Mais pourquoi la chaîne Arte flirte avec le n’importe quoi. A Bordeaux c’est assez comique, il n’y a pas de choix pour obtenir une version originale, et les films sont tous diffusés en 16/9ème, si vous avez une télévision normale, vous perdez, format 4/3 oblige, au moins un quart de l’image. Toutes suggestions concernant cette regrettable chaîne est donc bienvenue… Cette chaîne, comme Canal+ a diffusé cependant le film commémoratif du 60ème anniversaire du festival de Cannes – quoi de + normal puisqu’il n’y en eu que 58, si on ne compte pas le clash de 1968 ! -. Ce film « Chacun son cinéma ou ce petit coup de cœur quand la lumière s’éteint et que le film commence » (ouf) en est le titre complet, je me suis empressé de rajouter le titre exact sur IMDB. L’idée n’est pas neuve, demander comme avec « Lumière et compagnie » en 1995, pour le centième anniversaire du 7ème art, a des réalisateurs prestigieux de faire des petits courts. Le thème est la salle de cinéma, et la durée va de 3 à 5 minutes. C’est forcément inégal, mais c’est un exercice de style assez stimulant. Un DVD est sorti également avec en bonus les versions longues des films de Alejandro Gonzales Iñarittu, Michael Cimino et de Hou Hsiao Hsien. Le film est dédié à Federico Fellini. Petit panorama des sketches…
La conférence de presse à Cannes 200, Roman Polanski s’apprête à réagir aux propos des journalistes…
# Cinéma d’été, réalisé par Raymond Depardon, son et production : Claudine Nogaret, montage de François Gedidier, assisté d’Esther Frey, mixage de Christophe Vingtrinier, étalonnage d’Aude Humblet : Sensations d’un soir d’été dans un cinéma d’Alexandrie. Attachant.
# Une belle journée, écrit, monté et réalisé par Takeshi Kitano, avec Kitano lui même – sous le nom de Beat Takeshi et Moro Morooka. Un homme dans une campagne désertique demande le tarif fermier (!) pour assister à la diffusion de « Kids Returns », mais le projectionniste kitanesques doit se débattre avec la vétusté de son matériel. Amusant.
# Trois minutes, réalisé par Théo Angelopoulos, images d’Andréas Sinanos, son de Laurent Poirier, décors de Valérie Valero, montage de Yannis Tsitsopoulos, musique d’Eleni Tsitsopoulos, musique d’Eleni Karaïndrou, directeur de production d’Éric Vassard, avec Jeanne Moreau. Ce sketche dure 3 minutes. Une femme – Jeanne Moreau touchante – se rend dans un cinéma désert. Il y a des mannequins habillés avec des cirés jaunes et des parapluies à l’entrée – Angélopoulos s’amuse en s’auto-citant (?) dans ses évocations d’une Grèce sous la pluie -. En contrechamp, on retrouve Marcello (Mastroianni), dans des images tirées de « L’apiculteur » d’Angélopoulos également. Jeanne Moreau donne ensuite un beau moment d’émotion en reprenant un texte de « La nuit » de Michelangelo Antonioni.
# Dans le noir, écrit et réalisé par Andréi Konchalovsky’’, avec Yola Sanko, Juris Laucinsh, Amexéï Grishine, Daria Gratcheva, images de Maria Solovieva, décors de Lioubov Skorina et Edouard Skorina, son de Vassili Filatov, montage d’Olga Grinshpoun, direction de production d’Evgeny Stepanov, assistant mise en scène : Dimitri Kroutchkov. : Une salle quasi-déserte une ouvreuse s’apprête à assister à la projection du « 8 et demi » de Fellini, mais les plombs sautes, il y a bien un couple de spectateurs mais qui ne pensent qu’à faire l’amour. L’ouvreuse malgré toutes ces déboires, est elle bien disponible pour voir ce grand film. Un petit côté désabusé compensé par l’espoir que les chefs d’œuvres perdureront.
# Diaro di uno spettatore (Journal d’un spectateur), réalisé par Nanni Moretti : Nanni Moretti évoque ses souvenirs de spectateurs en visitant plusieurs salles de cinéma. On retrouve son style avec ce monologue mordant et l’humour dans ses évocations de souvenir de cinéphiles, avec son fils et sa mère, passant allégrement de « Matrix 2 » à « Rocky Balboa », irrésistible.
# The Electric Princess Picture House, réalisé par Hou Hsiao Hsien : Un militaire accompagne une mère enceinte et ses deux petites filles devant un cinéma. On retrouve la vie de la cité devant de la salle, avec ses vendeurs à la sauvette. Nostalgie sensible d’un souvenir d’enfance d’une salle de cinéma disparue avec une image finale fantômatique du « Mouchette » de Bresson.
# Dans l’obscurité, réalisé par Jean-Pierre et Luc Dardenne, avec Émilie Dequenne et Jérémie Segard, photo d’Alain Marcoen, cadre de Benoît Dervaux, son de Benoît de Clerk, mixage de Thomas Gauder, costumes de Monic Parelle, décors d’Igor Gabriel, montage de Marie-Hélène Dozo, production d’Olivier Bronckart : Un petit voleur profite de l’émotion d’une spectatrice pour voler dans son sac. Second hommage à Robert Bresson avec un extrait sonore d’Au hasard Balthazar, et jolie petite pirouette finale.
# World cinéma, réalisé par Joel et Ethan Coen, avec Josh Brolin, Grant Heslov, Brooke Smith, caméra : Steve Lubensky. Un cow-boy rentre dans un cinéma d’arts et essais qui propose « La règle du jeu » et « Climats ». Il finit par aller voir ce dernier, convaincu par un employé passionné. L’incongruité d’un américain moyen du moins d’aspect – il cache en fait une ambigüité – qui finit par être touché par un film. Un hommage à l’universalité du cinéma.
# Anna, écrit et réalisé par Alejandro Gonzales Iñarittu, avec Luisa Williams dans le rôle d’Anna, images d’Emmanuel Lubezki : Un homme accompagne Anna, une jeune aveugle, à assister à la projection du « Mépris » de Godard, en lui détaillant certains plans. Elle est submergée par l’émotion par la force de la bande son du film. Joli moment tendre et émouvant.
# En regardant le film, réalisé par ZHANG Yimou, avec Wang Liang (Le jeune garçon), LI Man (La jeune fille), LU Yulai (Le projectionniste), scénario de Zou Jingzhi, ZHANG Yimou, prises de vues de Zhao Xiaoding, Son de TAO Jing, assistant réalisateur de LIU Guonan, Montage : CHENG Long : Les préparatifs en plein d’un petit cinéma itinérant dans un petit village vu à travers les yeux d’un enfant. Touchant et charmant.
# Le Dibbouk de Haïfa, réalisé par Amos Gitaï. Parallèle entre un cinéma de Varsovie 1936, et un autre de Haïfa, 70 ans plus tard. Un exercice de style brillant, montrant un lieu privilégié et vivant rattrapé par l’histoire.
# Lady the bug (Lady insecte) de Jane Campion, avec Erica Englert (The bug), Clayton Jacobson (The man), et le voix de Geneviève Lemon, Marney McQueen, Clayton Jacobson. Produit par Christopher Gill, prises de vues de Greig Fraser, montage d’Alexandre de Franceschi, musique de Mark Brodshaw, direction artistique d’Andrew Short et Rebecca Cohen, cistyle de Gabrueka Cylesova et Jo Woodcroft. Une femme insecte énerve passablement un employé d’un cinéma. Ce sketche est dédié aux deux gentleman de Cannes Gilles Jacob et Pierre Rissient, mais me semble un peu anecdotique devant l’improbable prestation d’Erica Englert, créatrice de la bestiole.
# Artaud double life, réalisé par Atom Egoyan, images de Nick de Pencler, assisté d’Ono Weeda, musique de Mychael Danna, montage de Susan Shipton, assisté de Marc Roussel, son de Steven Munro. échanges de SMS de spectateurs dans des cinéma proposant « Vivre sa vie », « The adjuster » et « La passion de Jeanne D’Arc ». Le père Egoyan s’auto-cite se mettant sur le même plan que Godard ou Dreyer, et en plus encourage la désagréable habitude du portable allumé surlumineux dans une salle de cinéma. Reste qu’il trouve le moyen d’être brillant en opposant les images, malgré un certain manque d’originalité – le visage d’Anna Karina avec celui de Falconetti -, tout en rendant hommage à Antonin Artaud, on est loin des « Histoires du cinéma » de Godard.
# Sputnik – Esittää (Valimo – La fonderie), d’Aki Kaurismäki, avec Matti Hyvönen, Arto Malmberg, Tarmo Nyholm, Jukka Rautiainen, Jukka Salmi : Le style Kaurismakien, reconnaissable entre mille, des ouvriers d’une fonderie vont voir une sorte de cinéclub des petits films Lumière avec « La sortie de l’usine Lumière à Lyon 1895 », sous fond de musique rock. Galerie de trognes et ébauche d’une idée de révolte par le cinéma contre un monde difficile ?
# Recrudescence, d’Olivier Assayas, avec Deniz Gamze Ergüven, George Babluani et Lionel Dray, reste du générique difficilement lisible : Un petit couple amoureux bouffeur de pop-corn rentre dans le multiplex de l’UGC des halles, est suivi par un voleur… Même principe que le film des Dardenne, impressions parisienne et petit twist final difficilement cernable.
# 47 ans après, de Youssef Chahine, image de Ramzis Marzouk, montage de Ghada Ezzeldin, son et mixage de Mustafa Aly, avec Yossra El Lozy, Karim Kassel : Évocation du silence à Cannes autour de la sélection du second film de Chahine avant de recevoir des mains d’Isabelle Adjani, le prix du 50ème anniversaire pour son l’ensemble de son œuvre, pour son humanité, son courage et sa clémence. Les deux jeunes acteurs du débuts du film, sont mal dirigés. Le reste provient d’images d’archives cannoise de 1997. Auto-célébration de Youssef Chahine par lui même, mais message d’espoir aux débutants. Gentiment vain.
# It’s a dream (C’est un rêve), de Tasi Ming Liang, avec Lee Kang Sheng, Chay Yiok Khuan, Pearlly Chua, Norman Atun, Lee Yi Cheng. Une voix off raconte un rêve où il voit son père jeune et sa mère âgée, avant de se souvenir de l’amour du cinéma de sa grand-mère. Rêverie autour des écrans nostalgiques.
# Occupations, de Lars Von Trier, avec Jacques Frantz et Lars Von Trier : Un homme – Frantz – à la fois critique et homme d’affaires, s’ennuie ferme à la vision de… « Manderlay ». Il se met à parler avec son voisin – Lars Von Trier -. Exercice iconoclaste d’autodérision et excellente prestation de Jacques Frantz jouant en anglais.
# Le don, dialogue d’un cinéphile aveugle avec sa nièce anthropologue, de Raoul Ruiz, avec Michael Lonsdale et Miriam Heard : Retrouvaille avec Michael Lonsdale, plus de 20 ans après « L’évadé du pont de l’Alma ». On retrouve le côté conteur du cinéaste, avec les souvenirs d’un aveugle, qui avait apportait une caméra dans un petit village du Chili. Onirique dans un climat fantastique.
# Cinéma de Boulevard, de Claude Lelouch, avec Audrey Dana et Zinedine Soualem. Lelouch raconte la rencontre de ses parents dans un cinéma d’avant-guerre pour voir « Top hat » avec Fred Astaire et Ginger Rogers. Le cinéma sera un refuge ensuite pour le cinéaste durant la seconde guerre mondiale et lui montrera sa vocation avec « Quand passent les cigognes ». Sa mère reverra plus tard Fred Astaire et Ginger Rogers sur un écran, mais aux côtés de son fils pour la remise de l’oscar d’ « Un homme et une femme ». Sans surprise mais plaisant.
# First Kiss (Premier baiser), réalisé par Gus Van Sant, avec Paul Parson (The projectionnist) et Viva Las Vegas (sic) (The sunbather) : un jeune projectionniste est fasciné par l’image d’une jeune femme au bord de la mer. Quand « La rose pourpre du Caïre » rencontre « Le lagon bleu ». Mouais… Il y a des jours où l’on se demande pourquoi Gus Van Sant a « La carte »…
# Cinéma érotique, réalisé par Roman Polanski, avec Jean-Claude Dreyfus, Edith Le Merdy, Michel Vuillermoz, Sara Forestier, Denis Podalydès. Un couple (Édith Le Merdy et Jean-Claude Dreyfus) dans un cinéma, entendent des cris de jouissance lors d’une séquence de film érotique. Fortement gênés par de ce vil onaniste – Michel Vuillermoz -, ils appellent l’ouvreuse – Sara Forestier enlaidie -, qui devant la situation va vers son directeur – Denys Podalydès -. Enfin un peu d’humour, l’œuvre est drôlatique, même si la « chute » est prévisible.
# No translation needed – Sans traduction, réalisé par Michael Cimino, avec Juliana Muñoz (+ vocaliste) et Yves Courbert, montage de Gabriel Reed, cinématographie de Francis Grumman, producteur associé de Calantha Mansfield, produit par Joann Carelli, musique de Son Mayor. Un cinéaste fortement agité – Yves Courbet -, réalise un clip en DVD d’une chanteuse sud-américaine sensuelle – Juliana Muñoz – Autodérision – « Tu te prends pour « Miguel » Cimino ! » -, rythme et humour, efficace.
# At the Suicide of the Last Jew in the World in the Last Cinema in the World (Le suicide du dernier juif du monde dans le dernier cinema du monde), réalisé par David Cronenberg, avec David Cronenberg et les voix de Jesse Collins et Gina Clayton, avec la collaboration de Brandon Cronenberg, Carlyn Zeifman, John Bannister, Deirdre Bowen, Howard Shore, et … Deluxe, Toronto : Deux journalistes de « MBT Auto Bio Cam », commente le suicide en direct d’un juif hongrois dans la dernière salle du cinéma du monde. L’un des meilleurs sketches du film, avec un seul plan séquence joué par Cronenberg lui-même. Une réflexion salutaire sur l’avenir du
cinéma.
# I travelled 9000 km to give it to you (J’ai fait 9000 km), réalisé par Wong Kar Wai, écrit par Wong Kar Wai et William Chang, avec Fan Chih Wei, Frani Chang et Yui Ling : Caresse érotiques d’un couple lors de la projection d’Alphaville de Godard. On retrouve la virtuosité furtive et habituelle, limite chichiteuse, du metteur en scène.
# Where is Romeo (Où est mon Roméo ?), par Abbas Kiarostami, avec Nikoo Kheradmand, Laleh Eskandari, Fatemeh Motamedaria, etc… : Visages de femmes voilées pleurant lors de la diffusion de « Roméo et Juliette ». La simplicité de la mise en scène transcende l’émotion. Le film remercie Mme Nikoo
Kheradmand.
# The last dating show (La séance du dernier rendez-vous), de Billie August, avec Frank Hyam, Kristian Ibler, Casper Christensen, Peter Hesse Overgaard, Anne-Marie Louise Curry, etc… – générique peu lisible -. Un jeune danois a une invitation pour une femme voilée. Il lui traduit le en anglais car elle ne parle pas danois, ce qui énerve trois spectateurs : Très joli film pour l’académique Billie August, il semble que le format court lui sied beaucoup avec cette ode à la tolérance.
# Maladresse, écrit et réalisé par Elia Suleimann, avec Elia Suleiman, Leonid Alexeienko, Rami Abdu Hanna, Ehad Assal, Raja Dbayeh, Maria Villa Rebolo, Anton Shalhat, Rashad Deek, Ala Harbaji, Abeb Zoubi. Un metteur en scène – Elia Suleiman keatonien – vient présenter dans un pays de l’Est, son film. Mais la projection de son film s’avère catastrophique. Épisode très drôle proche des petits maîtres du burlesque américain. Nous recevons ici de bonnes nouvelles de ce cinéaste trop rare.
# Rencontre unique, écrit et réalisé par Manoel de Oliveria, avec Michel Piccoli (Nicolas Khrouchtchev), Duarte d’Almedia (Le pape Jean XXIII), Antoine Chappey (Le secrétaire de Krouchtchev), photographie ; Francisco de Oliveira, assisté de Mathieu Giombini, costumes de Fabio Perrone, Semira Suspene, Truquages de Stéphane Mitonneau, montage de Valérie Loiseleleux : Retour au muet et aux sources pour de Oliveira, où la rencontre improbable, sur une musique d’Erik Satie, de Krouchtchev avec le camarade pape Jean XXIII.
# Miguel Pereira, Brésil… à 8944 km de Cannes, réalisé par Walter Salles, avec Castanha et Caju, assistant réalisateur : Georges Moura, images de Mauro Pinheiro Jr, montage de Livia Serpa, son de Leandro Lima… : Joutes musicales devant un cinéma diffusant « Les 400 coups », galvanisant.
# War in peace (Guerre en temps de paix), réalisé par Wim Wenders : Kabalo au cœur du fleuve Congo, octobre 2006, première année de paix après un siècle de colonisation, après 30ans de dictatures, 10 ans de guerre, 5 millions de morts, des enfants regardent « La chute du faucon noir » devant une salle télé aménagée en cinéma de fortune. Wenders signe ici l’un des meilleurs épisodes du film, montrant des enfants traumatisés par la guerre fascinés et déroutés par le film de Ridley Scott.
# Au village, de Chen Kaige, images de Zhao Xiaoshi, direction artistique de Lui Quing : 1977 : Des enfants organisent une petite projection d’un film de Charlot, à l’extérieur dans un hiver glacial, en pédalant sur des vélos, pour faire fonctionner leur petit matériel. 2007 : Un aveugle entre dans une salle de cinéma. Troisième court sur le thème de la cécité. Poétique, charmant et ludique.
# Happy ending, un père et fils hésite sur le film à voir dans une salle d’attente, ce qui énerve passablement un spectateur. Mordant, dialogue brillant – le père présente Adolf Hitler comme vendeur de patates sur Barking Road ! – Loach égratigne en passant le cinéma de divertissement de masses.
# Épilogue : Extraits du film de René Clair « Le silence est d’or », avec la fameuse réplique de Maurice Chevalier : « Vous aimez quand ça finit bien Mademoiselle ».