Photo de Paul Vecchiali par Oliver Roller
Bon ce n’est pas Maurice Lamy dans la publicité d’Orangina rouge, mais il ne faut pas l’énerver : L’analyse du cinéaste Paul Vecchiali, une liberté de ton (polémique) assez rare pour être signalée :
LIBÉRATION
Week-end : La profession du cinéma a politisé le vote, mais multiplié les injustices.
Césars, tu me fends le coeur par Paul Vecchiali samedi 05 mars 2005
Paul Vecchiali cinéaste.
Convivial ne veut pas dire consensuel ! Si le vote, cette année, a été politique, faut-il s’en réjouir ? Ou bien doit-on constater que le dernier maillon ( le faible ? ) est tombé ? Celui du coeur ou de l’enthousiasme spontané. De tout temps, il y avait cette règle : le nombre d’entrées (parisiennes, cela va de soi) a régi les votes. Au moins, c’était clair. Cependant, une politique mal comprise n’est-elle pas pire qu’une politique injuste ?
Renvoyer les Choristes au solfège peut sembler une attitude noble de la part de la «Profession» : film racoleur qui a dit «sombre merde» ? plus sombre que merdeux, appel (discret) à la délation et au masochisme ( ce qui aurait pu être intéressant, sans le vernis de la démagogie ), avec un Jugnot dévitalisé ( pour faire sobre ? ) aux côtés d’un Berléand délirant, toujours aussi peu charismatique ( qui nous délivrera ? ). Ignorer ou presque ce (trop) Long dimanche de fiançailles, débordé par les effets spéciaux (prière de revoir les Croix de bois de Raymond Bernard, 1932 !), reste salutaire : voir les attendus précédents sur ce film «français».
Au profit de quoi cette charge «émotionnelle» a priori salubre ? Quand la mer monte ? Oui, bon, c’est mignon et sympathique… Quant à l’autre, accablé d’honneurs, cette Esquive chanceuse, je ne vois qu’une démagogie maladive pour distinguer ce film formaté ( à l’envers, mais formaté quand même ) et récompenser cette jeune actrice qui cabotine en éventail, fausse beurette, jolie mais disgracieuse, investie mais incontrôlée, ce n’est pas rendre service à une débutante dont le talent pourrait se révéler ailleurs, et plus justement.
Et puis, les «oubliés»… Je ne comprends pas, mais pas du tout alors, puisqu’il s’agissait cette année de revenir aux «petits films», soit donc aux films d’auteur, l’absence aux nommés de bijoux tels que l’Equipier, Malabar Princess, Wild Side, entre autres, ni encore moins que Grégory Dérangère, indiscutable (mais le dialogue reste ouvert) prince de nos comédiens, notre Cary Grant, ait été éliminé au profit du baba cool Torreton qui joue tout de la même façon ( dialectique, connais pas ! ) Pas davantage, je ne comprends qu’on ait zappé le très fin et très rusé Edouard Baer, si personnel, évitant les excès avec une maestria redoutable, peut-être alors trop élégant ?
Question de goût ? Justement ! De goût sans préméditation, sans volonté politique, cette politique qui a poussé le festival de Cannes à récompenser l’ignoble film de Michaël Moore…
Et cette cérémonie ringardissime censée nous restituer la grande Adjani, revenue sur terre pour l’occasion, soeur jumelle de Monica Bellucci drivée par «Gag» Elmaleh, plus patate qu’épatant cette année ( ce n’est pas de sa faute car il reste classieux, même dans le pire ), cérémonie essoufflée, pataugeante ! Où l’on pousse au crime de la vulgarité pour tenter d’éviter l’ennui. Toutefois, l’ennui demeure et la vulgarité fait couche…
Petite remarque en forme d’info : c’est la troisième année, et non la première, que se pratiquent les livraisons de DVD aux votants.
Pour terminer par ce qui me semble le plus grave : plus d’hommages aux disparus. On le sait, la mémoire s’efface. Pourtant, dans un système où la hiérarchie ( amour, gloire et beauté ) est la base industrielle de cette Profession, le seul moment d’égalité est bien celui-là. La mort nivelle tout et permet la re-connaissance… Faut-il perdre même ça ?
De la part d’un votant qui se flatte de n’être pas juge et parti !
Il y a un excellent portrait de lui dans Télérama N°2880, du 26 mars 2005. A l’image du film « Corps à coeur », il aurait pût très bien être un cinéaste populaire.
François Berléand que je connais un peu, y voit de l’aigreur (je l’avais informé de cet article rageur). C’est vrai qu’il peine d’ailleurs son film « A vot’ bon coeur » diffusé pourtant à la « quinzaine » à Cannes en mai 2005. On attend d’ailleurs son dictionnaire des cinéastes français des années 30.
Mais on ne peut lui donner tort sur tout :
Pour les « Césars » : Il a toujours un problème avec les disparus de l’année dans cérémonie inventée par Georges Cravenne. On a vu cette année des noms apparaîtrent de manière presque subliminale avec une photo de plus pour Jacques Villeret, c’est peu ( un Robert Dhéry méritait un hommage particulier par exemple ) et surtout illisible. C’est donc avec beaucoup d’émotions que l’on a retrouvé l’hommage au producteur Humbert Balsan par Gilles Porte & Yolande Moreau.
Cette manière de faire me semble indigne de cette institution, c’est peut-être une manière d’éviter de renouveler les gaffes de ces dernières années comme confondre le cinéaste Jacques Richard avec le comédien homonyme, ( la mère du cinéaste avait eu un choc de voir l’annonce de son fils mort ! )… ou de parler de la disparition de Marty Feldman 15 ans après !, (je ne sais plus quelle année). Très souvent du parfait n’importe quoi , sans parler des rituelles omissions chaque année .
Il y a un site de cinéma qui rend hommage aux comédiens décédés Les gens du cinéma grâce aux portraits d’Yvan Foucart ( citons dernièrement Henri Poirier, Henri Marteau, Roger Ibanez, Simone Simon, Pierre Trabaud, etc… ) La cérémonie des Molière est elle beaucoup plus chaleureuse et rigoureuse à ce sujet.
Il a raison d’évoquer le comédien Grégori Dérangère : Par les hasards de la vie , j’avais assisté à quelques jours du tournage ( sur Bordeaux ) du film de Jean-Paul Rappeneau en 2002 « Bon voyage ». J’étais dans un coin lors de la scène au jardin public où Frédéric Auger ( Derangère ), cinglant lance à Viviane Danvers (Isabelle Adjani) qu’elle terminera seule à se regarder dans la glace ( réplique assez terrible finalement ). Le comédien m’avait impressionné par son intensité. Je le lui avais dit lors d’une avant-première de « L’équipage » où il était avec Philippe Lioret et la délicieuse Anne Consigny. Il m’avait donné son état civil pour que je fasse une fiche ( avec une photo de Philippe Schroeder ) sur le site des « gens… » :Les gens du cinéma . Modeste, ce comédien (excellent dans « 30 ans » de Laurent Perrin) est bien comme le disait Jean-Paul Rappeneau, l’équivalent français de James Stewart.