Si on devait distribuer le prix du comédien le plus sympathique du cinéma français, Robert Rollis pourrait aisément y prétendre. Il était un des enfants des “disparus de Saint-Agil”, l’un des plus aisément repérable. Il avait une gouaille dans sa voix. Il la prête régulièrement pour des dessins animés, comme celle de “Pouce-moussu” dans l’émission enfantine “Les quat’zamis”, animé par Fabrice, sur Antenne 2 à la fin des années 70. Dans “Les Tortillards” (Jean Bastia, 1960), il est un des membres la famille d’artistes dirigée par “L’illustre Beauminet” campé par un truculent Jean Richard. Il se présente à Roger Pierre, comme acteur de seconds rôles “spécialisé dans les têtes de turc”. Il est vrai qu’il est souvent le bon copain, à l’image de son personnage de Léon dans les deux opus de “Papa, maman…” de Jean-Paul Le Chanois, surnommé par Fernand Ledoux “Alibi”, il couvre les frasques de Robert Lamoureux, sorte de “Tanguy” avant l’heure, vivant encore chez ses parents. Robert Rollis et souvent goguenard, comme dans “Nous autres à Champignol” et “Le gendarme à Champignol”, il est irrésistible en farceur, toujours le sourire aux lèvres, et prompt à préparer une mauvaise blague contre Jean Richard. Il est également l’un des piliers des Branquignols, aux côtés de Robert Dhéry et Colette Brosset. Il est coiffeur dans “La belle américaine”, un supporter goguenard d'”Allez France !”, un marin fidèle au poste de l'”Increvable”, navire qui se dégrade à chaque inauguration au champagne par Louis de Funès dans “Le petit baigneur”, un breton cul-de-jatte dans “Vos gueules les mouettes !”…. Il devient très populaire grâce à son personnage de Jehan dans “Thierry La Fronde” dont l’intégrale est disponible en DVD. Il sauve bien des comédies franchouillardes par sa présence, souvent en vélo d’ailleurs, C’est un voleur de scènes. Le voir par exemple en pensionnaire d’une maison de retraite dans “Monique”, nous fait regretter sa sous-utilisation ces derniers temps. Il reste presque inchangé également dans “Les amateurs” sorti en janvier 2004, en père de l’atypique Jean-Jacques Vannier, vieux paysan devenu “bredin” suite à une farce de gamins escamoteurs d’échelle, et qui ne s’exprime que par cris. Martin Valente avait hésité de confier ce rôle à ce formidable acteur, ne le trouvant pas à la hauteur de son talent. Dans le même sillon, il est “72 moissons” dans “Camping à la ferme”, de Jean-Pierre Sinapi. Il est l’ancêtre râleur du village, cultivant son champ, sans rien planter histoire de recevoir des subventions, revendique une sécheresse de cœur et meurt en laissant un gros magot dans une boîte à sucre. Le site des Gens du cinéma, pour lequel j’avais fait sa filmographie, nous donne la triste nouvelle de sa mort le 12 novembre 2007, à Paris, des suites d’un cancer foudroyant, à l’âge de 83 ans.

Robert Rollis & Aghmane Ibersiene dans “Camping à la ferme”
Filmographie : établie avec Armel de Lorme : 1937 La marseillaise (Jean Renoir) – 1938 Les disparus de Saint-Agil (Christian-Jaque) – Le roman de Werther (Max Ophuls) – Carrefour (Kurt Bernhardt) – La fin du jour (Julien Duvivier) – 1939 L’enfer des anges (Christian-Jaque) – Notre-Dame de la Mouise (Robert Péguy) – 1941 Premier rendez-vous (Henri Decoin) – Péchés de jeunesse (Maurice Tourneur) – Caprices (Léo Joannon) – Annette et la dame blonde (Jean Dréville) – 1942 Les cadets de l’océan (Jean Dréville) – 1943 Le carrefour des enfants perdus (Léo Joannon) – Lucrèce (Léo Joannon) – 1945 Les démons de l’aube (Yves Allégret) – 1946 Amours, délices et orgues (André Berthomieu) – 1947 Blanc comme neige (André Berthomieu) – 1948 Les amants de Vérone (André Cayatte) – Le bal des pompiers (André Berthomieu) – Tous les deux (Louis Cuny) – 1949 On ne triche pas avec la vie (René Delacroix & Paul Vandenberghe) – La femme nue (André Berthomieu) – La petite chocolatière (André Berthomieu) – 1950 Justice est faite (André Cayatte) – Le roi des camelots (André Berthomieu) – Une fille à croquer / Le petit chaperon rouge (Raoul André ) – 1951 La maison dans la dune (Georges Lampin) – Jamais deux sans trois (André Berthomieu) – Chacun son tour (André Berthomieu) – La maison Bonnadieu (Carlo Rim) – Drôle de noce (Léo Joannon) – 1952 Belle mentalité (André Berthomieu) – Allô… je t’aime (André Berthomieu) – Adorables créatures (Christian-Jaque) – Les dents longues (Daniel Gélin) – 1953 Le portrait de son père (André Berthomieu) – Virgile (Carlo Rim) – L’oeil en coulisses (André Berthomieu) – L’incentevole nemica (Pattes de velours) (Claudio Gora) – Une vie de garçon (Jean Boyer) – Faites-moi confiance (Gilles Grangier) – Le village magique (Jean-Paul Le Chanois) – 1954 Les évadés (Jean-Paul Le Chanois) – Les deux font la paire (André Berthomieu) – Papa, maman, la bonne et moi (Jean-Paul Le Chanois) – 1955 Le dossier noir (André Cayatte) – La madelon (Jean Boyer) – Papa, maman, ma femme et moi (Jean-Paul Le Chanois) – Cette sacrée gamine (Michel Boisrond) – 1956 La vie est belle (Roger Pierre & Jean-Marc Thibault) – Nous autres à Champignol (Jean Bastia) – 1957 Trois jours à vivre (Gilles Grangier) – La garçonne (Jacqueline Audry) – L’étrange Monsieur Stève (Raymond Bailly) – L’amour est en jeu (Marc Allégret) – Le grand bluff (Patrice Dally) – 1958 En légitime défense (André Berthomieu) – Le miroir à deux faces (André Cayatte) – Suivez-moi jeune homme (Guy Lefranc) – Le grand chef (Henri Verneuil) – Le gendarme de Champignol (Jean Bastia) – L’increvable (Jean Boyer) – 1959 Die Gans von Sedan (Sans tambour ni trompette) (Helmut Kaütner) – 1960 Ravissante (Robert Lamoureux) – Les moutons de Panurge (Jean Girault) – La brune que voilà (Robert Lamoureux) – Les amours de Paris (Jacques Poitrenaud) – L’homme à femmes (Jacques-Gérard Cornu) – Ma femme est une panthère (Raymond Bailly) – La française et l’amour [épisode : La femme seule] (Jean-Paul Le Chanois) – Les tortillards (Jean Bastia) – La famille Fenouillard (Yves Robert) – Quai Notre-Dame (Jacques Berthier) – 1961 La belle Américaine (Robert Dhéry & Pierre Tchernia) – Tout l’or du monde (René Clair) – Le petit garçon de l’ascenseur (Pierre Granier-Deferre) – La guerre des boutons (Yves Robert) – 1962 Les veinards [épisode : Le gros lot] (Jack Pinoteau) – Les culottes rouges (Alex Joffé) – C’est pas moi, c’est l’autre (Jean Boyer) – Mélodie en sous-sol (Henri Verneuil) – Paris champagne (Pierre Armand) – Le glaive et la balance (André Cayatte) – Strip-tease (Jacques Poitrenaud) – 1963 L’honorable Stanislas, agent secret (Jean-Charles Dudrumet) – Laissez-tirer les tireurs (Guy Lefranc) 1964 Allez France ! (Robert Dhéry) – Week-end à Zuydcoote (Henri Verneuil) – What’s new Pussycat ? (Quoi de neuf, Pussycat ?) (Clive Donner) – 1965 La tête du client (Jacques Poitrenaud) – Le caïd de Champignol (Jean Bastia) – Les baratineurs (Francis Rigaud) – 1966 Le jardinier d’Argenteuil (Jean-Paul Le Chanois) – Trois enfants dans le désordre (Léo Joannon) – Monsieur le président directeur général (Jean Girault) – 1967 Le petit baigneur (Robert Dhéry) – 1968 Un drôle de colonel (Jean Girault) – Faites donc plaisir aux amis (Francis Rigaud) – La femme écarlate (Jean Valère) – 1969 La maison de campagne (Jean Girault) – Trois hommes sur un cheval (Marcel Moussy) – 1972 La raison du plus fou (François Reichenbach) – 1973 Les gaspards (Pierre Tchernia) – L’événement le plus important depuis que l’homme a marché sur la Lune (Jacques Demy) – Le concierge (Jean Girault) – 1974 Vos gueules les mouettes ! (Robert Dhéry) – Impossible… pas français ! (Robert Lamoureux) – 1975 On a retrouvé la 7ème compagnie (Robert Lamoureux) – Opération Lady Marlène (Robert Lamoureux) – 1976 Le jour de gloire (Jacques Besnard) – Dis bonjour à la dame (Michel Gérard) – 1977 Moi, fleur bleue ! (Eric Le Hung) – 1978 Général… nous voilà ! (Jacques Besnard) – Les fabuleuses aventures du baron de Münchhausen (Jean Image, dessin-animé, voix) – 1979 La gueule de l’autre (Pierre Tchernia) – 1980 Touch’ pas à mon biniou (Bernard Launois) – 1981 Le jour se lève… et les conneries commencent (Claude Mulot) – Te marre pas… c’est pour rire ! (Jacques Besnard) – 1982 Le braconnier de Dieu (Jean-Pierre Darras) – Le secret des Sélénistes (Jean Image, dessin animé, voix) – 1986 Nuit docile (Guy Gilles) – 1987 A notre regrettable époux (Serge Korber) – Bonjour l’angoisse (Pierre Tchernia) – 1999 Tout tout près (Fabrice Maruca, CM) – 2001 Monique (Valérie Guignabodet) – 2002 Les amateurs (Martin Valente) – 2004 Camping à la ferme (Jean-Pierre Sinapi). Nota : Il ne semble pas participer aux films suivants, bien que parfois crédité : “Les Duraton” (André Bethomieu, 1955), “Signé Arsène Lupin” (Yves Robert, 1959).
Dans “Papa, maman, ma femme et moi”
Télévision : notamment : 1962 L’inspecteur Leclerc enquête : Face à face (Marcel Bluwal) – L’oiseau de bonheur (Georges Folgoas) – 1963/1966 Thierry La Fronde (Pierre Goutas & Robert Guez) – 1964 Médard et Barnabée (Raymond Bailly) – 1965 Le troisième témoin (Georges Folgoas, captation en direct) – Bob Morane (1 épisode) – La bonne planque (Louis Verlant) – Les saintes chéries : Ève de la maison de Compiègne (Jean Becker & Maurice Delbez) – 1967 Saturnin Belloir (Jacques-Gérard Cornu) – 1970 Au théâtre ce soir : Frédéric (Pierre Sabbagh) – Au théâtre ce soir : La brune que voilà (Pierre Sabbagh) -1971 Madame êtes-vous libre ? (Jean-Paul Le Chanois) – 1973 Au théâtre ce soir : La poulette aux oeufs d’or (Georges Folgoas) – Arsène Lupin : Le secret de l’aiguille (Jean-Pierre Desagnat) – Le vagabond (Claude-Jean Bonnardot) – Un curé de choc : Hold-up campagnard (Philippe Arnal) – 1975 Pilotes de courses (Robert Guez) – La vie de plaisance (Pierre Gautherin) – Les Zingari (Robert Guez) – 1976 Le milliardaire (Robert Guez) – 1977 Les folies d’Offenbach (Michel Boisrond) – Commissaire Moulin : Cent mille soleils (Claude-Jean Bonnardot) – Le passe-muraille (Pierre Tchernia) – 1980 Tout le monde m’appelle Pat (Robert Guez) – La vie des autres : L’intruse (Robert Guez) – Arsène Lupin joue et perd (Alexandre Astruc) – 1982 Des yeux pour pleurer (André Cayatte) – Toutes griffes dehors (Michel Boisrond) – 1983 Père Noël et fils (André Flédérick) – 1984 Péchés originaux : J’ai comme une musique dans la tête (Philippe Monnier) – 1986 Le tiroir secret (Édouard Molinaro, Nadine Trintignant, Michel Boisrond & Roger Guillioz) – 1991 Intrigues : Scoop (Emmanuel Fonlladosa) – Intrigues : Trou de mémoire (Dominique Giuliani) – 1992 Un beau petit miliard (Pierre Tchernia) – 1998 Dossiers disparus : Serge et Patrick – 2000 Avocats et associés : La preuve par le vide (Denis Amar) – 2005 Faites comme chez vous (Plusieurs réalisateurs).
Mise à jour du 16/11/2007




“Douches froides” est un film dans la filiation de l’œuvre d’André Téchiné (érotisation des corps adolescents et tourments à l’approche de l’âge adulte). Son réalisateur, Antony Cordier, venait de le présenter à la quinzaine des réalisateurs à Cannes, et fait suite à un documentaire “Beau comme un camion” consacré à sa famille. Il vient d’un milieu social modeste, ce qui reste assez exceptionnel dans notre cinématographie. Le film révèle parfaitement les pressions qui pèsent sur un adolescent – scolarité, compétitions sportives, pour accéder à un meilleur statut social -. C’est Mikaël – Johan Libéreau, très juste -. dont les parents vivent dans la précarité. Le réalisateur a une certaine sensibilité pour traduire les premiers émois d’un adolescent, la description d’un milieu difficile obligé de rogner sur le moindre coût. 

Ce mercredi vient de sortir le nouveau film de Thomas Vinterberg, qu’on appréhendait après le réfrigérant “It’s about love”, faux film d’anticipation, qui semblait montrer les limites du cinéaste. “Festen” était pourtant un petit bijou, allant bien au-delà du cadre du Dogme, dont on se demande si c’était une invention de petits malins ou une véritable révolution cinématographique… Vinterberg apporte ici une empathie au scénario cadré de Lars Von Trier. L’utilisation de Jamie Bell, héros du film et qui fut Billy Eliott, est une bonne idée. Il amène beaucoup de sensibilité à son personnage d’orphelin, on pense au Lucas Belvaux des années 80. Son personnage ne trouve d’échappatoire pour échapper au déterminisme d’une petite ville minière qu’en formant un club de “Dandy” fasciné par les armes, avec les jeunes désœuvrés assez archétypaux du lieu.
Evidemment depuis le succès planétaire du film de William Friedkin “L’exorciste”, nous avons droits à une multitude de produits dérivés, un récent lifting qui n’apporte rien, deux suites dont l’excellente de John Boorman – film à réévaluer, se démarquant de l’oeuvre originelle -, et la “prequel”, “L’exorciste au commencement”, commencé par Paul Schrader, version abandonnée au profit d’un retournage plus spectaculaire par Renny Harlin – on nous promet les deux versions dans un même DVD -. Le troisième opus de 1990 est réalisé par William Peter Blatty, lui-même auteur du livre originel, qui abandonne les pistes de John Boorman – trop décrié par les fans et par Blatty lui-même, mais encore une fois, son film est remarquable -, et la révélation du démon Pazuzu. Le film adapté de son roman “Legion”, fait suite à la première version, quinze après, en reprenant comme fil conducteur le personnage du Lieutenant William Kinderman, joué par Lee J Cobb, mais disparu en février 1976. C’est le vétéran George C. Scott, qui lui ressemble d’ailleurs qui prend la relève, et c’est on peut le dire le meilleur et le plus spectaculaire effet spécial du film. Il est un peu trop âgé pour le rôle, la nuance n’est pas trop son fort, mais il est remarquable cependant.
Il y a des jours où l’on ressort d’un film amusé, satisfait, sans vouloir ergoter sur une absence d’inventivité dans la mise en scène. Nous voyons donc ici le dernier avatar après le BD de Florence Cestac et le spectacle de Michèle Bernier. Première surprise on attendait à retrouver l’abattage de cette dernière, mais son personnage Anne, est désabusée, blessée, tout en retenue et même simplement belle. Elle continue son personnage de femme quadra, en mal d’amour mais combatif comme dans le très juste téléfilm “Haute coiffure” de Marc Rivière présenté sur Arte l’an dernier. Autre personnage fort, celui de Julien joué par le brillant Simon Abkarian, passant de la lâcheté aux affres du quotidien, voir la scène où il passe en une fraction de secondes, dans un café, d’excuses touchantes à la jubilation d’un but marqué, en voyant un match de foot sur un écran TV. Ce comédien confirme à chacun de ses films combien il est devenu important.
Autre beau moment et non le moindre, les deux scènes avec Claudia Cardinale – il y a deux extraits de deux de ses films “Sandra” et “Cartouche” -. Elle console Anne en parlant des surprises de la vie, et de ne plus trop se reconnaître en voyant ses premiers films. Un joli moment. Un film où l’on passe un bon moment et plus profond qu’il n’y paraît.
Avant-première hier à l’UGC Ciné-Cité Bordeaux, du second film d’Emmanuel Carrère – après le documentaire “Retour à Kotelnitc” en 2003 -, “La moustache” en présence du réalisateur et de Vincent Lindon. La visite se fait avant le film, le comédien déplorant ne pas pouvoir rester “pour un milliard de raisons”. C’est finalement une bonne chose, de ne pas avoir la tentation de demander ensuite une explication de texte au metteur en scène. Vincent Lindon assez calme, présente ce “premier” film – de fiction -, comme sa plus belle expérience au cinéma, son autre premier film – “Prunelle blues” ?” étant pour lui son plus mauvais. Il raconte que lors de son 45ème anniversaire l’an dernier sa mère lui avait déclaré ne toujours pas regretter sa venue au monde, Emmanuel Carrère, au 30 ème jour de tournage, lui avait confiait la même chose pour son travail avec lui. Cette espère de corrélation rassurante, nous montre un Vincent Lindon, inquiet, satisfait de compter pour son entourage. L’idéal est de savoir le moins possible sur ce film, mais – n’ayant pas vu la première œuvre cinématographique -, la certitude est de tenir un authentique cinéaste en la personne d’Emmanuel Carrère, alors qu’il a déjà été gâté par ses adaptations par Claude Miller “La classe de neige” et Nicole Garcia “L’adversaire”.


Jean-Pierre Sinapi
C’est un pied de nez salutaire et potache à l’Amérique bien pensante, qui se scandalise à la vue d’un sein – celle qui se scandalise à la vue du sein de Janet Jackson, lors du superbowl, ou la récente censure des dessins animés de Tex Avery par Warner, voir le site de