Évidemment, si vous avez vu comme moi le « Marie-Antoinette », made in – qualité – France, de Jean Delannoy (1955), avec Michèle Morgan dans le rôle titre qui semblait sortir d’une lobotomie, vous ne craignez pas le pire quand vous entrez voir cette nouvelle version. Sofia Coppola se révèle en trois films, être la cinéaste de l’insatisfaction, regard blasé de ceux dont la découverte d’une ville comme Tokyo laissent de marbre – « Lost in translation » (2004) -. C’est une vision pas très aimable des choses, à contre-courant, et on finit pourtant par s’attacher à ses personnages – Kirsten Dunst, Bill Murray, pour ses deux premiers films -. On droit donc ici à la quasi-intégralité de la famille Coppola, le cousin Jason Schwartzman, pourtant très inspiré chez Wes Anderson, qui nous livre un Louis XVI apathique, le père Francis comme producteur exécutif, et même le frère Roman – qui prouve comme réalisateur du sinistre CQ en 2001, que le talent n’est pas forcément héréditaire -, comme réalisateur de seconde équipes. Sofia Coppola, c’est un petit peu le syndrome de la pôôôvre petite fille riche, blasée le gendre, mais il serait stupide de ne pas reconnaître son grand talent comme cinéaste en raison de son pedigree écrasant. On pouvait craindre la vision d’une Marie-Antoinette – Kristen Dunst à nouveau naïve et désinvolte –parishiltonisée, car le film est non conventionel, on retrouve des anachronismes assumés à l’instar de fameuse paire de « Converse » mauve ! Mais comme disait Dumas « Il est permis de violer l’histoire à condition de lui faire un bel enfant. », bon, ici il a une drôle de bouille, mais au moins il tient sur ses jambes. La reconstitution peine un peu, nous ne sommes ni dans la subtilité d’un Milos Forman, ni dans les délires baroques d’un Ken Russel – une des références de la cinéaste, de même que… David Hamilton ! -. La reconstitution est assez stylisée, elle utilise au mieux le talent de la costumière Milena Canonero – son travail dans le « Barry Lindon » de Kubrick était prodigieux, qui a superbement mélangé les époques et les influences. Reste qu’elle est habile à traduire pour traduire, le déracinement, les rites très lourd de la court, menés par une Judy Davis – d’origine… australienne -,surprenante comtesse de Noailles. Le ridicule de ces cérémonies d’initiations est bien traduit. La théâtralité d’un protocole étouffant est habilement mise en scène, de la manière pour Marie-Antoinette de devoir se défaire de son vécu autrichien dans un passage symbolique entre deux frontières, à la manière d’une transfuge dans un film d’espionnage. Mais la réalisatrice semble ensuite trop confiante de son art, elle laisse les redites s’installer, c’est un peu le portrait d’une Madame Bovary qui pourrait assumer ses fantasmes, mais qui continuerait à végéter cependant. S’il y a quelque chose que l’on puisse partager avec elle, c’est bien un certain ennui, devant quelques scènes conventionnelles bousculées cependant par quelques anachronismes et quelques fulgurances.