On attendait légitimement beaucoup de Raffy Shart, qui nous avait déjà régalé d’un monument de cornichonerie abyssale en signant la captation de sa pièce « Ma femme s’appelle Maurice », mis en scène de manière épileptique par Jean-Marie Poiré, avec le duo Chevallier/Laspallès de sinistre mémoire. C’est rien de dire que l’on atteint ici des sommets. « Incontrôlable », c’est le parangon de la nouvelle comédie française ramenant Max Pécas au niveau d’Eisenstein… On donne une fortune à un comique télévisuel qui a un petit tempérament, pour qu’il dégueule en gros plan, et on lui adjoint, par précaution, quelques vieux de la vieille aguerris. Dans la nouvelle génération des comiques, c’est ici Michaël Youn qui s’y colle, il y est d’ailleurs aussi drôle que Zeppo Marx – le moins connu des frères Marx -. A son actif, il mouille beaucoup sa chemise, risque sa santé en prenant 18 kilos, en désespoir de cause. Le film s’essouffle en seconde semaine, l’ayant vu hier dans une des plus petites salles de l’Ugc local, aux 3/4 vide, à côtés d’ados tellement passionnés qu’ils en tripotaient leurs portables – test d’une redoutable efficacité, quand on atteint des sommets de vacuité. Georges Pal – allusion au cinéaste presque homonyme, mais le cinéaste n’en retient que le nom pour la pâtée pour chien -, et un scénariste en péril, prenant son corps pour « une poubelle », et faisant le pied de grue devant un producteur véreux – Patrick Timsit, ami du cinéaste, co-scénariste de « Quasimodo del Paris », pas inspiré -. Ce dernier privilégie un auteur capricieux à succès – Jackie Nercessian, amusant -, et préfère que Georges signe un scénario dans le style de « Quand vous avez vu la bande-annonce, vous avez vu le film ». Petit moment de lucidité avant de subclaquer cinématographiquement lamentablement par la suite, car c’est exactement le cas ici. Donc le corps de Georges se rebelle avec la voix de Med Hondo – on y reviendra -, mais hélas on est plus proche du cucul que du trash, visiblement inspiré des comédies américaines à la mode – les frères Farrelly, comme « Fous d’Irène », lamentablement pillé ici, on compatit d’ailleurs avec le comédien Christophe Fluder, dans le rôle de l’agent Franky -. Ca va être très difficile de faire pire cette année, mais vu le niveau de la production française, on ne désespère pas trop.

Michaël Youn, Françoise Bertin & Thierry Lhermitte

Non content d’aligner les gags consternants, vidés de leurs substances par une mise en scène inexistante, Raffy Shaft, cite allégrement et nominativement Billy Wilder et Ernst Lubisch – quel intérêt ? -, et nous offre une des parodies les plus consternantes de la création, avec celle rougéifiée de « 8 et demi » de Fellini, avec Youn en Marcello. Pathétique ! On tombe tellement dans les limbes de l’imbécillité que ça en devient plus jubilatoire que les comédies traditionnelles plus soignées comme, « Un ticket pour les Bronzés 3 ». Dans ce carnage les comédiens font ce qu’ils peuvent, Hélène de Fougerolles, qui doit se demander ce qu’elle fait là, fait de gros efforts pour garder sa dignité – elle est pourtant probante dans le seul gag drôle du film, celui de la danse contre son gré -, Thierry Lhermitte Preskovicquifié en catho-chasseur,  et grand habitué des nanars Louisbeckeriens, nous  arrache quelques sourires, Cyrielle Clair garde sa classe habituelle dans ce naufrage, mais Hippolyte Girardot est absolument désolant  et poussif dans sa pitoyable reprise de son rôle azimuté de « Rois et reine ». Reste quelques seconds rôles comme Jo Prestia en videur vidé, Gilles Gaston-Dreyfus en médecin allumé, Urbain Cancelier en producteur perplexe, Jacques Ciron en militaire outragé, Éric Le Roch en ordonnateur des pompes funèbres dépassé, etc… Et il y a  la pauvre Françoise Bertin qui reprend son rôle de mémé « yoyotante » d’ « Une journée de merde » de Miguel Courtois, elle est ici particulièrement malmenée. Cette actrice fétiche d’Alain Resnais sombre ici en s’amusant visiblement, mais bonjour la chute !

 Med Hondo

Le seul qui s’en sort ici, c’est Med Hondo, dont le talent vocal dans le corps de Rex est formidable. Je vous recommande le livre d’entretiens à son sujet « Med Hondo, un cinéaste rebelle, par Ibrahima Signaté » (Présence africaine, 1994). C’est un réalisateur mauritanien,  exigeant qui a réalisé  6 films de « Soleil O » (1969) à « Watani un monde sans mal » (1996), qui est sous utilisé comme comédien pour cause d’ostracisme anti-doublage, alors qu’il était drolatique dans « Antilles sur Seine » de Pascal Légitimus. Homme lucide, engagé et qui a un humour constant, on ne peut que lui tirer notre chapeau, puisque c’est le seul à tirer son épingle du jeu. Un talent rare !