Restons en compagnie de la charmante Cécile de France avec l’avant-première euphorisante – première de la tournée Province – à l’UGC Ciné Cité Bordeaux, du film de Cédric Klapisch « Les poupées russes », qu’elle présentait avec Cédric Klapisch et Romain Duris. Dans la série des – rares – suites réussies, ce film, succédant à « L’auberge espagnole » est digne d’ y figurer, à la manière du « Parrain II », « La fiancée de Frankenstein » ou « Nous irons tous au Paradis ». L’univers de Cédric Klapisch y est toujours aussi foisonnant, et on ne peut que louer son aptitude à se renouveler à chaque nouveau film. Il étonne par son inventivité constante, sa manière lumineuse de filmer « Paris », « Londres » et « Saint-Petersbourg », comme trois personnages à part entière du film. On retrouve les personnages quatre ans après, à travers le regard de Xavier – fantastique Romain Duris -, personnage central de ce film choral. Il vivote écrivant pour une bluette télévisée qui s’avère être une version ridicule de son propre parcours amoureux. Les clichés volent en éclats, Klapisch mettant un recul burlesque sur les difficultés de notre quotidien. Duris confirmait l’exigence de  Klapisch, qui avait refusé de tourner « Astérix ». C’est une scène de la vie quotidienne qui a été le catalyseur de cette suite. Un jeune marié, un peu ivre et pris de panique,  pleurait dans les toilettes d’un restaurant… On retrouve cette scène emblématique du film. C’est un grand plaisir de découvrir un film, sans en avoir aucun écho au préalable. Le film est à la hauteur de l’attente, visible ce soir là du public, qui salua par une « standing-ovation » méritée ce film jubilatoire. Le réalisateur, a 43 ans a bien évalué l’inquiétude – il disait « j’ai eu 13 ans pour réfléchir sur mes 30 ans », l’air du temps de jeunes trentenaires inquiets devant les incertitudes de la vie. Il analyse subtilement  – en vrac – les relations amoureuses, la précarité d’un travail subi, la mondialisation, l’état de la planète laissé en héritage par les post-soixantuitards désabusés. C’est donc un premier semestre déterminant pour lui, après avoir été à l’auteur d’un très grand rôle dans « De battre son cœur s’est arrêté » de Jacques Audiard, il confirme son assurance mêlée de légèreté, il était un peu dépassé, hier soir de son nouveau statut d’idole, face à des fans empressés. Acteur fétiche et complice de Klapisch, il avait retrouvé facilement son personnage, par la force de la mise en scène, puisqu’il n’avait pas le temps de se préparer entre deux tournages. Petite anecdote, le réalisateur aimant à donner des indications de dernières minutes, Romain lui a gardé une petite rancune. Il avait une longue blague à apprendre la veille pour le ledemain, en espagnol !, pour finir sur la table de montage. Audrey Tautou, mutine, amuse par son statut d’ex, qui garde toujours une importance – vaste programme pour une situation pas toujours facile à vivre – . Elle passe de l’inquiétude à l’amusement et se retrouve perdue lorsque le père de son jeune fils le récupère le temps d’un week-end. Kevin Bishop amoureux d’une danseuse russe, effrayé des perspectives de sa nouvelle vie en Russie, et Kelly Reilly en amoureuse transie et sensible participent à la réussite du film.

Cécile de France et Romain Duris dans « Les poupées russes ».

Cécile de France retrouve son rôle – pour lequel elle avait gagné un César de la meilleure révélation, en lesbienne complice, et brûlant la vie, elle retrouve ce rôle fort de femme libre et maladroite quant il s’agit de figurer en fiancée pour faire plaisir au grand-père, un grand moment cocasse.  Le reste de la distribution est à l’avenant de Carole Franck – la prof de « L ’esquive » -, en productrice qui prend Xavier en sympathie, Pierre Gérald en grand-père attachant de Xavier en harmonie avec son grand âge, la magnifique Aïsa Maïga – « L’un reste, l’autre part – en vendeuse amusée, Bernard Haller en éditeur efficace, Olivier Saladin en bourgeois bohème amoureux de la mère de Xavier, jouée par Martine Demaret, Lucy Gordon en mannequin entre fascination et étrangeté, etc… Et il y a le fidèle Zinedine Soualem, personnifiant « Monsieur tout le monde », inspirant des situations de comédie à Xavier. Saluons ce comédien, toujours drôle et efficace quelle que soit la durée de ses rôles. C’était un bonheur pour moi de pouvoir rediscuter un peu, une troisième fois avec le modeste Cédric Klapisch et de retrouver après « La confiance règne » la charmante et souriante Cécile de France, après sa performance cannoise, elle voit cette tournée promotionnelle comme des vacances !. Nous nous reconnaissons dans ces personnages encombrés mais bien vivants, et l’on ressort de ce film avec une énergie formidable, qui parle superbement d’amour, exercice périlleux par excellence. Un grand et beau moment de cinéma !