C’est un film à ne pas sous-estimer, malgré l’accueil assez hostile de la critique, lors de sa sortie. Étienne Chatiliez et Laurent Chouchan – réalisateur de l’acerbe « Vertige de l’amour » – ne me semblent pas porter pas de jugements sur ses personnages.  Ils observent ces électrons libres que sont Christophe et Chrystèle, deux paumés campés sur leur faculté de survivre le jour le jour, comme le plaisir immédiat de « boire une mousse »  – une réplique de Chrystèle promide à devenir culte – Chatiliez n’a pas un regard condescendant  – ce qui n’était pas l’avis de l’équipe du « Masque et la plume » sur France Inter – mais acerbe, il n’épargne les travers de personne ni des grands bourgeois, ni de ces petits malfrats.  Son film n’est pas « aimable » et nous tend un miroir peu flatteur de notre société, en appuyant où ça fait mal et dérange visiblement. Il ose jouer sans cesse sur le fil du rasoir, voir la scène des parents, joués formidablement par un couple véritable, André Wilms et Evelyne Didi en parents de Cécile de France, qui explique bien des choses sans s’appesantir. Comme toujours chez ce perfectionniste de Chatiliez, le moindre détail est juste, et les situations sont crédibles.  Cécile de France et Vincent Lindon nous offrent une poignante et drôle composition. Ils se mettent en danger et en n’essayent pas d’être plus malins que leurs personnages, ils apportent une humanité. On ressent de l’empathie pour ces deux personnages, finalement très travailleurs, au-delà d’une composition formidable.

Jacques Boudet, Martine Chevallier, Cécile de France & Vincent Lindon

Chatiliez sait laisser sa chance aux acteurs comme le couple de Jacques Boudet et Martine Chevallier, il faut voir ces personnages de notables englués dans leur médiocrité et travers. Il convient de saluer particulièrement ces deux comédiens ;  Boudet , un fidèle à l’univers de Guédiguian, était déjà chez Chatiliez en magistrat qui sort de son rôle pour proposer à André Dussollier de corriger son « têtard » dans « Tanguy ». Il  est attachant dans son rôle de mari peu dupe de la mesquinerie de sa femme. Martine Chevallier – grande carrière à la comédie Française et syndicaliste touchante dans « Violence des échanges en milieu tempéré » – nous touche par son personnage plein de faiblesses.  Le reste de la distribution est à l’avenant, Eric Berger prouve qu’il ne faut pas le cloisonner à son rôle de « Tanguy », Anne Brochet qui marque durablement des rôles désormais trop courts pour son talent – « Histoire de Marie et Julien », « Je suis un assassin » – rayonne en bourgeoise humaniste.  Il faut citer également dans les seconds rôles, Jean-Luc Porraz en banquier dépité, Erick Desmaretz en exploiteur, Pierre Vernier en mari volage ou Catherine Hosmalin en prostituée, etc… Malgré quelques faiblesses de rythme – la séquence nouveaux riches -, le ton de ce film est digne de la tradition de l’âge d’or de la comédie italienne et montre qu’Étienne Chatiliez sait se renouveler et nous surprendre toujours.

Le lien du jour :

Il convient de signaler un nouveau site et l’excellent travail de Philippe Pelletier, collaborateur des « Gens du cinéma », pour le site CinéArtiste, c’est d’autant plus remarquable qu’il est difficile de trouver des informations en Français sur le cinéma Allemand. La maquette est lumineuse et attractive. Un site à suivre de près.

Bon vent !