Après le petit chef d’œuvre de Danis Tanovic, « No man’s land », on attendait légitimement son second film. Ce film dédié à « K.K. » souffre hélas de l’ombre tutélaire écrasante de Krzysztof Kieslowski. Avant sa mort il avait conçu une trilogie, « Le paradis », « Le purgatoire » et « L’enfer », le premier volet avait été repris par le cinéaste Tom Tykwer, « Heaven » sorti en 2001, pas vraiment probant malgré la présence de la lumineuse Cate Blanchett. L’échec financier de ce film, a décidé la société Miramax de ne pas continuer la trilogie, les scénarios étant désormais libres de droits, « L’enfer » est donc adapté pour ce film. On retrouve un personnage emblématique du décalogue, la vieille dame qui a des difficultés à jeter une bouteille vide dans un container, si mes souvenirs sont bons, seule une personne l’aide d’ailleurs chez Kieslowski. Ce personnage est incarné par la touchante – et inoubliable interprète du film « Voyages » – Esther Gorintin, que l’on a toujours plaisir à revoir. Le film reprend ses idées, les métaphores, les enchevêtrements de destins, sans que cela fonctionne trop. On pense au début que le réalisateur va rajouter un humour assez ravageur, avec la scène du « coucou », mais hélas on ne le trouve que trop peu – les mariés photographiés par exemple -. La symbolique reste hélas assez lourde (Un insecte dans un verre, le jeu de la marelle, etc…).
Karin Viard
Miki Manojlovic sort de prison, personne ne l’attend, il repose dans un nid un oisillon. Cet odieux volatile étant un coucou, il s’empresse de jeter l’œuf présent au sol pour prendre sa place. On comprend assez rapidement la démonstration de l’ensemble et où veut en venir le metteur en scène, hélas tout est surligné ( sous l’égide de « Médée » ), et le souvenir assez vivace de l’œuvre du grand maître polonais n’arrange rien. On trace ici le destin de trois sœurs, Sophie – Emmanuelle Béart , désemparée -, qui soupçonne son mari Sébastien – Jacques Gamblin, physique -, de la tromper, Céline – Karin Viard, très touchante – est la sacrifiée de la famille, son interprétation est superbe de retenue et d’émotion -, personnage que cherche un mystérieux jeune homme – Guillame Canet dans un rôle effacé -, et Anne – Marie Gillain, en jeune femme qui découvre les affres de l’amour avec un homme marié – Jacques Perrin, sobre et juste -. Sur ces trois sœurs plane l’ombre écrasante d’une mère, – Carole Bouquet -, placée dans une résidence luxueuse pour personne âgée, et que seul Céline visite. Il faut voir la pauvre Carole Bouquet vieillie, son curieux maquillage lui donne des faux airs de Trevor Howard, dans le rôle de Richard Wagner, dans le « Ludwig » de Visconti, ce qui n’aide pas à adhérer au concept, heureusement le talent de la comédienne aide par son seul regard son personnage à exister. On retrouve dans des rôles secondaires, Jean Rochefort qui n’a pas grand chose à se mettre sous la vent, Miki Manojlovic, victime du destin, Mariyam d’Abo, maîtresse digne de Sébastien, de Dominique Reymond en mère compréhensive de l’amie d’Anne, Georges Siatidis, en contrôleur SNCF amoureux transi, Françoise Bertin en voisine curieuse, Patrick Paroux en chauffeur de taxi antipathique. Malgré quelques jolis moments, notamment ceux avec Karin Viard, comédienne qui nous surprend toujours, dans un rôle où l’on a l’habitude de la voir, on ressort hélas assez déçu de l’ensemble, trop ambitieux peut être.