Claude Piéplu dans « Les français parlent aux Shadoks »
 
Mort d’un très grand, Claude Piéplu, à l’âge de 83 ans. On connaissait son parcours atypique, il était employé de banque sous l’occupation, avant de prendre des cours auprès de Maurice Escande. Il devait ensuite rejoindre au théâtre la compagnie Renaud-Barraud. Il aimait à rappeler sa première apparition au cinéma dans « D’hommes à hommes » (Christian-Jaque, 1948), où il se faisait une joie de se retrouver sur un écran, avant de découvrir son rôle, un grand blessé méconnaissable car recouvert de bandelettes. Au cinéma, il avait fait preuve d’une grande exigence, préférant faire des créations pour le théâtre contemporain, plutôt que d’être utilisé dans le tout venant du cinéma comique franchouillard. Il a toujours construit avec ue grande habilité et un humour grinçant. On se souvient de sa célèbre collection de pots de chambre ! – ses personnages, avec un grand sens de l’observation : « Sans m’en rendre compte, j’accumulais les observations et déposais dans mon subconscient la provision de modèles qui me serviraient plus tard à colorer des personnages ». (1) Luis Buñuel a utilisé avec inventivité, son physique moyen est idéal pour jouer des ganaches ou des notables. Impossible de ne pas songer à son rôle de colonel, qui fait des essais militaires surprises, faisant une intrusion brutale dans un dîner bourgeois, avant de vanter les vertus de la majiruana dans « Le charme discret de la bourgeoisie » (1972), ou du policier se réjouissant que le couple joué par Jean Rochefort et Monica Vitti amène sur place leur petite fille qu’ils déclarent pourtant disparue. Il faut entendre Piéplu déclarant « Vous avez bien fait de l’amener, ça va aider pour les recherches », dans « Le fantôme de la liberté » (1974). On le retrouve souvent en notaire, celui fêtard de « La belle américaine » (Robert Dhéry, 1961), celui escroqué par Robert Lamoureux dans « L’apprenti-salaud » (Michel Deville, 1976), ancien combattant et combattu, éternel râleur, dans « Le diable par la queue » (Philippe de Broca), militaire misogyne dans « Calmos » (Bertrand Blier, 1975), le voisin râleur et déplaisant de Roman Polanski, dans « Le locataire » (Polanski, 75), juge collaborateur dans « Section Spéciale » (Costa-Gavras, 1974), promoteur escroc dans « Ils sont grands ces petits » (Joël Séria, 1978) – il y forme un duo formidable avec Jean-François Balmer -, beaucoup de figures odieuses et  antipathiques, qu’il finit par rendre sympathique par son grand talent. Mais il peut être plus humain, comme en résistant anglais, rendant parfaitement le flegme britannique sous l’occupation dans « Gross Paris » (Gilles Grangier, 1973), en barde breton auto-stoppeur et déjanté dans « Les galettes de Pont-Aven » (Joël Séria, 1975), en époux de Micheline Presle, restant auprès d’elle quand elle devient folle dans une guerre civile dans « Casque bleu » (Gérard Jugnot, 1993), professeur goguenard dans « Le paltoquet » (Michel Deville, 1986), commissaire sentencieux flanqué de Clovis Cornillac dans « Suivez cet avion » (Patrice Ambard, 1989) ou le druide Panoramix dans « Astérix et Obélix contre César » (Claude Zidi, 1998). A la télévision, Jean-Michel Ribes – avec Roland Topor – lui a donné de grandes occasions de nous régaler de son humour décalé, dans la série « Merci Bernard » (1982) ou dans « Palace » (1988), où il était l’inoubliable homme aux clefs d’or. A la télévision il a marqué durablement la série des « Shadocks », œuvre singulière de Jacques Rouxel, par sa voix caractéristique. Claude Chabrol lui a donné un de ses meilleurs rôles en homme politique corrompu, et trompé par sa femme Stéphane Audran dans « Les noces rouges » (1972), et on se souvient avec émotion de son couple avec Micheline Presle, à nouveau dans « Beau temps mais orageux en fin de journée » » (Gérard Frot-Coutaz, 1985), où il ne cessait de se chamailler avec elle, pour n’importe quel prétexte comme celui de l’achat d’un poulet. Claude Miller lui a donné deux rôles probants dans « Dites-lui que je l’aime » (1977), et surtout l’inoubliable directeur de colonies de vacances dans « La meilleure façon de marcher » (1975). On lui devait deux ouvrages « Il faut croire aux éléphants blancs » (Éditions Archimbaud) et « Qu’en est-il du comique ? » (Éditions Mallard), parus tous deux en 1999. Le cinéma ne l’a pas honoré comme il aurait mérité, mais il a marqué durablement ses rôles. Son humour corrosif va beaucoup nous manquer, de même le citoyen qui menait une réflexion salvatrice sur les dangers du nucléaire. Bibliographie : (1) Jacques Mazeau & Didier Thouart « Les grands seconds rôles du cinéma français » (Pac, 1984) – Jacques Valot & Gilles Grandmaire « Stars deuxièmes » (Édilig, 1989). 
 
 
 
 
Filmographie :  1948  D’homme à hommes (Christian-Jaque) – 1956  Adorables démons (Maurice Cloche) – 1958  Suivez-moi jeune homme (Guy Lefranc) – Du rififi chez les femmes (Alex Joffé ) –  1960  La Française et l’amour [épisode « L’adultère »] (Henri Verneuil) – L’affaire d’une nuit (Henri Verneuil) –  Le caïd (Bernard Borderie) – 1961  Un nommé La Rocca (Jean Becker) – La belle américaine (Robert Dhéry & Pierre Tchernia) – La chambre ardente (Julien Duvivier) – 1962  Le diable et les dix commandements  [épisode « Luxurieux point ne seras » (Julien Duvivier) – Comment réussir en amour (Michel Boisrond) – Le temps des copains (Robert Guez) – 1963  Cherchez l’idole (Michel Boisrond) – Faites sauter la banque ! (Jean Girault) – 1964  Un drôle de caïd / Une souris chez les hommes (Jacques Poitrenaud) – Les pieds dans le plâtre (Jacques Fabbri) – Les copains (Yves Robert) – Le gendarme de Saint-Tropez (Jean Girault) –  1965  La bourse et la vie (Jean-Pierre Mocky) – 1966  L’homme à la Buick (Gilles Grangier) – Si j’étais un espion (Bertrand Blier) – 1967  L’écume des jours (Charles Belmont) – Diaboliquement vôtre (Julien Duvivier) – La prisonnière (Henri-Georges Clouzot) – 1968  Le diable par la queue (Philippe de Broca) – La coqueluche (Christian-Paul Arrighi) – 1969  Hibernatus (Édouard Molinaro) – Clérambard (Yves Robert) – Le pistonné (Claude Berri) – Et qu’ça saute ! (Guy Lefranc) – 1971  Le drapeau noir flotte sur la marmite (Michel Audiard) – 1972  Sex shop (Claude Berri) – Le charme discret de la bourgeoisie (Luis Buñuel) – Elle court, elle court, la banlieue (Gérard Pirès) – Jean Vilar, une belle vie (Jacques Rutman, documentaire) –  Les noces rouges (Claude Chabrol) – 1973  Défense de savoir (Nadine Trintignant) – Les aventures de Rabbi Jacob (Gérard Oury) – Prêtres interdits (Denys de La Patellière) –  Gross Paris (Gilles Grangier) –  Par le sang des autres (Marc Simenon) – La gueule de l’emploi (Jacques Rouland) – Un nuage entre les dents (Marco Pico) – 1974  Le fantôme de la liberté (Luis Buñuel) – La moutarde me monte au nez (Claude Zidi) –  Section spéciale (Costa-Gavras) –  1975  C’est dur pour tout le monde (Christian Gion) – Les galettes de Pont-Aven (Joël Séria) – La meilleure façon de marcher (Claude Miller) – Calmos (Bertrand Blier) – Le locataire (Roman Polanski) – L’ordinateur des pompes funèbres (Gérard Pirès) – 1976  L’apprenti salaud (Michel Deville) – 1977  Dites-lui que je l’aime (Claude Miller) – Le mille-pattes fait des claquettes (Jean Girault) – Et vive la liberté ! (Serge Korber) – 1978  Chaussette surprise (Jean-François Davy) –  Vas-y maman ! (Nicole de Buron) – Le sucre (Jacques Rouffio) –  Le pion (Christian Gion) – Ils sont grands, ces petits (Joël Santoni) – 1984  Marie la nuit (Jean-Claude Tourneur) – 1985  La galette du roi (Jean-Michel Ribes) –  Beau temps mais orageux en fin de journée (Gérard Frot-Coutaz) – 1986  Le paltoquet (Michel Deville) – 1989  Après après-demain (Gérard Frot-Coutaz) – Suivez cet avion (Patrice Ambard) – 1993  Casque bleu (Gérard Jugnot) – D 14 (Frédéric Blasco, CM) – 1994  Les faussaires (Frédéric Blum) – 1995  Fallait pas ! (Gérard Jugnot) – 1996  Les paradoxes de Buñuel (Jorge Amat, documentaire) –  1997  Chapeau bas (Hervé Lozac’h, CM) –  1998  Astérix et Obélix contre César (Claude Zidi). Nota : il n’apparaît pas dans « Los pianos mecánicos / Les pianos mécaniques » (Juan Antonio Bardem, 1964) et « La maison » (Gérard Brach, 1970).Voxographie succincte : 1963  Égypte, un présent du fleuve (Jacques Brissot, documentaire, voix du récitant) – 1964  Pas question le samedi (Alex Joffé, voix de M. Cohen) – 1968/2000 Les shadoks (Jacques Rouxel, TV) – 1979  Le roi et l’oiseau (Paul Grimault, dessin animé, voix) – 1982  Le sang (Jacques Rouxel, CM, voix du récitant) – 1995  Un siècle d’écrivains : Henri Michaux (Alain Jaubert, voix du récitant, TV) –  1999  Chicken run (Id) (Peter Lord et Nick Park, dessin animé, voix française). 
 
 
Claude Piéplu dans « Maigret : Cécile est morte »
 
 Télévision (notamment) : 1953  Le mal de Marie (Albert Riéra) – 1958  Misère et noblesse (Marcel Bluwal) – 1959  Le bon numéro (Marcel Cravenne) – 1960  Théâtre de la jeunesse : Le prince et le pauvre (Marcel Cravenne) – Les mystères de Paris (Marcel Cravenne) – 1961  Théâtre de la jeunesse : Don Quichotte (Marcel Cravenne) – 1962  Théâtre de la jeunesse : Gargantua (Pierre Badel) – 1963  Une lettre perdue (Jean Prat) – Siegfried (Marcel Cravenne) – Théâtre de la jeunesse : L’enfance de Thomas Edison (Jean-Christophe Averty) – Théâtre de la jeunesse : Jean Valjean (Alain Boutet) – 1964  Théâtre de la jeunesse : Les aventures de David Balfour (Alain Boudet) – Théâtre de la jeunesse : Le matelot de nulle part (Marcel Cravenne) – Théâtre de la jeunesse : La sœur de Gribouille (Yves-André Hubert) – 1965  Bastos le hardi (Michel Ayats) – Les Boulingrins (François Gir, CM) – En votre âme et conscience : La canne à épée / L’affaire Caumartain-Sirey (Marcel Cravenne) –  1966  En votre âme et conscience : La mort de Sidonie Martens (Jean-Jacques Cornu) – La surprise de l’amour (Robert Crible) – 1967  La guerre de Troie n’aura pas lieu (Marcel Cravenne) – 1968  Théâtre de la jeunesse : Ambroise Paré : Les défaites (Éric Le Hung) –  Candide (Claude Santelli) – Les fiancés de loches (Pierre Badel) – 1969  Agence intérim : Quiproco (Marcel Moussy) – Que ferait donc Faber ? (Dolorès Grassian, série TV) – 1970  Au théâtre ce soir : Les joyeuses commères de Windsor (Pierre Sabbagh) – Le Noël de madame Berrichon (François Chatel, divertissement) – 1971  Au théâtre ce soir : Misère et noblesse (Pierre Sabbagh) – 1972  La fin et les moyens (Paul Paviot) – 1973  Témoignages : L’homme assis (Jean-Marie Périer) – 1974  Soirée Courteline : Les Boulingrin (Jeannette Hubert) – 1976  Le rabat joie (Jean Larriaga) – 1979  Chère Olga (Philippe Condroyé ) – 1980 Histoire contemporaine (Michel Boisrond) – Chouette, chat, show (Jacques Sanym, variétés) – 1981  L’oiseau bleu (Gabriel Axel) – La guerre de Troie n’aura pas lieu (Raymond Rouleau) – Le petit théâtre d’Antenne 2 : La bataille navale (Jean-Michel Ribes) – 1982  Merci Bernard (Jean-Michel Ribes) – Emmenez-moi au théâtre : Un habit pour l’hiver (Pierre Badel, captation) – 1983  Parlons français (Eugène Ionesco) – Allô Béatrice : Charmand week-end (Jacques Besnard) – 1984  Le petit théâtre d’Antenne 2 : Parlons français (Jeannette Hubert) – 1988  Un coupable (Roger Hanin) – Palace (Jean-Michel Ribes) – 1990  Un film sur Georges Pérec : Te souviens-tu de Gaspard Winckler ? – Vous souvenez-vous de Gaspard Winckler ? (Catherine Binet, récitant présent à l’image) –  Années de plumes, années de plomb (Nicoles Ribowski) – 1994  Le silence du cœur (Pierre Aknine) – Maigret : Cécile est morte (Philippe de la Patellière) – Le groom (Marc Simenon) – 1995 Le voyage de Pénélope (Patrick Volson) – Un amour impossible (Patrick Volson) – 1996  Entre terre et mer (Hervé Baslé ) – Les sciences naturelles impertinentes (Jean-Louis Fournier). Remerciements à Armel de Lorme.