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Fragments d’un dictionnaire amoureux : Jacques Morel

ROCHE/TF1/SIPA ¦ Jacques Morel sur le tournage de la serie «Julien Fontanes».

Annonce de la mort de Jacques Morel, dans la nuit de mercredi à jeudi. Sur le parcours étonnant de Jacques Morel, je vous renvoie vers l’indispensable livre de Jacques Lorcey « Tout Guitry ». Il cite les anecdotes multiples de son livre « Regards en coulisses » (Guy Authier, 1978), évidemment épuisé, et évoque longuement cet artiste complet. De son vrai nom Jacques Houstraete, il est prédestiné à travailler dans les métiers du carburant comme sa famille. Il rencontre Jane Sourza, puis Raymond Souplex. Il se lance dès 1941, dans l’animation de cabarets, avec bien évidemment quelques zones d’ombre, comme quelques interventions à la radio dans « Radio-Paris », qui lui vaut quelques déboires face aux comités d’épurations à la Libération. Sa voix aussi, est souvent utilisée – selon lui il participe à plusieurs milliers d’émissions radio, tel le culte « Maîtres du mystère ». Il sera plus tard Obélix formant un contraste amusant avec Roger Carel dans les premiers dessins animés adaptés de l’œuvre de René Goscinny et Albert Uderzo, il sera aussi « le bon gros toutou », dans le dessin animé « La maison de toutou », à la télévision. Il alterne les films passant de grands metteurs en scène – Marcel Pagnol, Jean Renoir, Sacha Guitry – dont il témoigne longuement dans le livre de Lorcey -. Il confère une humanité remarquable au Louis XVI dans l’académique « Marie-Antoinette » de Jean Delannoy, il est sans doute l’un des comédiens à l’avoir le mieux incarné avec Jean-François Balmer dans – « La Révolution française » -. On le voit parfois dans des rôles patelins, veules – son personnage de Castel-Vagnac dans « Topaze » face à Fernandel -, ou au contraire bonhomme, confiant, voire mari trompé.  La télévision l’utilise souvent depuis « Joueurs », d’après Nicolas Gogol, filmé en 35mn en 1950 avec un certain Louis de Funès.  Il est un rédacteur en chef, chapeautant Jean Amadou et Daniel Cauchy dans « De nos envoyés spéciaux » (1965-1966), l’ami d’une veuve d’un commissaire de police – Danielle Darrieux – s’improvisant enquêtrice dans le plaisant – sans-plus  -, « Miss » (1980), réalisé par Roger Pigaut, jusqu’aux mésaventures d’un studio télé dans le très bâclé « Studio Folies », avec Patrice Laffont en vedette, mais que sauve Ticky Holgado en cafetier toulousain. On le retrouve en 1974, dans une tonalité inhabituelle pour lui dans « Maigret et la grande perche » de Claude Barma, en fils soumis de Madeleine Renaud. Particulièrement peu coopératif avec le commissaire Maigret joué par Jean Richard, sa femme ayant disparu, il excelle dans la complexité. On peut déplorer, que cette facette de son talent ne fut pas assez exploitée. Mais c’est avec « Julien Fontanes, magistrat »» qu’il retrouve enfin un rôle à sa mesure. La série évoquée en détails dans le livre de Jacques Baudou et Jean-Jacques Schleret « Meutres en série », a la bonne idée de s’inspirer des « Juges noirs », de la Direction des Affaires Criminelles, inconnus du public et qui représentent le dernier espoir des condamnés« . Cette série, très bien écrite par Jean Cosmos, se terminera en 1989, suite à la privatisation de TF1  en 1987, au profit de « Tribunal » !. Jacques Morel est remarquable, le livre citant un numéro de Télé 7 jours de 1984 : « Jacques Morel qui possédait un potentiel dramatique et une force intérieure qui méritaient d’être exploités et c’est tout naturellement, en fonction de sa personnalité que se sont précisé les contours et le comportement de Julien Fontanes ». La série parlant des problèmes de son époque, bénéficiant d’une distribution exceptionnelle – André Falcon, Jean-Claude Calon, Antoinette Moya, etc…- Son parcours reste étonnant, et il est très dommage comme le disait Jacques Lorcey dans son livre, qu’on l’ait oublié dans bien des dictionnaires de cinéma.

Dans « Les suspects »

 

Filmographie : 1945  Seul dans la nuit (Christian Stengel) – 1948  Toute la famille était là (Jean de Marguenat) – Entre onze heures et minuit (Henri Decoin) – Bonjour le monde (Jean-Jacques Mehu, CM) – 1949  Voyage à trois (Jean-Paul Paulin) – Au p’tit zouave (Gilles Grangier) – 1950  La dame de chez Maxim’s (Marcel Aboulker) – L’homme de joie (Gilles Grangier) – Topaze (Marcel Pagnol) – Au fil des ondes (Pierre Gautherin) – 1951  Victor (Claude Heynemann) – Le dindon (Claude Barma) – 1952  Nous sommes tous des assassins (André Cayatte) – Une fille dans le soleil (Maurice Cam) – Un trésor de femme (Jean Stelli) – Les amours finissent à l’aube (Henri Calef) – Rue de l’Estrapade (Jacques Becker) – 1953  Une nuit à Megève (Raoul André) – Mandat d’amener (Pierre-Louis) – Si Versailles m’était conté (Sacha Guitry) – Les hommes ne pensent qu’à ca… (Yves Robert)  – 1954  Après vous, duchesse (Robert de Nesle) – Escalier de service (Carlo Rim) – 1955   Les grandes manoeuvres (René Clair) – La môme Pigalle (Alfred Rode) – Si Paris nous était conté (Sacha Guitry) – Marie-Antoinette (Jean Delannoy) – Elena et les hommes (Jean Renoir) – 1956  L’homme aux clés d’or (Léo Joannon) – Folies-Bergère (Henri Decoin) – Le septième commandement (Raymond Bernard) – Les suspects (Jean Dréville) – 1957  Un certain monsieur Jo (René Jolivet) – Clara et les méchants (Raoul André) – Sacrée jeunesse (André Berthomieu) – La vie à deux (Clément Duhour) – Madame et son auto (Robert Vernay) – Drôles de phénomènes (Robert Vernay) – 1959  Maigret et l’affaire Saint-Fiacre (Jean Delannoy) – À rebrousse-poil (Pierre Armand) – 1960  Le panier à crabes (Joseph Lisbona) – L’imprevisto (L’imprévu) (Alberto Lattuada) – 1961  Rencontres (Philippe Agostini) – 1964  Les mordus de Paris (Pierre Armand) – Le gentleman de Cocody (Christian-Jaque) – La corde au cou (Joseph Lisbona) – 1965  Pleins feux sur Stanislas (Jean-Charles Dudrumet) – Un milliard dans un billard (Nicolas Gessner) – 1969  L’auvergnat et l’autobus (Guy Lefranc) – 1976  L’excercice du pouvoir (Philippe Galland) – 1977  Ça fait Tilt (André Hunebelle) – 1978  L’amour en question (André Cayatte). Nota : IMDB seul le crédite dans « L’aventure est au coin de la rue » (Jacques Daniel-Norman, tourné en 1943) dans le rôle de « L’homme mystérieuse » (sic) et sous le pseudonyme de Jacques Murel, gourrance, gourrance ? Voxographie : 1950  La poison (Sacha Guitry) – 1967  Astérix le Gaulois (René Goscinny, Albert Uderzo & Raymond Leblanc, animation) – Deux romains en Gaule (Pierre Tchernia, animation, TV) – La maison de Toutou (Georges Croses, animation, série TV) – 1968  Astérix et Cléopâtre (René Goscinny, Lee Payant & Albert Uderzo, animation) – 1976  Les douze travaux d’Astérix (René Goscinny, Albert Uderzo & Pierre Watrin, animation) – 1977  La ballade des Dalton (René Goscinny, Morris, Henri Gruel & Pierre Watrin, animation).

 

 Dans « Julien Fontanes »

 

 

Télévision : (notamment) : 1950  Les joueurs (Claude Barma) – 1958  Le roman en neuf lettres (Marcel Cravenne) – 1962  La caméra explore le temps : L’affaire du collier de la reine (Guy Lessertisseur) – Système deux (Marcel Cravenne) – 1965  De nos envoyés très spéciaux (Jan Herman, Marc Monnet, Jean-Marie Coldefy, Claude Dagues & Jean-Patrick Lebel, saison 1) – Quelle famille ! (Roger Pradines) – 1966  De nos envoyés très spéciaux (Louis Grospierre, Jean-Patrick Lebel, Maurice Régamey & Pierre Cosson, saison 2) – Plainte contre X (Philippe Ducrest) – Au théâtre ce soir : Le père de Mademoiselle (Georges Folgoas) – Au théâtre ce soir : J’y suis, j’y reste (Pierre Sabbagh) – Edmée (Jean-Marie Coldefy) – 1967  Au théâtre ce soir : Les vignes du seigneur (Pierre Sabbagh) – 1968  Au théâtre ce soir : Mademoiselle (Pierre Sabbagh) – Au théâtre ce soir : Le système deux (Si j’étais moi) (Pierre Sabbagh) – 1969  Au théâtre ce soir : Le mari ne compte pas (Pierre Sabbagh) – 1972  Au théâtre ce soir : La reine blanche (Georges Folgoas) – 1973  La duchesse d’Avila (Philippe Ducrest) – 1974  Les enquêtes du commissaire Maigret : Maigret et la grande perche (Claude Barma) – Au théâtre ce soir : L’or et la paille (Georges Folgoas) – Au théâtre ce soir : Hélène ou la joie de vivre (Georges Folgoas) – 1975  Au théâtre ce soir : La mandragore (Pierre Sabbagh) – 1976 Le comédien (Jeannette Hubert, captation) – Au théâtre ce soir : La frousse (Pierre Sabbagh) – 1978  Preuves à l’appui : Les loups du bois (Jean Laviron) – Jean-Christophe (François Villiers) – Les bijoux de Carine (Philippe Ducrest) – 1979  La belle vie (Lazare Iglèsis) – Au théâtre ce soir : Le troisième témoin (Pierre Sabbagh) – 1980  Miss (Roger Pigaut, six épisodes) – Les dossiers éclatés : Le querellé ou la nécessité d’être comme tout le monde (Alain Boudet)  -Cabrioles (Yves-André Hubert, captation) – Julien Fontanes, magistrat : Un cou de taureau (Guy-André Lefranc) – Julien Fontanes, magistrat : Une femme résolue (Bernard Toublanc-Michel) – Julien Fontanes, magistrat : Par la bande (François Dupont-Midy) – Julien Fontanes, magistrat : Les mauvais chiens (Guy-André Lefranc) – 1981  Julien Fontanes, magistrat : Le soulier d’or (François Dupont-Midy) – Les bons bourgeois (Pierre Desfons, captation) – Tovaritch (Jeannette Hubert, captation) – La vie des autres : Pomme à l’eau (Emmanuel Fonlladosa) Julien Fontanes, magistrat : Un si joli petit nuage (Jean Pignol) – Julien Fontanes, magistrat : La dernière haie (François Dupont-Midy) – Julien Fontanes, magisrat : La 10ème plaie d’Égypte (Patrick Jamain) – 1982  Julien Fontanes, magistrat :  Une fine lame (François Dupont-Midy) – Julien Fontanes, magistrat : Cousin Michel (Guy-André Lefranc) – 1983  Mort d’un piéton (Pierre Billard) – Julien Fontanes, magistrat : Week-end au paradis (Guy-André Lefranc) – Julien Fontanes, magistrat : L’âge difficile (Serge Friedman) – Julien Fontanes, magistrat : Perpète (Jean-Pierre Decourt) – Julien Fontanes, magistrat : Un coup de bluff (Daniel Moosman) – 1984  Julien Fontanes, magistrat : La pêche au vif (Guy-André Lefranc) – Au théâtre ce soir : J’y suis, j’y reste ! (Pierre Sabbagh) – 1985  Châteauvallon (plusieurs réalisateurs) – Julien Fontanes, magistrat : Rien que la vérité (André Farwagi) – Julien Fontanes, magistrat : Mélanie sans adieu (Daniel Moosman) – 1986  Julien Fontanes, magistrat : Les nerfs en pelote (Jean-Pierre Decourt) – Julien Fontanes, magistrat : Jamais rien à Coudoeuvre (Roger Kahane) – Julien Fontanes, magistrat : Un dossier facile (Patty Villiers) – Julien Fontanes, magistrat : Retour de bâton (Guy-André Lefranc) – 1987  Julien Fontanes, magistrat : 10 petites bougies noires ( Christiane Spiero) – Julien Fontanes, magistrat : Le couteau sous la gorge (André Farwagi) – Studio folies (Yves Barbara, Pascal Goethals et Armand Wahnoun, 60 épisodes) – 1988  Julien Fontanes, magistrat : Le bête noire (Michel Berny) – 1989  Julien Fontanes, magistrat : Les portes s’ouvrent (Guy-André Lefranc).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Fragments d’un dictionnaire amoureux : Charlton Heston

 

img390/3809/heston1ln3.jpg Annonce de la mort de Charlton Heston, ce 5 avril, à l’âge de 83 ans. Jean-Pierre Coursodon et Bertrand Tavernier le définissaient avec justesse dans « 30 ans de cinéma américain » : « Dès qu’il apparaît sur l’écran, sa puissance balaie tout. Il concrétise à merveille la notion de force physique, voire de violence. Quand il se met en colère, chacun de ses gestes semble répondre  une crispation intérieure, à une insupportable tension morale ». Il débute, avec une silhouette assez frêle,  en 1941 dans « Peer Gynt », film du réalisateur David Bradley, qui ne connaîtra une sortie qu’en 1955 – 1965 ? selon d’autre sources – avec un nouveau montage, scènes additionnelles, sonorisation . Appelé sous les drapeaux, « il sert pendant trois ans, de 1943 à 1946, dans « Les îles Aléoutiennes », et il est opérateur radio sur un B-52 De l’USA Air Force » (1). En 1950, il signe un contrat pour 14 films à la Paramount, mais il a l’autorisation de tourner pour d’autres studios, une fois l’an. Il débute en vedette dans un polar de série B. « La main qui venge », en flambeur minable, écumant les tripots. Sa carrure, son côté « bigger than life », le prédisposent à jouer des personnages historiques, dans des films aux budgets conséquents. Pléthore de personnages mythiques composent sa filmographie. On le retrouve en trapéziste dans « Sous le plus grand chapiteau du monde », en Buffalo Bill dans « Le triomphe de Buffalo Bill » , etc… Il vise ensuite le grandiose, avec des superproductions, le cinéma voulant rivaliser avec la télévision en plein essort. Il retrouve Cecile B. DeMille dans le grandiose – et finalement assez indigeste – « Dix commandements » , avant de recevoir l’oscar du meilleur acteur pour « Ben Hur » en 1960. On le retrouve aussi dans « Le cid », film d’Anthony Mann, à revaloriser et dans « Les 55 jours de Pékin », une fresque assez flamboyante dans la Chine de 1900, peut-être un grand film malade selon une expression de François Truffaut. Il est étonnant dans « Le seigneur de la guerre », en chevalier normand du XIème siècle émérite, boutant l’envahisseur jusqu’à la mer. On le retrouve aussi en Michel-Ange, dans le romanesque « L’extase et l’agonie ». Il excelle dans le fantastique, à la fin des années 70, dans l’adaptation de l’œuvre de Pierre Boulle « La planète des singes », en explorateur de l’espace se retrouvant dans un monde dominé par des singes, une adaptation finalement assez probante de « Je suis une légende », après Vincent Price et avec Will Smith dans « Le survivant », où il a même des scènes d’amour avec Rosalind Cash, comédienne de la « Blaxploitation », ce qui était assez inhabituel pour l’époque. Il est remarquable face à Edward G. Robinson, dans « Soleil vert », film d’anticipation très réussi de Richard Fleischer. Il se lance dans la réalisation en 1972 avec une adaptation de la pièce de William Shakespeare « Antoine et Cléôpatre », puis en 1982, dans « La fièvre de l’or », où il joue un chercheur d’or dans une région sauvage du canada, dont Jacques Zimmer dans « La saison cinématographie 1983 », déplorait « une mise en scène appliquée et une direction d’acteurs relâchée font cohabiter malencontreusement lourdeur et frénésie… » A la télévision il signera en 1988, après Fred Zinnemann, une nouvelle adaptation de la pièce de Robert Bolt « Un homme pour l’éternité ». Le cinéma semble moins l’intéresser ses dernières années, mais il compose un Richelieu inattendu dans les deux adaptations des « Trois mousquetaires » de Richard Lester, et il ose l’autodérision comme dans « Wayne’s world 2 », où il fait un cameo étonnant, de « bon comédien », engagé pour figurer… un pompiste ! Comme le rappelaient Coursodon et Tavernier sur « Major Dundee », film hélas mutilé, dans lequel il compose un major sudiste : « Ce libéral a fait preuve d’une dignité de grand seigneur en offrant son salaire à Peckinpah pour qu’il tourne une scène ». Il d’ailleurs aidé Orson Welles à se remettre en selle, en lui confiant la réalisation de « La soif du mal, un chef d’œuvre où Heston accepte, grimé en mexicain de se laisser voler la vedette par Welles lui même en adipeux Hank Quinlan, policier corrompu. Il est vrai que l’homme est assez complexe et contradictoire dans ses engagements, passant du soutien à des oeuvres humanitaires à un conservatisme républicain, virant au réactionnaire – son engagement en 1987 à « Pro-life », association anti-avortement à la fin de sa vie -. Il participe aussi à la marche pour les droits du peuple noir en 1963, pour soutenir Martin Luther King. Mais ces dernières années, il était membre de la « National rifle association », entachant son image ces derniers temps. Il fera toujours l’apologie des armes en feu et on le retrouve visiblement très malade, défendant ses positions dans le polémique film de Michael Moore « Bowling for Colombine » en 2002. Mais curieusement, à le voir ainsi diminué, on finit par se surprendre à s’attendrir sur lui devant l’acharnement du réalisateur. On le retrouve d’ailleurs dans un clin d’œil ironique en singe belliqueux mourant, selon Antoine de Baeque dans son livre sur Tim Burton (Éditions des Cahiers du cinéma, 2007) : « …méconnaissable en vieux singe déliquescent mais très incisif en parrain réactionnaire de National Rifle Association », puisqu’il lance , lors de sa courte scène , « un revolver vaut bien mille javelots ». Il meurt près de sa femme, la comédienne, Lydia Clarke qu’il avait épousé en 1944. Il formèrent un couple durable, une longévité assez rare dans l’histoire du cinéma américain. La maladie d’Alzheimer (1) « Stars 18 » hiver 93.

img99/9954/heston2uf8.png Charlton Heston en 1963, lors de la marche pour les droits du peuple noir.

Filmographie : 1941  Peer Gynt (David Bradley) – 1949  Julius Caesar (David Bradley) – 1950  Dark city (La main qui venge) (William Diertele) – 1951  The greatest show of earth (Sous le plus grand chapiteau du monde) (Cecil B. DeMille) – 1952  The savage (Le fils de Géronimo) (George Marshall) – Ruby Gentry (La furie du désir) (King Vidor) – 1953  The President’s lady (Sa seule passion / Le sel de la terre) (Henry Levin) – Pony Express (Le triomphe de Buffalo Bill / Belgique : Les cavaliers du Pony Express) (Jerry Hopper) – Arrowhead (Le sorcier du Rio Grande) (Charles Marquis Warren) – Bad for each other (Belgique : Éternels ennemis) (Irwing Rapper) – The naked jungle (Quand la Marabouta gronde) (Byron Haskin) – 1954  The secret of the Incas (Le secret des incas) (Jerry Hooper) – The far horizons (Horizons lointains) (Rudoph Maté) – 1955  Lucy Gallant (Une femme extraordinaire) (Robert Parrish) – The private war of Major Benson (La guerre privée du Major Benson / La petite guerre du major Benson) (Jerry Hopper) – 1956  The ten commandments (Les dix commandements) (Cecil B. DeMille) – Three violent people (Terre sans pardon) (Rudoph Maté) – 1957  The big country (Les grands espaces) (William Wyler) – 1958  Touch of evil (La soif du mal) (Orson Welles) – The buccaneer (Les boucaniers) (Anthony Quinn) – 1959  Ben-Hur (Id) (William Wyler) – The wreck of the Mary Dare (Cargaison dangereuse) (Michael Anderson) – 1960  El Cid (Le Cid) (Anthony Mann) – 1961  The pigeon that took Rome (Le pigeon qui sauva Rome) (Melville Shavelson) – 1962  Diamond head (Le seigneur d’Hawaii) (Guy Green) – 1963  Fifty-five days at Pekin (Les 55 jours de Pékin) (Nicholas Ray) – The greatest story ever told (La plus grande histoire jamais contée) (George Stevens) – Major Dundee (Id) (Sam Peckinpah) – 1965  The agony and the ecstasy (L’extase et l’agonie) (Carol Reed) – The war lord (Le seigneur de la guerre) (Franklin J. Schaffner) – 1966  Khartoum (Id) (Basil Dearden) – 1967  Think twentieth (Richard Fleischer, CM) – Counterpoint (La symphonie des héros) (Ralph Nelson) – Will Penny (Will Penny le solitaire) (Tom Gries) – Planet of the apes (La planète des singes) (Franklin J. Schaffner) – 1968  Rowan & Martin at the movies (Jack Arnold, CM) – Number one (Tom Gries) – 1969  The festival game (Tony Kinger & Michael Lytton, documentaire) – Beneath the planet of the apes (Le secret de la planète des singes) (Ted Post) – Julius Caesar (Jules César) (Stuart Burge) – The Hawaiians (Le maître des iles) (Tom Gries) – The omega man (Le survivant) (Boris Sagal) – 1971  Antony and Cleopatra (Antoine et Cléopâtre) (+ réalisation et adaptation) – Skyjacked (Alerte à la bombe) (John Guillermin) – 1972  The special London bridge special (David Winters, CM) – Soylent green (Soleil vert) (Richard Fleischer) – The call of the wild (L’appel de la forêt) (Ken Annakin) – 1973  The three musketeers (Les trois mousquetaires) (Richard Lester) – The four mustketeers (On l’appelait Milady) (Richard Lester) – 1974  Airpont 75 (747 en péril) (Jack Smight) – Earthquake (Tremblement de terre) (Mark Robson) – 1975  Midway (La bataille de Midway) (Jack Smight) – The last hard men (La loi de la haine) (Victor V. McLaglen) –  1976  Two minute warning (Un tueur dans la foule) (Larry Pearce) – 1977  The prince and the pauper / Crossed swords (Vidéo : Le prince et le pauvre) (Richard Fleischer) – Gray Lady Down (Sauvez le Neptune) (David Hreene) – 1979  The mountain men (La fureur sauvage) (Richard Lang) – 1980 The awakening (La malédiction de la vallée des rois) (Mike Newell) –  1982  Mother Lode (La fièvre de l’or) (+ réalisation) – 1985  The fantasy film world of Georges Pal (Arnold Leibovit, documentaire) – 1986  Directed by William Wyler (Aviva Slesin, documentaire) – 1990  Solar crisis / Kuraishisu niju-goju nen / Starfire (Alan Smithee [Richard C. Sarafian]) – Almost an angel (Un ange ou presque) (John Cornell) – 1991  Symphony for the spire (Mike Mansfield, documentaire) – 1993  Genghis Kahn (Ken Annakin) –  Wayne’s world 2 (Id) (Stephen Surjik) – Tombstone (Id) (George Pan Cosmatos) – 1994  In the mouth of madness (L’antre de la folie) (John Carpenter) – True lies (True lies, le caméléon) (James Cameron) – A century of cinema (Caroline Thomas, documentaire) – 1995  Ben Johnson : Third cowboy on the right (Tom Thurman, documentaire) – 1996  Alaska (Fraser Clarke Heston) – Hamlet (Id) (Kenneth Branagh) – 1997  Off the menu : The last days of chasen’s (Shari Springer Berman & Robert Pulcini, documentaire) – 1998  Gideon’s webb (Gideon) (Claudia Hoover) – Forever Hollywood (Arnold Glassman & Todd McCarthy, documentaire) – 1999  An given sunday (L’enfer du dimanche) (Oliver Stone) 2000  Town & country (Potins mondains et amnésie partielle) (Peter Chelsom) – Planet of the apes (La planète des singes) (Tim Burton) – The order / Jihad warrior (Sheldon Lettich) – Last party 2000 (Last party 2000 – La démocratie américaine dans tous ses états) (Rebecca Chaiklin & Donovan Leitch, documentaire) – 2002   Bowling for Columbine (Id) (Michael Moore, documentaire) – Papà Rua Alguem 5555 (Egidio Eronico) – Télévision : (notamment) : 1949  Studio one : Smoke (Paul Nickell) – Studio one : The outward room (Paul Nickell) – Studio one : Battleship Bismark (Paul Nickell) –  Studio one : Of human bondage (Paul Nickell) – Studio one : Jane Eyre (Franklin J. Schaffner) – 1950  Studio one : The willow cabin (Paul Nickell) – The clock : The hypnotist (Fred Coe) – Studio one : The timing of the shrew (Paul Nickell) – Studio one : Wuthering Heights (Paul Nickell) – Studio one : Letter from Cairo (Lela Swift) – 1951  Studio one : Macbeth (Franklin J. Schaffner) – Studio one : A bolt of lightning (Paul Nickell) – 1952  Studio one : The wings of the dove (Franklin J. Schaffner) – 1955  Climax : Bailout at 43,000 Feet (John Frankenheimer) – 1957  Climax : The climax of captain Wirtz (Don Medford) -1961  Alcoa premiere : The fugitive eye (Herman Hoffman) – 1963  The patriots (George Schaefer) – 1983  Chiefs (Chronique policière) (Jerry London) – 1984  Nairobi affair (Sale affaire à Nairobi) (Marvin J. Chomsky) – 1995  Dynasty (Id) – 1985/1997  The Colbys (Les Colby) – 1987  Proud men (William A. Graham) – 1989  Original sin (Seule face au crime / Le péché du parrain) (Ron Satlof)  1989  A man for all seasons (un homme pour l’éternité) (+ réalisation) – The little kidnappers (Donald Shebib) – 1990  Treasure Island (L’île au trésor) (Fraser Clarke Heston) – The little kidnappers (Le secret des deux orphelins) (Donald Shebib) – 1991  Nostradamus : The man who saw tomorow – The crucifer of blood (Sherlock Holmes et la croix du sang) (Fraser C. Heston) – 1992  Crash landing : The rescue of flight 232 (Des héros par milliers) (Lamont Johnson) – 1994  SeaQuest DSV (SeaQuest, police des mers) : Abalon (Les Sheldon) – 1995  The avenging angel (Craig R. Baxley) – 1998  Friends (Id) : The one with Joey’s dirty day (Peter Bonerz) – 1999  Camino de Santiago (Robert Young) – 2000  The outer limits : Final appeal (Au-delà du réel – L’aventure continue) (Jim Kaufman). Voxographie : 1957  Many voices (récitant) – 1962  The five cities of June (Bruce Herschensohn, récitant) – 1965  The egyptologists (récitant) – 1966  While I run this race (Edmond Levy, récitant)) – 1967  Adventures of  Mowgli /  Maugli (Roman Davidov, récitant) – 1968  The movie experience : A matter of choice (Tracy Ward, récitant) – 1969  Rod Laver’s Wimbledon (Michael Seligman, récitant) – King : A filmed record… Montgomery to  Memphis (Joseph L. Mankiewicz & Sidney Lumet, documentaire, récitant) – 1975  The fun of your life (John J. Hennesy, voix du récitant) – 1976  Amercia at the movies (Il était une fois l’Amérique) (George Stevens Jr., documentaire, récitant) – 1988  Call from space (L’appel de l’espace) (Richard Fleischer, CM) – 1994  Texas (Richard Lang, TV, récitant) – 1996  The dark mist (Ryan Carroll, récitant) – Alaska : Spirit of the wild (George Casey, documentaire, récitant) –  1997  Hercules (Hercules) (Ron Clements & John Musker, récitant) – 1998  Bagpipe : Instrument of war (Patrick King, récitant) – Armageddon (Michael Bay, récitant) – 2000  Cats & dogs (Comme chiens et chats) (Lawrence Guterman) – 2003  Ben Hur (Bill Kowalchuk, animation, TV).

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Fragments d’un dictionnaire amoureux : Jules Dassin

Annonce de la mort de Jules Dassin, à Athènes , le 31 mars dernier à l’âge de 96 ans. Il suit donc dans la mort son interprète Richard Widmark des « Forbans de la nuit ». Il débute comme réalisateur en 1941, par un court-métrage brillant – diffusé au cinéma de minuit – d’après « Le cœur révélateur » d’Edgar Allan Poe. Il réalise ensuite plusieurs longs-métrages passant de films anti-nazis à des comédies romantiques, dont beaucoup resteront inédits en France, hormis « Le fantôme de Canterville », avec un Charles Laughton très inspiré dans le rôle titre. Il quitte la MGM avec fracas, où il ne pouvait véritablement s’exprimer. Il raconte son départ dans un entretien de 2005 (1), répondant à Louis B. Mayer qui comparait le cinéaste à un cheval de course sur lequel il fallait hurler parce qu’il flanchait  parce qu’il avait mal aux testicules : « Vous n’aurez pas mes couilles espèce de salopard ! ». Le producteur Mark Hellinger lui confie « Les demons de la liberté », premier film d’une suite de plusieurs chefs d’œuvres du film noir. Ce film donne un des premiers grands rôles de Burt Lancaster, qui joue un prisonnier victime de la haine d’un gardien-chef sadique – Hume Cronym dans le rôle de sa vie selon Claude Chabrol -, les représailles seront lourdes de conséquences… Le réalisme de Dassin fait merveille. « La cité sans voile » est du même niveau un inspecteur – Barry Fitzgerald – enquête sur le meurtre d’une jeune femme. Le film sera cependant amputé de quelques scènes par l’Universal, le film étant monté sans son réalisateur. « Les démons de la liberté » et « La cité sans voiles » sont disponibles dans un DVD dans la formidable collection « Les introuvables », bénéficiant de bonus remarquables dont des entretiens avec Jules Dassin. Avec « Les bas fonds de Frisco », il signe un autre chef d’œuvre, un homme – Richard Conte –rentre sur les lieux de sa jeunesse à San Francisco, pour retrouver son père accidenté et victime d’un grossiste en fruits et légumes revanchard. Si son parcours devait être riche en promesse, il fut hélas dénoncé comme communiste par le cinéaste Edward Dmytryk, il est obligé de tourner « Les forbans de la nuit » à Londres, avec Richard Widmark, comme évoqué précédemment donc et Gene Tierney. « Blacklisté » durant la chasse aux sorcières, il s’exile en France en 1952. Il se voit proposer la réalisation de « L’ennemi public numéro un », polar parodique avec Fernandel. Le film assez médiocre sera finalement réalisé en 1953 par Henri Verneuil. Il tourne finalement, heureusement pour lui, l’un des classiques du film policier français « Du rififi chez les hommes », adapté de l’œuvre d’Auguste Le Breton, avec Jean Servais probant dans le rôle de Tony le Stéphanois, truand lessivé sorti de prison. Dassin réalise une scène anthologique d’un casse silencieux d’une bijouterie se réservant de plus l’un des rôles principaux sous le pseudonyme de Perlo Vita. Toujours en France, il adapte le roman de Nikos Kazantsakis « Le christ recrucifié », montrant un petit village grec, dont certains habitants refusent, par égoïsme, de recevoir les survivants d’une attaque de Turcs. Il rencontre sur ce film Melina Mercouri qu’il épousera finalement en 1966. Ses admirateurs de la première heure, déploreront l’arrivée d’une telle personnalité fracassante dans son univers. Suit, une collaboration de 8 autres films (dont un documentaire), dont « La loi », assez décevant malgré une brillante distribution – Pierre Brasseur, Gina Lollobrigida, Yves Montand, Marcello Mastroianni… -, sombre histoire de vendetta italienne. « Jamais le dimanche », reste euphorisant, par le cabotinage « Mercourien », qui campe une prostituée à Athènes, dont un américain – Joué par Dassin lui même – tombe amoureux. Fasciné par la culture hellénique, il s’improvisera pour elle pygmalion. Toujours pour elle, il adapte ensuite « Phèdre », d’après la tragédie « Hippolyte » d’Euripide.  « Topkapi » (1963) est une variante ludique de son « rififi » transporté à Istanbul, où une bande de voleurs internationaux menée par Peter Ustinov, souhaite s’introduire par le toit du musée « Topkapi » grâce à l’agilité d’un acrobate – excellent et trop méconnu Gilles Ségal -. Dans la catégorie « on demande à voir »,  « 10 heures et demi en été », Melina Mercouri joue une femme espagnole délaissée par son mari – Peter Finch, ayant pour maîtresse Romy Schneider – qui par dépit, aide un homme qui vient de commettre un crime passionnel. Dassin adapte en France en 1969, l’œuvre de Romain Gary « Les promesses de l’aube », avec toujours Melina Mercouri en mère abusive du jeune Romain. Leur dernier film en commun sera « Cri de femmes », où une actrice grecque rencontre une meurtrière – Ellen Burstyn – afin de mieux interpréter « Médée ». Sans Melina Mercouri, il retourne à ses premières amours avec un polar social en 1969 avec « Point noir », traitant des violences du « Black Power ». Ce film qui ne semble ne pas avoir trop bonne réputation, est une nouvelle transposition du célèbre roman de Liam O’Flaherty, qui fut adapté en 1935  par John Ford. Il finira sa carrière par une variante de « Lolita » en 1980, « Circle of two » avec Richard Burton et Tatum O’Neal, film resté inédit chez nous. A noter qui a également réalisé deux documentaires : « Comme un éclair » (1967), sur Israël après la guerre des 6 jours et « The rehearshal » sur les révoltes estudiantines en lutte contre le pouvoir militaire la Grèce des colonels en 1973, tourné juste avec leur chute. Pour conclure l’entretien de 2005, il concluait ainsi sur le polar « Quelqu’un a écrit que j’avais été l’un des pionniers du genre. Cela ne m’a pas déplu… » (1) Il était le père du chanteur Jo Dassin et de la comédienne Julie Dassin. Il y a y avait eu un très bon livre à son sujet par Fabien Siclier et Jacques Lévy, dans l’excellente collection « Filmo » (Édilig, 1986), mais il est hélas épuisé. A lire un portrait très complet sur le site du « Festival de La Rochelle ». (1) « Jules Dassin, le cinéma dévoilé » , documentaire en bonus du DVD « Jules Dassin Films Noirs », collection « Les introuvables » chez Wild Side video.

Avec Gina Lollobrigida sur le tournage de « La loi » (DA)

 

Filmographie : Comme assistant-réalisateur : 1940 They knew what they wanted) (Garson Kanin) – 1941  Mr. and Mrs Smith (Joies matrimoniales) (Alfred Hitchcock). Comme réalisateur : 1941  Rr Allan Poe’s The tell-tale heart) – 1942  Nazi agent / Salute to courage – Once upon a Thursday / The affair of Martha – 1943  Reunion in France (Titre TV: Quelque part en France) – Young ideas – The Canterville ghost (Le fantôme des Canterville) – 1945  A letter for Evie – 1946  Two smart people – 1947  Brute force (Les démons de la liberté) – 1948  The naked city (La cité sans voile) – 1949  Thieve’s highway (Les bas-fonds de Frisco – Belgique : Le marché des voleurs) – 1950  Night and the city (Les forbans de la nuit) – 1952  The trio : Rubinstein, Heifetz and Pietigersky million dollar trio (CM) – 1954  Du rififi chez les hommes  (+ rôle sous le pseudonyme de « Perlo Vita ») – 1957  Celui qui doit mourir – 1958  La loi / La legge – 1960  Never on Sunday (James le dimanche) (+ rôle) – 1961  Phaedra (Phèdre) – 1963  Topkapi (Id) – 1964  10 : 30 P.M. summer (dix heures et demi du soir en été) (+ production) – 1967   Survival 1967 / Hamilchama al hashalom (Comme un éclair / Israël, An 5727 (La guerre amère)) (documentaire) – 1968  Up tight !  (Point noir) – 1969  La promesse de l’aube / Promise at dawn (+ rôle, production) – 1974  The rehearsal / I dokimi (documentaire) – 1978  A dream of passion (Cri de femmes) (+ production) – 1980  Circle of two.  

 

 

©   Le coin du cinéphage (reproduction strictement interdite, textes déposés)

Fragments d’un dictionnaire amoureux : Richard Widmark

 

Annonce ce lundi, de la mort de Richard Widmark, à l’âge de 93 ans. Jean-Pierre Coursodon et Bertrand Tavernier, le définissaient parfaitement dans « 30 de cinéma américain » : « …Son allure féline, sa chevelure blonde, ses yeux très clairs lui permirent par la suite d’enrichir de nuances ambiguës des personnages classiques, qu’ils soient antipathiques ou sympathiques, de rendre sensible leurs hésitations, leurs brusques changements, leur instabilité, se dissimulant sous un humour moqueur, méprisant ou craintif, toujours déroutant… ». Il naît le 26 décembre 1914, à Sunrise dans le Minnesota, de parents modestes. Il se partage entre des études de droits et le football, dans L’illinois. Un professeur d’art dramatique, Russel Tomlinson, le remarque. Selon « Stars » N°12, de mars 1992, il séjourne en Europe pour ses vacances, et s’amuse même à tourner dans l’Allemagne de 1936 : « ..Un film sur les camps de jeunesse que vient de lancer un certain Adolf Hitler ». Il débute dans des pièces radiophoniques, et est appelé sous les drapeaux en 1942, avant d’être exempté pour une blessure à l’oreille., Il était l’interprète rêvé pour un certain âge d’or du film noir, car il excelle dans les personnages de « Heavies ». Il fait une composition inoubliable dans le « Carrefour de la mort » (1947), en tueur sadique au rire sardonique proche de celui d’une hyène, quand il pousse dans les escaliers une vieille dame – Mildred Dunnock – en fauteuil roulant. S’il reçoit pour ce film, le Golden Globe, du meilleur espoir masculin, il n’eu cependant jamais reçu d’oscar – il fut nommé pourtant pour ce film comme meilleur second rôle – durant son impressionnante carrière. Il est engagé pour 7 ans par la Fox, participant à la vogue des thrillers réalistes. Il retrouve un rôle névrotique dans la « Dernière rafale », en promoteur sportif, phobique, se servant constamment d’un inhalateur nasal. Les classiques s’enchaînent comme « Le port de l’angoisse », en pickpocket poursuivi par des agents secrets de l’Est, pour avoir volé un microfilm dans le sac d’une femme. Curiosité le titre français, évoque la drogue, totalement absente de ce film, histoire de ne pas heurter les communistes contemporains à ce film. Il participe à un autre chef d’œuvre « Les forbans de la nuit », où il est un truand minable ambitieux, sévissant dans la pègre londonienne en organisant des combats de lutte. On le retrouve aussi dans « Panique dans la rue », où il est un médecin zélé chargé de retrouver deux meurtriers contaminés et porteurs de virus, magnifié par le duo Jack Palance-Zero Mostel. Vincente Minelli lui donne en 1958, l’un de ses meilleurs rôles dans « La toile d’araignée », en médecin aliéniste en butte avec son entourage. Le western devient aussi son domaine de prédilection, de « Alamo » fresque « fordienne » signée John Wayne, aux crépusculaires « Cheyennes ». Pour Otto Preminger, dans « Sainte Jeanne » en 1957, il compose un Charles VII halluciné face à Jean Seberg en Jeanne D’Arc, « …une des plus belles interprétations schizophréniques de l’histoire du cinéma » (1). En 1961, il produit et participe au tournage comme réalisateur de « Le dernier passage », film de « Série B » très mal accueilli à l’époque, la « Saison cinématographique 1962 » voit en ce film  » …Un méchant feuilleton anti-rouge dont la Hongrie, douloureusement éprouvée, il y a 6 ans fait encore les frais » et qui va  » …à l’encontre des vérités les plus élémentaires, favorise l’inconscience d’un public en le vouant au manichéisme le plus grossier »… Il casse cette fausse image comme étant l’un des comédiens les plus anti-rouges avec John Wayne, en capitaine de destroyer extrémiste, chargé de chasser des sous-marins soviétiques. Ce film de James B. Harris – redécouvert au cinéma de minuit -, se révèle fortement contestataire : « …Widmark prit des positions très libérales, attaquant violemment la droite américaine, John Wayne, la « John Birch Society », la guerre du Vietnam et Reagan… » (1) . Il retrouve le polar avec « Madigan », où il est particulièrement probant en policier ordinaire avec ses petites veuleries. Il est impressionnant et roublard dans « La théorie des dominos » (1976), manipulant un prisonnier accusé de meurtre joué par Gene Hackman, pour une sombre machination politique. Le polar reste l’un de ses domaines de prédilection, il participe même au remake du sublime « out of the past » de Jacques Tourneur, avec « Contre toute attente », Il ne dédaigna pas la télévision, deux de ses téléfilms « Blackout » (1985) et « Colère en Louisiane » (1986), furent même diffusés en salles en France.  Pour reprendre le titre de l’un de ses films, « Quand meurent les légendes », il était avec Kirk Douglas, Karl Malden et Eli Wallach, un des derniers grands comédiens américains à être né dans les années 10. Son physique émacié, et la grande richesse de son jeu resteront à jamais liés au grand cinéma américain.

(1) « Trente ans du cinéma américain » par Jean-Pierre Coursodon et Bertrand Tavernier.

Richard Widmark dans « Cinéma Cinémas »

Filmographie : 1947  Kiss of death (Le carrefour de la mort) (Henry Hathaway) – 1948  Road house (La femme aux cigarettes (JeanNegulesco) -The street with no name (La dernière rafale) (William Keighley) – Yellow sky (La ville abandonnée) (William A. Wellman) – 1948  Down to the sea in ships (Les marins  de l’Orgueilleux) (Henry Hathaway) – Slattery’s hurricane (La furie des tropiques) (André De Toth) – 1950  Night and the city (Les forbans de la nuit) (Jules Dassin) –  Panic in the streets (Panique dans la rue) (Elia Kazan) – Halls of Montezuma ( Okinawa) (Lewis Milestone) – No way out (La porte s’ouvre) (Joseph L. Mankiewicz) – 1951  The frogmen (Les hommes-grenouilles) (Lloyd Bacon) –  Screen snapshots : Hopalong in Hoppy Land (Ralph Staub, CM) – 1952  Red skies of Montana / Smoke jumpers (Belgique : Duel dans la forêt) (Joseph M. Newman) – 1952  Don’t brother to knock (Troublez-moi ce soir) (Roy Ward Baker) – O. Henry’s Full  house (La  sarabande des  pantins), (sketch : « The clarion call ») (Henry Hathaway) – My pal Gus (Belgique : Sans maman) (Robert Parrish) – Screen snapshots : Hollywood night life (Ralph Staub, CM) –  1953  Take the high ground ! (Sergent la terreur) (Richard Brooks) – Destination Gobi (Id) (Robert Wise) – Pickup on South Street (Le port de la drogue) (Samuel Fuller) – 1954  Hell and high water (Le démon des eaux troubles) (Samuel Fuller) – Garden of evil (Le jardin du diable) (Henry Hathaway) – Broken lance (La lance brisée) (Edward Dmytryk) – 1955  A prize of gold (Hold-up en plein ciel) (Mark Robson) – The cobweb (La toile de l’araignée) (Vincente Minnelli) – 1956  Backlash (Coup de fouet en retour) (John Sturges) – Run for the sun (La course au soleil) (Roy Boulting) –  The last wagon (La dernière caravane) (Delmer Daves) – 1957  Saint Joan (Sainte Jeanne) (Otto Preminger) – Time limit (La chute des héros) (Karl Malden, + production) –  The law and Jake Wade (Le trésor du pendu) (John Sturges) – 1958     The tunnel of love (Le père malgré lui) (Gene Kelly) –  The trap (Dans la souricière) (Norman Panama) – 1959  The secret ways (Le dernier passage) (Phil Karlson) – Warlock (L’homme aux colts d’or) (Edward Dmytryk) – 1960   The Alamo (Alamo) (John Wayne) – Two rode together (Les deux cavaliers) (John Ford) – 1961  Judgment at Nuremberg (Jugement à Nuremberg) (Stanley Kramer) – How the west was won (La  conquête de l’Ouest) (John Ford, Henry Hathaway & George Marshall) – 1962  Flight from Ashiya (Les trois soldats de l’aventure) (Michael Anderson) – 1963     The long ships (Les Drakkars) (Jack Cardiff) – 1964  Cheyenne autumn (Les Cheyennes) (John Ford) – 1965  Alvarez Kelly (Id) (Edward Dmytryk) – The bedford incident (Aux postes de combat) (James B. Harris, + production) – 1966  The way west (La route de l’Ouest) (Andrew V. McLaglen) – 1967   Madigan (Police sur la ville) (Don Siegel) – 1968  Death of a gunfighter (Une poignée de plombs) (Alan Smithee [Don Siegel & Robert Totten]) – 1969  A talent for loving / Gun crazy (Richard Quine) – 1970  The moonshine war (La guerre des Bootleggers) (Richard Quine) –  1971   When the legends die (Quand meurent les légendes) (Stuart Millar) –  1973  Murder on the Orient Express (Le crime de l’Orient Express) (Sidney Lumet) – 1974  The sell-out (Le sursis) (Peter Collinson) – 1976  To the devil  a daughter (Une  fille pour le diable) (Peter Sykes) – The domino principle (La théorie des dominos) (Stanley Kramer) – 1977  Twilight’s last gleaming (L’ultimatum des trois mercenaires) (Robert Aldrich) – Rollercoaster (Le toboggan de la mort) (James Goldstone) –  Coma (Morts suspectes) (Michael Crichton) – 1978  The swarm (L’inévitable catastrophe) (Irwin Allen) – 1979  Bear Island (Le secret de la banquise) (Don Sharp) – 1981     National Lampoon goes to  the  movies (Henry  Jaglom & Bob Giraldi) – 1982  Hanky panky (La folie aux trousses) (Sidney Poitier) – Commando (Who dares wins) (Ian Sharp) – 1983  Against all odds (Contre toute attente) (Taylor Hackford) – Blackout (Id) (Douglas Hickox) – 1985  Spencer Tracy legacy : A tribute by Katharine Hepburn (David Heeley, documentaire) – 1986    A gathering of old men (Colère en Louisiane) (Volker Schlöndorff) –  1991  True colors (Vidéo : Le jeu du pouvoir) (Herbert Ross)  -1995    Wild Bill : Hollywood maverick (Todd Robinson, documentaire). Télévision (notamment) : 1955  I love Lucie : The tour (William Asher) – 1971  Vanished (Buzz Kulik) – 1972  Madigan (Id) (Alex Marc & Boris Sagal, six épisodes) – 1973  Brock’s last case (La dernière enquête) (David Lowell Rich) – 1974  Benjamin Franklin (Glenn Jordan) – 1975  The last day (Vincent McEveety) – 1979  Mr. Horn (Mister Horn) (Jack Starrett) – 1980  A whale for the killing (Richard T. Heffron) – All God’s children (Le noir et le blanc (Jerry Thorpe) – 1983  Cinéma cinémas : Richard Widmark : Hollywood Mai 1983 (Claude Ventura, CM documentaire) – 1988  Once upon a time a Texas Train (Titre DVD : Le dernier western) (Burt Kennedy) –  1989  Cold Sassy Tree (La destinée de Mademoiselle Simpson) (Joan Tewkesbury). Voxographie : 1987  Marilyn Monroe : Beyond the legend (Gene Feldman & Suzette Winter, voix du récitant). 1992  Lincoln (Peter W. Kunhardt, TV).

Fragments d’un dictionnaire amoureux : Paul Scofield

 DA

Annonce du décès le 19 mars dernier de Paul Scofield, à Balcombe, au Royaume Uni, d’une leucémie à l’âge de 86 ans. Ce grand comédien au parcours théâtral prestigieux n’a tenu que peu de rôles au cinéma. Ses pairs de la « Royal Shakespeare company »  saluèrent en 2004 son interprétation du « Roi Lear », comme une des meilleures performances shakespeariennes de tous les temps. Ses deux rôles les plus connus restent celui de Sir Thomas More dans « Un homme pour l’éternité » (1966) pour lequel il reçoit l’oscar du meilleur acteur. Raymond Lefèvre et Roland Lacourbe dans l’excellent « 30 ans de cinéma britannique » (Éditions 76), parlent de lui pour ce film comme « …étonnant de présence et de dignité apportant au texte de Robert Bolt une puissance bouleversante ». Il figure aussi un officier allemand cultivé dans « Le train » – sorti en 1964 – au tournage chaotique – Burt Lancaster avait renvoyé Arthur Penn – … On le retrouvait ces dernières années dans quelques films historiques, dont l’ambitieux « Henry V » – meilleur film de la filmographie inégale de  Kenneth Brannagh comme réalisateur – où il campait le roi de France -. Robert Redford lui offrit l’un de ses rares rôles contemporains, dans les années 50 du moins, avec « Quiz show », où il joue le rôle du père de Ralph Fiennes. Il laissera le souvenir d’un comédien dont le jeu était toujours d’une grande justesse. D’autres décès sont à déplorer celui de l’écrivain Arthur C. Clarke adapté par Stanley Kubrick et son mythique « 2001, l’odyssée de l’espace » et du dramaturge et réalisateur belge Hugo Claus – qui vécu dans les années 70 avec Sylvia Kristel – . Pour mémoire citons aussi la disparition des comédiens Hubert Gignoux, et celle d’Alain Feydeau – mort en janvier, mais je l’ignorais – pilier d’  « Au théâtre de soir », infos découvertes dans le site des « Gens du cinéma » et auteur de livres sur Edwige Feuillère et Viviane Romance.

© Hulton-Deutsch Collection/CORBIS (prise le 14 juin1958)

Filmographie : 1954  That Lady (La princesse d’Eboli) (Terence Young) – 1958  Carve her with pride (Agent secret S.Z.) (Lewis Gilbert) – 1963  The train (Le train) (John Frankenheimer & Bernard Farrel) – 1965  A man for all seasons (Un homme pour l’éternité) (Fred Zinnemann) – Tell me lies (Dites-moi n’importe quoi) (Peter Brook) – 1969  Nijinsky  (Tony Richardson, inachevé) – 1970  Bartleby (Anthony Friedman) – 1970 Bartleby (Anthony Friedmann) – 1971  King Lear (Le roi Lear) (Peter Brook) – 1973  A delicate balance (Tony Richardson) – Scorpio (Id) (Michael Winner) – 1983  Summer lightning (Paul Joyce) – 1984  1919 (Hugh Brodie) – When the wales came (L’île aux baleines) (Clive Rees) – 1989  Henry V (Id) (Kenneth Branagh) – Hamlet (Franco Zeffirelli) – 1992  Utz (George Sluizer) – 1994  Quiz show (Robert Redford) – 1996  The crucible (La chasse aux sorcières) (Nicholas Hytner). Télévision (notamment) : 1969  Male of the species (Charles Jarrott) – 1985  Anna Karenina (Simon Langton) – 1987  Miss Corbett’s ghost (Danny Huston) – 1988  The Attic : The hiding of Anne Frank (John Erman) – 1994  Martin Chuzzlewit (Pedr James) – 1996  The little riders (Les cavaliers de la liberté) (Kevin Connor). Voxographie succincte : 1967  The other world of Winston Churchill (Louis Clyde Soumen, documentaire TV, récitant) – 1994 London (Patrick Keiller, documentaire, récitant) – 1997  Robinson in space (Les Robinson de l’espace) (Patrick Keiller, documentaire, récitant) – 1999  Rashi: A light after the dark ages (Ashley Lazarus, animation) – Animal farm (La ferme des animaux) (John Stephenson, animation, TV) – 2000  Kurosawa (Adam Low, documentaire).

©   Le coin du cinéphage (reproduction strictement interdite, textes déposés)

Fragments d’un dictionnaire amoureux : Anthony Minghella

Annonce de la mort d’une hémorragie cérébrale, ce 18 mars, au « Charing Cross hospital » de Londres, du scénariste et cinéaste anglais Anthony Minghella, né en 1954. Très doué, il était aussi musicien et dramaturge – « A little drowning », « Made in Bangkock » -. Il débute à la télévision anglaise en écrivant des scénarios « Légendes grecques », « Inspecteur Morse », à la fin des années 80. En 1990, il signe un film très enjoué « Truly Madly deeply » (Id, 1990). Une jeune musicienne londonienne, – Juliet Stevenson – retrouve le fantôme de son mari – génial Alan Rickman -, musicien comme elle, à l’installation de sa nouvelle maison. Mais il est hélas flanqué d’une cohorte de fantômes turbulents. « Mr. Wonderfull » (Id, 1993), est une comédie romantique, sur les pérégrinations d’un ouvrier – joué par Matt Dillon – qui cherche a être propriétaire d’un bowling. Il connut une reconnaissance internationale dès son troisième film,  avec « The english patient » (« Le patient anglais », 1996), d’après un roman de Michael Ondaatje. Juliette Binoche – qui gagnera un oscar du meilleur second rôle pour ce film – y trouve un de ses meilleures rôles en infirmière suivant le débarquement des alliés américains en Italie.  Elle rencontre un grand blessé – Ralph Fiennes -, qui va lui raconter ses grandes amours contrariées dans le Sahara avec le personnage de Katherine joué par Kristin Scott Thomas. Le film très lyrique et très émouvant est très efficace. Mais on se souviendra cependant d’un mémorable épisode de la série « Seinfeld », où Julia Louis-Dreyfus se retrouve face à l’hostilité générale, en se déclarant absolument insensible au film… « The talented Mr. Ripley » (« Le talentueux M. Ripley », 1999) est une excellente adaptation de l’œuvre de Patricia Highsmith, donnant ainsi un de ses rôles les plus probants à Matt Damon, excellent en « Ripley « manipulateur et revanchard face à Jude Law, performance d’autant plus louable pour passer après la première adaptation du livre par René Clément avec Alain Delon et Maurice Ronet avec « Plein soleil ». « Cold Mountain » (« Retour à Cold Mountain », 2002) d’après un roman de Charles Frazier, est plus conventionnel, évoquant la guerre de sécession. Si Jude Law et Nicole Kidman, forment un couple digne d’intérêt, il faut cependant saluer le cabotinage proprement effroyable de Renée Zellweger dans ce film – bien évidemment salué comme il se doit par l’oscar du meilleur second rôle féminin -. « Breaking and Entering » (« Par effraction », 2005), retour aux sources, un peu trop ambitieux, dans un Londres moderne et assez déshumanisé, est un film intéressant porté par l’excellente composition de Juliette Binoche – sous estimée dans ce film – en réfugiée bosniaque, qui charme le personnage de Jude Law, un architecte cherchant un sens à sa vie. Minghella était également un producteur exécutif avisé, avec des films comme « Heaven » d’après un scénario inachevé de Krysztof Kieslowski,  une nouvelle adaptation d’ »Un américain bien tranquille » d’après Graham Greene et  « Michael Clayton ». Ce metteur en scène possédant un réel souffle, avait même une certaine influence, on n’est pas étonné de le voir ainsi apparaître dans l’excellent « Reviens moi » réalisé par Joe Wright et diffusé en 2007, face à Vanessa Redgrave, ce qui constitue presque un hommage, dans cette mise en scène soignée et virtuose.

Avec Jude Law sur le tournage de « Retour à Cold Mountain »

ARTICLE : LONDRES (AP)

Décès d’Anthony Minghella, le réalisateur du « Patient anglais », par Jill Lawless
Le cinéaste britannique Anthony Minghella, qui avait réalisé « Le Patient anglais », film couronné par neuf Oscars, est mort mardi matin à Londres à l’âge de 54 ans, a annoncé son agent Judy Daish. Le réalisateur est décédé au Charing Cross Hospital des suites d’une hémorragie, a précisé son porte-parole Jonathan Rutter. Ce dernier a expliqué qu’Anthony Minghella avait été opéré la semaine dernière d’une tumeur au cou et que l’intervention « semblait s’être bien passée ». « A 5h aujourd’hui, il a eu une hémorragie fatale », a-t-il dit. Le Patient Anglais » (1996), avec Kristin Scott Thomas et Ralph Fiennes, avait remporté en 1997 pas moins de neuf Oscars, dont celui du meilleur réalisateur pour Minghella et celui de la meilleure actrice dans un second rôle pour Juliette Binoche. Le film était adapté d’une oeuvre littéraire au même titre que « Le talentueux M. Ripley » (1999) et « Retour à Cold Mountain » (2002). Il avait aussi tourné « Par Effraction » (2005) avec notamment Binoche et Jude Law. Anthony Minghella était récemment rentré du Botswana où il avait tourné un film adapté d’un roman d’Alexander McCall Smith, « The No.1 Ladie’s Detective Agency », que la BBC projette de diffuser dimanche. Il s’agit du premier tome d’une série narrant les aventures d’un détective privé, Precious Ramotswe. La chaîne de télévision américaine HBO avait passé commande pour 13 épisodes. Outre le cinéma, Anthony Minghella s’était intéressé à l’opéra. En 2005, il avait mis en scène « Madame Butterfly » de Puccini à Londres, sur une chorégraphie de son épouse, Carolyn Choa. Il travaillait avec le compositeur Osvaldo Golijov sur un nouvel opéra commandé par le Met. Il devait en signer le livret et la mise en scène, la première étant programmée pour la saison 2011-12. La mort d’Anthony Minghella a provoqué un choc. Jude Law, présent dans trois films du réalisateur, s’est dit « profondément bouleversé et attristé » par la perte d’un ami et collègue. Le Premier ministre britannique Tony Blair, ami de Minghella depuis que le cinéaste avait réalisé une publicité pour les travaillistes dans le cadre de la campagne électorale de 2005, s’est déclaré véritablement « bouleversé et très triste ». C’était un « être humain merveilleux », créatif et « brillant » mais « toujours humble » et « aimable », a-t-il ajouté, exprimant sa totale « admiration » pour lui. Le producteur David Puttman a lui souligné que Minghella était une personne « très particulière ». Ce n’était « pas simplement un auteur, ou un auteur-réalisateur », c’était « quelqu’un » de très « connu » et de très « aimé » dans le monde du cinéma, a-t-il dit à la BBC, estimant que le cinéaste était parti beaucoup trop tôt. Jeff Ramsay, responsable de la communication du président du Botswana Festus Mogae, a pour sa part estimé que la mort de Minghella constituait « un choc et une grande perte ». Il a raconté comment le réalisateur s’était rendu au Botswana avant le tournage et s’était montré curieux du pays. « C’était comme s’il faisait partie de notre communauté », a-t-il observé, évoquant un homme agréable et très simple. Né en 1954, Anthony Minghella a grandi sur l’île de Wight, au large de la côte sud de l’Angleterre, où ses parents possédaient une usine de crèmes glacées. Il a travaillé pour la radio et la télévision avant de faire ses débuts de réalisateur en 1990 avec « Truly, Madly, Deeply », une comédie incarnée par Juliet Stevenson et Alan Rickman. Mais c’est avec « Le Patient anglais », adapté d’un roman de Michael Ondaatje, qu’il a connu son plus grand succès. Minghella laisse sa femme, son fils, l’acteur Max Minghella et sa fille Hannah. AP

 

Fragments d’un dictionnaire amoureux : Renée Le Calm

Renée Le Calm, photo source « Agence art 7 »

La double actualité de Renée Le Calm, dans « Enfin veuve » et « Paris », était l’occasion après Dominique Marcas et Francia Séguy, de rendre à nouveau un hommage à nos doyennes du cinéma français. « Chacun cherche son chat » s’inspire directement d’une des mésaventures de Renée Le Calm, qui gardait les chats de son quartier. Une amie de Klapisch lui avait raconté ce qui devint le point de départ de ce film. Ironie du sort, cette fidèle habitante du XIème, avait déjà fait de la figuration dans deux films du cinéaste. Rétrospectivement, on la reconnaît dans le métro dans « Riens du tout ». Cette retraitée de la restauration est donc engagée à nouveau, pour tenir son presque propre rôle dans ce film, face à la trop sous-utilisée Garance Clavel. Elle alterne la drôlerie et l’émotion. Le personnage de styliste que joue Marina Tomé, la voyant avec une autre vieille dame, déclare les trouver « insensées ». C’est l’âme du quartier, mais elle n’est pas passéiste face aux changements multiples urbains. Si elle déplore que certains de ses voisins soient expropriés, elle déclare s’habituer très bien aux nouveautés. Son bagou cache cependant une belle sensibilité, elle va jusqu’à tomber malade pour avoir perdu le chat noir – nommé « Gris-Gris » – de sa voisine. Le fidèle Jamel – génial Zinedine Soualem -, devenu assez lent après un accident, l’aide à reprendre goût à la vie. Le cinéma très vite se l’arrache, il faut dire qu’elle est toujours irrésistible, on se souvient du fou rire de Gérard Depardieu dans le bêtisier au générique final dans « Les anges gardiens », signé par un Jean-Marie Poiré au-delà du speedé, face à elle qui communie devant Christian Clavier qui joue un prêtre. Elle s’ingénie en général à voler la vedette à tout le monde. On la retrouve en grand-mère de Christian « Jules-Edouard Moustic » Borde, obligé de fuir sa capitale, en raison d’une apocalypse fomentée – et bidonnée – par un grand gourou d’opérette dans « Michael Kael… ».

Avec François-Xavier Demaison & Vincent Elbaz dans « Tellement proches » – photo source Allociné –

Elle est acariâtre et agonisante, en léguant son héritage à Isabelle Carré dans « Quatre étoiles ». Isabelle Mergault l’emploie avec bonheur dans « Je vous trouve très beau », où elle a droit à sa réplique culte « qui est mort ? », mais elle l’utilise assez lourdement dans son décevant « Enfin veuve ». Elle est une vieille dame constamment saoule dans le café que fréquente Jacques Gamblin. Elle arrive cependant à tirer son épingle du jeu, en arrachant quelques rires avec ses insultes diverses, passant de « Enculé » à … »Encornet ». Il faut la voir face au pauvre Paul Crauchet aussi mal employé qu’elle, la dame vaguement atteinte de la maladie de Gilles de La Tourette étant aussi gâteuse que lui. On la retrouve dans le « Paris » de Klapisch qui lui reste fidèle. Elle est plus alerte, malgré son grand âge, pour monter les escaliers que le personnage joué par Romain Duris et qui souffre du cœur. Elle est irrésistible en Mme Docase qui « crache des flammes » dans « Aide toi le ciel t’aidera » (François Dupeyron, 2007). Il faut la voir maugréer constamment et se lever de son fauteuil roulant pour partir à petits pas, quand elle n’attire plus l’attention de Félicité Wouassi. Elle est également formidable dans « Tellement proches » du duo Nakache et Toledano. Candidate improbable au permis de conduire – elle s’y essaie après des années – sans être dupe des sarcasmes de Vincent Elbaz. Elle se retrouve trimbalée par ce dernier dans toutes ses pérégrinations, ce qui donne des scènes drolatiques quand on la retrouve à faire une tortue en poterie dans une maternelle et même arbitre de tennis ! Avant de se voir par son répondant et son tempérament, membre adopté d’une famille compliquée. Renée Le Calm a une très grande personnalité et a ses dernières années composé l’un des personnages les plus attachants du cinéma français. A lire également son portrait dans L’oeil de Balthazar. Cédric Klapisch lui rend un bel hommage sur facebook, pour sa disparition le 8 juin 2019 : «  »Je m’étais tellement habitué à sa présence que j’avais oublié que ce jour pouvait arriver… J’adorais cette parisienne éternelle avec sa façon de parler inimitable et sa gouaille hallucinante… » On la retrouve une dernière fois sous sa direction dans « Deux moi ». Elle est une émouvante centenaire qui a perdu son colis, un cadeau pour son centième anniversaire, en ligne avec le personnage amusé et désemparé joué par François Civil, employé d’un call center.

Photo : L’oeil de Balthazar

Filmographie : 1991 Riens du tout (Cédric Klapisch) – 1993 Le péril jeune (+ version TV « Les années lycée : Péril jeune – 1975 ») (Cédric Klapisch) – 1995 Chacun cherche son chat (Cédric Klapisch) – Les anges gardiens (Jean-Marie Poiré) – Le silence de Rak (Christophe Loizillon) – 1997 L’annonce faite à Marius (Harmel Sbraire) – Ca n’empêche pas les sentiments (Jean-Pierre Jackson) – 1998 Lila Lili (Marie Vermillard) – 1999 Peut-être (Cédric Klapisch) – 1999, Madeleine (Laurent Bouhnick) – Les insaisissables (Christian Gion) – 2000 La boîte (Claude Zidi) – 2001 Filles perdues, cheveux gras (Claude Duty) – Ah ! Si j’étais riche (Gérard Bitton & Michel Munz) – The truth about Charlie (La vérité sur Charlie) (Jonathan Demme) – 2005 Je vous trouve très beau (Isabelle Mergault) – Quatre étoiles (Christian Vincent) – 2006 Petites révélations (Marie Vermillard) – Paris (Cédric Klapisch) – 2007 Enfin veuve (Isabelle Mergault) – Ma chère Alice (Martin Amic, CM) – Aide-toi, le ciel t’aidera (François Dupeyron) – 2008  Tellement proches (Eric Toledano & Olivier Nakache) – 2011  Renée (Jézabel Marques, CM) – 2018  Deux moi (Cédric Klapisch).

Télévision (notamment) : 1999 Regards d’enfance : Rends moi mon nom (Patrice Martineau) – Maigret : Meurtre dans un potager (Ewin Baily) – Avocats & associés : Le prix des sens (Philippe Triboit) – 2000 Un homme en colère : L’ange déchu (Didier Albert) – Boulevard du palais : La jeune morte (Jacques Malaterre) – Blague à part : Mémère (Pascal Chaumeil, CM) – 2001  Commissaire Bastille : Feux croisés (Gilles Béhat) – 2002  Maigret : La maison de Félicie (Christian de Chalonge) – 2003 Le porteur de cartables (Caroline Huppert) – 2005 Jeff et Léo, flics et jumeaux : Jardin zen (Étienne Dahene) – Docteur Dassin, généraliste : Des secrets bien gardés (Olivier Langlois) – Docteur Dassin, généraliste : L’ombre et la lumière (Olivier Langlois) – 2011  Le chant des sirènes (Laurent Herbiet). Non datés : Le bahut (Arnaud Sélignac).

 

Fragments d’un dictionnaire amoureux : Alain Robbe-Grillet

Alain Robbe-Grillet & Anicée Alvina

Annonce de la mort d’Alain Robbe-Grillet, à l’âge de 85 ans, dans la nuit de dimanche à lundi à Caen, des suites de problèmes cardiaques. Ce pape du nouveau roman aura eu le mérite de s’intéresser au cinéma. Pour n’évoquer son parcours qu’au cinéma, à l’instar de Marguerite Duras, il sera engagé par Alain Resnais, qui confia souvent ses scénarios à des romanciers confirmés, pour « L’année dernière à Marienbad ». Cette œuvre déconcertante, esthétique, mais aussi envoûtante et hors du temps, jouée par Delphine Seyrig, Sacha Pitoëff et Giorgio Albertazzi, imposa son univers à l’écran. Il apparaîtra ensuite dans « Je t’aime, je t’aime » en 1967, autre chef d’œuvre d’Alain Resnais, dans le bref rôle d’un attaché de presse s’étonnant que Claude Rich qui joue un écrivain, signe impersonnellement ses ouvrages, « Hommage de l’auteur ».  Le cinéaste intrigue, préférant l’utilisation d’images mentales à la narration traditionnelle. Il connaîtra une grande notoriété, par son travail sur l’érotisme, son attrait pour les « filles-fleurs de nos rêves » – Françoise Brion, Marie-France Pisier, Anicée Alvina, etc… Il se lance dans la réalisation en 1962, avec « L’immortelle », où un professeur joué par Jacques Doniol-Valcroze, perd sa vie à retrouver le fantasme d’une aventure avec une étrangère de passage, jouée par Françoise Brion – Il reçoit pour ce film, le prix Louis Delluc 1963 – ex aequo avec « Le soupirant » de Pierre Étaix -. « Trans-Europ-Express » (1966), évoque les fantasmes de passagers lors d’un voyage en train de Paris à Anvers. Il y emploie Jean-Louis Trintignant qui lui restera fidèle pour 3 autres films. « L’homme qui ment », pour lequel il obtint le meilleur scénario au festival de Berlin, tourne autour de l’identité du homme mystérieux, nommé Boris Varissa. André Cornand dans « La saison cinématographique 1968 », le défend contre certaines critiques qui l’accusent de fumisterie, « …Robbe-Grillet ne tranche pas, il donne à voir, invite le spectateur à entrer dans l’univers fictif de son héros, l’appelle à la participation, laisse libre son interprétation. A lui de trouver sa voie dans le « labyrinthe » de l’imaginaire… ». « L’Eden et après » avec Catherine Jourdan, évoque des jeux sado-masochistes dans un café nommé « L’Eden ». Curiosité, Robbe-Grillet, essaiera un nouveau montage, en modifiant l’ordre des plans, pour en faire un nouveau film « N a pris les dés », ce dernier fut d’ailleurs diffusé dans les années 80, sur FR3. « Glissements progressif du plaisir », tourné en 1973, évoque les mésaventures d’une jeune femme mineure – Anicée Alvina -, en prison pour l’assassinat d’une amie avec une paire de ciseaux, et attendant sa fin prochaine dans des rêveries érotiques. »Le jeu avec le feu », tourné l’année suivante, multiplie la présence de belles interprètes – Anicée Alvina, toujours, Christine Boisson, Agostina Belli, Sylvia Kristel – une organisation secrète enlevant les jeunes femmes pour les livrer en pâture à des maniaques fortunés.  Suivant le conseil de Jean-Louis Trintignant de participer à ce film, Philippe Noiret ne s’acclimatera pas à cet univers. Il en parle dans son livre « Mémoire cavalière », rejoignant ainsi ses détracteurs : « …Supérieurement intelligent, il avait une fâcheuse tendance  à vous le faire sentir un petit peu » (…) Quand aux fantasmes érotiques de Robbe-Grillet, comme ce n’étaient pas les miens, je les ai trouvés d’un ennui profond ». « La belle captive » (1982) joue avec les codes du surréalisme et du fantastique, hommage à Jean Cocteau et à René Magritte, bénéficiant d’une superbe photographie d’Henri Alekan. On y retrouve Daniel Mesguich, le génial Daniel Emilfork et les magnifiques Cyrielle Claire et Gabrielle Lazure, ainsi qu’Arielle Dombasle qui participa à ses deux derniers films, dans le rôle de la femme hystérique. Autant d’exercices de style, agaçants parfois, mais pour lequel on garde un plaisir coupable en raison de l’érotisme ambiant. La critique suit parfois, tel Raymond Lefèvre dans « Cinéma 262 », octobre 80 : « Sous nos yeux, les structures se font et se défont, les intrigues se dissolvent dans la dérision, les faits et les personnages se dédoublent ou se pluralisent, les signes changent de valeur selon les nouveaux contextes, le réel et les possibles entrent dans le même champ de vision. Et tout cela sur le mode de jeu enrobé d’humour. Les détracteurs de l’oeuvre de Robbe-Grillet sont souvent ceux qui, au nom du « contenu » (le « fond » qu’ils privilégient) se refusent d’entrer dans l’univers ludique de l’auteur et l’accusent de formalisme stérile. C’est oublier que toute contestation doit également passer par une remise en question des structures de narration que nos habitudes de perception ont figéees en les considérnant, bien à tort, comme « normales ». Sur ce point, l’apport stylistique d’Alain Robbe-Grillet est dondammental… ». La suite est plus marginale, avec « Le bruit qui rend fou » (1994), co-réalisé par Dimitri De Clerq, histoire de vengeance dans un port de Méditerranée. Il retrouve donc Arielle Dombasle, pour « Gradiva », un essai qui provoqua quelques sarcasmes de la part des critiques. Son livre « Les gommes » avait été adapté en Belgique par Lucien Deroisy et René Micha, en 1968, avec Françoise Brion. Un gros ouvrage de 720 pages, reprend les scénarios de ses films comme réalisateur, sous le titre « Scénarios en rose et noir » 1966-1983, aux éditions Fayard (2005). Un ouvrage assez intéressant – pour l’avoir emprunté dans une bibliothèque – tiré de ses propres archives, comportant des documents de travail, rappelant ses obsessions. Rappelons qu’André S. Labarthe, lui consacré l’un de ses portraits pour le mythique : « Cinéastes de notre temps », qu’il réalisa avec Noël Burch, en 1969.

 

Filmographie : Comme scénariste : 1960  L’année dernière à Marienbad (Alain Resnais) – 1963  Begegnung mit Fritz Lang (Peter Fleischmann, documentaire) – 1995  Taxandria (Raoul Servais) – Comme réalisateur-scénariste : 1962  L’immortelle –  1966  Trans-Europ-Express – 1967  L’homme qui ment – 1969   L’Eden et après – N a pris les dés (nouveau montage du film précédent) – 1973  Glissements progressifs du plaisir – 1974  Le jeu avec le feu – 1982  La belle captive – Un bruit qui rend fou (co-réalisé avec Dimitri de Clercq) – 2005 – La Gradiva / C’est la Gradiva qui nous appelle – Comme acteur : 1967  Je t’aime, je t’aime (Alain Resnais) – 1969  Cinéastes de notre temps (André S. Labarthe & Noël Burch, documentaire TV en deux parties) – 1982   Un film, autoportrait (Marcel Hanoun, documentaire) – 1998   Le temps retrouvé (Raoul Ruiz) – 2001  Alain Robbe-Grillet : un nouveau cinéma (Benoît Peeters, documentaire). Conseiller technique : 1976  Guerres civiles en France (François Barat, Vincent Nordon & Joël Farges) .

Fragments d’un dictionnaire amoureux : Henri Salvador

Annonce de la mort d’Henri Salvador, mercredi 13 février, à l’âge de 90 ans à son domicile parisien d’une rupture d’anévrisme. Peu de cinéma, mais il mérite qu’on s’y attarde un peu. On peut découvrir sa bonne humeur dans le DVD : « Mademoiselle s’amuse » (chez L.C.J. Éditions), en collègien de Ray Ventura, face à Gisèle Pascal. On le retrouve dans quelques nanars, en professeur de chant excentrique dans « Le clair de lune à Maubeuge » et en brigadier de gendarmerie taré dans « Les malabars sont au parfum ». Il fut en vedette cependant dans « Une cigarette pour un ingénu », un film de Gilles Grangier, mais… inachevé, apprend-on dans le livre d’entretiens « Gilles Grangier : Passé la Loire, c’est l’aventure ». Il y tient le rôle d’un homme fuyant son existence avec son camion benne. Il tient aussi le rôle principal du cornichonesque « Et qu’ça saute ! », signé Guy Lefranc, en policier doux rêveur, qui trouve deux caisses d’ananas contenant des bombes, dans une république sud-américaine d’opérette. On le retrouve dans un épisode de « Crimes en série », « Variations mortelles », en ami cafetier de Pascal Légitimus. S’il y est crédité au générique du début, il est totalement oublié dans celui, déroulant final. Ce grand musicien et chanteur, inoubliable interprète du blouse du dentiste de Boris Vian, emporte avec nous une part de notre enfance, par le souvenir de ses émissions de variétés, dans lesquelles il nous amusait par ses déguisements multiples et ses sketches, tout comme il pouvait nous attendrir. France 3 diffuse en hommage « Nous irons à Paris », vendredi prochain, à 14h40. Annonce aussi de la mort du grand cinéaste japonais, Kon Ichikawa, auteur notamment de « La harpe de Birmanie » (1956), de « Les feux de la plaine » (1959) et de « La vengeance d’un acteur » (1963).

 

Filmographie : Comme acteur : 1945  Le moulin des Andes / Le fruit mordu (Jacques Rémy) – 1947 Mademoiselle s’amuse (Jean Boyer) – 1949  Nous irons à Paris (Jean Boyer) 1951 Nous irons à Monte-Carlo (Jean Boyer) – 1952  Magazine de Paris (Claude Heymann, CM) – 1955  Bonjour sourire / Sourire aux lèvres (Claude Sautet) – 1956  Printemps à Paris (Jean-Claude Roy) – 1958  Europa di notte (Nuits d’Europe) (Alessandro Blasetti) – 1961  Il segugio (Accroche-toi y a du vent !) (Bernard-Roland) – 1962  Tartarin de Tarascon (Francis Blanche) – Un clair de lune à Maubeuge (Jean Chérasse) – 1964  Carrusel nocturno (Esteban Madruga) – Les gros bras (Francis Rigaud) – 1965 Les Malabars sont au parfum (Guy Lefranc) – 1967  Une cigarette pour un ingénu (Gilles Grangier, inachevé) – 1969  Et qu’ça saute (Guy Lefranc). Voxographie : 1999 The little mermaid (La petite sirène) (John Musker & Ron Clements, version française) – 2000  The little mermaid II: Return to the sea (La petite sirène 2 : Retour à l’océan (Jim Kammerud & Brian Smith, version française vidéo 2006) – 2004  Pollux, le manège enchanté : de Jean Duval, Frank Passingham & Dave Borthwick). Musique : 1961  Accroche-toi y a du vent ! (Bernard-Roland) – 1964  Sursis pour un espion (Jean Maley) – 1969  Et qu’ça saute ! (Guy Lefranc) – 1970  L’explosion (Marc Simenon).

 

Nota : Certaines sources le créditent à tort dans « Candide ou l’optimisme au Xxème siècle », de Norbert Carbonnaux, en 1960, dans le rôle du chef des Oreillons. Le rôle est tenu en fait par un autre chanteur, John William, confirmé par la vision du DVD chez René Château. Nombre de ses chansons figurent dans des films citons :  The little hut (La petite hutte), (Mark Robson, 1956), L’assassino (L’assassin) (Elio Petri, 1961), Le magot de Josefa (Claude Autant-Lara, 1963), Ghosts of Mississippi (Les fantômes du passé) (Rob Reiner, 1996), Le voisin (Marianne Vissier, CM, 1996), Go (Doug Liman, 1999),  Artificial Intelligence  : AI (A.I. Intelligence Artificielle) (Steven Spielberg, 2001), Ocean’s eleven (Steven Soderbergh, 2001), Merci Docteur Rey (Andrew Litvak, 2001) ; etc…

Fragments d’un dictionnaire amoureux : Roy Scheider

Annonce de la mort de l’acteur Roy Scheider, mort à l’hôpital de l’Université de l’Arkansas à Little Rock, à l’âge de 75 ans. Le comédien était atteint depuis deux ans d’un myélome multiple. Son physique taillé à la serpe, le prédisposait à jouer des hommes solides, luttant contre une société menaçante, tout en gardant une certaine probité. Issu d’un milieu modeste, il s’essaye au théâtre et découvre le cinéma, dans des rôles secondaires. On le retrouve en 1972 engagé par deux français, dans « L’attentat » d’Yves Boisset, en écrivain américain cynique et dans « Un homme est mort », solide polar de Jacques Deray. Les années 70, sont une belle décennie pour lui, on le retrouve souvent en policier comme son personnage de Brody dans « Les dents de la mer », qu’il reprendra dans la « séquelle » suivante. Il est aussi un policier intègre dans « French connection », et le frère de Dustin Hoffman dans « Marathon Man », dans des films qui lui apportent la confirmation de son talent. Il reprend le rôle d’Yves Montand dans l’honorable remake du « Salaire de la peu », d’Henri-Georges Clouzot, dans « Le convoi de la peur »,  où il est un ancien escroc, devant conduire un camion de nitroglycérine à travers la jungle. Il excelle dans un solide polar de Jonathan Demme, dans le rôle d’un ancien agent secret dépressif et victime d’une sombre machination. Il sait toujours apporter une humanité, même dans ses rôles les plus virils. Il trouve l’un de ses meilleurs rôles dans « Que le spectacle commence », audacieuse réalisation de Bob Fosse, qui mène une vie d’enfer à Brodway, comme metteur en scène d’une comédie musicale, dont le cœur finira pas lâcher. Citons aussi « Tonnerre de feu », spectaculaire film de John Badham pour l’époque, où en vétéran de la guerre du Vietnam, devient un pilote d’une brigade héliportée de surveillance. On le retrouve dans la suite du culte « 2001, odyssée de l’Espace », « 2001 », film décevant par son côté explicatif, mais qui n’est pas si indigne de son illustre modèle. Les dernières décennies, hormis un rôle ambigu chez David Cronenberg dans « Le festin nu » et chez Francis Ford Coppola,  seront beaucoup moins prestigieuses, il se perd dans des films de séries, qui sortent parfois en France présentés comme téléfilm ou en vidéo, ce qui rend complexe sa filmographie française. On le retrouve aussi dans quelques séries populaires comme « Sea Quest, police des mers ». Il finit donc légitimement par s’auto-parodier dans une pub pour « Orange » à l’instar d’un Steven Seagal. Annonce également de la mort de l’actrice suédoise Eva Dalhbeck, héroïne de « L’attente des femmes » d’Ingmar Bergman, et qui eu une consécration internationale, elle tourna même dans le curieux « Les créatures » d’Agnès Varda.

Filmographie : 1963  The curse of the living corpse (Del Tenney) – 1968  The paper lion (Le lion de papier) (Alex March) – Star ! (Star) (Robert Wise) –  1969  Stiletto (Bernard L. Kowalski) – Loving (Id / Belgique : Infidélités) (Irvin Kershner) – 1970   Puzzle of a downfall child (Portrait d’ une enfant déchue) (Jerry Schatzberg) – 1971  Klute (Id / Belgique : L’inspecteur Klute) (Alan J. Pakula) – The French Connection (French Connection) (William Friedkin) – 1972  L’attentat (Yves Boisset) – Un homme est mort (Yves Boisset) – 1973 The seven-ups (Police Puissance 7) (Philip D’Antoni) – 1974  Sheila Levine is dead and living in New York (Sidney J. Furie) – 1975  Jaws (Les dents de la mer) (Steven Spielberg)1976  Marathon Man (Id) (John Schlesinger) – 1977  Sorcerer / Wages of fear (Le convoi de la peur) (William Friedkin) – 1978  Jaws 2 (Les dents de la mer 2) (Jeannot Szwarc) – Last embrace (Vidéo : Meutres en cascade / Belgique : La dernière victime) (Jonathan Demme) – 1979  All that jazz (Que le spectacle commence) (Bob Fosse) – 1981  Blue Thunder (Tonnerre de feu) (John Badham)1982 Still of the night (La mort aux enchères) (Robert Benton)1984  2010 (2010, l’année du premier contact) (Peter Hyams) – In our hands (Robert Richer & Stanley Warnow, documentaire) – Starring… the actors (Alan Bloom, documentaire) – 1986  The Men’ s Club (Men’ s club) (Peter Medak) – 52 pick-up (Paiement cash) (John Frankenheimer) – 1988  Cohen & Tate (Eric Red) –  1989  Night game (Meurtres en nocturne) (Peter Masterson) – Listen to me (Une chance pour tous) (Douglas Day Stewart) – The fourth war (Vidéo : La quatrième guerre) (John Frankenheimer) – 1990  The Russia house (La maison Russie) (Fred Schepisi) – 1991  Contact : The Yanomami indians of Brazil (Geoffrey O’Connor) – Naked lunch (Le festin nu) (David Cronenberg) – 1993  Romeo is Bleeding (Id) (Peter Medak) – 1994  Wild justice (Paul Turner) – 1996  The myth of Fingerprints (Back home) (Bart Freundlich) – Plato’ s run (Vidéo : Traque sans merci / TV : Un duo de choc) (James Becket) – The rage / Word of Honor (Les enragés) (Sidney J. Furie) – The Peacekeeper / Hellbent (État d’urgence) (Frédéric Forestier) – 1997  Executive Target (Titre TV : Pleins feux sur le président) (Joseph Merhi) – John Grisham’ s The rainmaker (L’idéaliste) (Francis Ford Coppola) – The definite Maybe (Rob Rollins Lobl & Sam Sokolow) – 1998  Better living (Max Mayer) –  Evasive action (Vidéo : Sécurité maximum) (Jerry P. Jacobs) – The uttmost (Diana Choi, documentaire) – The white raven (Vidéo : Le solitaire) (Andrew Stevens) – 1999  RKO 281 (Citizen Welles) (Benjamin Ross, téléfilm diffusé en salles en France) – 2000  The doorway (Michael B. Druxman) –  Chain of command (Priorité absolue) (John Terlesky) – Daybreak (Le métro de la mort) (Jean Pellerin) – Angels don’ t sleep here (Titre TV : « Les anges ne dorment pas ») (Paul Cade) – Falling through (Colin Bucksey) – 2001 Time lapse / Past tense (David Worth) – Texas 46 / The good war (Giorgio Serafini) –  2002  Love thy neighbor (Nick Gregory) – Red serpent (Gino Tanasescu) – 2003 A decade under the influence (Une décennie sous influence) (Ted Demme & Richard LaGravenese, documentaire) – Citizen verdict (Philippe Martinez) – Wes Craven presents Dracula II : Ascension (Patrick Lussier, vidéo) – The Punisher (Id) (Jonathan Hensleigh) – Dracula III : Legacy / Dracula : Resurrected (Patrick Lussier, Vidéo) – Last chance (Lee Greenberg, CM) – Dark Honeymoon (David O’ Malley) – 2007  If i didn’ t care (Ben Cummings & Orson Cummings) – Iron Cross (Joshua Newton) – The poet (Damian Lee) – Voxographie : 1985 Mishima : A life in four chapters (Mishima) (Paul Schrader, récitant) – 2000  Legends, icons & superstars of the 20th Century (Robert Guenette, documentaire, récitant, vidéo) – 2002  The Feds : U.S. Postal inspectors (Jason Meath, documentaire, récitant) – 2006  The Shark is still working (Erik Hollander, vidéo, récitant) – 2007  Chicago 10 (Brett Morgen , documentaire, récitant) – Télévision (notamment) : 1972  Assigment : Munich (Un dangereux rendez-vou) (David Lowell Rich) – 1983  Jacobo Timerman : Prisoner without a name, cell without a number (Linda Yelen) –  1984  Tiger town (Alan Shapiro) -1990  Something has to shoot the picture (Frank Pierson) – 1993  Wild justice (Tony Wharmby) – 1996  Money play$ (Frank D. Gilroy) – 1998  Silver wolf (Peter Svatek) – 2001  Diamonds Hunters (La dernière rivale) (Dennis Berry).