Il y a avait eu une avant-première le 31 août, à l’UGC cité-Ciné, de « Chacun sa nuit » en présence de Pascal Arnold, Jean-Marc Barr, Lizzie Brocheré et Arthur Dupont. Le débat d’après film fut passionnant, Pascal Arnold présentant avec ardeur son film, Jean-Marc Barr se faisant plus discret, il filmait le débat pour un site internet, Lizzie Brocheré semblait un peu timide, mais Artur Dupont très énergique défendait avec superbe son rôle, avec une abnégation assez rare pour un si jeune comédien. La petite appréhension acquise par la vision d’une bande-annonce baignée par une lumière assez sombre – il y avait en fait un problème d’étalonnage sur ce format -, a très vite disparue. Pierre – Arthur Dupont – et Lucie –Lizzie Broccheré -sont frère et sœur, et vivent une adolescence insouciante formant une sorte de club fermé avec trois copains garçons. Assez libres, font de la musique rock, ils vivent sans tabous, croisant leurs histoires d’amours. Mais un jour Pierre, qui est un peu l’âme de ce groupe, ne rentre pas chez lui. Sa mère – Valérie Mairesse, à l’aise dans le registre dramatique on le sait depuis Bernard Favre et Tarkovsky -, une femme laissant un peu ses enfants autonomes -, et Lucie s’inquiètent… Même si le film n’est pas sans défaut, c’est une œuvre libre et riche, à découvrir donc au sein de notre cinéma qui en ce moment nous livre jours après jours des œuvres aseptisées. C’est un film fait à l’arraché, suite à la défection des capitaux américains pour un précédent projet de film en anglais avec Kathleen Turner et Geraldine Chaplin qui restera inabouti. En réaction, Pascal Arnold, trouve ce sujet d’après un fait divers réel, sur quelques-uns de ces « enfants terribles » chers à Cocteau, tous formidables – dont Pierre Perrier vut dans « Douches froides » -. Ce drame qui peut sembler difficilement compréhensible à  l’issue de la révélation finale. Arnold et Jean-Marc Barr qui a signé l’image à bout de bras à l’aide d’une caméra DV – il avait en main ce soir là d’ailleurs -, ont fait ce film avec la dernière énergie. Ils trouvent dans l’improvisation selon les conditions de tournage, à l’instar une certaine lumière donnant naissance à la formidable idée du générique des ombres des jeunes danseurs. Ces contraintes fut nombreuses comme celle de  trouver un comédien de dernière minute pour le rôle du jeune voyeur, suite à une désaffection d’un autre plus confirmé inquiet de cette méhode de tournage, qui semble a un curieux un mimétisme avec Barr. Citons aussi la chanson jouée à la guitarepar Arthur Dupont – décidément très doué, il est aussi chanteur et musicien -, de Georges Brassens, « Je me suis fait tout petit », superbe  moment du film, l’équipe ne savait même pas s’ils pouvaient avoir les droits de la chanson. Ils ont réalisé ce film avec énergie.

Arthur Dupont & Lizzie Brocheré

La situation est parfois confuse, ce qui est compréhensible il y avait un premier montage de 2h40. Mais ils n’ont pas hésité pas à couper le trop plein d’un montage inital de 2h40, quitte supprimer complétement le rôle de Jean-Marc Barr. Il jouait un des personnages de l’enquête -. Anecdote significative, son personnage s’appelant Philippe, Pascal Arnold lui avait proposé de coupé son rôle. La réponse du comédien fut « mais qui est Philippe ? », montrant la simplicité de l’homme. Les scènes sont alertes, les pièges d’un voyeurisme de quadragénaires sur des jeunes sont évités, il n’y a pas de complaisance. Ils aident à comprendre ses personnages, donnent parfois des pistes – l’idée du kamikaze -, mais ne surlignent et n’explique  jamais, nous laissant dans le vague, à chacun de se forger sa propre vision de l’histoire. Le réalisme ici de certaines scènes est remarquable – sans vouloir déflorer l’histoire, les scènes de la reconstitution ou de la crémation sont prenantes, et même plus impressionnantes que si on avait vu les véritables scènes du drame. L’insouciance du sexe – autre vision du sexe après « Too much flesh », face à ces jeunes n’est parfois qu’une façade face au charisme de Pierre, mais il y a ici une empathie avec les personnages. On peut prendre pour preuve le personnage de Jean-Christophe Bouvet, homosexuel partouzard et porté sur les jeunes éphèbes. Il y a toujours chez lui une perversité patente, et peut être à cause du souvenir de « La machine » de Paul Vecchiali (1977), où il jouait un pédophile, on finit par craindre son apparition au milieu du petit groupe. Mais il finit par gagner une profondeur, il faut le voir parler avec indulgence à la jeune Lucie, du piège ourdi par son ex-femme, il finit par donner une grande dignité à son personnage. A noter que Jean-Marc Barr et lui se connaissent depuis 1980. L’après débat dans le hall de l’UGC fut très intéressant en retrouvant la modestie de Lizzie Brocheré, l’enthousiasme d’Arthur Dupont, l’énergie de Pascal Arnold. C’était très plaisant de converser ensuite avec Jean-Marc Barr, alros plus disert. On peut retrouver une absence patente d’ego, une volonté de ne pas tomber dans les pièges de la starification. C’était passionnant de l’entendre, toujours souriant, sur les États-Unis, il est en fait très déçu par son pays natal, même s’il va retrouver son père souvent. Il fallait l’entendre parler du projet inachevé de Lars Von Trier tourné sur 6 ans – le tournage du film devait se dérouler sur plusieurs années, belle idée… – tout en rendant hommage à son mentor-. Loin de se cantonner dans l’idée du dogme du premier film de Jean-Marc Barr « Lovers », la collaboration de Pascal Arnold et Barr, après « Too mush flesh » et « Being light » se révèlent cohérente, exigeante, inventive et salutaire. Une sincérité à saluer.