Skip to main content

MAROCK

 Avant-première le 2 février 2005 du film « Marock » premier film de la réalisatrice Laïla Marrakchi, en sa présence et celles de Razika Simozrag, Morjana El Alaoui et Rachid Behaissan, une équipe très dynamique et sympathique. Ce film qui a suscité quelques polémiques au Maroc, voir lien avec Yabiladi, qui nous semblent incompréhensible à l’issue du film. Les  artistes vétérans marocains qui furent choqué par la vision de la réalisatrice, au festival du film national de Tanger, qui par honnêteté à décrit ce qu’elle a connu du Maroc en 1997, du point de vue de sa classe, « la jeunesse dorée », et insouciante, à l’avenir tout tracé. Influencée par « La fureur de vivre » de Nicholas Ray, elle retrace l’année du bac de Rita, une jolie musulmane – Morjana El Aloui, qui capte aisément la lumière et que la caméra aime visiblement – , 17 ans et de ses deux amies. Elle tombe amoureuse de Youri – Mathieu Boujenah -, qui appartient à la communauté juive de Casablanca, d’où un début d’histoire d’amour dans la grande tradition Roméo + Juliette, évoquée avec beaucoup de sensibilité. Loin d’être provocante, cette évocation reste chaste, à l’image d’un baiser tendre entre les deux personnages. Les excès inhérents à cette génération (drogue et alcool) devrait expliquer les polémiques dont ce film fait objet chez les artistes confirmés au Maroc.

Fatym Layachi, Morjana El Alaoui & Razika Simozrag

La réalisatrice en parlant de son expérience et de ses années d’études – elle vient d’une famille aisée -, tente sans fioriture de jouer contre les clichés, de parler d’une histoire d’amour universelle en retrouvant ses souvenirs. Le film est moins désinvolte que l’on pourrait le croire, elle décrit par petites touches un pays qu’elle aime, rappelant par petites touches un Maroc moins privilégié, comme le vieil homme priant dans un parking entre deux voitures, où ces hommes jouant aux dames avec des capsules en plastiques. Déterminée, Laïla Marrakchi a répété plusieurs mois avec ces jeunes interprètes – tous probants -. Elle passe facilement de l’émotion aux rires, soulignons particulièrement la scène de réconciliation entre Rita et son frère Mao – Assaad Bouab, apportant une complexité à son personnage -, de manière presque chorégraphique. Ce film est un souffle d’air frais, sans prétention, porté par l’enthousiasme de ses interprètes. C’est une proposition, certes partiale et d’un certain point de vue, mais le film ne méritait pas toutes ces polémiques. Les Marocains de Bordeaux, retrouvaient pour beaucoup leurs souvenirs, et la beauté des lieux, il n’y a d’ailleurs eu aucune polémique ce soir là. La réalisatrice, femme du cinéaste Alexandre Aja, ne prétend d’ailleurs pas à dépeindre la totalité du Maroc. Un talent à encourager donc, sortie mercredi prochain.

LE COIN DU NANAR : BANDIDAS

 Monsieur Besson,  la mode est à la pseudo-lettre pour un destinataire qui ne la recevra évidemment pas, du genre faussement intime. J’étais parti pour l’insulte genre  « A bas Luc Besson », à la vision de votre dernière bessonade « Bandidas », grâce au « Dictionnaire des injures » de Robert Édouard édité chez Tchou en 1970 et trouvé chez un bouquiniste. A bas signifie selon lui  : « Se lance sur le passage de quelqu’un qui n’a pas les pieds sur terre (qui est dans les nuages, ou dans la lune), pour l’inciter à reprendre contact avec le monde réel. Parfois, pour exprimer le désir – ou annoncer le projet qu’on a formé – de faire descendre un individu quelconque du piédestal où il est abusivement hisser… ou à qui l’on reproche, plus encore que d’être allé trop loin, d’en être revenu… » . Bon le début ça ne colle pas trop, vous avez les pieds sur la terre, mais la seconde partie est probante. Mais les insultes ne sont pas très constructives, et d’abord quand on va voir un film écrit par Luc Besson – je sais ça fait toujours rire -, il ne faut que s’en prendre à soi, on ne va pas se régaler quand on va voir un « speed rabbit movie ». Car j’ai changé de comportement depuis que je suis « ugécétifié »,  encarté quoi, je délaisse les films d’auteurs diffusés à l’UTOPIA uniquement, pour aller voir des divertissements sans âmes tel ce « Bandidas » bas de gamme. Je me dis pourquoi pas, c’est en V.O. dans l’UGC local, les deux comédiennes sont plaisantes, il y a Steve Zahn excentrique patenté, et même Sam Shepard, dans l’increvable cliché du mentor. Pour ce dernier, ce film est la seule ombre au tableau d’une filmographie exigeante, on dirait un des films tournés par son personnage d’Howard dans le film de Wim Wenders, « Don’t come knocking ». Le film est cornichon à souhait, même pas bandant, même pas plaisant. Penelope Cruz vous commande un projet pour qu’elle puisse tourner avec Salma Hayek. Ni une, ni deux, la machine à dupliquer les films déjà existants, est en marche, l’équation est simple « Les pétroleuses »,  film désinvolte, mais charmant de Christian-Jacque, avec le duo sensuel Claudia Cardinale – sublimissime – et Brigitte Bardot, + « Viva Maria » (1965) de Louis Malle avec Bardot toujours et Jeanne Moreau, à défaut d’être original. Donc on retrouve Sara – Salma Hayek -, fille d’un riche banquier et Maria fille d’un pauvre peone – Penelope Cruz -, aux prises avec un des méchants les plus pitoyables de ces dernières années, « Tyler Jackson » – joué par Dwight Yoakam zombiesque à souhait -.

Hayek + Cruz : Europacorp… fixe

Au final entre deux gags lamentables – le hoquet de Sara, répété à l’envi… -, l’esthétique publicitaire – et pour cause vous avez péché deux publicitaires norvégiens Joachim Roenning & Espen Sandberg, on dirait un canular -, des animaux crétins-malins à la Morris – on finit par regretter les « Dalton » de Philippe Haïm, c’est dire…-, on subit la musique poussive d’Éric Serra. Pourtant il y a des moyens, une belle photo de Thierry Arbogast mais que l’on préfère au service d’un Jean-Paul Rappeneau, des décors reconnus de l’État de Durango, si souvent utilisés. On ressort de ce film avec une triste impression de gâchis. Monsieur Besson, donc, non content de planquer votre cynisme derrière une roublardise, de celui qui n’a pas cédé aux sirènes hollywoodiennes, et est resté simple circulant à Paris en moto. Tout chez vous est calcul, entre les déclinaisons « Nikitesques », service minimum du film européen louchant sur l’International, vous faites même des petits comme Roselyne Bosch et son pathétique « Animals », la prétention en plus, les effets d’annonce et la stratégie du secret. Tout est assez vain chez vous, de l’apologie du suicide du « Grand bleu » – quand on attend un enfant de Rosanne Arquette céder à l’abîme c’est d’une noirceur inouïe -, à l’improbable cliché du tueur solitaire. Comme je suis un peu couillon  – d’ailleurs je suis resté chez 20six après migration, pensant naïvement qu’il va y avoir quelques progrès, c’est dire si j’ai ma dose d’imbécillité… -, j’attends de vous une prise de conscience, un changement de cap dans votre fumisterie généralisée, que vous aidiez quelques metteurs en scènes, et non d’utiliser certains talents qui font bien dans le CV – j’ai entendu le témoignage de Jean-Paul Rouve sur le film « Bunker paradise », distribué sans conviction par « Europacorp » -. Vous dites travailler pour le public, dont je fais parti, mais on vous soupçonne de participer à la restauration de votre château, et cessez votre chantage affectif et  puéril sur votre présumé abandon comme cinéaste après menace de largage de créatures Minimoys. Je suis assez naïf, mais un auteur qui avait pour acteur fétiche Jean Bouise, ne peut pas être foncièrement mauvais.

BROTHERS

 Membre de l’équipe de cinéastes gravitant autour de Lars Von Trier, Susanne Bier suit ici les voies du dogme, avec le bonheur d’un cousinage avec le beau « Festen » de Thomas Vinterberg, auquel on pense beaucoup en retrouvant son protagoniste principal : Ulrich Thomsen. La réalisatrice qui a déjà filmé « Open Hearts » respectant les contraintes du « dogme », gimmick efficace Vontrierien, cite d’ailleurs ce grand film, avec quelques scènes ironiques de repas, dont une où une petite fille règle ses comptes avec son père. Même si ce film danois n’égale pas la réussite du précédent, le film a une acuité de regard indéniable. Le postulat de départ est le suivant, Michael – Ulrich Thomsen donc – va chercher son frère Jannik de prison – Nikolaj Lie Kaas -. Tout oppose les deux frères qui s’aiment énormément, Michael est le fils préféré de son père, a une épouse sublime – Connie Nielsen, vue il y a peu en femme fatale dans « Faux amis » d’Harold Ramis -, deux filles adorables, un métier solide de militaire, une maison de rêve, Jannik, lui est asocial, a raté lamentablement un braquage de banque, boit beaucoup et est anti-conformiste. Le retour du fils prodigue ne fait pas plaisir à son père, un taiseux patenté, mais Jannik tente de s’intégrer. Michael part lui en mission pour l’ONU en Afghanistan…

Connie Nielsen & Ulrich Thomsen

Sans vouloir déflorer l’histoire, le postulat de départ va être malmené sérieusement. Dans un climat faussement rassurant d’un pavillon familial, un évènement redéfinit les liens, certains étant rapidement effilochés, d’autres se solidifiant. Le scénario d’Anders Thomas Jensen, est brillant et non dénué d’humour, à l’image de la mère de Jannik qui lui prépare un canard, croyant par on ne sait quel quiproquo, que c’est le plat préféré de son cadet.  Les deux frères ont du caractère qu’ils vont utiliser parfois de manière surprenante pour des questions de survie. Comme « Festen » les apparences vont valdinguer, laissant poindre la détresse ou même la folie. Avec beaucoup de pudeur, malgré quelques maniérismes de mises en scènes, comme l’inévitable caméra portée séquelle du dogme – ce film ne respectant pas toutes les contraintes, ne peut donc pas y appartenir – assume ici les névroses de ses personnages. Les acteurs sont solides, la musique est envoûtante. On retrouve de réelles qualités, une aptitude à décrire l’intimité comme une agressivité étonnante. Susanne Bier a réussi à faire un film à l’atmosphère prenante de bout en bout.

Fragments d’un dictionnaire amoureux : Thierry Fortineau

  

Annonce de la mort prématurée de Thierry Fortineau, des suites d’un cancer. Ce comédien à la carrière théâtre exemplaire, voir les articles suivants, a eu quelques beaux rôles au cinéma, du gendre trop idéal pour être honnête de Michel Serrault dans « Bonjour l’angoisse » (Pierre Tchernia, 1987) au grand bourgeois, brillant dans les soirées mondaines où le cynisme triomphe dans « Gabrielle » (Patrice Chéreau, 2004). François Dupeyron lui a donné un de ses meilleurs rôles dans le très beau « Un cœur qui bat » (1990), film à redécouvrir, où il est un brocanteur qui tombe amoureux d’une femme mariée – Dominique Faysse -, où il se montre sensible et attachant. Il était un des principaux protagonistes du mésestimé « Le brasier » (1990), où il montrait une solidité face au travail harassant de la mine et de « L’homme de sa vie » (1991), en libraire au chômage et misanthrope qui retrouve l’amour avec Maria de Medeiros. On se souvient du prisonnier évadé grâce à la détermination de sa femme – jouée par Béatrice Dalle – de « La fille de l’air » (Maroun Bagdadi, 1992), histoire véritable de Michel Vaujour. Il arrivait à tirer toujours son épingle du jeu, même dans des films assez académiques comme « Comédie d’été » (Daniel Vigne, 1988), ou « L’homme de ma vie » (Jean-Charles Tacchella, 1991). Il se faisait rare sur les écrans ces derniers temps pour se consacré au théâtre, mais il avait été un Maurice Papon très probant dans « Nuit noire, 17 octobre 1961 » (Alain Tasma, 2004), à la base un téléfilm sur Canal + mais qui a connu une sortie en salles. Il laisse le souvenir d’un acteur remarquable et discret.

Thierry Fortineau à la cérémonie des Molières en 2003 (Sipa)

Filmographie : 1987  Bonjour l’angoisse (Pierre Tchernia) – Doux amer (Franck Apprederis) – 1988  Vent de galerne 1783 (Bernard Favre) – Un tour de manège (Pierre Pradinas) – Comédie d’été (Daniel Vigne) – 1989  Rendez-vous au tas de sable (Didier Grousset) – Le brasier (Éric Barbier) – 1990  Un cœur qui bat (François Dupeyron) – 1991  Le trou de la corneille (François Hanss, CM) – L’homme de ma vie (Jean-Charles Tacchella) – 1992  La fille de l’air (Maroun Bagdadi) – 1993  Photo (Ivan Maussion, CM) – 2004  Nuit noire, 17 octobre 1961 (Alain Tasma, téléfilm distribué en salles) – Gabrielle (Patrice Chéreau). Télévision (notamment) : 1976  Les mystères de Loudun (Gérard Vergez) –  1981  Mon meilleur Noël : Rien qu’une petite fille (Jean-Pierre Marchand) – 1982  Malesherbes, avocat du roi (Yves-André Hubert) – 1986  Cinéma 16 : Le cadeau de Sébastien (Franck Apprederis) – 1988  L’argent (Jacques Rouffio, série TV) – Haute tension : Histoires d’ombres (Denys Granier-Deferre) – 1989  Femmes de papier (Suzanne Schiffman) – Condorcet (Michel Soutter, série TV) – 1990  L’ami Giono : Ennemonde (Claude Santelli) – Cinéma 16 : Un destin cannibale (Roger Guillot) -1992  Fenêtre sur femme (Don Kent) – 1993  Jules Ferry (Jacques Rouffio) – La porte du ciel (Denys Granier-Deferre) – 1994  La grande collection : Le feu follet (Gérard Vergez) – 1996  Les amants de la rivière rouge (Yves Boisset) – 1997  Frères et flics (Bruno Gantillon, série TV) – 1998  Le prince des imposteurs (Jean-Pierre Prévost) – Un hiver dans la tourmente (Bernard Favre) – 2000  Entre l’arbre et l’écorce (Bruno Gantillon) –  2001  L’instit : Carnet de voyage : Madagascar (Jérôme Laperrousaz) – 2002  Tous les chagrins se ressemblent (Luc Béraud) – 2004  Maigret : Maigret et la demoiselle de compagnie (Franck Apprederis).

NOUVELLE CUISINE

 « Dumplings / Nouvelle cuisine » est un film saisissant et une variation inventive du  mythe de la comtesse Bathory, se nourrissant du sang des vierges pour garder la jeunesse éternelle. C’est la première incursion du cinéaste Fruit Chan dans le cinéma fantastique. Ce film est le prolongement d’un des  sketches « 3 extrêmes », le cinéaste souhaitant développer le personnage de Mei, et en faire un long métrage. Le climat social et la description de la société coréenne déliquescent est ici remarquable – c’est la marque de fabrique du metteur en scène, habitué à dépeindre dit-on la société de son temps. Adapté d’une nouvelle de Lilian Lee, le film met en scène la belle Mei, sorte de sorcière moderne, sans âge et très sensuelle et transfuge de la Chine communiste – exceptionnelle Ling Bai, tricarde à Hongkong par son anticonformisme, elle ici inquiétante, séductrice et désinvolte -, et de Ching Lee – Miriam Yeung Chin Wah, retrouvant l’expressivité d’une actrice de cinéma muet – une ancienne comédienne de sitcom, devenue oisive après un riche mariage avec un homme qui la trompe – Tony Leung Ka Fai, « L’amant » chez Jean-Jacques Annaud, désormais grisonnant -, et qui a peur des premiers signes de vieillissements de sa beauté froide.

Ling Bai / Bai Ling

Mei est très connue pour préparer dans un quartier populaire, de mystérieux petits raviolis vapeur – des dumplings-, dont la chaire rose assez ragoûtante semble avoir des vertus rajeunissantes. Elle fait de mystérieux va et vient pour en trouver la matière première. Ching, délaissée, se laisse tenter sur la foi d’un bouche à oreille encourageant. Le film se voit à deux niveaux, le premier un film d’effroi absolument maîtrisé passant de l’appétit au dégoût, la belle Mei, outre ses talents de cuisinière, étant médecin dans une vie antérieure n’hésite pas à se proposer faiseuse d’anges. La prouesse est de faire monter l’angoisse aussi bien dans des scènes neutres où les grands ensembles s’avèrent tout aussi inquiétants qu’une somptueuse demeure en ravalement, que dans des scènes gore, saisissantes, où l’on se retrouve au bord de la nausée. Baigné d’humour noir – à recommander une scène d’amour avec une jambe dans le plâtre -, le film bafoue allégrement la bienséance. Le second niveau est une critique acerbe de l’individualisme, de la politique de l’enfant unique – garçon de préférence -. L’admirable photographie de Christopher Doyle magnifie de climat délétère, de la dictature des apparences, l’ancienne actrice étant prête à tout pour retrouver sa séduction entière de son ancienne série, où sa jeunesse éclate ressort avec les interminables rediffusions. Quitte à y laisser son âme, pour briller dans une société de dupes, elle ne se pose pas trop de questions, et finit par être vampirisée par Mei. Le film mérite de se laisser désarçonner –  essayer d’imaginer la tête d’une spectatrice, qui se plaignait d’avoir mal digéré à son mari, à l’issue du film – , le choc est rude, mais il est difficile de trouver un univers aussi fort ces derniers temps.

FAUTEUILS D’ORCHESTRE

 Avant-première à l’UGC-Cité Bordeaux, le mardi 31 janvier 2006, de « Fauteuils d’orchestre », le troisième film comme réalisatrice de Danièle Thompson, en sa présence – très empressée pour cause de dîner avec les notables du crû à l’issue du film -, Christopher Thompson, Dani et Claude Brasseur – grande joie, il n’était pas annoncé -. Le film s’ouvre et se ferme sur la voix de Suzanne Flon, une grand-mère gâteau un peu radoteuse, bel hommage que lui rend la réalisatrice, elle ouvre et ferme ainsi le bal, le film lui est dédié. Elle campe donc l’aïeule de Jessica, habitant Mâcon –  Cécile de France, définitivement irrésistible -, dont elle partage l’amour des lieux luxueux. Elle lui conseille de travailler dans cet univers, afin de se rapprocher de ses rêves. Ni une, ni deux, elle arrive à Paris, bluffe, et finit très rapidement par obtenir un travail de serveuse dans une brasserie huppée de la  rue Montaigne, où ne travaillent que des hommes. Son directeur et serveur – François Rollin, bougon mais sympathique qui trouve enfin un rôle à sa mesure -, la fait travailler rapidement pour cause de personnel indisponible, gobant même son petit mensonge quand elle s’autoproclame, reine du tartare. Naïve et énergique, elle observe tout un petit monde de faux-semblants, le lieu étant un carrefour des affaires et des théâtres. Chacun envie un peu le bonheur de l’autre, sans voir qu’ils sont privilégiés.  

Claude Brasseur & Cécile de France

On suit ce microcosme, de Jacques Grumberg, financier autodidacte qui vend sa collection d’œuvres d’arts comme Michel Serrault se séparant de sa collection de livres dans « Nelly et M. Arnaud » – Claude Brasseur, d’une grande subtilité -, de Frédéric, son fils prématurément aigri et assez taciturne – Christopher Thompson dans son meilleur rôle -, jalousant son père de sa belle maîtresse – Annelise Hesme – ; de Jean-François Lefort – Albert Dupontel, au bord de l’explosion parfait dans ce rôle, contenant sa rage et son impatience -, et sa femme jouée par Laura Morante – So Perfect -, qui a sacrifié sa carrière pour son mari – ; Claudie – Dani –  qui est l’âme du théâtre où joue Lefort, férue de chanson française, et appréhendant avec dignité son départ en retraite, Catherine Fersen – Valérie Lemercier, épatante -, actrice suffisante et recurrente d’une sitcom bêtasse mais très bien payée, qui pousse son agent – Guillaume Gallienne « Besnehardien », pour obtenir le rôle de Simone de Beauvoir auprès d’un grand cinéaste – Sidney Pollack, qui est aussi un très grand comédien -, malgré l’antipathie qu’elle suscite auprès de la directrice de casting – Françoise Lépine, qui dans les rôles secondaires arrive toujours à tirer son épingle du jeu -. Catherine joue en attendant un vaudeville de Feydeau, rendant chèvre son metteur en scène par ses caprices – Christian Hecq – et entraînant le comédien principal – Michel Vuillermoz, que je trouve toujours remarquable -, dans son mauvais esprit.  Les personnages sont happés autour de la lumineuse Jessica, le lieu aidant, des rencontres improbables sont évidentes ici, c’est une étude de mœurs bien vue, très bien écrite, laissant sa chance démocratiquement à tous les personnages d’une habilité remarquable. On se laisse prendre au jeu, sans voir les artifices du scénario, comme ça pouvait être le cas parfois dans « La bûche » et « Décalage horaire ». L’observation est très juste, entre ceux qui vivent pleinement mais trouvant des limites dans une existence devenant trop rassurante, et ceux qui vivent par procuration, dans l’entourage des artistes – Laura Morante, Dani -, mais trouvant matière à fabriquer des rêves. Le dosage rires émotions, fonctionne, Christopher et Danièle Thompson ayant trouvé un ton original et euphorisant. Poussant mon petit couplet flagorneur dans le débat avec sincérité, j’entends ainsi Dani déplorant avoir peut-être avoir raté certains grands rôles par sa faute – elle est ici impressionnante de justesse -, et Claude Brasseur – entrevu ensuite et très abordable -, sur son jeu cite avec humilité son père, disant que ce sont les grands rôles qui font les grands comédiens, et citant Picasso, « J’ai mis longtemps à devenir jeune ».  Ce film, détonnant avec les comédies manufacturées et insipides de ces derniers temps, est à recommander chaleureusement. 

Fragments d’un dictionnaire amoureux : Walerian Borowicz

 Annonce de la mort du cinéaste polonais Walerian Borowczyk, décédé vendredi de suites de complications cardiaques. Relégué assez longtemps dans la catégorie érotisme chic à l’instar d’un Just Jaeckin – voir article joint – . Mais on a réévalué son talent ces dernières années de cet ancien dessinateur d’affiches, qui étudia aux beaux-arts, et dont la découverte de plusieurs de ses courts-métrages d’animation très inventifs  dans deux DVD édités sur ARTE et réunissant 4 de ses longs-métrages « Goto, l’île d’amour » (1969), un petit chef d’œuvre qui fera objet d’une prochaine note ici même, « Contes immoraux », avec un Fabrice Luchini débutant et déluré, film à sketches dont l’épisode sur « Lucrèce Borgia » fut censuré à la télévision lors de sa diffusion, et « La bête » curieux film zoophile avec la belle Silke Hummel. On retiendra également « La marge » (1975), curieux film amalgamant l’atmosphère des années 70, avec celle des années 30, avec deux icônes Sylvia Kristel et Joe Dallesandro.  Rendons justice à ce metteur en scène qui a donné ses lettres de noblesse à l’érotisme à l’écran, même quand il répondait à la commande de Pierre Grimblat, pour la série TV « Série rose ». Voir le dossier élaboré sur le site ARTE.

Les contes immoraux

ARTICLES CINÉMA 80 – Cinéaste d’animation volontiers agressif et recherchant une réjouissante épure de la laideur (M. et Mme Kabal), Borowczyk réalise en 68 un chef d’œuvre d’acidité où sexe et politique dotaient la fable d’un poids inattendu de réalisme (Goto). Blanche était déjà plus facile et Histoire d’un péché, quoique réalisé en Pologne, assez accrocher ; mais c’est avec Contes immoraux que Borowczyk devint le chantre du porno de luxe. Soignant ses scénarios et entrelardant subtilement une mise en scène extrêmement raffinée de quelques irruptions bien dosées d’un mauvais goût outrancier, Borowczyk séduit aujourd’hui au lieu d’irriter, flatte au lieu de prendre à rebrousse poil et récupère par l’athéisme, des situations sado-masochistes qui constituent le menu quotidien des salles classées X. Désormais complaisant et fourgueur d’alibis culturels à un public honteux incapable d’assumer la réalité de ses fantasmes sexuels, Boorowczyk se permet même de bâcler parfois la réalisation (Intérieur d’un couvent) et d’assassiner par incompétence les mythes les plus solides du panthéon érotique (Lulu, la même année où ressortait le « Loulou » de Pabst). René Prédal Cinéma 80 (Octobre 1980).

LE MONDE – Walerian Borowczyk, cinéaste par Jean-Luc Douin – Article paru dans l’édition du 09.02.06 

Le cinéaste Walerian Borowczyk est mort vendredi 3 février, à l’âge de 82 ans, de complications cardiaques, dans un hôpital de la région parisienne proche du Vésinet (Yvelines) où il résidait. Né le 2 septembre 1923 à Kwilicz, en Pologne, Walerian Borowczyk avait été d’abord un artiste polyvalent, graphiste, peintre, écrivain, avant de devenir le cinéaste de l’érotisme. André Breton le disait doué d’une « imagination fulgurante ».

Grand Prix national du graphisme en 1953 pour ses affiches de cinéma, Borowczyk se lance dans le court-métrage en 1946 et est très vite bouleversé le cinéma d’animation en y introduisant un humour noir, des gags surréalistes et une technique nouvelle fondée sur les découpages. Il a une vision de démiurge et impose un univers aussi tapageur (tant du point de vue pictural que de celui de l’absurde) que celui de Ionesco ou de Beckett.

Il travaille un temps avec Chris Marker (Les Astronautes) et Jan Lenica, autre grand graphiste et affichiste polonais, mais ce qui distingue Borowczyk est une hantise des objets et des formes, comme ces convulsions d’une chevelure-pieuvre surgie de chez Lautréamont dans Dom. C’est un sabbat d’objets de grenier dans Renaissance, un terrifiant camp de démontage d’automates par des séraphins invisibles dans Les Jeux des anges.

Le premier long-métrage de Walerian Borowczyk, Le Théâtre de M. et Mme Kabal (1963), impose un couple (un homme rêveur amoureux des papillons, flanqué d’une matrone au profil de vautour) et un monde kafkaïen. En 1968, Borowczyk quitte le cinéma d’animation et obtient le prix Georges-Sadoul pour Goto, l’île d’amour, qu’il définit comme « un film d’amour sur l’amour du pouvoir ». Il s’agit de l’histoire d’un despote où le goût des objets fétiches, du masochisme, et la figure du père rappellent l’oeuvre de Bruno Schulz.

Blanche (1972) renoue avec le même thème que Goto : une jeune femme captive d’un vieux seigneur (Michel Simon). Nous sommes dans un Moyen Age courtois, aux décors inspirés de Giotto et Jérôme Bosch, à l’atmosphère tiraillée entre dictature et désir physique.

Les Contes immoraux (1974) font de Borowczyk un cinéaste érotique. Il est foudroyé par la censure, puis partiellement libéré (interdiction aux moins de 16 ans). Il s’agit d’un film composé de quatre sketches, le premier adapté d’André Pieyre de Mandiargues, le deuxième évoquant le plaisir solitaire d’une jeune fille vouée à la prière, le troisième retraçant les perversions saphiques et sanguinaires de la comtesse hongroise Erzebet Bathory, et le dernier contant les amours incestueux du pape et de son fils César Borgia avec leur fille et soeur Lucrèce.

Après être retourné en Pologne tourner Histoire d’un péché, qui confirme son goût des atmosphères suffocantes et ses indéniables dons plasticiens, Walerian Borowczyk revient en France signer La Bête (1975), puis La Marge (1976), Intérieur d’un couvent (1978), Les Héroïnes du mal (1979), Lulu (1980) d’après Wedekind, L’Art d’aimer (1983) d’après Ovide, et Emmanuelle 5 (1987) : variations plus ou moins audacieuses, plus ou moins raffinées, et inégalement réussies, sur les tourments de la chair, en référence à Sade, Baudelaire, Bataille, Mandiargues.

Fragments d’un dictionnaire amoureux : François Levantal

François Levantal dans « sur le fil »

Si l’on retrouve souvent François Levantal dans des seconds rôles, en premier plan il est aussi remarquable. Ainsi dans « L’affaire Pierre Chanal », sur l’affaire réelle des « disparus de Mourmelon », il impressionne, comme le définit justement Nicolas Schmidt dans « Télévision française – La saison 2007 » au sujet de son personnage qui « remarquablement interprété (…) peut faire figure de coupable, impressionnant dans son allure rigide, au ton constamment péremptoire et qui semble d’un bloc en toutes circonstances ». Dans le dossier de presse du film « L’amour aux trousses », Jean Dujardin déclare à son sujet « Lee Van Cleef vous voulez dire…? François est un comédien très doué, bourré de talents, très précis, qui joue comme il parle, très rapide, très calibré, qui a beaucoup de recul, qui peut faire croire tout ce qu’il veut, très doué comme imitateur aussi ».Et Pascal Elbé de rajouter « François Levantal hors classement. Un physique unique, taillé à la serpe et puis en même temps une espèce de classe hors norme avec un humour qu’on n’imagine pas. Parce qu’il est bien « marbré » lui aussi ». C’est l’un des grands sous-utilisés de notre cinéma, c’est devenu l’homme que vous aimerez haïr. Avant de débuter au cinéma – nous apprend le dossier de presse de « Neg’marron »-, il se produit au théâtre dans « Mirabeau ou le délassement comique », « Le théâtre de foire », « Les oiseaux « , « La poudre aux yeux », « Un otage », « L’exil ». Il est capable de faire exister un personnage par sa seule présence, à l’image du tenancier de « Blueberry », où il semble être un des personnages évadés de chez Sam Peckinpah. Il faut le voir dans le décevant « Mauvais esprit », malgré un scénario mordant de Laurent Chouchan, sauver les meubles. Son personnage veule, peu recommandable et capable de toutes les bassesses est digne de figurer dans l’âge d’or de la comédie italienne.

Dans le making off de « Blueberry, l’esprit du film », diffusé sur le câble, on retrouve un François Levantal décontracté, parlant de l’humour, de son attirance pour ce qui est inutile. Il faut l’entendre théoriser sur la nature. Pour finir, il imite « Le cri de la bouteille qui se débouche » (débouchée évidemment), avec brio. Il faut bien le dire, l’humour lui sied bien, il apporte toujours une ironie mordante au moindre de ses rôles, à l’image de la série de pub pour la SNCF. Selon Vincent Cassel, dans le commentaire DVD de « La haine », il a également pour surnom « Main de bois », car il « donne des baffes extrêmement puissantes » !. C’est donc avec « La haine » et son personnage bien sulfaté et en pagne, qui fait des tours avec des balles de revolver, que l’on finit par repérer ce comédien très apprécié par Bertrand Tavernier. On ne cesse donc de le retrouver, et en 2002, il tente un personnage plus posé le temps de deux saisons dans « Avocats et associés » dans le rôle de Nicolas, un personnage altruiste et secret, ce qui lui permet de renouveler son image, avec un rôle moins lisse qu’il n’y paraîtrait puisque son personnage est aux prises avec le « démon du jeu ». Il reste disponible pour des réalisateurs de courts-métrages, incarnant même un officier SS dans « Le barbier ».

Ce qui est remarquable dans son interprétation, c’est l’humour qu’il amène dans sa galerie de personnages hauts en couleurs et souvent antipathiques. Il est hilarant dans « La vie est à nous » en dealer zen, dans  « L’annonce faite à Marius » en interne qui se retrouve interloqué à la vue d’un Pascal Légitimus « enceint » des expériences de Jackie Berroyer ou en adepte de la pétanque nudiste dans « Camping ». Il est capable aussi d’humanité comme le maître dragueur fatigué de Saïd Taghmaoui dans « Confession d’un dragueur » ou son personnage de grand blessé de guerre des « Blessures assassines ». Il convient également de signaler sa performance parmi toute une équipe de joyeux drilles (Édouard Montoute, Atmen Kelif, Armelle Deutsch ou Christophe Alévêque) dans « Nos amis les flics », en personnage de truand petits bras « bas du front » se retrouvant à occuper un commissariat. Il se prend au jeu dans son nouveau costume et conseille à un quidam de casser la gueule à son patron. Dans « L’antidote », il joue les utilités brillamment aux côtés de Christian Clavier, lorgnant sur les charmes d’Alexandra Lamy. Il peut être d’une cruauté inouïe dans « Un long dimanche de fiançailles », et on finit par approuver le personnage de Marion Cotillard dans ses idées de vengeances. Dans « Narco » il est un père albinos et terrifiant pour un frère et une sœur, les poussant sadiquement au meurtre en allant trop loin dans leur entraînement pour une compétition de patinage artistique. Il est idéal pour incarner les monstres du quotidien.  De la bande des affreux de « Dante 01 », il est le plus retord et cruel et dans le téléfilm « La mort n’oublie personne », son personnage est qualifié comme « La gueule même du faux témoin ». Il va même jusqu’à personnifier le professeur cauchemardé, quand le cancre Ducobu s’imagine en pension dans « L’élève Ducobu ». Antoine Blossier l’engage dans sa galerie des monstres pour « La traque », car selon le dossier de presse du film « François Levantal s’est révélé une évidence pour le rôle. Il adore les personnages de méchants et je crois qu’il a beaucoup aimé jouer un type un peu lâche et dangereux ».

Il est particulièrement réjouissant dans « L’amour aux trousses » où il procède à diverses ruptures de ton, en méchant bondissant et narquois, sans pitié, il faut le voir lors de la scène de rencontre avec Caterina Murino, femme policier se faisant passer pour une call-girl, il charme et terrifie à la fois. Dans ce film son personnage passe facilement d’une violence brutale à des jeux puérils, il zappe malicieusement lors du match de foot  que regarde son acolyte « Le Brésilien », il fonce, raille ses poursuivants, un rôle, encore une fois, particulièrement réjouissant… Citons Bayon à son sujet : « L’affiche… est relevée de l’éminent François Levantal (qui galvaude trop en réclames sa «gueule» d’atmosphère digne d’André Héléna) » Libération 06/07/2005.

Il faut le voir dans le pataud « L’île au(x) trésor(s) », en pirate échoué sur une île. Ironie du sort, il possède une véritable fortune qui ne lui sert strictement en rien. Le régime noix de coco et crabe bouilli l’a rendu totalement fou. Le visage mangé par une barbe épaisse, il étonne dans la composition de ce personnage décalé à la gestuelle déglinguée, inventant un curieux langage remplis de borborygmes et d’élucubrations diverses. Son apparition est une bouffée d’air frais dans cette grosse machinerie, il écrase avec superbe tous les autres personnages de ce « Pirates des Caraïbes » du pauvre, et sauve une fois de plus le film. François Levantal était épatant en vedette d’un téléfilm – impossible de me souvenir du titre. Il y jouait un journaliste s’improvisant détective avec beaucoup de subtilité. Ce formidable comédien est mûr pour les grands rôles, en souhaitant que l’on utilise au mieux sa dimension tragique, son élégance et sa « vis comica ». Sa participation au culte « Kaamelott » en légionnaire goguenard est dans ce sens un absolu régal.

Il trouve son meilleur rôle dans la série « Sur le fil » – l’intégralité de la série est disponible en DVD- série policière qui se démarque singulièrement des habituels modèles du genre. Dans sa composition du commandant Munoz, policier anticonformiste et agissant à la limite de la légalité, il excelle en chef d’une petite équipe qui est en conflit permanent avec son supérieur le trop novice commissaire Forge. Munoz est impulsif, mais probe, il se débat entre les méandres de l’administration, une délinquance de plus en plus violente et des problèmes familiaux, notamment avec son fils. Levantal y diffuse une autorité, une chaleur avec ses coéquipiers – ses partenaires sont tous excellents -, le tout avec une bonne dose d’humour comme à l’accoutumée. Dans « Les Lyonnais », il impressionne en mentor trahi d’Edmond Vidal et as du braquage, en figure idéale pour perpétuer une tradition du polar français. Retour à l’humour pince sans rire avec « La petite histoire de France », diffusé sur W9 à partir du 28 novembre 2015, où il est irrésistible en cousin du Roi, en disgrâce. Dans « Raid dingue », il est le chef du RAID très crédible par son autorité, utilisant une nouvelle fois son humour quand il ne maîtrise pas totalement les situations, mais s’affirmant cependant malgré les pressions du ministre de l’Intérieur, campé par Michel Blanc, ce qui nous vaut des échanges irrésistibles.

Filmographie : 1985  Conseil de famille (Costa-Gavras) – 1989  La Révolution française : Les années Lumière (Robert Enrico) – 1991  L. 627 (Bertrand Tavernier) – 1993  La fille de d’Artagnan (Bertrand Tavernier) – 1994  3000 scénarios contre un virus : Mort d’un couple (Laurent Heynemann, CM) – L’appât (Bertrand Tavernier) –  La haine (Mathieu Kassovitz) – 1995 Capitaine Conan (Bertrand Tavernier) – Un héros très discret (Jacques Audiard) – 1996 Plan séquence : Homo-automobilis (Vincent Mayrand, CM) – Le ciel est à nous (Graham Guit) – Assassin(s) (Mathieu Kassovitz) – Dobermann (Jan Kounen) – 1997 Le bossu (Philippe de Broca) – La voie est libre (Stéphane Clavier) – L’annonce faite à Marius (Harmel Sbaire) – Zonzon (Laurent Bouhnik) – Sabbat night fever (Vincent Cassel, CM) – Le poulpe (Guillaume Nicloux) – 1998 Quasimodo del Paris (Patrick Timsit) – Une vie de prince (Daniel Cohen) – Menhir (c’est citer) (Hubert Kondé, CM) – 1999 Clara qui êtes aux cieux (Jean-François Hirsch & Pascal Demolon, CM) – Le sens des affaires (Guy-Philippe Bertin) – Sade (Benoît Jacquot) – Les rivières pourpres (Mathieu Kassovitz) – Les blessures assassines (Jean-Pierre Denis) – 2000 Même pas mal (Diastème, CM) – Belphégor, le fantôme du Louvre (Jean-Paul Salomé) – Confession d’un dragueur (Alain Soral) – Le barbier (Jon J. Carnoy, CM) – Grégoire Moulin contre l’humanité (Artus de Penguern) – 2001 La nuit du chien (Robin Sykes, CM) – Vertiges de l’amour (Laurent Chouchan) – Le nouveau big bang (Nicola Koretzky, Marina Tomé, CM) – Se souvenir des belles choses (Zabou Breitman) – Gangsters (Olivier Marchal) – La guerre à Paris (Yolande Zauberman) – Le nouveau Jean-Claude (Didier Tronchet) – La sirène rouge (Olivier Mégaton) – 2002  À l’abri des regards indiscrets (Hugo Gélin & Ruben Alves, CM) Mauvais esprit (Patrick Alessandrin) – Michel Vaillant (Louis-Pascal Couvelaire) – L’ancien (Nicky Naude & Emmanuel Rodriguez, CM) – 2003 Holden se blinde (Nicola Koretzky, CM) – Blueberry, l’expérience secrète (Jan Kounen) – Nos amis les flics (Bob Swaim) – Le veilleur (Frédéric Brival, CM) – Narco (Tristan Aurouet et Gilles Lellouche) – Un long dimanche de fiançailles (Jean-Pierre Jeunet) – 2004  La Chepor (David Tessier, CM) – Transit (Julien Leclerc, CM) – Nèg marron (Jean-Claude Flamand-Barny) – L’antidote (Vincent de Brus) – L’amour aux trousses (Philippe de Chauveron) – 2005  Ma vie en l’air (Rémi Bezançon) – Demain la veille (Julien Lucat & Sylvain Pioutaz, CM)Sheitan (Kim Chapiron) – Sauf le respect que je vous dois (Fabienne Godet) – Entente cordiale (Vincent de Brus) – Camping (Fabien Onteniente) – 2006  L’île au(x) trésor(s) (Alain Berberian) – Dante 01 (Marc Caro) – Demain la veille (Julien Lecat et Sylvain Pioutaz , CM) – 2007  Black (Pierre Laffargue) – Orange juice (Ronan Moucheboeuf, CM) – 2008  Jusqu’au bout… (Vincent Plaidy, CM) – 2009  Vendetta (Patrick Bossard, CM) – Les bons tuyaux (Olivier Riffard, CM) – La traque (Antoine Blossier) – 2010  L’élève Ducobu (Philippe de Chauveron) – Les Lyonnais (Olivier Marchal) – 2011  Enfant de la patrie (Kim Chapiron) – Peter Pan (Nicolas Duval, CM) – Les Kaira (Franck Gastambide) – 2012  Pari (Jovanka Sopalovic, CM) – Les invincibles (Frédéric Berthe) – Les petits joueurs (Guillaume Breton, CM) – 2013  Les Francis (Francis Begotti) – Quarante (Nicolas Koretzky et Hervé Rey, CM) – 2016  Raid Dingue (Dany Boon) – 2017  La finale (Robin Sykes) – Taxi 5 (Franck Gastambide). Voxographie : Les lascars (Emmanuel Klotz & Albert Pereira-Lazaro).

Télévision: Notamment : 1989  Les nuits révolutionnaires (Charles Brabant) – 1992  Commissaire Moulin : Les zombies (Yves Rénier) – 1994  Cognacq-Jay (Laurent Heynemann) – 1995  Chercheurs d’héritiers : Les gens de Faillac (Laurent Heynemann, pilote inédit diffusé sur le câble) – L’instit : L’angélus du corbeau (Laurent Heynemann) – 1996  La poupée qui tue (Bruno Gantillon) – 1997  Un arbre dans la tête (Jean-Pierre Sinapi) – 1998  Le feu sur la glace (Françoise Decaux) – 1999  Les duettistes : Une dette mortelle (Alain Tasma) – 2000  Passage interdit (Mickaël Perrotta) – Une femme d’honneur : Mort clinique (Alain Bonnot) – Rastignac ou les ambitieux (Alain Tasma) – 2001  Le lycée : Une voix publique (Miguel Courtois) – P.J. : Enfant battu (Olivier Bonnet) – 2002  Le juge est une femme : L’ami d’enfance (Charlotte Brandstrom) – 2002/2004  Avocats et associés (26 épisodes) – 2003  Les enquêtes d’Éloïse Rome : Joanna est revenue (Philippe Setbon) – À cran (Alain Tasma) – 2004  À cran, deux ans après (Alain Tasma) – 2005  La battante (Didier Albert) – 2006  L’affaire Pierre Chanal (Patrick Poubel) – David Nolande : Crescendo (Nicolas Cuche) – Élodie Bradford : Une femme à la mer (Olivier Guignard) – 2007  La lance de la destinée (Dennis Berry) – Sur le fil (Frédéric Berthe, 5 fois 52mn) – Les Bleus : Premiers pas dans la police : Enquête interne (première et deuxième partie) (Patrick Poubel) – Sur le fil (Bruno Garcia, saison 2) – La mort n’oublie personne (Laurent Heynemann) – 2009  Sur le fil (Bruno Gantillon, saison 3) – Kaamelott livre VI (Alexandre Astier, saison 6) – Cartouche, le brigand magnifique (Henri Helman) – 2011  Ni vu, ni connu (Christophe Douchand) – Braquo (Philippe Haïm et Éric Valette, saison 2) – La nouvelle tragédie : Les voies impénétrables (Noémie Saglio & Maxime Govare) – 2013  La télé commande (CM, mini-série) – Julie Lescaut : Tragédie (René Manzor) – 2014  Meurtres à l’Abbaye de Rouen (Christian Bonnet) – 2015  Le placard (Dominique Thiel, captation) – 2015/2016  La petite histoire de France (Jonathan Barré, CM, série) – 2016  Section zéro (Olivier Marchal et Laurent Guillaume) – 2018  Les rivières pourpres (Olivier Marchal, mini-série). Voxographie : 1996  Enquête sur un enlèvement  (Peter Kassovitz, récitant) – Un monde digital (Martin Meissonnier, documentaire, récitant) – Web Site Story (Martin Meissonnier, série documentaire, récitant) – 2013-2016 Les Kassos (Alexis Beaumont,  Julien Daubas, Rémi Godin et Yves Bigerel, animation).

THE KING

 Elvis Sandow – Gael Garcia Bernal, qui ne cesse de nous surprendre -, dont le prénom évoque évidemment  « Le King », après avoir effectué son service dans la Navy, par avec son arme dans une petite ville puritaine du Texas, nommée Chorpus Christi !, trouver son véritable géniteur, un certain David Sander – William Hurt, en très grande forme ces derniers temps -, qui a abandonné sa mère. Ce dernier est devenu prédicateur respecté, faisant son prêche à l’Américaine, a épousé une très belle femme, et a deux enfants une adolescente réservée et un fils qui reprend les idées de son père, en essayant de faire valoir en vain, ses croyances contre les théories officielles de Darwin, dans son école. Le premier contact entre Elvis et son père, ne fait que provoquer l’animosité de ce dernier, réveillant une ancienne vie, peu recommandable, et en contradiction totale avec son nouveau rôle. Qu’importe, Elvis persiste, s’installe, et élabore volontairement ou non une stratégie pour ce faire accepter.

Gael Garcia Bernal

Ce film, pas aimable, corrosif et à contre-courant avec le cinéma américain actuel, a une sorte de logique implacable et assez salutaire. Le Texas, et les allusions bibliques -Le retour de l’enfant prodigue – ne sont pas le fait du hasard, pour son premier film de fiction, James Marsh semble se délecter de bousculer l’hypocrisie générale d’une petite ville tranquille des États Unis, en étudie les codes pour mieux les détruire. Refusant d’éclairer certaines zones d’ombres, le film compte sur le charisme de Gael Garcia Bernal, dans un personnage à la fois bafoué et monstre froid. Par son ambiance torve et sans apitoiements moralisateurs, le réalisateur décortique les mécanismes du certain fanatisme, instrumentalisé, mis en spectacle, et soucieux des apparences et l’aliénation par la foi, par l’armée – l’arme est une compagne ritualisée pour Elvis -. Le film refuse l’utilisation d’un suspense artificiel, mais nous laisse assez amer face à la situation. Un film inconfortable et très maîtrisé, à la fois détaché et sans complaisances. L’atmosphère, proche d’un David Lynch, trouble est remarquablement réussite par sa musique, sa lumière et son interprétation – mention spéciale à la jeune Pell James -.

BALI BALLOT

 Avant-première à l’UGC Cité-Ciné Bordeaux, du film « Toute la beauté du monde », vendredi 27 janvier, en présence de Marc Esposito, Marc Lavoine, Zoé Félix et Albane Duterc, mais aussi une déception plus que notable après « Le cœur des hommes », avec déjà Zoé Félix et Marc Lavoine, film d’hommes mais avec quelques portraits de femmes. Dans la série des « grandes amoures contrariées », c’est ici Franck – Marc Lavoine, juste mais limité -, qui a sacrifié sa vie sentimentale pour reprendre les affaires de boiseries et élever ses frères et sœurs, à la mort de ses parents. Il tombe raide dingue de Tina – Zoé Félix, qui ne semble pas avoir consenti à couper ses cheveux, planqués sous une perruque, mais dont le jeu est probant -, qui vient de perdre son mari, jeune trentenaire, qui délaisse l’éducation de ses enfants de 5 à 7 ans – personnages sacrifiés dans le film – pour se consacrer à son deuil larmoyant. Franck lui propose de faire un séjour en Asie, histoire de reprendre goût à l’existence – « Changement d’herbage réjouit les veaux » -. Franck qui va souvent à Bali pour son travaille, essaye de conquérir son cœur, mais elle reste fidèle à son mari, et reste sur la défensive, quand Franck lui avoue son amour. Franck persiste, décide de l’amadouer, étant expert de la « mécanisation » des gens. Suspense intolérable, Tina finira-t-elle par aimer Franck ? L’émotion effleure parfois le film dans la litanie de conventions,  en particulier grâce au couple Jean-Pierre Darroussin – toujours subtil – et une nouvelle venue dynamique – Albane Duterc -, en français installés à Bali, et Pierre-Olivier Mornas – ex « Bâtard de Dieu » -, en frère dépassé de Zoé Félix, dans une tonalité proche de Darroussin, la maturité devrait lui aller très bien.

Mais l’ennui gagne l’assemblée, pire que les soirées diaporama entre potes, surtout quand on est particulièrement sédentaire. Les gens commencent à ricaner, commentent, sans que curieusement ça dérange les autres, grand froid à l’arrivée de l’équipe, chacun des habitués rassurant les autres, non vous n’êtes pas rentré dans une période « pisse-froide », c’est juste un ratage complet, Yann Arthus-Bertrand sort de ce cinéaste ! Marc Esposito tombe dans tous les écueils de la carte postale sponsorisée par l’office de tourisme de Bali et de la Camargue – il ne manque même pas les flamants roses au tableau -, la B.O. d’une mièvrerie inouïe, ne faisant que souligner les manques d’inventivité face à ses paysages sublimes de beauté. Mais très vite la saturation gagne, l’envie de retrouver l’air vicié de la ville, l’hiver, grande était la tentation à la sortie de respirer les vapeurs d’échappements automobiles, et retrouver Bordeaux, une ville blafarde et de façades, me mettait en joie. Et là grand moment d’empathie avec le critique Jean-Pierre Lavoignat, ami de 32 ans, nous dit le sieur Esposito qui a du mal à prendre son micro après quelques verres de bordeaux, on finit par l’excuser de s’autoproclamer écrivain avec la version roman de cette triste oeuvrette. Lavoignat donc, co-fondateur du magazine « Studio », avec lui, avait sur plusieurs numéros fait un compte-rendu du tournage, laissons-lui le crédit d’avoir aimé le film, voir sa critique du dernier numéro, mais si ce n’est pas le cas, il s’en est sorti avec élégance. Le parti pris pouvait être intéressant, dresser une intimité amoureuse dans un décors écrasant, sujet abordé par avec beaucoup de subtilité par Ang Lee avec son « secret de Brokeback mountain ». Marc Esposito rate superbement sa cible, et comme il nous annonce qu’il prépare une suite aux « Cœurs des hommes », ce qui est un peu la solution de facilité, souhaitons qu’il ne soit pas l’homme d’un seul film.