Reprenons un peu les avant-premières, avec celle de l’UGC-Cité-Bordeaux du 25 mars dernier du film « Sans arme, ni haine, ni violence », en présence de son réalisateur, Jean-Paul Rouve et Gilles Lellouche. On retrouve donc le second film adapté de la vie romanesque d’Albert Spaggiari, avec l’assez oubliable « Les égouts du paradis » tourné en 1978, avec Francis Huster et Jean-François Balmer, pas le meilleur film de son metteur en scène convenons-en… On ne peut pas dire que Jean-Paul Rouve flirte avec la sympathie à l’issue du film. Il fallait le voir, proférant un tonitruant « ta gueule ! » à un jeune spectateur de 12 ans posant des questions pertinentes – déclaration rouvienne,  » il devrait travailler à Libération ! « -, donnant des détails sur l’absence d’Alice Taglioni, pourtant annoncée en se délectant des ravages d’une « gastro » chez cette superbe actrice -. Petite surprise, avec l’arrivée du chef-opérateur Christophe Offenstein, qui est de la région, le film lui doit beaucoup compensant les faiblesses de la réconstitution – il est un peu gênant de voir l’un des protagonistes lire un « Paris Match » d’époque ! -. Pour avoir eu la chance de voir travailler M. Offenstein sur « Mon idole » et « Edy » – grâce à François Berléand – il est évident que l’on retrouve sa patte. Mais hélas Jean-Paul Rouve le présente avec condescendance et minore sa participation au film. Car il a un sérieux côté content de lui – il ne voyait que lui-même – pour le rôle -, voire même cassant – sans doute une défense si on veut faire de la psychanalyse de « Prisu » -, mais on lui pardonne car son talent d’acteur est énorme – confère ce qu’il apporte au personnage de grand méchant dans le factice « La jeune fille et les loups ». Il privilégie l’aspect excentrique du personnage, ne voulant pas faire un biopic. Il le compare à un chanteur, qui n’aurait eu qu’un « tube » dans sa vie. Il déclare ne pas avoir souhaité faire un documentaire, bien qu’aimant ces histoires. Il était scotché à la vision de « Faites entrer l’accusé », présenté par l’ineffable Christophe Hondelatte – …la honte du Pays-Basque -. Evidemment tout le monde s’est mis à rire, mais non Rouve était bien sérieux… Il s’amuse visiblement avec cette figure cabotine, édulcorant certaines aspects négatifs de la personnalité du bandit. Son racisme est évoqué cependant, tel le malaise qu’il crée face à une jeune vendeuse de vêtement vietnamienne – Pom Klementieff, un nom à retenir -. . S’il montre aussi que le truand possède véritablement des armes, loin de sa légende, il préfère minorer ses idées avec de l’humour – le « gauchiste » proféré souvent – Imprimons donc la légende, avec pour danger de rendre sympathique un homme aux idées très douteuses – son flirt avec l’extrême-droite, son soutien à l’OAS, etc… -. L’histoire est dont très romancée, la compagne de Spaggiari, était moins magnifique que la belle Alice, et a juré fidélité à sa mémoire -.  Le personnage de journaliste joué par Gilles Lellouche  est inventé également. Le comédien est d’ailleurs très sympathique et modeste, déplorant avec humour, avoir évité son accès au vedettariat avec l’échec du très plaisant « Ma vie est une comédie romantique ». Le comédien s’étonne des rôles approchant les gangsters des années 70, après le décevant « Dernier gang », et avant la première partie du film de Jean-François Richet, sur la vie de Jacques Mesrine, il y interprète un dandy voyou.

Gilles Lellouche & Jean-Paul Rouve

Le film est assez ludique, même s’il se révèle décevant. Il y a pourtant de bonnes idées, comme l’utilisation d’un très important comédien français, venu par amitié. Je vous en laisse la surprise, mais en précisant que j’ai rajouté sadiquement son nom dans les fiches Wikipédia et IMDB du film, et que son nom est dans le dossier de presse trouvable sur le web et dans les magazines de cinéma. Il figure un grand truand marseillais soupçonné d’avoir aidé Spaggiari, mais comme l’individu est plutôt procédurier, Rouve à trouvé l’astuce de filmer le comédien en question, de manière à ce que personne ne le reconnaisse vraiment. Son nom figure avec humour au générique final – avec la mention « avec pour la première fois (pas) à l’écran » -. Disons que sans « Contestation générale » et sans en faire « Une question d’honneur » – comprenne qui pourra… – il nous a tout de même bien mis sur la voie pour identifier le caïd , en déclarant « Ça finit par… et ça commence par… ». Rouve en interprétant ce bandit médiatique phagocyte l’écran, laissant peu de place à Gilles Lellouche et Alice Taglioni, qui sauvent honorablement leurs personnages. Les seconds couteaux doivent se contenter des miettes, comme le trop rare sur le grand écran et excellent Maxime Leroux, qui a plus une silhouette à habiter que de rôle à tenir avec son personnage de « 68 ». Beaucoup de comédiens doivent se contenter de faire de la figuration intelligente, comme le trio de policier décalé – Alice Marivin, Jean-Philippe Puymartin et Renan Carteaux -, Patrick Bosso en truand – qui porte cependant magnifiquement les boucles d’oreilles -, Arsène Mosca en perceur de coffre, ou Florence Loiret-Caille en épouse du journaliste. Les autres n’ont l’occasion que de tenir des apparitions subliminales, tel François Berland en avocat. Au final, si le divertissement l’emporte, on se fatigue de voir ainsi glorifiée une certaine mythologie des voyous. Son auteur n’aura pas réussi à égaler l’originalité des ses camarades des Robins des Bois, Pierre-François Martin-Laval et surtout de Maurice Barthélémy, passant à la réalisation. Je croise Jean-Paul Rouve, en lui disant qu’il pourrait être un formidable Robert Le Vigan, dont il partage une certaine folie, des personnes lui en ont déjà parlé. Il trouve le personnage trop négatif – il a pourtant joué un « collabo » dans « Monsieur Batignolle » et repart en évoquant tout haut une hypothétique participation à un remake de « Goupi Mains-rouges »…