Cette variation du mythe de Don Juan, dédiée à Jean Eustache – divine surprise -, donne ici un nouvel exemple de la maîtrise de la mise en scène de Jim Jarmush, il a obtenu lors du dernier festival de Cannes, le grand prix . Il renouvelle l’idée convenue de rencontres d’ « ex ». Don Johnston, ne pas oublier le « t », se fait quitter par sa dernière conquête, Sherry – Julie Delpy superbe -, dans broncher en regardant affalé sur son canapé le « Don Juan » d’Alexandre Korda, avec Douglas Fairbanks. Rien ne semble devoir de troubler dans sa vie très structurée, mais il reçoit une lettre intrigante laissant entendre la présence d’un enfant ignoré d’une de ses conquêtes qui ne donne pas son nom, mais qui stipule que ce dernier est à sa recherche après avoir fugué. Son voisin sympathique, un Éthiopien symphatique père d’une petite tribue, , Winston – virevoltant Jeffrey Wright, étonnant déjà dans le rôle titre « Basquiat », en 1996, dans une composition enlevée -, tente de le sortir de son empathie, en planifiant une rencontre, avec les mères potentielles.

 

Le film renouvelle le thème convenu, de l’homme désabusé et de sa quête de son identité à travers des personnes de son passé, Bill Murray, dans le registre très « underplaying » qu’on lui connaît est excellent, arrivant à nous toucher avec un personnage loin d’être aimable, il nous donne une nouvelle performance, d’homme désabusé, revenu de tout, qui se trouve une lueur d’espoir dans la vacuité de sa vie, avec l’idée d’une paternité possible. Le clan imaginaire des anciennes amies, donne l’occasion à plusieurs comédiennes de faire un petit tour, des personnages de Laura Miller – Sharon Stone, libre et sensuelle -, et sa fille Lolita ! – nabokovienne Alexis Dziena -, la bourgeoise décalée Dora – Frances Conroy, dans une autre tonalité que la série « Six feet under » et adepte de la nouvelle cuisine -, de Carmen – Jessica Lange toujours radieuse, assistée d’une Cloë Sevigny aguicheuse -, et ses hilarantes communications avec les animaux à la frustre paumée Penny – Tilda Twinston, toujours à l’aise dans la composition, après son rôle mémorable dans « Orlando » -.De la sobriété élégante de l’ensemble – les fondus au noir -, à la musique lancinante et formidable de Mulatu Astatke, qui colle parfaitement au personnage, tout ici est parfait. Louons le talent de Jim Jarmusch pour intégrer de belles personnalités comme ici Bill Murray, le film a été écrit pour lui, Tom Waits ou Roberto Begnini. Certaines critiques – le film est parfois qualifié de réactionnaire – me semblent difficilement recevables … Jarmusch décortique les rapports homme-femme, et les leurres des nouvelles possibilités de communication, tout en gardant son humour subtil. C’est toujours un bonheur de retrouver sa petite « musique » et ses petites observations – la rencontre avec la jeune fleuriste ou le jeune voyageur -.

Jeffrey Wright et Bill Murray