Avant-première, jeudi 8 février à l’UGC-Cité Ciné, du film de Pierre Jolivet « Je crois que je l’aime » en sa présence et celle de Vincent Lindon. On peut remarquer de plus en plus de comédies « auteuristes », comme par exemple Catherine Corsini, qui vient d’en alterner deux, faute de pouvoir sans doute alterner les genres. Pierre Jolivet avait signé un film plus personnel avec « Zim & co » qui n’a hélas pas eu le succès escompté. Il s’entoure donc ici de fidèle, comme avec François Berléand – c’est leur neuvième signe ensemble -, Albert Dray et donc Vincent Lindon. Le scénario co-écrit avec Simon Michaël est habile. Un riche et suspicieux industriel, tombe amoureux d’Elsa, une céramiste au caractère bien trempé, qui réalise une fresque dans le hall de son entreprise. Lucas est très blasé depuis sa dernière rupture sentimentale. Il lutte contre son ancienne femme partie aux États-Unis, pour récupérer la garde de son fils. L’entourage de Lucas – un œil sur les actions de la société – ne souhaite pas retrouver ce type de situation, car ils ont beaucoup à perdre en cas de déprime. Sa société peut péricliter très vite si le propriétaire des lieux se laisse envahir par la morosité qui le neutralise complètement. Lucas décide alors de faire suivre la jeune femme par son responsable de la sécurité, Roland Christin joué par François Berléand. Il est excellent comme à l’accoutumée, je pense ne plus trop être objectif, mais les rires du public qu’il déclenche couvrent même certaines répliques du film. Christin, tendance pervers-pépère, a un système d’écoute très perfectionné, Simon Michaël ayant appartenu aux Renseignements généraux, a dû se servir de son expérience, pour l’écriture de ce personnage. Le moindre détail est ainsi décortiqué, par cet espion qui se vante d’avoir fait ses armes sous François Mitterrand – allusion des Irlandais de Vincennes, un cadre de l’ancien président est sous son bureau -. Pierre Jolivet signe ici une charmante comédie, montrant très justement la rencontre de deux êtres et la peur de tomber amoureux très dans l’air du temps. Il égratigne les arcanes du pouvoir, et la tendance au repli sur soi bien dans l’air du temps. Sandrine Bonnaire rayonne particulièrement, il est vrai que mis à part « Mademoiselle » de Philippe Lioret, on ne l’a que très peu vue dans le registre de la comédie. Il y a une évidence que son talent et son tempérament sont idéals pour s’épanouir dans ce type de films. Lindon au jeu inquiet arrive à nous rendre son personnage, peu sympathique, finalement attachant.
Sandrine Bonnaire & Vincent Lindon
Kad Mérad – qui forme un couple très probant quoi qu’inattendu avec la belle Hélène de Saint-Père -, en ami confident est toujours aussi réjouissant. On retrouve aussi quelques seconds rôles, comme le fidèle Albert Dray, chauffeur – alors qu’il ne lui reste que 3 points – particulièrement dévoué et observateur, Mar Sodupe et Guilaine Londez sont excellentes en employées dévouées de Lucas et succombant à son charme. Le vétéran Venantino Venantini dans le rôle de « Della Ponte », en créateur amoureux de son art de la céramique, nous offre aussi un joli moment de sensibilité, loin de ses rôles habituels. Liane Foly est assez inattendue en garce à l’accent du Canada, Pierre Diot en conseiller et Brian Bigg en sumotori apportent également un décalage proverbial. Le débat était intéressant, retrouver Pierre Jolivet et son humour perpétuel, était passionnant et passionné, parlant de son amour pour écrire pour ses fidèles interprètes. Il fallait l’entendre évoquer sa rencontre avec un assureur – sa confrérie ayant été égratigné dans « Ma petite entreprise » -, venant après le cambriolage de son logis, lui reprocher dans ce film, qu’un des personnages casse la fenêtre de gauche, alors que tous les professionnels savent bien que c’est bien celle de droite qu’il faut fracasser pour tout types de forfaits. Vincent Lindon, toujours un peu sur la défensive, semblait cependant plus détendu que lors de l’avant-première du « Fils du guerrier » par exemple -, mais il continue à parfaire son petit côté écorché vif, tout en étant très enthousiasme. Il est plus détendu, quand je l’ai félicité ensuite directement, sur ces choix et sa manière de défendre des rôles sortant du tout venant du cinéma français – « Chaos », « La moustache » -. La rencontre entre Sandrine Bonnaire et Vincent Lindon – des retrouvailles après le film de Claude Sautet, « Quelques jours avec moi » -, elle solaire et indépendante, lui plus fébrile, fonctionne parfaitement. Le premier titre « Irrésistible » du film, non retenu finalement, correspond assez bien à la vision de cette charmante comédie. Saluons le talent de Pierre Jolivet, qui semble toujours faire un film en se démarquant du précédent.