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MAMMUTH

Avant-première lundi 12 avril à l’UGC-Cité-Ciné, en présence de Benoît Delépine, de Mammuth film qu’il a coréalisé avec Gustave Kervern. Il a ensuite filé pour un débat à l’Utopia. Serge Pilardosse vient d’avoir 60 ans. C’est Gérard Depardieu qui joue ce rôle, ici dans sa meilleure interprétation depuis assez longtemps, un contemporain de la moto « Münch Mammuth » crée en 1973, l’année où il tournait dans « Les valseuses ». Il a droit pour son pot de départ à la retraite en tant qu’équarisseur dans un abattoir porcin, à un discours assez gratiné et à un superbe cadeau… un puzzle ! – Il faut voir Depardieu le regarder comme une poule, un couteau -. L’heure des comptes a sonné, pour retrouver les annuités et les trimestres manquants pour avoir une retraite à taux plein. Sa femme – Yolande Moreau jubilatoire -, employée dans un supermarché s’inquiète de voir son mari devenu oisif et qui tourne dans l’appartement comme un lion dans une cage. Elle le pousse à retrouver les trimestres manquants. Il enfourche donc sa mythique moto …une Mammuth , et part à la recherche de ses états de service dans les années 70, accompagné du fantôme de son amour perdu – étonnante Isabelle Adjani – disparue dans un accident, qui veille sur lui. S’en suivent des rencontres rocambolesques, des retrouvailles incongrues – celle avec son cousin joué par Albert Delpy, dans une scène promise à devenir culte -, de chasse vaine aux fiches de paies et de mauvaises rencontres – étonnante Anna Mouglalis, dont le personnage a trouvé un solution bien à elle pour régler les problèmes de retraites ! –

Yolande Moreau & Gérard Depardieu dans « Mammuth » (source Ad Vitam Distribution)

Mélange de drame et de drôlerie telle la scène où Bruno Lochet en père de famille pendu à son téléphone, pleure d’être loin de sa progéniture. On connaît l’admiration que portent nos deux compères à Aki Kaurismaki, nous sommes ici au même niveau. On est ainsi un tantinet vengé de l’insupportable habitude de certains de nos congénères qui se répandent allégrement sur leurs portables, bien qu’ici Lochet apporte une touche d’émotion. La distribution comme souvent chez Delépine/Kervern est hétéroclite, outre ceux cités, il y a  l’étonnante Miss Ming en nièce artiste – l’équivalent d’une Muni chez Luis Buñuel -, Catherine Hosmalin – voir la mise à jour de sa fiche ici -, Benoît Poelvoorde en « concurrent » à la chasse au trésor, Bouli Lanners en recruteur libidineux, Philippe Nahon en directeur de maison de retraite fatigué, Siné en viticulteur méprisant, Dick Annegarn en fossoyeur chanteur, le dessinateur Blutch en employé de caisse de retraite circonspect. Et il y a même une apparition « artistique » de Noël Godin en…. Tartobole ! La présentation par Bruno Delépine fut très intéressante, notamment à propos de l’adhésion de Gérard Depardieu en 20 minutes après une première rencontre dans son restaurant avec les deux loustics. Delépine assez étonné l’a recontacté pour avoir confirmation mais il avait donné sa parole, en affirmant dans un message que Delépine a gardé longtemps sur son répondeur « Entre pompiers on ne se marche pas sur le tuyau ». Il a également évoqué celle d’Isabelle Adjani, comme eux timide mais avec un grain – c’est elle qui filme Depardieu dans certaines scènes en 16 millimètres. Il a parlé du vin –Bordeaux oblige – en évoquant l’idée d’un film festif sur l’alcool, confiant l’abstinence record de Depardieu sur le tournage et l’évolution du festival de Caïen – surveillé par la police –. Au final, avec ce film, collant parfaitement au malaise du temps, le duo confirme une singularité très salvatrice.

CHICAS

Demain sort « Chicas » de Yasmina Reza, vu à l’UGC-Cité Bordeaux le 8 février, en sa présence. Elle présentait son premier film comme réalisatrice pour la première fois devant un vrai public. C’est avec une émotion non feinte qu’elle se présentait devant nous. Pilar, une ancienne coiffeuse a trois filles, Nuria – Emmanuelle Seigner – une star internationale qui fait la couverture de Vogue et reçoit des mains de Stephen Frears, le BATA de la meilleure actrice, Aurélia – formidable Valérie Dréville – qui est comédienne également, mais vit dans l’ombre de sa sœur bien qu’elle ait du talent et travaille au théâtre et Christal, femme dynamique mère de deux enfants. Les trois sœurs s’entendent autour de la personnalité envahissante et un tantinet égocentrique de Pilar. Elles partagent une enfance heureuse en Espagne, malgré le deuil de leur père. Des flashbacks de cette période traversent tout le film. La réunion des quatre femmes n’a rien de sereine cependant, mais elles arrivent à se déclarer leur amour malgré les heurts du quotidien. Quelques hommes les accompagnent comme Fernand – un syndic – le fiancé de Pilar, qui aura du mal à ne pas se faire malmener par la famille, Maurice – Bouli Lanners – mari d’Aurélia, père un peu absent, mais amoureux de sa femme. Christal se partage entre son mari – Antonio Gil Martinez – et son amant – Philippe Uchan touchant en homme un peu dépassé par les événements se trouvant dans une position inconfortable ..Yasmina Reza, a parlé avec beaucoup d’émotion de son film, important pour elle car le sujet la touche, et elle a fait de très beaux portraits de femmes, ce qu’elle a évité parfois dans son œuvre.

Yasmina Reza et ses interprètes, Emmanuelle Seigner, Carmen Maura et
André Dussollier (Photo : UGC Distribution)

Elle a également évoqué l’importance qu’elle portait au montage, ne voulant pas que son film soit trop écrit, et au final le temps imposé par le scénario a servi de fil conducteur. Le film a beaucoup de pudeur et d’humour. Emmanuelle Seigner fut choisie par la réalisatrice car pour elle c’était la seule comédienne à avoir une aura de star et à montrer un côté plus accessible dans le quotidien. C’est elle qui a le plus réussi. Valérie Dréville, excellente comédienne que le cinéma boude un peu trop hélas – rappelons qu’elle est la fille de Jean Dréville – campe le personnage le plus touchant, d’une grande fragilité malgré un tempérament de fonceuse. Mais c’est une façade, en effet elle est facilement désemparée quand elle est confrontée à une crise d’angoisse où elle a l’impression de se vaporiser littéralement. Christelle Tual a une énergie non feinte, avec un côté insouciant et un fond de gravité. Ces deux dernières comédiennes ont été choisies par la réalisatrice pour leur talent et une certaine ressemblance avec Emmanuelle Seigner. Elle narre que les trois comédiennes blondes aux yeux bleus ont dû être teintes en brune. Carmen Maura qui a travaillé son rôle en français, a un beau tempérament dans ce rôle de mère qui centralise l’attention, ce que lui reproche à un moment le personnage joué par Bouli Lanners. Il y a une grande drôlerie, tel Pilar amoureuse qui ne remarque pas que son fiancé se teint les cheveux. Yasmina Reza comme réalisatrice s’attache aux petits événements du quotidien et nous rend attachants ses personnages. Elle a dès son premier film trouvé une équivalence filmographique à son talent d’écriture, souhaitons que son film soit bien perçu, car sinon on perdrait un beau talent dans le septième art.


LES INVITÉS DE MON PÈRE

Avant-première le lundi 1er mars de « Les invités de mon père », à l’UGC-Ciné Cité de Bordeaux, en présence d’Anne Le Ny et du survolté – euphémisme ! – Fabrice Luchini en guise de présentation en début de film. Depuis « Rien sur Robert », j’ai pris l’habitude de le voir, je l’ai même vu refuser de signer un autographe à un spectateur lors de celle de « Jean-Philippe » : « Désolé Chéri mais je suis fatigué ! ». Il est vrai qu’il nous régale à chaque fois du numéro habituel disons de cabotinage plus ou moins inspiré. Il adore Bordeaux, rappelle ses tournages dans cette ville de « L’année Juliette » et « Beaumarchais ». Nous sommes privilégiés car il fait très peu de villes. Mais cette fois, ça a fusé, tout y est passé, sur Martine Aubry – qui semble l’avoir réfrigéré à Lille -, le sourire de Ségolène Royal -, Johnny Hallyday, Arthur – « l’animateur pas Rimbaud » (sic), Juppé, Chaban-Delmas, « La » (sic) Bernard Kouchner, Jean-Louis Tamin – directeur du « Femina » un théâtre de Bordeaux, avec une dérive limite homophobe au sujet de ce dernier – j’en passe tant ce fut virevoltant tendance lourdissime. On a eu droit à son habituelle litanie répétée à l’envi, « on est de gauche ! », car la gauche « … lui casse les ille-cous » ! Volontiers discourtois, il s’en est pris au physique d’Anne Le Ny – excellente directrice d’acteurs bien qu’elle soit de gauche ! – et surtout au directeur Pierre Bénard pourtant affable – on a eu droit a six reprises à « Bénard le q[Censored]ard !, infondé mais ça rime ! -. Anne Le Ny, forcément interdite n’a pas réussi, on le comprend, à le gérer, mais l’a arrêté à temps avant qu’il ne déflore toute l’histoire -. Me voici donc fan du comédien, et à chaque fois un peu moins du personnage. Ce n’est pas contradictoire, je l’ai défendu pourtant longtemps, je deviens aussi pisse-froid que ses détracteurs… Le fait d’avoir mis Louise Bourgoin dans le sérail du cinéma sera en prime retenu contre lui en circonstance aggravante – J’attends de la voir dans « Blanc comme neige » cependant, mais pour paraphraser Philippe Meyer elle est comme l’oseille elle agace… -. Le film en lui même confirme le talent d’Anne Le Ny – excellente comédienne chez Pascal Thomas ou Pierre Jolivet -, comme réalisatrice après « Ceux qui restent ». On oubli très vite le froid qu’a jeté l’ineffable Luchini – très applaudi il faut bien en convenir -…

Fabrice Luchini, « On est de gauche ! » (photo source « Pathé »)

Lucien Paumelle – Michel Aumont magistral – est un grand médecin, militant actif à 80 ans et a été résistant à l’âge de 17 ans. Il a passé sa vie à défendre les femmes, les précaires et diverses causes humanitaires. Il est reconnu comme un homme éclairé. Sa fille, Babette  – Karin Viard toujours dans la subtilité – a suivi ses traces et travaille comme médecin également dans un dispensaire, avec son collègue – Raphaël Personnaz qui fut pressenti pour jouer Delon dans un biopic abandonné sur la vie de Romy Schneider -.  Elle vit avec son compagnon – excellent Olivier Labourdin – une vie tranquille. Son frère Arnaud – Fabrice Luchini donc investi dans son personnage – lui se désolidarise assez de cette famille et est un avocat d’affaires tendance nouveau riche. Il vit avec sa femme qui est très terre à terre – Valérie Benguigui, une comédienne à suivre assurément  – et ses deux enfants. Le paternel démiurge de son petit monde, annonce à ses enfants qu’il va recueillir ses sans-papiers. Les enfants n’ont pas trop de choix que de respecter sa décision, mais surprise les heureux élues sont une plantureuse moldave et sa fille. Anne Le Ny fait un portrait très décapant des bonnes intentions, de la générosité qui ne tient pas quant il y a des intérêts. Les enfants en manque de reconnaissance face à la personnalité écrasante du père – Michel Aumont, excelle entre autorité et fragilité – voient leurs repères brisés par une attitude qu’il ne comprennent pas. Karin Viard et Fabrice Luchini sont crédibles en frère et sœur qui vont voir leurs failles révélées par la suite des événements. Valérie Benguigui est exceptionnelle dans un rôle humainement ingrat, ses attitudes moralement peu amènes finissent par arranger tout le monde. Il faut la voir face à un Luc-Antoine Diquéro, circonspect dans le rôle d’un bénévole, manier le double langage tout en étant franchement raciste. Veronica Novak dans le rôle de l’encombrante Tatiana donne une justesse à son personnage, qui défend avant tout sa fille. Car la réalisatrice Le Ny qui fait un joyeux jeu de massacre, gratte le vernis des convenances, respecte ses personnages et ne les juge pas. Le scénario – co-écrit par Luc Béraud – est très inspiré, on connaît les qualités d’écriturs d’ Anne Le Ny dans son premier film et dans « Didine ». Son regard sur le monde est très juste, et elle est assez critique sur son organisation à l’instar d’un exemple saisissant que je ne peux dévoiler sous peine de déflorer l’histoire. Coup de chapeau à Anne Le Ny, souhaitons juste pour elle, qu’un Luchini soit moins ingérable sur plateau de cinéma que lors d’une avant-première, car il est dans ce film très bon. C’est donc un film qui rend « actant » comme il le dit si bien. Donc clamons avec lui « On est de gauche ! ». Jugez sur pièce en visitant deux extraits proposés par  bossoftheangels sur Dailymotion 1 et Dailymotion 2.

LA DAME DE TRÈFLE

Vu en avant-première à l’UGC-Ciné-Cité Bordeaux, présenté par Jérôme Bonnel, le 6 janvier dernier, son 4ème film confirme son grand talent. Il était déjà venu présenter son film précédent, évoqué ici : « J’attends quelqu’un ». Ce cinéma, surtout grâce à la personnalité de son directeur, M. Pierre Bénard, continue à passer de grosses productions – la veille Jacques Perrin présentait son film Océan – à des films plus intimistes. Il permet aux cinéphiles bordelais de faire de belles rencontres. Le réalisateur prend prétexte du film de genre pour dresser un portrait intimiste d’un frère et d’une sœur. Aurélien – Malik Zidi – et Argine – Florence Loiret Caille – prénom venant de la carte « La dame de trèfle », atypique car étant le seul dans un jeu de carte à ne pas exister -, vivent en petite autarcie. Ils habitent la maison familiale depuis la mort de leurs parents dans un accident de voiture, lui vend des fleurs, elle se laisse plutôt vivre, lui plus solitaire, quand sa sœur papillonne, se laisse prendre dans un trafic de vol de cuivre histoire de vivoter. Il a pour complice un certain Simon Sarasian – Jean-Pierre Darroussin, qui à l’instar du film « L’armée du crime » joue un personnage inquiétant -, qui vient rapidement lui demander des comptes. Aurélien et Argine ont leurs petites habitudes dans un café tenu par Marie-Jeanne – Judith Rémy -, où ils se retrouvent et trompent l’ennui avec les habitués, dont deux prétendants d’Argine: Loïc, volontiers bagarreur et Pujol – Marc Citti, amoureux transi, fasciné par les exécutions historiques . Une jeune mère au bras cassé très séduisante –  Nathalie Boutefeu – arrive dans la petite bourgade et séduit Aurélien…

Jérôme Bonnell, avec Malik Zidi et Jean-Pierre Darroussin sur le tournage de « La dame de trèfle » (source « Allociné »)

Le réalisateur réussit de manière très habile à mêler le polar au portrait intimiste d’un jeune couple, qui au final  ne peut se défaire l’un de l’autre. Leur intimité finira par les pénaliser… Aurélien – le réalisateur n’a pas pensé au roman d’Aragon, qu’il n’a pas lu, bien que l’ayant dans sa bibliothèque -, est introverti, a peur du grand amour, et est formidablement interprété par Malik Zidi de mieux en mieux avec la maturité, à l’instar de son rôle dans le téléfilm « Le mort n’oublie personne ». Dans le rôle d’Argine, sans cesse en activité, remuante puis s’endormant comme un bébé, avec un cœur d’artichaut, on retrouve une Florence Loiret Caille admirable – elle était aussi très juste en confidente malgré elle de Daniel Auteuil dans « Je l’aimais ». Elle confirme à nouveau avec ce film l’étendu de son talent. Le reste de la distribution est remarquable, des comédiens toujours très justes, mais rares tels Marc Citti, Nathalie Boutefeu, Marc Barbé, Judith Rémy, et bien entendu Jean-Pierre Darroussin, sont ici utilisés avec subtilité. Le débat avec le réalisateur fut passionnant, animé par le désormais ineffable Jacques de l’association Saint-Bruno – célèbre localement pour quelques gaffes, tout en lisant laborieusement ses notes. Jérôme Bonnel parle de son amour des acteurs, de son choix de les laisser habiter le cadre pour les suivre et en adapter sa mise en scène. Par exemple pour vérifier l’osmose Zidi-Loiret Caille, il a préféré les faire se rencontrer dans le quotidien pour voir si un couple pouvait se former. Il aime permettre à ses interprètes de nourrir ses personnages en improvisant parfois. Il maîtrise également le genre polar – il cite volontiers « 7h58 ce samedi là » film mésestimé de Sydney Lumet et « Fargo » des « Frères Cohen ». Il laisse la tension monter, créer un climat dans la pénombre. Le quotidien le passionne aussi comme le décor très juste d’un petit café de Province, retrouvé avec beaucoup de finesse. L’observation du frère et de la sœur l’intéresse dans ce contexte de genre, il est le départ de l’écriture du film. Sans jugements, ni psychologie, il arrive à nous accrocher à eux, à les rendre attachants dans leurs failles. Jérôme Bonnel est un cinéaste à suivre assurément.

LE COIN DU NANAR (DE TROP) : SEULS TWO

Et encore une comédie ! donnez nous du givre, du crachin, du spleen, on ne va jamais pouvoir tenir le coup à ce rythme là. Bon, tout est dérision de nos jours, Droopy est même premier ministre, mais là nous sommes au-delà de l’indigestion. Alors voir « Seuls two », après le faux film culte « Steak » – grand délire des Cahiers du cinéma sur deux pages -. La vision de ce film m’avait laissé perplexe, et dans une totale incompréhension. Écouter nos deux zigues parler du nouvel humour sous fond de paysage canadien twinpeaksisé, ça pouvait désarçonner aussi les bien les amateurs du tandem – furieux à la sortie de film – que ceux amateurs pathologiques de nanars franchouillisant – rangez moi plutôt dans cette catégorie, et en plus je ne me soigne même pas -. Le duo vedette du film Eric Judor et Ramzy Bedia – pas les plus antipathiques, convenons-en -, déclarent depuis quelques années être déçus par les réalisations d’après leur univers, par les vétérans Charles Némès et Gérard Pirès. Ces deux derniers ont du talent, mais le culte  auteuriste aidant ils signent ici eux même leurs derniers forfaits. Le début vise le cartoon, le probe Gervais – Eric Judor déguisé en palmier (mort de rire) – est en planque pour arrêter le voleur speedé Curtis – Ramzy Bédia -. Bien entendu, ce dernier gagne à tout les coups et Gervais et la tête de turc de ses collègues et n’est bon qu’à martyriser un jeune voleur de saucisses… Le duo finit par se retrouver seul au monde, par une sorte d’entrée dans la cathodique dimension – idée déjà prise sans grand résultat dans « Les Guignols, la fiction », il y a quelques années -. S’ils apprennent à s’estimer, ils retrouveront les autres. C’est amusant de voir finalement le décalage, un budget colossal pour notre duo de choc, qui se livre à une sorte d’impro généralisée, ce qui donne un résultat assez étonnant. En gros comme l’autre duo présent sur le film – Fred Testot et Omar Sy, séparés cependant – on s’attend toujours à ce qu’ils nous refourguent quelque chose, un met façon fast food, ou un compte en banque… où est la limite entre la pub, petits sketchs TV et cinéma… On s’étonne devant la démesure de l’ensemble, on imagine aisément les tournages parisiens dans les petits matins blêmes histoire de figurer la disparition des autres personnes. Finalement la réplique la plus drôle est dans le générique de film – mais tout le monde s’est barré, je persiste quand je vous disais que j’étais un grand pervers – : de mémoire : « C’est une « archipel(le) », un chapelle en plus gros -. C’est tout de même mieux que « Gervais, c’est frais », disons à la rigueur. Parfois c’est nettement limite, un truand noir à pour surnom « blanchette » ! – bidasses pas morts !-. On attendait mieux pour un film dédié à… Pierre et Marie Curie !

Éric Judor, « Je suis tombé dans Paris, c’est la faute à Ramzy… »

Quelques guests sont présents histoire de meubler l’ensemble. François Damiens, qui peut se targuer de passer de Jacques Doillon à nos deux zigues – 653 apparitions depuis le début d’année, il bat donc Julie Ferrier de deux films -, en adepte du curling, Benoît Magimel et Kristin Scott Thomas semblent s’ennuyer, Elodie Bouchez s’essaie dans la composition – sans grand résultat d’ailleurs -, Edouard Baer tente l’accent belge, Mc Jean Gab’1 s’amuse avec son image. Ils ne font que passer, mais il est assez limite de voir ces comédiens de manière abusive en promotion  – A l’instar de Michaël Youn et Antoine de Caunes dans le pataud « Tu peux garder un secret ? », on préfère plutôt avoir la surprise comme de retrouver Alain Chabat et Elie Semoun dans « 15 ans et demi ». Il y a aussi un nouveau phénomène à déplorer, l’absence de seconds rôles et de personnalités. On retrouve des génériques avec beaucoup de noms inconnus, les amateurs d’excentricités broient du noir, il ne semble plus y avoir d’inventivité concernant les comédiens ces derniers temps. Et le public alors, à voir les jeunes présent préférer regarder leurs portables – effet déplaisant garantie -, plutôt que nos deux amis, on se dit que le résultat final ne doit pas être trop avenant. Il y a un gros problème actuellement dans le cinéma français, on table sur un casting, on ébauche une vague histoire, on noie le tout dans une bande son « vavavoumhissante », et sur un profit immédiat. Certains essaient parfois une véritable inventivité – Nicolas et Bruno, mais pour la plupart des comédiens, on ne vise que le service minimum et la rentabilité immédiate. Peut-être que comme les duettistes Franco Franchi / Ciccio Ingrassia ou Abbott et Costello, il finiront « cultifiés » à la Cinémathéque en 2072, mais ce n’est pas leur rendre service que de les laisser en roue libre ou en démesure. Dès qu’un tandem a du tempérament, il est propulsé vedette à l’écran – sauf Sören Prévost et Arnaud Gidouin, sans oublier les hilarants Roselyne Bachelot et Bernard Laporte, on ne sait pas pourquoi -. Et pourtant il était amusant de voir leur évolution d’Eric Judor et Ramzy Bédia, l’un s’enroue, l’autre s’empatte… Reste à savoir, si nos estomacs supporteront longtemps ce régime hautes calories.  Entendu notre duo pour une « promo » pour le site « commeaucinema.com » : « On la refait, en drôle ? » : Chiche !

VALSE AVEC BACHIR

Avant-première le lundi 16 juin, de « Valse avec Bachir » à l’UGC-Cité Ciné Bordeaux, en présence de son réalisateur Ari Folman. Ce film présenté au festival de Cannes le 15 mai, a d’excellentes critiques, beaucoup d’entre eux s’étonnèrent à raison de son absence de prix au Palmarès. Évidemment, pour poser la question qui fâche au réalisateur sur ce fait, devinez donc qui était volontaire ce soir-là ? La réponse était assez cinglante « Too many american actors », avec le sourire cependant. Mais l’accueil critique et ses répercutions internationales était une véritable consolation pour lui. On peut se demander même en n’ayant pas vu l’intégralité des films du pourquoi des prix attribués par ce jury qui semble avoir voulu privilégier plus le côté social que la réussite artistique. Le film est une animation documentaire, genre assez inédit, présentant l’avantage d’une économie sur les problèmes de reconstitution. L’animation est très probante, malgré un manque de moyens avérés – jusqu’à trois minutes utilisable par jour –. Elle se base sur une base documentaire, alternant la technique du « rotoscope » utilisant les images existantes, avec l’animation traditionnelle – que le réalisateur nommait « Bambi » pour mieux nous faire comprendre -. Son travail avec son directeur artistique David Polonsky est remarquable. Il évoque aussi la difficulté pour ses personnages de les faire se mouvoir, mais on ne peut que louer le résultat final alors qu’il affirmait avoir qu’un budget très serré loin de celui du film de Marjane Satrapi « Persepolis » – qu’il citait à dessein ? -. Ari Folman évoque donc sa guerre, vue par un lui-même jeune homme. Il nous explique la manière dont il a occulté des années plus tard, le souvenir de sa cruauté par un souvenir écran imaginaire – il se rêve se baignant dans la mer avec ses camarades militaires -. Il va se livrer de nous jours, à une véritable investigation avec ses anciens amis soldats, il ne peut se souvenir s’il avait assisté aux massacres par les phalangistes chrétiens des Palestiniens dans les camps de Sabra et Chatila en 1982, voulant venger la mort de Bachir Gemayel. La démonstration est très convaincante, de la manière dont les jeunes gens doivent « déréaliser » la guerre pour survivre – le témoignage d’un photographe, pour supporter le carnage ambiants – image « Célinienne » d’un massacre de chevaux -.

Ari Folman en animation

Il essaie de comprendre le travail de la mémoire – très belle image de l’incrustation de la photographie de sujets enfants dans un décor de fête foraine, ils vont s’approprier cette scène jamais vécu par eux. Nous avons une empathie immédiate, avec la démonstration de la réaction que peut avoir un être humain pour composer avec la réalité. Il peut ainsi surmonter son traumatisme, comme absent de lui-même. Il se sert de son point de vue pour expliquer sa vision de la guerre, il trouve plus juste que les Palestiniens évoquent eux même leurs vécus au cinéma, plutôt que d’opposer les deux points de vue. Son travail d’évocation est d’une grande richesse, montrant la réalité crue de la guerre – la scène du verger, celle documentaire et insoutenable dans le final du film – et son interprétation onirique refoulée – la meute de chiens -. La guerre peut être surréaliste comme la scène qui donne son titre au film, du soldat narguant l’ennemi en dansant, ou du journaliste se tenant droit dans la mitraille. Il y a une bande son exceptionnelle, grâce aussi au talent du musicien écossais Max Richter, avec lequel il avait commencé à travailler par mails, la musique était composée en amont de l’animation aidant à établir un climat, voir la manière dont il s’approprie le climat musical des années 80. Le débat était très intéressant, en anglais, on ne pouvait que féliciter le traducteur présent, mais je n’ai pas retenu son nom. Son réalisateur, parlait du cinéma actuel israélien plus nourri par les images que sa génération – il a 46 ans –. Scénariste, il était amené comme beaucoup de soldats, à suivre une thérapie en étant dégagé des obligations militaires à la quarantaine. Il a ainsi mené à bien cette œuvre foisonnante et passionnante et à trouver la bonne distance pour nous la faire comprendre. Un choc tant sur le fond que sur la forme, dans cette année cinématographique assez médiocre.

SANS ARME, NI HAINE, NI VIOLENCE

Reprenons un peu les avant-premières, avec celle de l’UGC-Cité-Bordeaux du 25 mars dernier du film « Sans arme, ni haine, ni violence », en présence de son réalisateur, Jean-Paul Rouve et Gilles Lellouche. On retrouve donc le second film adapté de la vie romanesque d’Albert Spaggiari, avec l’assez oubliable « Les égouts du paradis » tourné en 1978, avec Francis Huster et Jean-François Balmer, pas le meilleur film de son metteur en scène convenons-en… On ne peut pas dire que Jean-Paul Rouve flirte avec la sympathie à l’issue du film. Il fallait le voir, proférant un tonitruant « ta gueule ! » à un jeune spectateur de 12 ans posant des questions pertinentes – déclaration rouvienne,  » il devrait travailler à Libération ! « -, donnant des détails sur l’absence d’Alice Taglioni, pourtant annoncée en se délectant des ravages d’une « gastro » chez cette superbe actrice -. Petite surprise, avec l’arrivée du chef-opérateur Christophe Offenstein, qui est de la région, le film lui doit beaucoup compensant les faiblesses de la réconstitution – il est un peu gênant de voir l’un des protagonistes lire un « Paris Match » d’époque ! -. Pour avoir eu la chance de voir travailler M. Offenstein sur « Mon idole » et « Edy » – grâce à François Berléand – il est évident que l’on retrouve sa patte. Mais hélas Jean-Paul Rouve le présente avec condescendance et minore sa participation au film. Car il a un sérieux côté content de lui – il ne voyait que lui-même – pour le rôle -, voire même cassant – sans doute une défense si on veut faire de la psychanalyse de « Prisu » -, mais on lui pardonne car son talent d’acteur est énorme – confère ce qu’il apporte au personnage de grand méchant dans le factice « La jeune fille et les loups ». Il privilégie l’aspect excentrique du personnage, ne voulant pas faire un biopic. Il le compare à un chanteur, qui n’aurait eu qu’un « tube » dans sa vie. Il déclare ne pas avoir souhaité faire un documentaire, bien qu’aimant ces histoires. Il était scotché à la vision de « Faites entrer l’accusé », présenté par l’ineffable Christophe Hondelatte – …la honte du Pays-Basque -. Evidemment tout le monde s’est mis à rire, mais non Rouve était bien sérieux… Il s’amuse visiblement avec cette figure cabotine, édulcorant certaines aspects négatifs de la personnalité du bandit. Son racisme est évoqué cependant, tel le malaise qu’il crée face à une jeune vendeuse de vêtement vietnamienne – Pom Klementieff, un nom à retenir -. . S’il montre aussi que le truand possède véritablement des armes, loin de sa légende, il préfère minorer ses idées avec de l’humour – le « gauchiste » proféré souvent – Imprimons donc la légende, avec pour danger de rendre sympathique un homme aux idées très douteuses – son flirt avec l’extrême-droite, son soutien à l’OAS, etc… -. L’histoire est dont très romancée, la compagne de Spaggiari, était moins magnifique que la belle Alice, et a juré fidélité à sa mémoire -.  Le personnage de journaliste joué par Gilles Lellouche  est inventé également. Le comédien est d’ailleurs très sympathique et modeste, déplorant avec humour, avoir évité son accès au vedettariat avec l’échec du très plaisant « Ma vie est une comédie romantique ». Le comédien s’étonne des rôles approchant les gangsters des années 70, après le décevant « Dernier gang », et avant la première partie du film de Jean-François Richet, sur la vie de Jacques Mesrine, il y interprète un dandy voyou.

Gilles Lellouche & Jean-Paul Rouve

Le film est assez ludique, même s’il se révèle décevant. Il y a pourtant de bonnes idées, comme l’utilisation d’un très important comédien français, venu par amitié. Je vous en laisse la surprise, mais en précisant que j’ai rajouté sadiquement son nom dans les fiches Wikipédia et IMDB du film, et que son nom est dans le dossier de presse trouvable sur le web et dans les magazines de cinéma. Il figure un grand truand marseillais soupçonné d’avoir aidé Spaggiari, mais comme l’individu est plutôt procédurier, Rouve à trouvé l’astuce de filmer le comédien en question, de manière à ce que personne ne le reconnaisse vraiment. Son nom figure avec humour au générique final – avec la mention « avec pour la première fois (pas) à l’écran » -. Disons que sans « Contestation générale » et sans en faire « Une question d’honneur » – comprenne qui pourra… – il nous a tout de même bien mis sur la voie pour identifier le caïd , en déclarant « Ça finit par… et ça commence par… ». Rouve en interprétant ce bandit médiatique phagocyte l’écran, laissant peu de place à Gilles Lellouche et Alice Taglioni, qui sauvent honorablement leurs personnages. Les seconds couteaux doivent se contenter des miettes, comme le trop rare sur le grand écran et excellent Maxime Leroux, qui a plus une silhouette à habiter que de rôle à tenir avec son personnage de « 68 ». Beaucoup de comédiens doivent se contenter de faire de la figuration intelligente, comme le trio de policier décalé – Alice Marivin, Jean-Philippe Puymartin et Renan Carteaux -, Patrick Bosso en truand – qui porte cependant magnifiquement les boucles d’oreilles -, Arsène Mosca en perceur de coffre, ou Florence Loiret-Caille en épouse du journaliste. Les autres n’ont l’occasion que de tenir des apparitions subliminales, tel François Berland en avocat. Au final, si le divertissement l’emporte, on se fatigue de voir ainsi glorifiée une certaine mythologie des voyous. Son auteur n’aura pas réussi à égaler l’originalité des ses camarades des Robins des Bois, Pierre-François Martin-Laval et surtout de Maurice Barthélémy, passant à la réalisation. Je croise Jean-Paul Rouve, en lui disant qu’il pourrait être un formidable Robert Le Vigan, dont il partage une certaine folie, des personnes lui en ont déjà parlé. Il trouve le personnage trop négatif – il a pourtant joué un « collabo » dans « Monsieur Batignolle » et repart en évoquant tout haut une hypothétique participation à un remake de « Goupi Mains-rouges »…

LES FILMS QUI RENDENT SCROGNEUGNEU : ASTÉRIX AUX JEUX OLYMPIQUES

Il est charitable de ne pas tirer sur l’ambulance, de ne pas rire de David Martinon, de trouver Danièle Evenou fofolle et non pas pathétique, d’affirmer sans rire qu’Estelle Lefébure est assurément faite pour le cinéma, de trouver drôle Louise Bourgoin sur Canal+, et de ne pas avoir l’impression du bruit de la craie sur le tableau dès quelle parle –  elle nous menace, elle aussi de faire actrice chez Anne Fontaine -, de rire aux sketches de Jean-Luc Lemoine dans « On n’est pas encore lessivé », de trouver normal que Renaud Le Van Kim censure le beau texte de Mathieu Amalric aux Césars, …pour une question de timing – on y croit ! -, et que oui, vraiment Josée Dayan avec son « Sous les vents de Neptune », est vraiment la référence du service public – enfin, ce qu’il en reste -. Ah ! les travers de la politesse, oui il est trop facile de ricaner caché derrière son clavier. Mais on se retrouve parfois perplexe devant une entreprise – « Astérix 3 » donc, et l’on se demande, comment en est-on arrivé là ! Et pourtant, à trop tarder de voir le film, à trop vouloir compléter la fiche IMDB, en rentrant des noms inédits trouvé sur le site de Pathé suisse !,  – il me faut en ce moment quasiment visiter chaque fiche des film français, et faire du ressemelage, tant elles chantent misères, je crois que je vais abandonner… -, je finissais par trouver assez désolant que l’on jette autant d’opprobre sur ce film de divertissement… Il fallait bien que Thomas « Brutus » Langmann finisse par trouver moyen de s’affirmer face à Claude « César » Berri, tout de même… Curieuse évolution que celui de l’investigateur de ce film, qui avait débuté assez subtilement comme acteur au début des années 90 – « Nuit et jour », « Paris s’éveille » -, et qui voulait alterner, comme producteur, des films populaires – « Le boulet », plutôt plaisant – avec des films plus ambitieux – Mesrine vu par Jean-François Richet – en passant par des bizarreries totales – le (faux) culte et survendu « Steak » de Quentin Dupieux -. A force de ne rien attendre, on finit par espérer au moins un minimum syndical. Le public hélas, même les enfants, restait de marbre, ce qui est rare dans un multiplex… A la vision du film, il reste la désagréable impression d’un film écrit trop vite autour d’un casting quatre étoiles, il n’est qu’un prétexte pour enfiler un ensemble de scénettes, le duo Charlot-Magnier trouvant même l’occasion de s’auto-citer, avec le fameux « à l’insu de son plein grè », tiré des « Guignols de l’info » – période où ils étaient drôles certes -. Les effets spéciaux sont étonnamment peu convaincants, on a l’impression désagréable de voir les comédiens jouer devant un fond bleu. Alors pourquoi Albert Uderzo et la fille de René Goscinny, en bon gardiens du temple – mais que vaut Astérix sans Goscinny ? -, interdisaient à Gérard Jugnot de tourner « Astérix en Hispanie », avant de se laisser convaincre ici, quel manque de discernement. C’est aussi navrant que l’annulation de la pièce de Bernard-Marie Koltès, « Retour au désert », par ses ayants-droits. Et la seule idée du film, alors ? : Alain Delon et son « Avé moi » – idée honteusement piquée au « To be or not to be » de Lubisch – avec son célèbre « Heil Myself« , proféré par un acteur grimé en Hitler -, n’arrache même pas l’esquisse esquivée d’un sourire.

« Beaucoup de bruit pour rien »

Il tente l’autodérision, trop tardivement il est vrai si l’on songe aux acteurs américains. Quant à son dialogue reprenant quelques titres de ses films de « La race des seigneurs » au « Guépard », il est très creux. De plus Patrice Leconte utilisait cette même idée, il y a dix ans pour « Une chance sur deux », où il déclarait à Jean-Paul Belmondo être plutôt « Piscine ». Curieuse fin de carrière pour cette star se complaisant dans un certain passéisme, qui n’aura eu comme titre de gloire ces derniers temps que dévoyer complètement le Fabio Montale de Jean-Claude Izzo. Gérard Depardieu, n’est que l’ombre de lui-même, mais espérons pour lui que ce soit voulu comme les ¾ de sa filmo ces derniers temps, – je vais finir par lui faire un hommage rubrique R.I.P. de son vivant, si il persiste -. Surprise son personnage tente assez vainement de devenir plus subtil, et nous avons droit à une parodie pataude de l’un de ses rôles phare « Cyrano de Bergerac », ce qui n’arrange rien, on décroche bien évidemment pour songer au film de Jean-Paul Rappeneau. Clovis Cornillac essaie pourtant de trouver des équivalences au style BD, en montrant un Astérix convaincant ce qui n’est pas une mince performance vu l’ensemble. Benoît Poelvoorde nous arrache quelques sourires comme souvent, on a l’impression de le voir faire du sur place cependant, Stéphane Rousseau semble exsangue, José Garcia et Elie Semoun semblent prendre de la distance avec ce barnum… Les seconds rôles sont sacrifiés – Jean-Pierre Cassel, Vernon Dobtcheff, Sim, Arsène Mosca, Bouli Lanners, etc…-. Franck Dubosc et Alexandre Astier ne se renouvellent guère, Les caméos se multiplient Castaldi senior, Dany Brillant, Francis Lalanne, quelques stars du sport oeuvrant pour des associations. Enfin, au final, le génial Jamel Debouze qui nous tire de notre somnolence, hélas trop tardivement. Cerise sur le gâteau, on retrouve Vanessa Hessler, qui par habitude de sa prestation dans la pub « Alice » continue à rendre transparent tout ce qu’elle approche… Le film se partage entre l’esbroufe – la course de chars – et le décousu. Il y a curieusement un côté potache, à survoler ainsi un énorme budget pour en faire une parabole de la grenouille voulant être aussi grosse que le bœuf – la version signée Chabat -. Petite performance, on arrive à visualiser la pire des trois adaptations cinématographique sur Astérix – Claude Zidi avait eu au moins le mérite d’essuyer les plâtres et de poser les personnages -. Le spectateur moyen veut bien suivre, mais il y a des limites tout de même à ce naveton dispendieux. Les gros budgets deviennent de plus en plus énormes, le matraquage médiatique sert à palier les manques, le cinéma exigeant a de plus en plus de mal à exister. Je pensais à la phrase d’Olivier Assayas, dans le documentaire « Les mémoires du cinéma français » d’Hubert Niogret diffusé en DVD. Il y réclamait un devoir d’inventaire sur les actuelles comédies françaises, et pourquoi pas finalement…. Alafolix… pas du tout !

LE COIN DU NANAR : LA VIE INTÉRIEURE DE MARTIN FROST

Pauvre, pôôvre David Thewlis. Il était pourtant formidable dans « Naked » de Mike Leigh, mais il a curieusement négocié son parcours depuis. Tétanisé devant le concours de cabotinage de Marlon Brando et Val Kilmer – ce dernier étant grand gagnant – dans le tordant « L’île du docteur Moreau », il a aussi fait quelques frimes pour quelques grands metteurs en scène et a participé même à une comédie sur… l’IRA avec le cultissime « Divorcing Jack ». Las, Paul Auster vient ici de lui donner le coup de grâce… Le très talentueux producteur Paolo Branco finance chichement ce film américano-espagnol-paraguayen,-portugais ( Uirk !!! ), mais ne rend pas service à l’écrivain en le laissant filmer le canevas d’une historiette assez flagada. Paul Auster s’a(muse) comme il peut avec son nombril, en recyclant l’un de ses ouvrages « Le livre des illusions » (2002). Il se paie même le luxe de prêter sa voix au récitant, assez hésitante pour narrer les affres de la création. L’inspiration de la mise en scène est inexistante, à noter une scène d’anthologie de crevaison d’une voiture à deux à l’heure. J’ai eu ma période Paul Auster comme lecteur, et j’ai gardé un plutôt bon souvenir de son premier film « Lulu on the bridge », sur un thème similaire avec Mia Sorvino et Harvey Keitel, diffusé en 1998, je cours donc à la dernière séance 22 heures de mon multiplex local histoire de ne pas rater ce dernier avatar auster. Martin Frost est un Paul Auster aux petits pieds. Il part se mettre au vert dans la maison de campagne d’un couple d’ami parti faire les malins à Calcutta. L’ami est figuré par Auster lui-même qui prêtre sa noble tête aux photos du lieu, clin d’œil mégalomaniaque lourdingue. L’auteur lessivé, décide d’y mener la vie d’une pierre ! Le plan suivant nous le montre roulé en boule par terre sous les arbres, ce n’était donc pas une image… Mais non, on souffle, il observe juste des fourmis… Le lieu l’inspire, il commence l’écriture d’une nouvelle. Au petit matin, il saute comme un cabri, en découvrant Irène Jacob dans son lit, une inconnue qui se dit étudiante en philosophie. Il veut être seul, il vitupère odieusement, jette son courroux sur la malheureuse Claire qui s’annonce comme la nièce du couple. Mais il tombe sur le charme de la belle. Seule explication viable, c’est sans doute en raison  de son tee-shirt Berkeley – jeu de mots, comme disait Maître Cappelo, avec l’université et le philosophe du même non, l’ineffable duo se lançant dans des explications oiseuses -.

Michael Imperioli et David Thewlis, jouons à la tournevissette en attendant la mort…

Hélas, plus l’écrivain est inspiré à l’écriture de son oeuvre, plus la belle se trouve mal en point… Mais qui donc est cette mystérieuse créature ? Jetons de gros doutes sur le jeu d’Irène Jacob, qui se livre à un festival de minauderies proprement hallucinant. Dirigée par un metteur en scène comme Kieslowski, elle a beaucoup de talent, mais ici que dire. Aucune dignité à attendre, elle tombe dans le jardin, avec force de précaution pour ne pas se faire mal, dernier réflexe évident quand on perd connaissance. Il faut la voir – attention SPOILERS – sub-claquer dans son lit après une forte fièvre, comme si elle avait ingurgité un bataillon de limaces vivantes. Le réalisateur un tantinet sadique, nous livre même une sorte de best (worst ?) of, de ses pauses affectées en noir et blanc et au ralenti, tandis qu’une machine à écrire tombe interminablement dans le vide. Arrive Michael Imperioli en chauffagiste amateur de lecture. On le comprend, ce pilier des « Soprano » doit être jaloux de Lorraine Bracco qui a débuté dans quelques nanars franchouilles navrants en France au début des années 80, il veut lui aussi faire œuvre dans la désolation. Son arrivée devrait amuser, mais il est mauvais comme un cochon avec ce personnage hautement improbable, écrivant lui aussi des contes sur des pays fictifs dans les Carpates. Il invente même la « tournevissette », déguisé en garçon vacher, un jeu de fléchettes remplacées par des tournevis ( !), ce qui parachève totalement le salmigondis ambiant de ce film. L’individu lui est flanqué d’une muse plutôt mal en point joué par la propre fille de Paul Auster, Sophie, qui trouve moyen de rabaisser encore le niveau, ce qui n’est pas une mince performance. Elle joue une « non-comprenante » comme disait Pierre Desproges, et nous régale de plus de son petit filet de voix. Auster malmène le mythe d’Orphée – ah, le coup du rétroviseur… -, on arrive petitement à la fin avec un sentiment de délivrance. Reste à savoir l’emploi du temps de cette feignasse de muse de Paul Auster, partie sans doute suggérer au jury des Emmy Awards d’attribuer l’award du meilleur directeur à Patrick Le Lay – ce monde est fou… -.

À L’INTÉRIEUR

En cette période de disette cinématographique, on ne peut que se jeter sur ce film comme la misère sur le bas clergé de notre cinéma hexagonal. Le 8 juin dernier, il y avait eu une avant-première du film en présence des deux réalisateurs Alexandre Bustillo et Julien Maury. Ils aiment le cinéma de genre et ne jouent pas à rigoler avec les codes, ce qui est hautement honorable ces derniers temps. Il y a cependant une volonté évidente de désarçonner le spectateur, à l’instar d’un Gaspar Noé et d’une Marina de Van. Le résultat est divers pour les spectateurs, les rigolards sont parfois de sortie histoire de conjurer la peur – ce qu’ils assument -, les autres suivent le spectacle de manière plus calme, se laissant prendre par une mise en scène énergique. Pour Alexandre Bustillo, ancien journaliste à Mad Movies, la seule violence intolérable du film provient de scènes d’archives, lors de mouvements sociaux dans les banlieues. Le procédé est loin d’être gratuit, une menace sourde pèse sur la ville, laissant une mère de famille enceinte, qui a perdue son mari dans un accident dans une inquiétude sourde la veille de son entrée à l’hôpital pour son accouchement. Elle se réfugie chez elle un soir de Noël. Et bien évidemment une inconnue rode devant la porte. La bonne idée ici c’est d’avoir féminisé le slasher, ce qui installe un curieux malaise face à nos propres tabous sur la maternité. L’intruse c’est Béatrice Dalle dans un registre proche du « Trouble every day » de Claire Denis, dans une composition forte et névrotique. Ils ne tarissent d’ailleurs pas d’éloge sur cette comédienne et souhaitent continuer à travailler avec elle. Le film a de grandes qualités, les deux cinéastes sont cinéphiles, il y a donc un petit jeu des références qu’ils assument, de l’appareil photo de « Fenêtre sur cours » d’Hitchcock aux murmures du prénom de l’héroïne échappés à l’œuvre de Dario Argento. Ils citent aussi bien « Les innocents » (1961) de Jack Clayton, que la série des « Halloween », l’étonnant « Giallo », publié il y a peu en DVD chez « Neopublishing », « Folie meurtrière » (Tonino Valerii, 1972), surprenante réussite du genre, ou au mésestimé « Mort un dimanche de pluie » (Joël Santoni, 1986). L’utilisation d’une villa existante est habile – pour la petite histoire, elle est souvent louée pour des tournages, c’était là par exemple qu’habitaient André Dussollier et Martine Chevallier dans « Ne le dis à personne » -. Les scènes d’agressions sont d’ailleurs réellement angoissantes. Seule la salle de bain est un décor de studio.

Julien Maury & Alexandre Bustillo

Les cinéastes ne rechignent donc pas sur les effets gore, arrive à faire naître une angoisse par le jeu des apparitions-disparitions, les maquillages probants, de l’utilisation du cadre et des lumières. Alysson Paradis en héroïne quelque peu malmenéE et blessée par la vie est particulièrement convaincante, il y a de plus un effort sur la distribution pour incarner des archétypes, limites caricaturaux, de Nathalie Roussel, méconnaissable en mère de famille, Nicolas Duvauchelle terminant en pantin désarticulé, François-Régis Marchasson en patron secourable, ou Aymen Saïdi, seul personnage sympathique du film finalement dont le destin bascule par la seule raison d’un « délit de faciès ». Autre présence très forte, c’est celle de Dominique Frot – sœur de Catherine -, dont le rôle a pourtant été un peu coupé au montage, installant un certain malaise en infirmière givrée au début du film, c’est une comédienne toujours surprenante, elle réussit ici une prestation particulièrement glaçante. Ce film est donc une sorte d’expérimentation, sur le thème archi-battu du « survival », le générique a d’ailleurs été fait de manière artisanale avec une plaque en verre et quelques viscères. On ne peut que louer l’ensemble, malgré quelques flottements ici ou là, mais il est clair que ces deux jeunes metteurs en scène ont un sacré talent avec un budget très modeste et un manque d’expérience au préalable. Le film n’a été interdit qu’au moins de 16 ans, ce qui est important pour la rentabilité du film, on connaît celle de moins de 18 ans pour « Saw III », que l’on dit pourtant moins dérangeant. Il convient donc de les encourager ce tandem de cinéastes, que l’on risque évidement  de retrouver à l’instar d’un Alexandre Aja, aux États-Unis. 

Pour info, sur « 13ème rue » chaîne, que je n’ai pas hélas, il y a ce mardi à 22h50 « Mister Mocky présente… d’après les nouvelles d’Alfred Hitchcock » dans le cadre des « Mardis Mocky ». C’est une série de trois courts-métrages inédits de 1991, pour une question de droits je crois », avec ce soir « La méthode Barnol » avec Jean Poiret, Roland Blanche, Dominique Zardi. L’histoire : « Un homme d’une quarantaine d’années ne supporte plus la présence du père de son épouse chez lui. Pour hériter de la maison, il décide de monter un stratagème… ». Souhaitons que ce courts et les deux suivants « La vérité qui tue » et « Dis-moi qui tu hais », sortent dans la collection Mocky en DVD.

Le cinéaste australien Richard Franklin est mort le 11 juillet dernier à Melbourne (Australie) d’un cancer de la prostate. On lui doit quelques films fantastiques dont « Patrick » (1978) sur la télékinésie étonnant film, grand prix au festival d’Avoriaz ou « Link » (1985), avec Elisabeth Shue et Terence Stamp, histoire d’un chimpanzé cobaye trop évolué, sans oublier une suite en 1983, dispensable sans être indigne au célèbre « Psychose » d’Hitchcock avec le retour de Vera Miles, confère les informations sur Senseofcinema.