Cédric Kahn, continue à nous surpendre, avec ce conte pour enfant, loin du réalisme fortement influencé par Maurice Pialat, de l’excellent « Bar des rails ». Il arrive sans pathos à faire un film louchant volontairement sur un esthétisme d’un certain âge d’or hollywoodien, en prenant le parti pris de la fausseté – comme dans « Feux rouges » ou les transparences étaient visibles, de mémoire voir son interview dans « Positif »-. Les nuits américaines sont visibles, le méchant joue aux croquemitaines – Nicolas Briançon toute bedaine dehors, courant comme un forcené -, et la neige retrouve la naïveté de certains clichés. Si l’on peut déplorer une bande annonce qui déflore trop le film, Kahn parle sobrement du deuil d’un enfant, du regard des autres, de la difficulté au travail du deuil (voire la réplique terrible à son grand-père, « Je peux monter faire des devoirs ? » avec cette impossibilité de réagir à un mal trop grand pour soi, son seul petit drame d’avant étant de ne pas avoir eu un vélo à Noël. Pour avoir, comme le personnage de Charly – attachant Roméo Botzalis -, avoir été orphelin de père très jeune – « envoyez les violons ! » -, j’ai retrouvé assez justement cette angoisse sourde qui ne m’a jamais plus quitté –  » allons bon voilà qu’il raconte sa vie maintenant ! » -, c’est un thème qui a très peu été abordé me semble t’il.

Alicia Djemaï et Isabelle Carré dans « L’avion »

Isabelle Carré est simplement formidable, son registre étant très large, elle aide à croire aux situations les plus rocambolesques, il faut la voir « vivre » son personnage lors des manifestations fantastiques de l’avion, répondre avec simplicité aux questions de son fils, le trahir malgré elle, quand elle le sent en danger, pour mieux réagir à une situation critique. Il faut bien le dire que son jeu, est un mélange très fort de force et de sensibilité, de charme et de grâce, d’aplomb et de rêverie, elle nous régale à nouveau d’une superbe interprétation. Pari difficile, pari tenu, pour Cédric Kahn, – qui pour l’avoir vu lors de l’avant-première de « Feux rouges » est quelqu’un de très brillant -, réussit à concilier son imaginaire avec son intelligence.Charlie a donc perdu son papa, un militaire chercheur de l’armée de l’air échappé d’un film américain – le cliché de l’enterrement en grande cérémonie -, et se raccroche au cadeau de Noël de son père, mais l’avion semble s’animer parfois. Sa mère tente de retrouver goût à la vie – Isabelle Carré, le « Stradivarius du cinéma français », et il peut compter sur l’amitié de sa jeune copine, Mercedes, espiègle, têtue mais sincère – incroyable présence de la jeune Alicia Dhemaï -. Cette œuvre me semble donc très personnelle, mais si c’est l’adaptation de la BD de Magda et Lapière, mais tout ici est pensé – l’objet-avion est formidablement dessiné et animé. La spontanéité des enfants est pourtant sauvegardée, et Vincent Lindon en deux scènes définit son personnage, qui reste en mémoire, le restant de film, histoire de redire que c’est un de nos plus grands acteurs.