Jacqueline Laurent – Photo source Christian Grenier (L’Encinémathèque)

Yvan Foucart nous fait l’amitié de nous présenter l’un des hommages inédits de son « Dictionnaire des comédiens disparus » avec Jacqueline Laurent. On retrouvera également son hommage à Isabelle Corey, disparue en début d’année sur le site de l’Encinémathèque

Hommage à Jacqueline LAURENT

elle nous quitta il y aura bientôt deux ans

Dix films à son actif, mais l’on se souviendra uniquement du « Jour se lève » de Marcel Carné, dans lequel elle incarna la jolie fleuriste dont Jean Gabin, l’ouvrier sableur, tombe amoureux.

Il ne fut pas le seul. Il y eut aussi Jacques Prévert…

Elle naît à Brienne-le-Château, la cité napoléonienne de l’Aube. Le papa y est professeur et compositeur de musique à ses moments perdus, et la maman institutrice.

La guerre terminée, la famille gagne la capitale et s’installe non loin du parc de Montsouris. Elle y rencontre Sylvain Itkine, son aîné de dix ans, comédien bien connu mais qui le sera encore davantage grâce à « La grande illusion » de Jean Renoir, et de façon plus dramatique et discrète, torturé et fusillé en août 1944 par les bourreaux au service de la Gestapo de Klaus Barbie.

Jacqueline n’a pas encore dix-sept ans, mais elle est amoureuse et conséquemment ils se marient à la mairie du XIVme arrondissement, ayant comme témoin Suzanne Saillard, une artiste dramatique. Toutefois, leur union sera de courte durée.

Durant cette même année de 1935, son père, ami du réalisateur André Hugon, convainc celui-ci d’engager sa fille dotée d’une bien jolie voix pour son « Gaspard de Besse » dont la tête d’affiche s’avère être celle de l’imposant Raimu. Jacqueline s’en sort très bien au point que Hugon la rappelle plus tard pour un autre tournage aux côtés d’Harry Baur.

C’est, entre ces deux films qu’elle rencontre Jacques Prévert au quartier déjà mythique de Saint-Germain-des-Prés, le plus souvent au café qui fera beaucoup parler de lui, le  « Flore ».  Quatre années de passions partagées réuniront ces deux amants.

En 1938, sollicitée par les bureaux parisiens de la MGM, elle signe un contrat d’un an en attendant mieux et se retrouve sur les plateaux hollywoodiens pour un film dont Mickey Rooney est la grande vedette, mais aussi insupportable, avouera-t-elle.

Paris lui manque, Prévert aussi, à tel point qu’il viendra la rejoindre pour quelques semaines.

Ayant supplié Louis B. Mayer, celui-ci lui offre étonnement sa liberté, ce qui lui permet de rejoindre Marcel Carné et surtout Prévert auteur des dialogues du « Jour se lève » et qui ne fut pas étranger à l’obtention du rôle tant convoité de la jeune et jolie fleuriste.

Trois films suivront, certes d’honnête facture, mais sans plus. Puis, avec son nouvel amour, elle passera les Apennins et tournera trois films mièvres aux studios de la Cinecittà.  Et là, s’arrête la carrière artistique de Jacqueline Janin dite Laurent.

Son retour en France s’accompagnera de deux mariages. Espérons qu’ils furent heureux, car elle ne se cacha jamais d’avoir été – quelques fois – frivole, loin s’en faut.

Elle se retira dans les Alpes-Maritimes et décéda à 91 ans.

A noter que « Le jour se lève » connut une version américaine par la RKO (« The long night »), dans laquelle Henry Fonda et Barbara Bel Geddes reprirent les rôles de Gabin et de Jacqueline.

@  Yvan Foucart    (Dictionnaire des comédiens français disparus)

Avec Harry Baur dans « Sarati, le terrible »  (source « Toutlecine.com »)

Filmographie : 1935 Gaspard de Besse (André Hugon) – 1937 Sarati, le terrible (André Hugon) – 1938 Judge Hardy’s children / Les enfants du juge Hardy (George B. Seitz,) – 1939 Le jour se lève (Marcel Carné) – 1940 Un chapeau de paille d’Italie (Maurice Cammage) – 1941 Les deux timides (Yves Allégret) – 1942 L’homme qui joue avec le feu (Jean de Limur) – 1943 Addio, amore ! / Dernier amour (Gianni Franciolini) – 1945 L’abito nero da sposa (Luigi Zampa), Le vie del peccato / Le chemin du péché (Giorgio Pastina) – 1964 Le coup de grâce (Jean Cayrol et Claude Durand). Nota : on lui attribue parfois à tort des titres de la filmographie de son homonyme, dont on retrouvera les détails dans l’indispensable « Dictionnaire des films français pornographiques & érotiques », paru sous la direction de Christophe Bier.