Philippe Castelli dans « Chut ! »
Annonce de la mort de Philippe Castelli, sa grande silhouette dégingandée, sa prononciation hésitante, l’incursion d’un corps comique lent, faisant souvent une pose dans un film au rythme trépidant, a fait de lui le second rôle idéal des comédies françaises, voire franchouillardes. Il avait pourtant débuté avec Claude Chabrol. On retient évidemment ses contributions radios et télévisées dans « Les grosses têtes » présentées par Philippe Bouvard, éternel souffre-douleur de l’ »odieux » Olivier de Kersauzon. Le cinéma l’utilisait souvent sur ce mode, tel l’inspecteur en retard, qui subit une engueulade d’anthologie de la part de Louis de Funès, dans « Fantômas se déchaîne » (1965). Mais le décalage était toujours au rendez-vous, il fallait l’entendre chanter au générique de « Ça va pas être triste » (Pierre Sisser, 1982), « Merde, merde, merde, y a que des emmerdes…, brouilles, brouilles, y a que des embrouilles ». Il avait souvent poussé la chansonnette, l’excellent Philippe Meyer le rappelait parfois en diffusant ses débuts au petit conservatoire de Mireille, sur France Inter et à la télévision dans « Le petit conservatoire de la chanson » des années 60 à 70. Il participe à 4 reprises, au bestiaire Mocky. Il fallait le voir en maître fromager vantant les différents goûts de fromages, avec beaucoup de condescendance face à l’improbable tandem Heinz Ruhmann – Fernandel ignares des subtilités gastronomiques (« La bourse et la vie », 1965). Il jouait dans « Chut ! » (1971) le double rôle d’un ministre, complotant et donnant rendez-vous à Michael Lonsdale, dans une gare, tout en se faisant passer pour un aveugle, avec des lunettes noires dont un des carreaux est cassé, et de son sosie un quidam mi-guindé, mi auvergnat. L’heure étant grave dans le film, suite à une escroquerie à l’épargne, il donne des ordres à son subordonné, en complotant tout en chantant et en jouant de l’accordéon ! C’est un grand moment loufoque, nous faisant regretter une meilleure utilisation de sa folie à l’écran. On le retrouve essentiellement des années 60 à 80, dans de multiples emplois, décalé en garde en noir du Cardinal dans « Les quatre Charlots mousquetaire », et souvent en maîtres d’hôtel ou majordomes, dont le sérieux – ou l’ennui – est parfois malmené. Citons son rôle de concierge de l’hôtel Danieli, victime des guignolades belmondiennes dans « Le guignolo » (Lautner, 1978), ce dernier rentrant dans l’hôtel… en bateau. Il a été d’ailleurs l’un des acteurs fétiches de Georges Lautner, il fut le portier turc dans « Les barbouzes », le quidam trouillard, n’étant pas d’une grande aide à Mireille Darc dans un parking, dans « Les seins de glace » (1974), le buraliste ronchon dans « Mort d’un pourri » (1977).. On le retrouve stoïque face à Belmondo toujours dans « Flic ou voyou » (1978). Il est un examinateur au permis de conduire, ignorant qu’il couvre, malgré lui, sa fuite. Il le recale d’ailleurs, les cascades n’étant pas très réglementaires… De silhouettes à de simples apparitions, il savait souvent tirer son épingle du jeu. Ce type de comédiens nous manque beaucoup de nos jours.
Filmographie : établie avec Armel de Lorme : 1959 Les bonnes femmes (Claude Chabrol) – 1960 Les Godelureaux (Claude Chabrol) – 1961 À fleur de peau (Claude Bernard-Aubert) – Le caporal épinglé (Jean Renoir) – Cartouche (Philippe de Broca) – 1962 Les bricoleurs (Jean Girault) – Landru (Claude Chabrol) – 1963 Carambolages (Marcel Bluwal) – La porteuse de pain (Maurice Cloche) – Les tontons flingueurs (Georges Lautner) – Une ravissante idiote (Édouard Molinaro) – Des pissenlits par la racine (Georges Lautner) – Les durs à cuire ou comment supprimer son prochain sans perdre l’appétit (Jack Pinoteau) – 1964 Aimez-vous les femmes (Jean Léon) – Une souris chez les hommes / Un drôle de caïd (Jacques Poitrenaud) – La grande frousse ou la cité de l’indicible peur (Jean-Pierre Mocky) – Fantômas (André Hunebelle) – Les barbouzes (Georges Lautner) – Patate (Robert Thomas) – Un monsieur de compagnie (Philippe de Broca) – Yoyo (Pierre Étaix) – 1965 Les bons vivants / Un grand seigneur [épisode « Les bons vivants »] (Georges Lautner) – Les enquiquineurs (Roland Quignon) – Quand passent les faisans (Édouard Molinaro) – Fantômas se déchaîne (André Hunebelle) – Galia (Georges Lautner) – La communale (Jean L’Hôte) – Pas de caviar pour tante Olga (Jean Becker) – Monnaie de singe (Yves Robert) – Ne nous fâchons pas (Georges Lautner) – Tant qu’on a la santé (Pierre Étaix) – La sentinelle endormie (Jean Dréville) – La bourse et la vie (Jean-Pierre Mocky) – 1966 The night of the generals (La nuit des généraux) (Anatole Litvak) – 1968 La grande lessive ! (Jean-Pierre Mocky) – 1969 La promesse de l’aube / Promise at dawn (Jules Dassin) – Borsalino (Jacques Deray) – 1970 Laisse aller… c’est une valse (Georges Lautner) – Doucement les basses (Jacques Deray) – 1971 Le drapeau noir flotte sur la marmite (Michel Audiard) – Le viager (Pierre Tchernia) – Chut ! / Pavane pour un crétin défunt (Jean-Pierre Mocky) – 1972 Quelques messieurs trop tranquilles (Georges Lautner) – Les volets clos (Jean-Claude Brialy) – La guerre des espions (Henri Boyer & Jean-Louis Van Belle) – 1973 Quatre Charlots mousquetaires (André Hunebelle) – Un amour de pluie (Jean-Claude Brialy) – 1974 Le bordel, 1ère époque (1900) (Jose Benazeraf) – Deux grandes filles dans un pyjama (Jean Girault) – Sexuellement vôtre (Max Pécas) – Les bidasses s’en vont-en guerre (Claude Zidi) – Borsalino and Co (Jacques Deray) – Les seins de glace (Georges Lautner) – Ce cher Victor (Robin Davis) -Soldat Duroc, ça va être te fête (Michel Gérard) – 1975 Black out (Philippe Mordacq, inédit) – C’est dur pour tout le monde (Christian Gion) – Bons baisers de Hong-Kong (Yvan Chiffre) – Couche-moi dans le sable et fais jaillir ton pétrole (Norbert Terry) – 1976 L’intrus (Patrick Schulmann, CM) – 1977 Dialogue sous la lampe (Christian Riberzani, CM) – Mort d’un pourri (Georges Lautner) – On peut le dire sans se fâcher / La belle emmerdeuse (Roger Coggio) – 1978 One, two, two : 122 rue de Provence (Christian Gion) – Ils sont fous sorciers (Georges Lautner) – Brigade mondaine (Jacques Scandelari) – Judith Therpauve (Patrice Chéreau) – Le cavaleur (Philippe de Broca) – Le temps des vacances (Claude Vital) – Flic ou voyou (Georges Lautner) – 1979 Brigade des mœurs : La secte de Marrakech (Eddy Matalon) – Le guignolo (Georges Lautner) – Les aventures de Guidon Fûté (Jean-Marie Durand) – 1980 Une merveilleuse journée (Claude Vital) – Est-ce bien raisonnable ? (Georges Lautner) – Signé Furax (Marc Simenon) – 1981 Le jour se lève et les conneries commencent (Claude Mulot) – Prends ta rolls et va pointer (Richard Balducci) – Pour la peau d’un flic (Alain Delon) – Le secret des Sélénites (Jean Image, animation, voix) – 1982 On s’en fout… nous on s’aime (Michel Gérard) – Plus beau que moi tu m’aimes (Philippe Clair) – Rebelote (Jacques Richard) – Le battant (Alain Delon) – Ca va pas être triste (Pierre Sisser) – 1983 Retenez-moi… où je fais un malheur (Michel Gérard) – Aldo et Junior (Patrick Schulmann) – 1984 Par où t’es rentré… on t’as pas vu sortir (Philippe Clair) – Ave Maria (Jacques Richard) – Liberté, égalité, choucroute (Jean Yanne) – 1985 Banana’s boulevard (Richard Balucci) – 1988 À deux minutes près (Éric Le Hung). Nota : Il n’apparaît pas dans « À nous quatre, Cardinal ! » (André Hunebelle, 1973), bien que crédité au générique, et il n’apparaît pas dans la version VHS du « Temps des vacances » (1978).
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Télévision: (notamment) : 1961 En votre âme et conscience : L’affaire Courtois (Jean-Pierre Marchand) – 1962 Le peintre exigeant (Jean Vernier) – 1964 Le théâtre de la jeunesse : La soeur de Gribouille (Yves-André Hubert) – La mégère apprivoisée (Pierre Badel) – Thierry la fronde : la chanson d’Isabelle (Robert Guez) – 1965 Les facéties du sapeur Camenber (Pierre Boursaus, série TV) – 1966 Vive la vie (Joseph Drimal, série TV) – L’écharpe (Abder Isker) – Comment ne pas épouser un milliardaire (Lazare Iglésis, série TV) – Sacrés fantômes (Stellio Lorenzi) – 1967 L’amateur / S.O.S. Fernand (Jean-Piere Decourt) – Max le débonnaire : Un bon petit Jules (Gilles Grangier) – 1968 Les dossiers de l’agence O : Le vieillard au porte-mine (Jean Salvy) – 1970 Tête d’horloge (Jean-Paul Sassy) – Les caprices de Marianne (Georges Vitaly) – Le fauteuil hanté (Pierre Bureau) – Rendez-vous à Badenberg (Jean-Michel Meurice, série TV) – La fille qui disait non (Yannick Andréi) – 1971 Quentin Durward (Gilles Grangier, série TV) – Madame êtes-vous libre ? (Jean-Paul Le Chanois) – Bon an mal an ou chérie je me sens vieillir (Rémy Grumbach) – Les nouvelles aventures de Vidocq : Les banquiers du crime (Marcel Bluwal) – Au théâtre ce soir : Cherchez le corps M. Blake (Pierre Sabbagh) – La belle aventure (Jean Vernier) – 1972 La demoiselle d’Avignon (Michel Wyn, série TV) – Avec le coeur (Rémy Grumbach) – La bonne nouvelle (Guy Lessertisseur) – Kitsch-Kitsch (Janine Guyon) – Le voleur de riens (Janine Guyon) – 1973 Le bleu d’outre-tombe (Edouard Logereau) – Au théâtre ce soir : Le million (Georges Folgoas) – Poker d’as (Hubert Cornfield) – Poker d’as (Hubert Cornfield, série TV) – Gil Blas de Santillane (Hubert Cornfield) – Un curé de choc : Pension pour dames seules (Philippe Arnal) – 1974 Monsieur Badin (Jean Bertho) – Le droit aux étrennes (Jean Bertho) – Le commissaire est bon enfant (Jean Bertho) – Les balances (Jean Bertho) – 1975 La pluie sur la dune (Serge Piollet) – 1977 Emmenez-moi au Ritz (Pierre Grimblat) – 1980 Les incorrigibles (Abder Isker) – 1981 Au théâtre ce soir : Alain, sa mère et sa maîtresse (Pierre Sabbagh) – Anthelme Collet ou le brigand gentilhomme (Jean-Paul Carrère) – 1982 Les scénaristes ou les aventures extraordinaires de Robert Michon (Nino Monti) – Les enquêtes du commissaire Maigret : Maigret et l’homme tout seul (Jean-Paul Sasst) – 1986 Grand hôtel (Jean Kerchbron) – 1992 Aldo tous risques : Mascarade (Claude Vital) – C’est quoi ce petit boulot (Michel Berny & Gian Luigi Polidoro) – Tout ou presque (Claude Vital) – Prêcheur en eau trouble (Georges Lautner) – 1996 Jamais deux sans toi : Le gendre idéal.
Mise à jour du 16/09/2011
Mort également du cinéaste ivoirien Henri Duparc, lire à son sujet l’article de Afrik.com.