Dans le flot continu des témoignages télévisés, certains restent en mémoire comme celui de Bruno de Stabenrath, poignant et digne, à l’occasion de la sortie de son livre. Sur le plateau de « Tout le monde en parle » de Thierry Ardisson, il montrait son élégance et sa verve, parlant de son état de paraplégique avec beaucoup d’humour. On pouvait avoir beaucoup d’apriorismes de savoir son personnage incarné par Titoff, comique « gros rouge qui tâche », pas vraiment probant sur des comédies comme « Gomez & Tavares » et « L’incruste ». Autant voir l’intelligence ou la probité incarnées par Alexia Laroche-Joubert !  Grave erreur, Mea Culpa…, les étiquettes ont la vie dure, mais Titoff est tout à fait crédible dans ce rôle – même déguisé en Basque ! -, pour peu que l’on occulte un peu le modèle original. Moins abouti et énergique que « L’envol » et surtout « Le grand rôle », précédents films de Steve Suissa, ce film pêche beaucoup par ses maladresses – ralentis sirupeux, ombre titanesque d’une perche dans la scène du retour de Léo de l’hôpital -. Mais la sincérité de l’œuvre fait oublier les défauts de  l’ensemble. Il y a deux grandes forces, dans ce film, d’une part le traitement des difficultés et contraintes du quotidien, pour un nouveau handicapé – Les frais que causent une invalidité, le regard des autres, les choses bénignes qui semblent devenir insurmontables, certains tabous – et l’interprétation, formidable, comme dans les autres films de Steve Suissa.

 

Titoff

La fiche d’IMDB, semble assez complète – mais il manque au moins Valérie Steffen, en handicapée du gang des ciseaux -, beaucoup de comédiens sont venus faire un petit tour – Jean-Claude Bouillon et Béatrice Agenin, en parents chaleureux, Lionel Abelanski en vendeur de chaises roulantes, Pierre-Olivier Mornas, en sadique aux ciseaux, Elodie Navarre en infirmière compréhensive, etc… -. Marion Cottillard, Bérénice Béjo en femmes aimantes ou mal aimées, sont touchantes, de même que le trop rare Richard Bohringer, en médecin désabusé, Bruno Todeschini et Stéphan Guérin-Tillé en bons copains – ce dernier est touchant de la scène où il tente d’ironiser sur les avantages de vivre en banlieue -, Marianne Groves en soignante musclée avec lequel le courant ne passe pas – encore une grande sous-utilisée depuis son beau premier rôle dans « Mado, poste restante », et Laurent Bateau, en passe de devenir un indispensable, dans le rôle du frère rabat-joie et terre à terre, mais sur lequel on peut toujours compter, même s’il a des difficultés à dire les joies d’un instant présent. A saluer également la musique de Michel Legrand – pour les nostalgiques -, et la reprise de la musique d’Ennio Moriconne, ritournelle de « Et pour quelques dollars de plus », remixée par Claude Challe, tiré de l’album « 60 seconds », d’une redoutable efficacité. Ce film, certes maladroit par la forme, touche par son absence de pathos, c’est une belle leçon de vie, si vous avez l’occasion de voir les deux premiers films de Steve Suissa, n’hésitez pas, son parcours est à suivre de près.