Renée Le Calm, photo source « Agence art 7 »

La double actualité de Renée Le Calm, dans « Enfin veuve » et « Paris », était l’occasion après Dominique Marcas et Francia Séguy, de rendre à nouveau un hommage à nos doyennes du cinéma français. « Chacun cherche son chat » s’inspire directement d’une des mésaventures de Renée Le Calm, qui gardait les chats de son quartier. Une amie de Klapisch lui avait raconté ce qui devint le point de départ de ce film. Ironie du sort, cette fidèle habitante du XIème, avait déjà fait de la figuration dans deux films du cinéaste. Rétrospectivement, on la reconnaît dans le métro dans « Riens du tout ». Cette retraitée de la restauration est donc engagée à nouveau, pour tenir son presque propre rôle dans ce film, face à la trop sous-utilisée Garance Clavel. Elle alterne la drôlerie et l’émotion. Le personnage de styliste que joue Marina Tomé, la voyant avec une autre vieille dame, déclare les trouver « insensées ». C’est l’âme du quartier, mais elle n’est pas passéiste face aux changements multiples urbains. Si elle déplore que certains de ses voisins soient expropriés, elle déclare s’habituer très bien aux nouveautés. Son bagou cache cependant une belle sensibilité, elle va jusqu’à tomber malade pour avoir perdu le chat noir – nommé « Gris-Gris » – de sa voisine. Le fidèle Jamel – génial Zinedine Soualem -, devenu assez lent après un accident, l’aide à reprendre goût à la vie. Le cinéma très vite se l’arrache, il faut dire qu’elle est toujours irrésistible, on se souvient du fou rire de Gérard Depardieu dans le bêtisier au générique final dans « Les anges gardiens », signé par un Jean-Marie Poiré au-delà du speedé, face à elle qui communie devant Christian Clavier qui joue un prêtre. Elle s’ingénie en général à voler la vedette à tout le monde. On la retrouve en grand-mère de Christian « Jules-Edouard Moustic » Borde, obligé de fuir sa capitale, en raison d’une apocalypse fomentée – et bidonnée – par un grand gourou d’opérette dans « Michael Kael… ».

Avec François-Xavier Demaison & Vincent Elbaz dans « Tellement proches » – photo source Allociné –

Elle est acariâtre et agonisante, en léguant son héritage à Isabelle Carré dans « Quatre étoiles ». Isabelle Mergault l’emploie avec bonheur dans « Je vous trouve très beau », où elle a droit à sa réplique culte « qui est mort ? », mais elle l’utilise assez lourdement dans son décevant « Enfin veuve ». Elle est une vieille dame constamment saoule dans le café que fréquente Jacques Gamblin. Elle arrive cependant à tirer son épingle du jeu, en arrachant quelques rires avec ses insultes diverses, passant de « Enculé » à … »Encornet ». Il faut la voir face au pauvre Paul Crauchet aussi mal employé qu’elle, la dame vaguement atteinte de la maladie de Gilles de La Tourette étant aussi gâteuse que lui. On la retrouve dans le « Paris » de Klapisch qui lui reste fidèle. Elle est plus alerte, malgré son grand âge, pour monter les escaliers que le personnage joué par Romain Duris et qui souffre du cœur. Elle est irrésistible en Mme Docase qui « crache des flammes » dans « Aide toi le ciel t’aidera » (François Dupeyron, 2007). Il faut la voir maugréer constamment et se lever de son fauteuil roulant pour partir à petits pas, quand elle n’attire plus l’attention de Félicité Wouassi. Elle est également formidable dans « Tellement proches » du duo Nakache et Toledano. Candidate improbable au permis de conduire – elle s’y essaie après des années – sans être dupe des sarcasmes de Vincent Elbaz. Elle se retrouve trimbalée par ce dernier dans toutes ses pérégrinations, ce qui donne des scènes drolatiques quand on la retrouve à faire une tortue en poterie dans une maternelle et même arbitre de tennis ! Avant de se voir par son répondant et son tempérament, membre adopté d’une famille compliquée. Renée Le Calm a une très grande personnalité et a ses dernières années composé l’un des personnages les plus attachants du cinéma français. A lire également son portrait dans L’oeil de Balthazar. Cédric Klapisch lui rend un bel hommage sur facebook, pour sa disparition le 8 juin 2019 : «  »Je m’étais tellement habitué à sa présence que j’avais oublié que ce jour pouvait arriver… J’adorais cette parisienne éternelle avec sa façon de parler inimitable et sa gouaille hallucinante… » On la retrouve une dernière fois sous sa direction dans « Deux moi ». Elle est une émouvante centenaire qui a perdu son colis, un cadeau pour son centième anniversaire, en ligne avec le personnage amusé et désemparé joué par François Civil, employé d’un call center.

Photo : L’oeil de Balthazar

Filmographie : 1991 Riens du tout (Cédric Klapisch) – 1993 Le péril jeune (+ version TV « Les années lycée : Péril jeune – 1975 ») (Cédric Klapisch) – 1995 Chacun cherche son chat (Cédric Klapisch) – Les anges gardiens (Jean-Marie Poiré) – Le silence de Rak (Christophe Loizillon) – 1997 L’annonce faite à Marius (Harmel Sbraire) – Ca n’empêche pas les sentiments (Jean-Pierre Jackson) – 1998 Lila Lili (Marie Vermillard) – 1999 Peut-être (Cédric Klapisch) – 1999, Madeleine (Laurent Bouhnick) – Les insaisissables (Christian Gion) – 2000 La boîte (Claude Zidi) – 2001 Filles perdues, cheveux gras (Claude Duty) – Ah ! Si j’étais riche (Gérard Bitton & Michel Munz) – The truth about Charlie (La vérité sur Charlie) (Jonathan Demme) – 2005 Je vous trouve très beau (Isabelle Mergault) – Quatre étoiles (Christian Vincent) – 2006 Petites révélations (Marie Vermillard) – Paris (Cédric Klapisch) – 2007 Enfin veuve (Isabelle Mergault) – Ma chère Alice (Martin Amic, CM) – Aide-toi, le ciel t’aidera (François Dupeyron) – 2008  Tellement proches (Eric Toledano & Olivier Nakache) – 2011  Renée (Jézabel Marques, CM) – 2018  Deux moi (Cédric Klapisch).

Télévision (notamment) : 1999 Regards d’enfance : Rends moi mon nom (Patrice Martineau) – Maigret : Meurtre dans un potager (Ewin Baily) – Avocats & associés : Le prix des sens (Philippe Triboit) – 2000 Un homme en colère : L’ange déchu (Didier Albert) – Boulevard du palais : La jeune morte (Jacques Malaterre) – Blague à part : Mémère (Pascal Chaumeil, CM) – 2001  Commissaire Bastille : Feux croisés (Gilles Béhat) – 2002  Maigret : La maison de Félicie (Christian de Chalonge) – 2003 Le porteur de cartables (Caroline Huppert) – 2005 Jeff et Léo, flics et jumeaux : Jardin zen (Étienne Dahene) – Docteur Dassin, généraliste : Des secrets bien gardés (Olivier Langlois) – Docteur Dassin, généraliste : L’ombre et la lumière (Olivier Langlois) – 2011  Le chant des sirènes (Laurent Herbiet). Non datés : Le bahut (Arnaud Sélignac).