Ce film ténu est très touchant, même si l’on peut déplorer quelques longueurs et quelques maladresses, sur un thème voisin de « La petite chartreuse ». On peut comprendre le personnage de Clara (superbement joué par Sylvie Testud), sa rudesse devant la protéger devant la dureté de la vie (elle est illettrée suite à un traumatisme d’un geste brutal (certes d’amour) de son enfance. Anna (lumineuse et très expressive) et sa mère forment une sorte de couple fusionnel et en définitif partageur.. Il faut sauver la mère pour que la fille trouve son salut. Bizarrement le personnage de Sylvie Testud, véritable petit soldat, est touchant – son personnage n’est pas immédiatement « aimable » -, devant son inaptitude à la vie. C’est loin d’être un monstre froid, je crois, et le subtil jeu de Testud nous laissant entrevoir le drame de cette jeune femme.
Sylvie Testud
Sergi Lopez est idéal dans son rôle d’éducateur rassurant, de même pour Mar Sodupe qui joue sa soeur, et dans un petit rôle Isabelle Petit-Jacques (actrice fétiche de Patrice Leconte), en directrice d’école peu compréhensive. Salutations à l’ingénieur du son Pierre Gamet, que j’avais rencontré un jour, et son beau travail sur le mode intime (l’oisellerie, la mer). Deuxième réussite pour le tandem Corneau-Testud après « Stupeur et tremblements », film conte, sans pathos et avec une belle utilisation de la caméra DV.
Esther Gorintin
Évoquons aussi Esther Gorintin, dont la présence rayonne durant tout le film, même après sa disparition. Je me souviens d’elle avec émotion pour l’avoir rencontrée durant l’avant-première du film « Depuis qu’Otar est parti ». Elle retrouvait Bordeaux, la ville de sa jeunesse après des années, elle avait fuit durant l’occupation. C’était un choc, la transformation du quartier Meriadeck, par exemple. C’était une formidable rencontre avec la cinéaste Julie Bertuccelli. Un grand souvenir pour moi et je regrette de n’avoir pas pris de notes sur cette formidable rencontre avec deux belles âmes. Depuis « Voyages », son rôle de voisine souffrante d' »Imago » ou « Rosie » dans « Carnages », ses personnages nous touchent énormément…