Un collègue me prête le dernier Dario Argento, sorti directement en DVD, « Card Player » – ce qui n’est pas bon signe -. A la mou qu’il me fait, je m’attends au pire, en plus de lire dans l’incontournable hors-série de Mad Movies consacré à « L’âge d’or du cinéma italien », la réflexion de Pascal Laugier : « … Le dernier opus de Dario Argento ressemble à un téléfilm berlinois : lumière verte-vomi qui ferait passer n’importe quel épisode de Navarro pour du Barry Lyndon, suspens inexistant, découpage plan-plan exécuté (c’est le mot entièrement au 50 mm, focale unique, circulez, y’a rien a voir !… ». Le DVD propose une VO anglaise et un making-off anémique. Qu’est-il arrivé au maître ? est-ce la reconnaissance ?, qu’il mérite tout de même – A lire le livre de Jean-Baptiste Thoret « Dario Argento, le magicien de la peur » – un cynisme redoutable, vivre sur son acquis par un dernier bâclage. Ses derniers films présentent parfois des fulgurances – « Le sang des innocents » – et son film « Le syndrome de Stendhal » me semble un film à reconsidérer. Mais ici, le niveau est encore plus bas que dans « Le fantôme de l’Opéra », c’est dire l’étendue du désastre. Tout ici est plat, l’histoire de départ assez improbable, un serial-killer joueur de poker virtuel, jouant la vie de ses victimes avec la police, assez sadique pour laisser les meurtres hors champ, ne flattant même pas nos vils instincts…

Stefania Rocca

Comme d’habitude, l’interprétation n’est pas le fort des films d’Argento, si je sauve personnellement Stefania Rocca, étonnante déjà en victime du web dans le film italien « Viol@ », mélange d’inquiétude et de grâce, avec un côté assez caméléon. Elle donne un peu d’humanité à se rôle de fliquette dévouée à son travail, composant avec un lourd vécu. Le reste de la distribution est assez banal, mais on s’amuse à reconnaître Adalberto Maria Merli en chef de la police – il était Minos dans « Peur sur la ville » (Henri Verneuil, 1975) -, mais on compatit avec l’Irlandais Liam Cunningham, en policier en exil à Rome, noyant ses démons dans l’alcool. Le scénario est assez ridicule, on n’échappe pas au cliché du médecin légiste original – sorte de Danny de Vito, chantant et faisant des claquettes ! ». Les lieux sont ici impersonnels, et Argento s’auto cite à outrance – Le pollen faisant penser aux insectes de « Phenoména ». Il semble même qu’il ait pillé le réalisme des cadavres au film de Frédéric Schoendoerffer dans « Scènes de crimes », la subtilité en moins. Un achat à éviter, le film est à voir, seulement si l’on est un fan absolu du maître, et encore uniquement pour se poser des questions, sur comment peut-on tomber si bas. On peut lui concéder cependant une volonté de renouvellement. Attendez donc la diffusion TV. Le film ressemble à l’oeuvre d’un tâcheron, copiant maladroitement les films précédents d’Argento, rajoutant ordinateurs et portables pour faire moderne.