh) – 1977  Messieurs les jurés : L’affaire Beauquesne (Frédéric Witta) – 1979  Messieurs les jurés : L’affaire Coublanc (Dominique Giuliani) – 1980  Histoires étranges : La mort amoureuse (Peter Kassovitz) – Le séquestré (Guy Joré) – 1983  Clémentine (Roger Kahane) – 1993  Le siècle des lumières (Humberto Solás).

Voxographie succincte : 1954  Fortune carrée (Bernard Borderie, doublage) – 1959  Les seigneurs de la forêt ( Henry Brandt & Heinz Sielmann , voix du récitant) – 1962  Histoires africaines (Denise Charvein, série TV documentaire, récitant) – Stvoreni sveta (La création du monde)  (Eduard Hofman, animation, voix française) – 1963  L’inconnue de Hong Kong (Jacques Poitrenaud, doublages) – 1964  Moukenge (Denise Charvein, CM documentaire, récitant) – 1966  Tendre voyou (Jean Becker, doublages) – 1969  D’Artagnan (Claude Barma, série TV, voix française de Porthos) – 1975  Tarzan, la honte de la jungle (Picha et Boris Szulzinger, animation) – 1976  Drôles de zèbres (Guy Lux, voix clin d’œil de « Gros minet ») – 1980  The missing link (Le chaînon manquant) (Picha, animation) – Mama Dracula (Boris Szulzinger, voix du récitant) – 1983  Mickey’s Christmas Carol (Le Noël de Mickey) (Bunny Mattinson, version française) – 1986  Big Bang (Picha, animation).

 

ARTICLE Source : AFRICULTURES

Georges Aminel a tiré sa dernière révérence, par Sylvie Chalayepublié le 22/05/2007

Premier acteur noir à entrer au Français, Georges Aminel vient de disparaître à l’âge de 84 ans. Il faisait partie de ces comédiens sans visage que la télévision a fabriqué dans l’ombre du cinéma américain et de ses stars auxquelles il fallait bien donner des voix françaises. On a oublié les traits de l’acteur, mais le timbre de sa voix est resté dans l’oreille de nombreux spectateurs. Qui ne connaît les chuintements de Gros minet ou la magistrale inflexion de la voix française d’Orson Welles ou de Yul Brynner ? Georges Aminel avait du tempérament et une voix profonde qui traduisait parfaitement sa noblesse d’âme et sa hauteur. Fier et entier, il n’avait fait aucune concession à ce métier, où pendant longtemps les acteurs « basanés » étaient restés limités dans des emplois qui correspondaient à leur couleur, et il préféra, dans les années 70, tirer sa révérence et assumer dans l’ombre le jeu d’un acteur qui donne sa voix, mais dont on ne sait rien de la couleur. Il eut ainsi la carrière paradoxale d’un comédien qui connut les feux de la rampe de la Comédie-Française, mais qui eut le courage de démissionner, plutôt que d’être enfermé dans l’image de l’Autre qu’on voulait lui faire systématiquement jouer.

Né à Clichy en 1922, d’un père martiniquais et d’une mère parisienne, Georges Aminel connaît la notoriété en 1954, quand Yves Jamiaque lui confie le rôle de Bistouri dans Negro Spiritual, le médecin philosophe qui ramène ses frères à la raison, et les empêche de commettre un meurtre, et même si la pièce n’est pas un succès, la critique salue avec enthousiasme sa prestation d’acteur.

Jacques Maline (*), qui avait pris le nom de Georges Aminel, avait commencé sa carrière dix ans plus tôt en jouant d’abord de petits rôles : ici un Polynésien muet dans Faux jour de Closson au Théâtre de l’Oeuvre (1941), là un vieux nègre illuminé dans Sud de Julien Green au Théâtre de l’Athénée, ou un gentil sauvage dans une robinsonade (Robinson de Supervielle en 1952). Dès ces années-là, Aminel n’hésitera pas à dénoncer dans la presse la difficulté que rencontraient alors les acteurs noirs : « On rejette les gens de couleur parce qu’ils risquent de vous apporter des ennuis. Il n’y a pas de pièce pour eux. Celles qui ont été montées sont tombées à plat. ». (1)

En 1958, Jean Louis Barrault l’engage, il joue dans Le Soulier de satin, La Vie parisienne, Madame Sans-Gêne… En 1963 Pierre Debauche fait appel à lui pour le rôle d’Holopherne dans Judith de Hebbel, qu’il tournera ensuite pour la télévision avec Maurice Garrel, Pierre Arditi et Evelyne Istria, puis Raymond Rouleau lui donne le rôle d’Alexandre de Médicis dans son Lorenzzaccio. Enfin, ce sera le duc d’York dans Henri VI de Shakespeare que Jean-Louis Barrault monte à l’Odéon. Georges Aminel est alors remarqué par Jacques Charon et Maurice Escande qui l’engagent à la Comédie-Française en 1967, où il sera le premier acteur de couleur. Son premier rôle est celui de Picaluga dans L’Emigré de Brisbane de Georges Shéhadé. Il joua ensuite Pyrrhus dans Andromaque, Don Gormas dans Le Cid, Joad dans Athalie. Il fut un extraordinaire Malatesta, en 1970, dans la pièce de Montherlant.

Il tourna aussi au cinéma pour Claude Bernard-Aubert dans « Les portes de feu » en 1971, à côté d’Annie Cordy et Dany Carrel. Il participa à plusieurs feuilletons populaires à la télévision comme « Le temps des copains » ou « Comment ne pas épouser un milliardaire ».

En 1972, Georges Aminel incarne Oedipe dans une mise en scène de Jean-Paul Roussillon. La pièce est fortement décriée par la critique et on remplace Aminel par Claude Giraud. Bien qu’il fût à quelques jours de devenir pensionnaire [En fait sociétaire, voix commentaires] de la Comédie-Française, George Aminel, démissionna. Déçu par les rôles qu’on lui proposait, il finit par quitter la scène une dizaine d’années plus tard et à se consacrer au doublage. En 1979, avant de renoncer au théâtre, il confiait à Marion Thébaud lors d’un entretien pour le Figaro : « Je suis trop blanc, trop noir, le cheveu trop crépu ou pas assez. Bref, des amis qui me veulent du bien me demandent pourquoi je ne joue pas Othello mais jamais pourquoi je n’interprète pas Macbeth. C’est bien simple, j’ai passé mon temps à me barbouiller et à prendre un accent. Les faits sont là : j’ai débuté dans un rôle de Polynésien muet et depuis je ne compte pas les personnages de chamelier juif, brésilien ou arabe que j’ai endossés. Alors, si parce que mon père est Antillais, je dois toute ma vie incarner des Sud-Américains explosifs ou des Indigènes fanatiques, je préfère arrêter. » (20/06/1979) 1. Le Figaro littéraire, 25 septembre 1967.

(*) L’article initial donnait par erreur Jacques Lamine, comme son vrai nom.

EN COUP DE VENT #1

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Jean Abeillé

Petite rubrique « coup de vent », imaginée en créant quelques fiches pour « Wikipédia », histoire de saluer quelques comédiens souvent cantonnés dans des rôles qualifiés parfois péjorativement de seconds plans. Ils font pourtant souvent mouche à la moindre de leurs apparitions, au détour d’un plan dans le cinéma français, à l’instar d’Henri Attal et Dominique Zardi déjà évoqués ici, en attendant un petit hommage consacré à Bernard Musson. Quelques messieurs pour commencer. Vous pouvez trouver plus d’informations pour quelques uns d’entre eux dans le site Les gens du cinéma et dans les ouvrages évoqués ici. Pour les reconnaître il y a aussi l’indispensable trombinoscope de Thelin.

Jean Abeillé : Incroyable « speakerin » dans les émissions de « La 7 » qui devint « Arte » par la suite. Sa nochalance est très appréciée de Luc Moullet et Jean-Pierre Mocky.

Edmond Ardisson (1904-1983) : Membre régulier de la troupe de Marcel Pagnol, un tempérament méditerranéen constamment dans la sympathie. Il est le jardinier jovial prénommé Napoléon dans la célèbre « Demoiselle d’Avignon » à la télévision.

Philippe Brizard (1932-) : Malgré ses airs débonnaires, il faut parfois se méfier de lui comme son rôle de « Fanfan » dans la « Scoumoune » (1972), mais il incarne souvent l’ordre et l’autorité.

Paul Bisciglia : (1928). Ce prolifique comédien, spécialisé dans des seconds rôles, a près de 200 films à son actif. On le retrouve souvent dans des personnages souvent gouailleur, tel le comédien marié à Micha Bayard en quête de rôles dans « Le cinéma de Papa ». Il ne dédaigne pas des comédies égrillardes, et on le retrouve régulièrement chez Jean Rollin.

Pierre Collet (1914-1977) : Le planton dans « Les 5 dernières minutes » version Loursais-Souplex, un bon sens et une aptitude peu commune à être complètement dépassé par des personnalités loufoques. Une voix aussi, on retrouve souvent ce comédien solide dans des rôles d’hommes du peuple.

Georges Douking (1902-1977) : Une folie évidente, acteur fétiche de Pierre Chenal, qui a manqué de grands rôles à la fin de sa carrière. Il est le jardinier assassiné par Julien Bertheau dans « Le charme discret de la bourgeoise ».

Henri Lambert (1927-2003) : Comédien très physique, souvent cantonné dans des rôles de brutes ou d’hommes de main, on le retrouve parfois dans des rôles d’inspecteurs.

Robert Le Béal (1915-1996) : Archétype du monsieur distingué, fine moustache et flegme britannique, il fut le fils de Denise Grey dans « La boum » faisant curieusement beaucoup plus âgé qu’elle.

Rudy Lenoir (1913-1995) : Ce strasbourgeois est souvent employé dans des rôles d’officier S.S., de par sa stature et sa calvitie, mais Jean-Pierre Mocky l’intègre dans son bestiaire.

Sylvain Lévignac  (1929-1994) : Une silhouette massive, et un parcours solide de cascadeur. On le retrouve hélas beaucoup dans les rôles d’abrutis de service.

Roger Lumont (1934-) : Une rondeur, une voix – beaucoup de doublage -, cantonné souvent dans des rôles inquiétants, mais on le retrouve aussi dans des emplois plus bon enfant – le commissaire dans l’ineffable « Na ! » de Jacques Martin.

Max Montavon (1926-1983) : Caricature d’homosexuel tendance « grande folle » du comique français des années 60 à 1980. Il en fait tellement en policier maniéré, que son partenaire, Serge Gainsbourg n’arrive visiblement pas à contrôler son hilarité dans le film « Trop jolies pour être honnêtes » (1972).

Albert Michel (ou Albert-Michel)  (1909-1981) : Un prolifique archétype du français moyen, souvent odieux ou sans-gênes voire râleur, mais attachant au final.

Jean Ozenne (1998-1969) : Des personnages guindés souvent coincés dans des convenances, une raideur de notable ou de domestiques serviables. Mais avec lui, derrière une apparence austère, la folie n’est jamais loin, du fétichiste des bottines du « Journal d’une femme de chambre » version Buñuel au maître d’hôtel sarcastique lançant des « Mon Dieu » à la cantonade devant les énervements d’un De Funès dans « Le grand restaurant » (1966).

Jean-Pierre Rambal (1931-2001) : Un comédien lunaire, dont le souvenir un tantinet régressif est émouvant pour les vieux enfants qui l’ont vu en professeur Plumecousin dans l’émission « Brok et Chnok » dans les années 70 dans les « Visiteurs du mercredi ». Il fallait le voir en acteur incarnant un pompiste arrosant de fausse essence les seins dénudés de Miou-Miou dans « Josépha » (1981).

Jacques Robiolles : Le moindre rôle de fou lui était dévolu par la télévision française à l’instar d’un adorateur d’une secte animalière dans les excellents « Compagnons de Baal » en 1966. Il cabotine volontiers dans ses emplois. 

Yvon Sarray : Comédien attachant que l’on retrouve souvent dans des feuilletons historiques, mais le cinéma n’aura pas sû l’utilisé autrement que dans des silhouettes.

Jean Saudray (1928-2002) : Une silhouette austère souvent cantonnée dans des rôles « d’affreux », de bagnards, il était toujours impeccable dans des rôles souvent retords.

Sylvain (Jean Sylvain) (1906-1970) : Une silhouette austère pour des petits rôles de concierges ou d’homme du peuple, à ne pas confondre avec Sylvain Lévignac qui figure parfois avec ce même prénom.

Lionel Vitrant : Ce comédien devenu cascadeur par hasard sur « Le jour le plus long » (1961) , où il joue le parachutiste accroché en haut d’une église, paraît souvent dans des rôles plutôt taiseux comme le fidèle homme de main d’Alain Delon dans « Borsalino  Co » (1974). Son fils Olivier est également cascadeur.

To be continued…

CLERKS II

img514/7284/clerks2fn0.jpg En aparté, dernier salut à un vieux cabot institutionnel qui nous parle une dernière fois, 5 minutes – douche comprise ? -, je ne sais pas si c’est l’effet de la lecture du prompteur ou les affres de la maladie, mais j’ai crû voir un zombie d’un film de Romero mâtiné de Louis XV. On peut lui préférer le génial Robert Hirsch nous livrant un formidable numéro lundi soir à la cérémonie des Molières avec un grand sens de l’autodérision et du panache. Pour rester dans une certaine inanité , j’ai vu « Clerks 2 » avec un vague bon souvenir du premier opus, « Clerks, les employés modèles », film fauché en noir et blanc. Nous étions 2 dans la salle, et j’avais l’appréhension morose de m’attendre à voir exploité à l’envi de filon de ses employés minables – après  « Clerks, The cartoons », la série TV)- .  La vulgarité est à la mode, citons Jean-Marie Bigard et son célèbre poil de cul dans la savonnette, il fallait le voir un jour chez Michel Denisot, louer que son anus soit érogène pour finir par demander à la belle Valeria Golino s’il peut se caresser quand elle parle… Il finit légitimement par grossir la longue liste des souteneurs de Nicolas S. N’est pas Rabelais qui veut, faire frémir nos zygomatiques avec quelques énôôôrmités n’est pas donné à tout le monde. Il faut un sacré talent pour nous amuser avec ces matières, mais bonne surprise c’est le cas ici avec ce film de Kevin Smith. On le retrouve donc douze ans qui joue avec nos « nerds » Dante Hicks – Brian O’Halloran, la trentaine fatiguée – et Randall Graves – Jeff Anderson, et son sempiternel petit côté potache -, travaillant désormais dans la restauration rapide, Randal ayant oublié d’éteindre la cafetière et ayant mis le feu à son magasin. Dante doit se marier avec une femme aisée, et veut quitter le fast-food.

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Rosario Dawson & Brian O’Halloran

Randal appréhende de se retrouver seul, et se console en faisant du jeune cuistot du lieu son souffre-douleur, ce qui est d’autant plus aisé que ce dernier est fan des « Transformers ».  Dante a lui des affinités, avec la gérante du restaurant, la belle Becky – Charmantissime Rosario Dawson, venant du vivier Rodriguez-Tarantino, dans un rôle plus sage qu’à l’accoutumé-. Jay et Silent Bob – Jason Mewes et Smith himself -, zonards dealers qui viennent de purger une peine de prison, retrouvent leurs marquent en végétant devant le restaurant. Kevin Smith joue avec bonheur avec la vacuité de son scénario, pour preuve il y a même une apparition de Ben Affleck – du latin « affligere » -. La modestie du traitement finit par donner un résultat assez plaisant. Dans un jeu « tarantinien » d’éloge de la sous-culture, il continue à nous amuser, les fans de « La guerre des étoiles », devant composer désormais avec ceux du « Seigneur des anneaux ». Randal, éternel « adulescent »,  finit par accuser une sorte de « coup de vieux », comme dans la scène où il est humilié par le décalé Jason Lee. Il se paie même le luxe de flirter avec la mièvrerie. Mais les personnages évoluent, trouvant une gravité inattendue avec la maturité, la manifestation d’une jovialité permanente finit par lasser place à une inquiétude sourde à l’avenir. Mais le mauvais goût assumé de situations vraiment scabreuses est ici assez réjouissant, on retrouve avec plaisir la scène culte de Jay, rejouant la célèbre danse de Ted Levine dans « Le silence des agneaux ».  Au final, même si curieusement il y a un conformisme inattendu, c’est une bonne surprise, surtout en comparaison avec le tout venant des comédies françaises actuelles. A défaut d’originalité, ce recyclage se révèle assez réjouissant. Le film est un peu à l’image de la scène ahurissante avec l’âne, « c’est dégoûtant, mais on ne peut pas s’empêcher de regarder ».

TRÈS BIEN MERCI

img148/8024/trsbiennl5.jpg Alex et Béatrice – Gilbert Melki et Sandrine Kiberlain – sont un couple sans histoires et sans enfants. Ils plient un peu l’échine face aux agressions du quotidien. Elle conduit un taxi, rongeant son frein quand ses clients lui font des caprices selon le bon principe du client qui est roi – dont Camille Japy, irrésistible ici, mais c’est normal on n’est pas ici chez Eric-Emmanuel Schmitt…-. Lui est un expert comptable sous pression permanente de son patron – Christophe Odent, excellent en chéfaillon méprisant -. Il défend mollement son collègue Landier – trop rare Olivier Cruveiller qui incarne un sympathique combinard – qui en tant que représentant gruge sur la note de frais, et est de ce fait le candidat idéal pour un licenciement. Quelques signes avants coureurs de son avant coureur, finissent par surgir chez Alex, notamment quand il se laisse à fumer en cachette dans les toilettes et finit par être verbalisé dans le métro pour sortir son indispensable cibiche. Un soir Alex s’arrête devant un banal contrôle d’identité fait par la police sur un jeune couple. Il regarde cette action et finit par sa seule présence par énerver les représentants de la loi, ce fait anodin finit par atteindre des proportions inattendues. Après une nuit au poste assez rude, il réclame le commissaire des lieux, qui reste tragiquement absent. Il va atterrir sans rien comprendre dans un hôpital psychiatrique, les policiers ne comprenant pas que l’on puisse remettre en question la suprématie de leur autorité. Gilbert Melki, assurément l’un des plus grands comédiens du cinéma français, avec humour et une grande justesse, excelle dans ce rôle d’homme ordinaire, fatigué, résigné et sans histoire Il finit par ne plus vouloir joué le jeu des apparences, quitte à se laisser choir. Sandrine Kiberlain joue avec retenue son épouse, qui en voulant l’aider finit par l’enfoncer sans le vouloir, dans une scène d’une absurdité assez réjouissante avec Frédéric Pierrot en interne surmené qui le fait hospitaliser sans le voir. Au contraire d’un Nicolas S., candidat à la Présidence à la sortie du film, qui avait eu un lapsus intéressant « J’ai connu l’échec et j’ai dû le surmontrer » –. Alex perplexe , « sousmontre » les épreuves. Comme badaud de lui même finit par devenir le propre spectateur de sa propre détresse subie.

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Gilbert Melki

Il finit même par trouver un avantage, son hospitalisation finissant par lui donner l’occasion de souffler un peu. Difficile de ne pas évoquer Franz Kafka, d’autant plus qu’il y a dans ce film également un humour omniprésent devant l’incongruité des situations. Cette drôlerie en filigrane, finit par nous aider à supporter, une tension constante, Emmanuelle Cuau joue avec nos peurs, celle du chômage , de l’échec et d’un stress que l’on arrive plus à contenir. Elle avait montré déjà beaucoup de talents avec son « Circuit Carole » sorti en 1995 avec Laurence Côte et Bulle Ogier. Sur un ton intimiste, elle analyse avec finesse les mécanismes de notre société. En prenant le parti-pris du réalisme, on est amené à réfléchir sur son propre sort, la manière dont une vie peut changer si on finit par ne plus respecter les « cases » qui nous sont réservées dans notre société. On finit par réfléchir sur son égoïsme, ses capacités à être rassurés avec ses petits enfermements balisés. Il y a un ici un constat amer, sur la manière d’être démuni que l’on peut avoir devant les autorités ou les notables, à l’image du grand moment d’humour noir, où une psychiatre incarnée avec autorité par Catherine Ferran, où son personnage explique comment Alex a tenté de se suicider en se jetant au travers d’une fenêtre fermée, alors qu’il est victime d’un accident. Le film laisse des avis assez tranchés, entre ceux touchés par ce film et ceux franchement agacés par son traitement. Les films qui respirent l’air du temps ne sont pas si nombreux dans le cinéma français. Souhaitons que ce film ne soit pas un avant goût de nos 5 prochaines années, si on voit ce film à l’aune de la victoire d’une droite qui se veut autoritaire. A l’instar d’Annie Cordy, notre icône politique de la droite décomplexée pourrait bien chanter à notre petit valeureux peuple franchouille – mais l’idée politique chagrine qui s’offre en concurrence l’ordre juste et le drapeau français est gratinée également – : « Tu m’as voulu(uuu)e – Tu m’as eu(uuu)e – Tu m’as choisi(iii)e – C’est tant pi(iii)s… ». En attendant on peut toujours se consoler avec ce film salutaire, nous offrant une réflexion à contre courant du climat ambiant.

LE COIN DU NANAR : LA GRANDE MAFFIA…

Une pensée pour ce pôôôvre Vincent Bolloré qui est dans la tourmente…. Il est difficile de ne pas s’émouvoir devant le sort de cet homme, 451ème fortune mondiale, ce qui est assez chiche, convenons-en, même pour la France qui se lève tôt. Pourtant, pour recevoir un nouvel élu de la république – confit dans son arrogance – dans son joyeux yacht Paloma, il a dû en faire des efforts et des sacrifices. Prenons en exemple sa chaîne, Direct 8, petit prodige du PAF… En effet, on peut faire une chaîne de la TNT dans l’improvisation, avec le budget d’une télé locale ou d’un pays de l’Europe de l’Est au P.I.B. anémique. Enfin les amateurs, les hésitants peuvent faire leurs premières armes sans être dérangés par le CSA, qui touchée par cette maladresse, a enfin l’occasion de baisser les armes, en louant cette capacité de faire de la télévision sans la moindre idée saugrenue d’innovation. On exhume en passant quelques animateurs de la trash TV, trouvant le moyen d’expier leurs fautes dans l’honneur, la France du mérite, quoi… Mine de rien, cette chaîne, au moins, montre la grande richesse de l’identité nationale notre grand cinéma. Prenons en exemple, « La grande maffia…. », film de 1971 de notre génial Philippe Clair, une rareté, s’il en est… Merci Vincent, grâce à vous, enfin, nous avons l’occasion de voir cet incunable de notre cinéma. L’histoire est assez édifiante, Modeste Miette – Francis Blanche qui semble moyennement être concerné par l’agitation ambiante -, est employé timoré de la banque Rotfeller – mort de rire ! -. Ce bureaucrate est en prime allergique à la paperasse… qui lui déclenche une allergie ! Trois truands se sont infiltrés dans les lieux – les « Tontos » (sic), trio de comique italiens dont Aldo Maccione, 1 an après sa découverte en France dans « Le voyou » de Claude Lelouch -. Ces criminels maffieux sont assez potaches, allant jusqu’à humilier constamment le pauvre Modeste, qui trompe sa frustration en lorgnant sur la superbe plastique de Chantal Nobel, figurant une secrétaire sexy. Il y a bien Mlle Pussiau – Micha Bayard irrésistible et pour une fois dans un rôle sympathique -, qui est amoureuse transie de Modeste, mais son air rébarbatif et son improbable perruque filasse, n’aident pas beaucoup à sa séduction. Les facéties continuent, entre deux entraînements forcés d’un petit chef de service énervé et bondissant, qui pousse ses troupes à l’excellence – joué par Sim, toutes ressemblances… -. Epuisé, Modeste finit par avoir une crise cardiaque, après avoir trouvé une souris blanche tontosienne placée dans son tiroir. Le bouche-à-bouche de Mlle Pussiau, n’étant pas très efficace – elle aspire… -, un interne survolté qui se prend pour un toréro – André Gilles, comédien souvent sous-utilisé -, finit par se prendre pour le professeur Barnard, et lui greffe le cœur du chef des Tontos, celui d’Al Cartone – re-mort de rire…-. Modeste avec son nouveau cœur finit par se prendre pour le célèbre gangster. Les pères des tontos – Michel Galabru, Achille Zavatta et Serge Davri, qui heureusement pour eux n’ont que deux scènes, finissant en prison, Norbert devient le nouveau chef maffieux, gageons que Francis Coppola, a du s’inspirer de ce film pour son célèbre « Parrain ». 

Francis Blanche

Philippe Clair, avec son bagou, habituel, aime à envoyer valdinguer le bon goût, il raille tout ce qui est à sa portée, en franchissant allégrement la ligne jaune, en se moquant des nains, des obèses, des déviants de toutes sortes. Mais concédons lui d’avoir voulu sortir le cinéma comique français de l’ornière du vaudeville. Mais c’est pour se planter assez lamentablement, il fait de grands efforts assez vains d’accélérations, de distorsions d’images, et d’accélération généralisée des plans à défaut de lui donner du rythme. On sourit à quelques gags, comme un liquide vert coulant d’un feu rouge détruit, mais l’ensemble est assez vain. Il était pourtant visible que Philippe Clair avait pensé aux Marx Brothers, de par la manière de laisser toujours une dizaine de personnes dans chaque plans. L’absurdité générale finit par avoir son charme, comme Francis Blanche attaquant une banque déguisé en « Papa Schultz » du film de Christian-Jacque « Babette s’en va-t-en guerre », en déclarant : « C’est un costume qui me restait d’un vieux film » ! Les dialogues sont débiles à souhait, ce qui ne gâte rien, exemple : – les Tontos (avec accent italien) : « On était sûr Jour H, que c’était l’heu(o)re J », Michel Galabru : « L’orgie ? Ah non, l’heure J »… Mais il y a une distribution hallucinante, Jean Rupert, Gilbert Servien et le cher Henri Attal en employés de bureaux, Annick Berger en mamma envahissante, Dominique Zardi et Gérard Croce en gangsters idiots, les nains Roberto – dans trois rôles – et Jimmy Karoubi en petit président de la banque, dont la petite taille est jugée comme nuisant à la crédibilité de sa fonction – toutes ressemblances…- , Rudy Lenoir en fumeur de cigare chauve, Bernard Lavalette en notaire bafoué, Ibrahim Seck en gangster noir qui bien évidemment veut manger Francis Blanche, Georges Douking en faux aveugle, Yves Barsacq en policier, Pierre Repp sempiternel bafouilleur dans son sketche habituel – il se définit comme premier sinistre !, Amarande en veuve délurée, Carlos – soutien de…-  en gendarme de campagne, et même Sidney Chaplin – fils de Charles Spencer – en banquier idiot. On retrouve même Philippe Clair agité au-delà du burlesque en curé pied noir énergique. Tous ce petit monde est bien évidemment en roue libre, et semble beaucoup s’amuser… Nous un peu moins. Mais ne disons pas trop de mal des ringards, car s’ils vous soutiennent, ils peuvent vous apporter la victoire… Le film vaut bien un label nanar culte, car Philippe Clair a une énergie débordante et le film se voit sans trop de déplaisir. L’excellent site Nanarland en parle d’ailleurs avec brio, comme « une coke filmique ». A lire leur analyse jubilatoire de ce film ici. Message personnel à Monsieur Vincent et son Direct 8 : Encore ! le potentiel de nanars du cinéma français étant inépuisable…

Fragments d’un dictionnaire amoureux : Gordon Scott

img329/3261/scott2ta5.jpg Mort de Gordon Scott, à 80 ans, le 30 avril dernier à Baltimore, Maryland, des suites de complications des plusieurs opérations cardiaques en ce début d’année. Il né en 1927, dans une famille immigrée autrichienne installée à Portland, plus grande ville de l’état de l’Orégon. Après de brèves études à l’université de Portland, il s’engage dans l’armée de 1944 à 1947. Ce sportif émérite, il excelle dans le judo et les arts martiaux, est remarqué par deux agents d’Hollywood, en 1953, dans un petit hôtel de Las Vegas, où il travaille comme maître nageur. Ils travaillaient pour le producteur Sol Lesser, qui avait une franchise pour adapter le célèbre personnage inventé par Edgar Rice Burroughs. Il est choisit pour succéder à Lex Barker notamment, pour incarner « Tarzan », pour une série de 6 films, grâce à ses qualités physiques, ses capacités dans la natation et son corps de culturiste. Il est le onzième à tenir se rôle, et se place rapidement comme l’un des dignes héritiers de Johnny Weissmuller. Il était l’époux de l’actrice Vera Miles, qui fut sa partenaire dans « Tarzan chez les Soukoulous », de 1954 à 1959. De cette union naquit un fils Michael. Le cinéma italien se l’accapare pour des films divertissants, chers aux amateurs du « cinéma de quartier ». péplums tel « Romulus et Remus », il incarne Remus face à son homologue Steeve Reeves dans le rôle de Rémus, auquel on le compare souvent. On le retrouve aussi bien dans le western européen, en chasseur de bisons dans « Buffalo Bill, héros du Far west », que dans la mythologie gréco-romaine pour terminé dans deux films d’espionnage. Il incarne aussi bien Zorro, que Maciste poursuivant ses exploits à la cour de Chine ou luttant contre un être au pouvoirs surnaturels, ou Goliath. On le retrouve même en Jules César face à Pascale Petit dans « Cléopâtre une reine pour César », le temps d’une apparition à la fin du film, cette dernière émergeant nue d’un tapis déroulé à ses pieds. En 1967, il arrête sa carrière avant d’atteindre la quarantaine. Avec lui disparaît un certain âge d’or du cinéma italien et de divertissement, même si parfois historiquement fantaisiste, les cinéastes imaginatifs faisait souvent preuve de savoir faire et d’imaginations face à des problèmes de budget. Si les amateurs du genre préfère lui reconnaître ses qualités physiques à son jeu d’acteur, il a pourtant marqué le cinéma de genres de son empreinte.

« Le géant à la cour de Kublai Khan »

Pour conclure, dans l’excellent livre d’entretien d’Éric Poindron, « Riccardo Freda un pirate à la caméra » (Institut Lumière/Actes, 1995), page 291, Freda parlait de son « Maciste » ainsi : « …Gordon Scott était un type gentil et très attentif autant dire parfait pour ce genre de rôle. Il n’est pas devenu célèbre pour une raison simple, il était sympathique, reconnaissant, généreux » (…) « …Une anecdote amusante, c’est la séquence  où Maciste doit sauver le prince de la fosse au titre. Maciste saute dans la fosse et prend le prince dans ses bras. Pour cette séquence nous endormions un peu le tigre en lui faisant une piqûre anesthésiante dans la queue… Mais après plusieurs piqûres, l’anesthésie n’était plus aussi efficace. Quand nous avions jeté le prince, qui était joué par un étudiant coréen, le tigre était réveillé, et le prince terrorisé. Maciste saute dans la fosse, soulève le tigre et l’écarte. Au moment de sortir de la fosse avec le prince, Gordon Scott fait une grimace épouvantable… A la fin du plan, je l’insulte, je lui demande pourquoi il fait cette grimace et il me répond : « Mais Riccardo, le Coréen, il a « fait » dans son pantalon royal ! »… ».

 

Filmographie (établie avec Christophe Bier) :1954  Tarzan’s hidden jungle (Tarzan chez les Soukoulous) (Harold D. Schuster) – 1955  Tarzan and the lost safari (Tarzan et la safari perdu) (H. Bruce Humberstone) – 1958  Tarzan’s fight for life (Le combat mortel de Tarzan) (H. Bruce Humberstone) – Tarzan and the trappers (Charles F. Haas et Sandy Howard, TV) – 1959  Tarzan’s greatest adventure (La plus grande aventure de Tarzan) (John Guillermin) – 1960  Tarzan the magnificent (Tarzan le magnifique) (Robert Day) – 1961  Maciste contro il vampiro (Maciste contre le fantôme) (Giacomo Gentillomo & Sergio Corbucci) – Romolo e Remo (Romulus et Rémus) (Sergio Corbucci & Franco Geraldi) –  Maciste alla corte del Gran Khan (Le géant à la cour de Kublai Khan, Belgique Kublaï Khan et le géant de Mongolie) (Riccardo Freda) – 1962  Il gladiatore di Roma (Le gladiateur de Rome) (Mario Costa) – Il figlio dello Sceicco (Le retour du fils du Cheik) (Mario Costa) – Una regina per Cesare (Cléopâtre, une reine pour César) (Piero Pierotti & Victor Tourjansky) – Il giorno più corto  (Sergio Corbucci ) – 1963  Zorro e i tre moschettieri (Zorro et les 3 mousquataires) (Luigi Capuano) – L’eroe di Babilonia (Hercule héros de Babylone) (Siro Marcellini) – Goliath e la schiava  ribelle (Goliath et l’Hercule noir) (Mario Caiano) – Il leone di San Marco (Le lion de Saint-Marc) (Luigi Capuano) –  Buffalo Bill, l’eroe del Far West (Buffalo Bill, le héros du Far West) (Mario Costa) – Coriolano, eroe senza patria (La terreur des gladiateurs) (Giorgio Ferroni) – Ercole contre Moloch (Hercule contre Moloch) (Giorgio Ferroni) –1964  Il colosso di Roma (Le colosse de Rome) (Giorgio Ferroni) – 1965  Gli  uomini dal passo pesante (Les forcenés) (Mario Sequi & Albert Band) – Hercules and the Princess of Troy (Albert Band, TV, 48 minutes) -1966  Il raggio infernale / Nido de espías (Le rayon infernal) (Gianfranco Baldanello) –  1967  Segretissimo / Secretesimo (Le requin est au parfum) (Fernando Cerchio).

©   Le coin du cinéphage (reproduction strictement interdite, textes déposés)

 

Fragments d’un dictionnaire amoureux : André Valardy

Jacques Mazeau & Didier Thouart  dans « Les grands seconds rôles du cinéma français » (Pac, 1984), précieux livre hélas épuisé, saluait le grand talent de ce comédien. Son visage très mobile et son habituel petit air goguenard faisait merveille dans bien des comédies. Ce comédien belge est mort à Paris, le 30 avril dernier à Paris, des suites d’un cancer, à l’âge de 68 ans. Au cinéma, il excelle en journaliste minable, collègue de Jean Rochefort, découvrant des martiens – nommés les Gammiens -… en Bretagne ! dans l’ahurissant « Ne jouez pas avec les martiens » (Henri Lanoë, 1967). On le retrouve en automobiliste baba-cool pris en stop par Jacques Brel dans « L’emmerdeur » (Édouard Molinaro, 1973), ou en syndicaliste profitant de la sympathie qu’il suscite auprès de son patron incarné par Pierre Mondy dans « Le téléphone rose » (Molinaro toujours, 1975), pour tirer son épingle du jeu lors de grèves. Il est irrésistible en psychologue d’entreprise utilisant la malchance de François Perrin, joué à la perfection par Pierre Richard dans « La chèvre » (Francis Veber, 1981). Il trouve l’un de ses meilleurs rôles à la télévision dans l’épisode « Urbain » de la série « La ligne de démarcation » (Jacques Ertaud, 1973). Il incarne un citoyen belge débrouillard, qui se lance dans la résistance avec beaucoup d’enthousiasme, face à un Louis Lyonnet – comédien mort en février dernier – intrigué. Son personnage se sert de ses qualités sportives, en se déguisant en coureur cycliste pour passer des documents. Les soldats allemands le laissent passer… en l’applaudissant ! Il restait fidèle au théâtre où son univers non-sensique à l’instar d’un Jean-Paul Farré, faisait merveille. Il connut aussi une grande popularité à la télévision avec des émissions comme « Allons raconte », « L’académie des 9 », « Le bon mot » ou « La classe ». En 2003, il se produisait dans son one-man-show « André Valardy – Un monde fou… fou… fou… », co-écrit avec Jean-François Champion et Jean-Marc Ferréol, où le L.S.D. devenait « Le Lifting Sans Douleur, » ou l’.E.T.A., « Épilation Traitement Assuré » (Source Théâtre on line.). On le retrouvait rarement sur un grand écran ces derniers temps, mais il marquait toujours la moindre de ses apparitions. Citons le montreur d’ours ébaubi de voir son ours « divinisé » se mettant à parler dans « Que la lumière soit ! » (Arthur Joffé, 1997), le fantôme du père de Sophie Marceau, danseur de claquettes dans « La fidélité » (Andrej Zulawski, 1999), et l’acteur cabotin de théâtre, capitalisant sa popularité pour avoir été la vedette d’un feuilleton des années 60 en restant suffisant dans « 30 ans » (Laurent Perrin, 2000). Il avait réalisé trois courts métrages, dont « L’erreur est humaine » (1984), avec Renée Saint-Cyr, Marthe Villalonga et Alain Flick, racontant les déboires d’une vieille dame qui devient bonne dans un immeuble et « Le fauteuil magique » (1992) avec Marthe Villalonga et Olivier Lejeune, mettant en scène un jeu télévisé. A lire l’hommage de Donatienne Roby pour Les gens du cinéma. 

Annonce également de la mort du comédien italien Luigi Filippo d’Amico le 28 avril dernier.

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André Valardy au théâtre Saint-Georges à Paris, en juin 1989

Filmographie (établie avec Christophe Bier) : 1959  Les frangines (Jean Gourguet) – 1966  Bang-Bang (Serge Piollet) – 1967  Ne jouez pas avec les Martiens (Henri Lanoë) – 1971  Papa, les petits bateaux (Nelly Kaplan) – 1973  L’emmerdeur (Édouard Molinaro) – Les aventures de Rabbi Jacob (Gérard Oury) – 1974  Parlez-moi d’amour (Michel Drach) – L’important c’est d’aimer (Andrzej Zulawski, rôle coupé au montage) – 1975  Le téléphone rose (Édouard Molinaro) – 1976  Bobby Deerfield (Id) (Sydney Pollack) – 1977  Monsieur Papa (Philippe Monnier) – Le point de mire (Jean-Claude Tramont) – La raison d’état (André Cayatte) – 1979  Nous maigrirons ensemble (Michel Vocoret) – Les Charlots en délire (Alain Basnier) – Je vais craquer (François Leterrier) – 1980  Rendez-moi ma peau (Patrick Schulmann) – Faut s’les faire ces légionnaires ! (Alain Nauroy) – 1981  La chèvre (Francis Veber) – 1982  Légitime violence (Serge Leroy) – Les voleurs de la nuit (Samuel Fuller) – 1983  Attention ! une femme peut en cacher une autre (Georges Lautner) – Amercian Dreamer (titre vidéo : Une américaine à Paris) (Rick Rosenthal) – 1984  Sous peine de poursuite (Vincent Vidal, CM) – 1986  Lévy et Goliath (Gérard Oury) –  1987  En toute innocence (Alain Jessua) – 1995  Iraé (Alain Bellon, CM) – 1997  Que la lumière soit ! (Arthur Joffé) – 1999  La fidélité (Andrzej Zulawski) – 30 ans (Laurent Perrin) – 2006  Nothing sacret (Dylan Bank & Morgan Pehme). Comme réalisateur-scénariste : 1984  L’erreur est humaine (CM) – 1992  Le fauteuil magique (CM) – non daté : « Boule de haine ».

Télévision(notamment) : 1968  Ton sur ton (Georges Barrier, variétés) – 1970  Une heure, une vie (Alain Dhénaut) – 1973  Il faut que le Sycomore coule (Jean-Paul Sassy, captation, captation) – La ligne de démarcation : Urbain (Jacques Ertaud) – 1974  À dossiers ouverts : La malédiction de l’ogre (Claude Boissol) – 1974  Messieurs les jurés : L’affaire Varney (André Michel) – 1978  Ce diable d’homme (Marcel Camus, série TV) – 1980  Petit déjeuner compris (Michel Barny, série TV) -Le dossiers de l’écran : Vient de paraître (Yves-André Hubert) – 1981  À nous de jouer (André Flédérick) – Julien Fontanes magistrat : Un si joli nuage (Jean Pignol) – Arcole ou la terre promise (Marcel Moussy, série TV) – Au bon beurre (Édouard Molinaro) – 1982  Le sud (Philippe Monnier) – Julien Fontanes magistrat : Une fine lame (François Dupont-Midy) – Aide toi… (Jean Cosmos) – Cinéma 16 : Le wagon de Martin (Patrick Saglio) – 1990  Le grand dîner (Gérard Pullicino, divertissement) – 1991  Navarro : Comme des frères (Patrick Jamain) – 1996  Navarro : Comme des frères (Patrick Jamain) – 2000  Le juge est une femmes : Cadeau d’entreprise (Pierre Boutron) – 2002  Navarro : Sur ma vie (Patrick Jamain) – 2003  Navarro : Ne pleure pas Jeannettes (José Pinheiro) – Ne pleure pas (Josée Dayan) – 2005  Navarro : Manipulation (Édouard Molinaro).