Troisième salve pour les films de Jean-Pierre Mocky, en DVD, voir la notule, de ce blog. On peut rajouter donc 7 autres à la collection, avec « Un couple » (1960), « L’ombre d’une chance » (1973), « Litan, la cité des spectres verts » (1981), « La machine à découdre » (1985), « Le miraculé » (1986), « Une nuit à l’assemblée nationale » (1988), « Ville à vendre » (1991). « L’ombre d’une chance » est une comédie dramatique, avec Mocky en acteur principal, faisant suite à « Solo » et « L’albatros ». Mais on retrouve cependant son côté farce, et un ton libertaire. Il est Mathias Caral, la quarantaine, qui a abandonné son poste d’ingénieur pour devenir un brocanteur bohème. Marginal, frondeur, il se donne un rôle de séducteur, aucune femme se semble d’ailleurs résister à son charme. Il est amoureux de la belle Sandra – Jenny Arasse, so charming -, 20 ans plus jeune que lui, qui l’honore d’une gâterie dans son camion. Ils rentrent vannés, et trouvent chez eux, une sorte d’entrepôt  aménagé en appartement, un homme assez austère, qui n’est autre que Michel – Robert Benoît – le propre fils de Mathias, qu’il  a eu à 14 ans. En voyant cet homme, le visage mangé par une grande barbe, Sandra pense qu’il est plus âgé que son père. Il est venu avec sa compagne, Odile – Marianne Eggerickx, petite filmo en 5 ans -, qui est du même âge que Sandra… La bande annonce en bonus se termine par « Interdit au moins de 18 ans, hélas ! ». Mocky qui a toujours eu le don de sentir l’air du temps, traite de la liberté des moeurs, dénude très largement ses actrices, et s’offre même un insert hot, de pénétration de manière frontale.

Le film tourné en 1973, est donc précurseur le sexe envahissant à l’aube des années 70, les salles obscures, c’est donc une des premières utilisations de scènes sexy et réaliste hors du créneau du film pornographique. Selon le réalisateur dans l’un des bonus du film, le film a battu des records, pour cet atmosphère sexy.  Lire la passionnante étude, à ce sujet de Christophe Bier « Censure-moi » (Éditions L’esprit frappeur, 2000) -. Mocky joue donc avec les convenances. Il se montre trivial, tout en restant assez romantique. Il critique l’hypocrisie des institutions, la libération sexuelles, se moquant des jeunes bourgeois se prétendant libres, ou des huissiers rapidement humiliés. Ce film est de la veine de ses meilleurs films, Mocky ayant toujours le génie des lieux et des décors, voir la manière dont il aménage l’appartement surchargé véritable bric-à-brac baroque. Ce rapport père-fils est assez bien vu, les personnages féminins, sont touchants, il s’intéresse ici aux femmes, à l’image des conversations crues entre Sandra et Odile, ou le personnage d’Huguette, femme esseulée. On retrouve ici moins ces personnages haut en couleurs, les habitués, Roger Lumont, excellent en bon copain rigolard, et Michel Bertay en austère huissier, et les petits nouveaux Juliette Fabert, gloire des années 30 et Robert Lombard en bourgeois maniéré. On retrouve ici de jeunes interprètes dont surprise Myriam Boyer – Muriel Boyer au générique ! -, qui parle avec chaleur du film dans un des bonus et Caroline Sihol, en jeune bourgeoise délurée. Pour l’anecdote, cette dernière avait parlait dans feu l’émission « Le club », sur Ciné-Classic, du tournage du film, Jean-Pierre Mocky faisait dormir ces jeunes comédiens dans les décors, ce qui lui faisait économiser à la fois l’hôtel et les frais de gardiennage ! Cette nouvelle sortie permet de redécouvrir le talent de son réalisateur – « L’ombre d’une chance » n’est visible qu’en VHS -, il mérite mieux que les clichés perdurant à son propos.